Sélectionner une page

au trésor des souffles

Contes, Perles et Histoires

Contes et histoires ordinaires et extraordinaires

[printfriendly]

Contes et histoires ordinaires et extraordinaires

 

Pleins de sagesse et de folie les uns et les autres  peuvent  contribuer à donner idées, questions ,  émotions et forces.

Ces contes et ces histoires témoignent de souffrances, de joies, d’espoirs…

De nombreux  étudiants m’en demandaient souvent, je les proposais  en début de cours de 1972 à   2013 .

Choisis  parmi près de cinq cents, en voici  une soixantaine   de différents auteurs, inconnus et connus,  lus ici et là, parfois entendus à la radio et reconstitués par l’auteur de ce site qui en propose aussi  et  quelquefois en commente  d’autres.

Les titres et sous-titres  sont de l’auteur de ce blog de Mediapart ,  Jean-Marc Lavieille  , on en retrouve aussi sur  son site « au trésor des souffles »

 

1-L’essentiel / 2-Humanité /3- Amour /4-Fraternité /5-Solidarité /6- Courage /7- Résistance / 8-Souffles /9-Sagesse  /10- Vérité /11- Humilité /12- Globalité /13- Imagination /14- Blessures et joies / 15- Souffrances /16-Mort /17- Peurs/18-Le temps/19-Lenteur , rapidité /20-Autodestruction/21-Croissance , décroissance /22-Techno science /23-Humour.

 

 

1-L’essentiel

 

Le bol et les cailloux

  Un sage demande à des personnes « Voilà un bol plein de cailloux, puis-je y mettre autre chose ? », 

«  Non » répondent-elles.

 Il ajoute du sable,

 «  Puis-je y mettre autre chose ? »

 « Non » répondent-elles.

 Il ajoute un peu d’eau puis demande : « Quelle est la philosophie de ce que je viens de faire ? »

 Les uns disent « il faut remplir sa vie jusqu’au bout »,

 d’autres  affirment «  il faut profiter de chaque moment de sa vie… »

Le sage ajoute : « N’oublions pas dans nos vies de mettre d’abord l’essentiel, puis l’important puis le secondaire. Essayons avant tout de déterminer ce qui est pour nous essentiel. »  

 Conte entendu et reconstitué par l’auteur de ce  blog et de ce site

 

   Daphnis es-tu là ?

Un étudiant demande à son enseignant « Vous semblez aimer la mythologie grecque et romaine, comment, à partir  d’elle, nous diriez-vous ce qui est pour vous essentiel dans nos vies? »Après un long silence l’enseignant répondit :

J’aimerais pour chacun, chacune, pour tous et toutes, que l’essentiel  entre  dans  nos vies, comme on accueillerait  une nouvelle personne dans une ronde, par exemple une ronde à quatre.

  Voilà Sisyphe, condamné à rouler une roche au sommet d’une montagne, elle redescend et il doit toujours la remonter, ainsi  sont  dans nos vies   les  répétitions,

 Voilà Prométhée, qui  dérobe le feu aux dieux pour le donner à l’homme, ainsi   sont dans nos vies  les créations,

Voilà Castalie, nymphe métamorphosée en fontaine inspiratrice, ainsi  sont dans nos vies   l’enthousiasme et l’imagination,

 Voilà Hygiée, déesse qui soutient  la force des êtres vivants, ainsi  sont dans nos vies  la santé, le soulagement ou la guérison des douleurs,

La ronde des quatre commence et continue, mais ils découvrent  que  quelqu’un d’essentiel  leur manque. Ils le veulent, ils l’appellent, le voilà.  

 Apparait Daphnis, berger, chanteur, poète et musicien, remarquable   de beauté et de sagesse, apprenant à tous le respect des hommes et de la nature, et qui, admis dans l’Olympe, prit sous sa protection les pasteurs et les troupeaux, il fut chéri  et des dieux et des êtres humains et du vivant.

  Ainsi dans nos vies, si nous pensons que c’est elle(?) et  qu’il doit en être ainsi(?),  accueillerons-nous cette part  de l’essentiel ?

 Conte proposé par l’auteur de ce  blog. (Voir aussi sur Daphnis  de P. Commelin, Mythologie grecque et romaine, Pocket,1994, pages 187 et 188.)

 

Lumières…

A une fête des ami(e)s devaient apporter un objet symbolique d’une partie essentielle de leurs vies.

 Ils amenèrent des photos d’enfants, de petits-enfants, de parents, d’amis, mais aussi de poings levés dans des manifs, des photos de leur travail, ils amenèrent des livres, des journaux intimes, des instruments de musique, des photos de villages, de maisons, d’appartements, de voyages, d’animaux, de télévisions , d’ordinateurs et de téléphones portables, des photos de luttes pour la paix, la justice, la démocratie,l’environnement,…et beaucoup d’autres objets.

L’un d’entre eux dit qu’il ne pouvait faire partager son objet aux autres qu’une fois la nuit arrivée.

A l’heure convenue  il sortit une  lanterne et dit «Avec les autres  j’aurais aimé porter plus souvent cette petite lumière, comme des veilleurs debout. Il est déjà tard mais toujours temps. »

Histoire écrite par l’auteur de ce blog et de ce site .

 

2-Humanité.

 

Les livres et le petit papier

Un empereur demande à de nombreux savants de lui écrire l’histoire de l’humanité.

 Au bout de dix années ils reviennent avec dix volumes, « c’est trop long » dit l’empereur »,

 au bout d’un an ils reviennent avec un gros volume, « c’est trop long » dit l’empereur,

 au bout d’un mois ils reviennent avec une page, « c’est trop long » dit l’empereur.

 Au bout d’une heure  ils donnent à l’empereur un petit papier.

 « Merci »  dit l’empereur.

 Il était écrit : « l’homme nait, aime, est aimé, souffre, lutte et meurt ».

 Conte reconstitué par l’auteur de ce blog et de ce site.

 

Souffles ?!…

Un inconnu  proposa  un autre résumé de l’histoire de l’humanité.

« Quels souffles ?

Notre souffle !

Un souffle… »

 

L’auteur de ce blog.

 

 3-Amour

 

Sur un tabouret

 Un mandarin était amoureux d’une courtisane. Elle lui dit «  Je serais à vous lorsque vous aurez passé cent nuits sous ma fenêtre à m’attendre, assis sur un tabouret. »

 A la 99ème nuit le mandarin prit son tabouret  sous le bras et s’en alla.

Histoire racontée par le philosophe Roland Barthes

 (Commentaire de l’auteur de ce blog : peur de décevoir, ou d’être déçu, ou volonté de ne pas se soumettre, ou refus de rencontrer une femme autoritaire, ou une autre femme entrevue partie devant lui et qu’il se met à suivre, ou  peur d’attraper froid ,ou mal au postérieur, ou s’est dit qu’il n’avait pas éteint la lumière chez lui  ou … ?)

 

Avoir faim ensemble…

Dans la rosée du matin : ton sourire, nos corps, notre projet, notre départ. Tu cueilles des perce-neige.

 Au milieu de jour ,  sans trop nous dévorer, avoir faim ensemble d’un autre monde possible avec les autres. Je renouvelle ta rose.

Le soir approche : serre moi fort…L’orchidée choisie ensemble se penche doucement, comme nous vers la terre.

 

Amour, dans d’autres paysages, ailleurs, cueillerons-nous des perce-neige ?

 

 Saint Valentin, Libération, M. à M. 

 

 

 Amour encore et toujours.

« J’ai écrit ton nom sur le tronc d’un arbre mort,

 ton nom était si beau que l’arbre a refleuri. »

  Geneviève Imbo

 

Qu’ai-je à t’offrir mon amour ?

Moi je t’offrirai

Des perles de pluie

 Venues de pays

Où il ne pleut pas

 

Jacques Brel

 

 

L’œuf et l’amour

 

L’amour c’est comme un œuf. Il faut savoir le prendre comme un œuf.

 Un œuf si on le presse trop fort il casse.

 Si on le prend de façon trop décontractée alors il tombe.

 Si l’on sait bien le prendre il restera dans le creux de la main.

 

 Alvania

 

 

La vase de l’étang,  le ruisseau de la montagne et la maison de mots

 

Ce qui nous manquait c’était une maison de mots où habiter ensemble.

 Nous étions deux carpes enfouies dans la vase de notre vie quotidienne.

Nous serons désormais comme deux truites frémissant flanc à flanc dans les eaux d’un torrent de montagne.

 

Michel  Tournier

 

 

  Amour de ses enfants

 Un khalife  fait venir un sage, il lui demande « tu as sept enfants : lequel  préfères-tu ? » Le sage répondit :

 « Celui de mes enfants que je préfère

c’est le plus jeune jusqu’à ce qu’il grandisse,

 c’est celui qui est malade jusqu’à ce qu’il soit  guéri,

 celui qui est triste jusqu’à ce qu’il soit joyeux,

celui qui est loin jusqu’à ce qu’il revienne,

 celui qui est éprouvé jusqu’à ce qu’il ne le soit plus,

celui qui ne pense pas assez aux autres jusqu’à ce qu’il y pense,

celui qui est toujours généreux pour qu’il le reste. »

  Conte   réinventé  par l’auteur de ce blog.

 

Quelles marges de manœuvres laisserons-nous  aux  générations futures ?

Des indiens iroquois, par transmission orale depuis le XIIème siècle et par une Grande loi de paix de 1720, prenaient des décisions « en tenant compte du bien-être jusqu’à  la septième génération après eux. » !!!!

 Surtout à partir de 1870 ,  date d’explosion des énergies fossiles, de plus en plus de personnes ont  souvent fait  n’importe quoi sur terre cela   dans la dictature du court terme,  pour  l’appât du gain, la domination  du pouvoir, la course à la compétition.

Nous n’avons pas su voir loin et clair.

 Pouvons-nous encore remettre en cause ce système devenu fou, dont nous ne sommes que  les fous d’un fou ?

L’auteur de ce blog

 

 4-Fraternité

 

Porter sur son dos

 Sur un chemin  je croise  une petite fille qui porte sur le dos son tout jeune frère. Je lui dis « tu  en as un lourd fardeau ! ».

Elle s’arrête, me regarde et me répond « çà n’est pas un fardeau, Monsieur, c’est mon frère !! ».

Depuis ce jour, quand la peine des hommes m’accable et que le courage commence à partir, je me dis «çà n’est pas un fardeau que tu portes, c’est ton frère ».

  Conte  proposé par l’Association ACAT

 

La nuit prend fin, le jour se lève

 Un maître demande à ses élèves « Quand est-ce que la nuit prend fin et quand est-ce que le jour commence ? »

Des enfants répondent : « Quand on reconnait un chat et  un chien, un vieux et un jeune, un  gros arbre et un petit arbre… »

Oui, dit le maitre, mais on peut ajouter que «  l’on sait que la nuit prend fin et que le jour commence lorsque l’on reconnait en chaque visage celui d’un frère ou d’une sœur, avant cela le jour ne s’est pas encore levé ».  

 Conte écrit par Bernard Durel

 

 Fraternité encore et toujours 

 Conte reconstruit par l’auteur de ce blog à partir du précédent et  partagé parfois dans les  amphis, conte mis aussi en exergue d’un de mes livres « Relations internationales », éditions Ellipses.

 Un enseignant demande un jour à ses étudiants « Quand peut-on dire que la nuit s’achève et que le jour se lève ? »

Quatre étudiants répondent tour à tour : « lorsqu’on y voit plus clair autour de soi et en soi, lorsqu’on a diplômes, métier, argent, et surtout santé, amour, amitié, lorsque dans la rosée du matin on cueille le souffle du monde, lorsque les enfants  souffrent moins et que toutes les personnes et les animaux  seront réunis au paradis s’il existe. » « Oui, dit l’enseignant, mais encore ? »

 Une petite voix se risque : «  Je crois que la nuit s’achève et que le jour se lève lorsque l’on distingue un être humain d’un arbre, un arbre d’un canon, un canon d’une charrue, une charrue d’un morceau de pain. » « Oui, dit l’enseignant, mais essayez d’aller plus loin. »

 Quatre étudiants répondent tour à tour : « Le jour se lève quand on ne distingue plus l’arbre malade de celui qui va bien parce que tous respirent, lorsqu’on ne distingue plus un canon d’une charrue parce que tous les canons ont été transformés en charrues, lorsqu’on ne distingue plus les pauvres des riches parce que tous ont assez de pain, lorsqu’on ne distingue plus ceux qui commandent de ceux qui sont commandés parce que tous décident. »

Ainsi, dit l’enseignant, « se connaitre, être, avoir, aimer, moins souffrir, construire un monde écologique, pacifique,  juste et démocratique, tout cela et bien des choses encore font que la nuit s’achève et que le jour se lève.

 Peut-être pourrait-on ajouter que la nuit s’achève et que le jour se lève lorsque l’on peut voir dans le visage de chaque être humain celui d’un frère et d’une sœur. Alors la nuit s’achève, l’aube apparait, une aube d’humanité. »

 

 5-Solidarité

 

Solidarités mystérieuses

(Des personnes disparues ? Ou un dieu ? Ou Dieu ?  Ou… ?)

 Au soir de sa vie un homme se retourne et voit ses pas sur le sable, ils sont entourés d’autres pas, quelquefois  nombreux, mais de temps en temps il  constate que ses pas sont seuls sur la plage de sa vie.

 Il se dit tristement  «  j’étais seul, personne n’était là pour m’accompagner. » Il entend alors une voix qui lui dit « va voir tes pas !».

 Il approche et découvre que, lorsqu’ils étaient seuls, les pas étaient plus profonds. Il entend alors la voix lui dire : « tu ne le savais pas mais j’étais là et je te portais ».

Il pleura d’émotion et de reconnaissance.

Histoire qui viendrait du  Brésil , reprise sous différentes formes  et reconstruite  ici.

 

 

 Solidarité ok , compétition ko…Ubuntu ! Ubuntu !   ( beau nom pour une association !)

  Un anthropologue propose un jeu aux enfants d’une tribu sud-africaine. Il met un panier de fruits près d’un arbre et leur dit : « le premier qui arrive gagne tous les fruits ! »

Au signal les enfants s’élancent en même temps en criant « ubuntu ! » et en se donnant la main, puis ils s’assoient ensemble autour de la récompense.

Ils expliquent à l’anthropologue « ubuntu, çà veut dire : je suis parce que nous sommes ».  

 Anonyme dans une revue écologique alternative du  département du Lot.

Il ne restait plus personne

Quand ils sont venus
Chercher les communistes
Je n’ai rien dit
Je n’étais pas communiste
Quand ils sont venus
Chercher les syndicalistes
Je n’ai rien dit
Je n’étais pas syndicaliste
Quand ils sont venus
Chercher les juifs
Je n’ai rien dit
Je n’étais pas juif
Quand ils sont venus

Chercher les catholiques
Je n’ai rien dit
Je n’étais pas catholique

Puis ils sont venus me chercher
Il ne restait plus personne
Pour dire quelque chose …

Louis Needermeyer ne racontait pas un conte

 mais  témoignait d’une série de souffrances et en appelait aux solidarités.

 

6- Courage

 Le chat et le puits.

 Un fermier voulait condamner son puits. Son chat étant tombé dedans, il décide aussi de s’en débarrasser.

 Avec son voisin ils commencent à boucher le puits, le chat miaule à chaque pelletée  de terre puis il se tait.

Les deux hommes se penchent et voient que le chat se secouait à chaque pelletée, arrivant assez haut il bondit et partit cahin-caha.

Ainsi dans nos vies des évènements peuvent  nous «  tomber sur le dos »,  le courage nous attend.

 Conte anonyme entendu à la radio  et reconstitué, voir aussi Internet.

 

 Courage encore… 

  « Lorsque la désobéissance civile contre des injustices insupportables m’a mené en prison, plusieurs philosophes me rendirent visite.

 Ils me demandèrent « Mais pourquoi êtes-vous en prison ? »

Je leur répondis : « Pourquoi n’y êtes-vous pas ? »

 Henry David Thoreau, auteur et praticien de la  non-violence inspiré par Etienne de la Boétie , ami de Montaigne.

 

Le tigre, la liane et la framboise

Un homme qui traversait un champ se trouve nez à nez avec un tigre. Il s’enfuit, le
tigre à ses basques.

 Arrivé au bord d’une falaise il s’accroche à une liane et se balance. Le tigre le flairait d’en haut. Terrorisé l’homme baissa les yeux : tout en bas un autre tigre attendait.

 Deux souris se mirent à ronger la liane.

L’homme aperçut une framboise.

 Se tenant d’une main à la liane il cueillit la framboise de l’autre.
Qu’elle était succulente !

Parole Zen

 

La chèvre Blanquette de Monsieur Seguin

Au lever du jour elle s’effondre, le corps à demi lacéré, un gout de sang et d’herbes sauvages dans la bouche, d’immensité et de  finitude  mêlées  dans son cœur et sa chair. Vaincue mais insoumise elle meurt sans le moindre regret de s’être enfuie de son enclos, de s’être éprise de liberté, d’avoir aimé la vie au large et en hauteur.

 Blanquette vue par Sylvie Germain.

Et d’être restée debout.(rajouté par l’auteur du blog.)

 

Goutte d’eau…

Son cœur était une goutte d’eau de lumière qui se battait avec le flot et remontait, obstinément, à contre-courant, le fleuve vagabond de la nuit.

Nikos Kazantzakis

 

 

Les traces du courage d’une tortue

Sur une plage…
Une tortue, à pas lent, se promène. Tout d’un coup, un jaguar surgit devant elle :
–   Bonjour, cher déjeuner.
–   Jaguar, jaguar s’il te plaît accorde-moi une faveur avant de me dévorer.
–   Qu’est-ce que tu veux ?
–   Laisse-moi un peu de temps pour me préparer à ma mort.
–   D’accord, dit le jaguar, tu n’es pas bien rapide, tu ne pourras pas t’échapper. Prends le temps qu’il te faut mais fais vite, j’ai faim.
   A ces mots, la tortue se rue sur le sol, commence à frapper le sable de sa patte, se tourne dans un sens puis dans l’autre, secoue la terre dans tous les sens. Puis elle se calme, vient se placer devant le jaguar et lui dit :
–   C’est bon, je suis prête.
–   Mais qu’est-ce  que tu as fait, je ne comprends pas.
–   Aujourd’hui, tu me manges et contre ça, je ne peux rien. Mais demain, les hommes vont passer par ici et ils verront les traces du combat acharné d’un jaguar et d’une toute petite tortue. Alors, peut-être auront-ils le courage de venir t’affronter …

Rapporté par le conteur Dan Yashinsky

 

7- Résistances

 

Ils n’avaient pas le mot « non » dans leur langue

 Les habitants d’un pays étaient tombés  en esclavage pour ne pas savoir prononcer une seule syllabe : Non.

 Plutarque, cité par Montaigne, histoire inspirant peut-être Etienne de la Boétie (De la servitude volontaire, 1576)…cité par Edwy Plenel (Dire non, éditions Don Quichotte, 2014.)

Ce qui peut faire penser entre autres  à ce qu’écrivait  le philosophe Alain : 

«  Penser, c’est dire non. Remarquez que le signe du oui est d’un homme qui s’endort ; au contraire le réveil secoue la tête et dit non. ( …)

 

Le i, petite flamme du mot résister

Il est des mots dont la graphie semble incarner mystérieusement le sens. Ainsi du beau verbe résister avec ses deux r, ses deux e, ses deux s qui entourent symétriquement son i, comme s’il s’agissait de le préserver, de le garder précieusement en vie.

Car résister, c’est d’abord cela : c’est maintenir intacte la flamme fragile, éphémère de l’existence : tenir, survivre.

Gérald Cahen

 

Un acte de résistance

 « Un homme, lors de la Deuxième Guerre mondiale, en Italie, un jour s’est plié en deux. Impossible de le remettre droit, de jour comme de nuit, aucune force n’en est venue à bout. Impossible de le faire incorporer à la guerre ou maintenir en détention. Il est resté plié en deux pendant plusieurs années. Devenu symbole de la résistance, il a été fusillé.

Il avait inventé cette attitude corporelle silencieuse qui était sa façon de parler juste. Plié, par refus de plier et pour montrer que l’homme  était déjà plié sous le joug du fascisme. Aujourd’hui on parle encore de la façon singulière d’avoir dit non à la guerre. »

 Marie-Magdeleine Lessana (Pour une « paix-attitude », in  «  éclats de paix », de Alain Mingan, éditions du chêne,2004.)

 

« Le maquis de l’âme »

Devant la conquête et la colonisation de nombreux Mayas se suicidèrent prenant
ainsi « le maquis de l’âme » dans une manifestation ultime de refus qui en laissait
entrevoir bien d’autres.

 Les chefs mayas laissaient à leurs descendants ce message
: « nous reviendrons ».

Michel Boccara

 

Le printemps

« Ils pourront couper toutes les fleurs ils n’empêcheront jamais le printemps ! »

Pablo Neruda dénonçant les dominations vécues par les  peuples .

 

8- Avoir du souffle  

 

Du souffle dans ce que l’on fait.

 Un enseignant demande à trois étudiants. «Que faites-vous ? »

 Le premier lui dit « je travaille un cours»,

 le second  lui dit «je travaille un des cours de ma formation »,

 le troisième lui  répondit «c’est un des cours de ma formation qui contribue  aussi à m’interroger  sur ma  future profession, sur la société dans laquelle je vis et sur celle que je voudrais contribuer à construire.

Conte proposé par l’auteur de ce blog.

 

  Résister aux casseurs d’horizons !

  On  pourrait ajouter aux personnes rencontrées par le Petit Prince d’Antoine de  Saint- Exupéry … un casseur d’horizons :

« Qu’est-ce que vous faites ? » demanda le Petit Prince,

 « Dès que je vois des ailes qui poussent je les rogne, je les casse, je les coupe. »

 « Vous aimez çà ? » demanda  le  Petit Prince d’un air effrayé,

 « Oh oui j’aime çà, je n’en décolle plus ! » répondit le rogneur d’ailes.

 « Moi, dit le Petit Prince, j’aime l’horizon. J’aime marcher doucement vers une fontaine. » 

  Conte proposé par l’auteur de ce blog  avec ce commentaire :

Ainsi  la pente la plus forte c’est  celle qui nous amène à ne pas marcher vers des fontaines, c’est celle de la résignation devant les rapports de forces  alors que ceux-ci peuvent changer, alors qu’à chaque instant, le réel contient plus de possibles que l’on ne croit. Manquer de souffle, être étouffé(e) par l’impératif du réalisme,  laisser la place à des sortes d’experts de rétrécissements d’horizons, et  finalement de ne pas être à la hauteur des défis.

Simone de Beauvoir écrivait: « Il est peu de vertus plus tristes que la résignation. Elle transforme en fantasmes, en rêveries contingentes, des projets qui s’étaient d’abord constitués comme volonté et comme liberté. » Jean-Paul Sartre écrivait de même: “L’important n’est pas ce qu’on fait de nous mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce qu’on a fait de nous. »)

 

9-Sagesse

 

Plusieurs facettes

Il y avait une fois un disciple d’un philosophe grec à qui son maître ordonna de
donner de l’argent à toute personne qui l’insulterait, et cela trois années durant.
Lorsque cette période d’épreuve toucha à son terme le maître lui dit : « Maintenant tu
peux aller à Athènes apprendre la sagesse ».
Quand le disciple entra dans Athènes, il rencontra un sage assis à la porte qui
insultait tous ceux qui arrivaient dans la ville et tous ceux qui en sortaient.
Il insulte aussi le disciple qui éclata de rire. « Pourquoi ris-tu quand je t’insulte ? »
demanda le sage. « Parce que pendant trois ans j’ai payé pour me faire insulter et toi
maintenant tu me donnes ça pour rien. »
Entre dans la ville, lui fit le sage, elle est toute à toi.
Ainsi ce ne sont pas seulement les épreuves qui ouvrent la « cité de la sagesse » au
disciple. C’est aussi sa capacité de changer de perspective, chaque événement
possède plusieurs facettes.

Le Dalaï-lama

 

10-Vérité

 

 Le vieux maitre

Pendant des années un jeune candidat à la sagesse suprême se faisait initier par un
vieux maître en spiritualité. Avant leur dernière rencontre le disciple voulait poser une
dernière question primordiale. Autorisé il la formula : Qu’est-ce que la vérité ?
Tu es trop inexpérimenté pour l’apprendre lui rétorqua le vieux maître. Va dans le
monde, médites, construis et reviens me voir dans dix ans pour que je réponde à la
plus importante de tes questions.
Dix ans après le disciple revient. Ils se promènent longuement sans se parler puis
l’élève dit : j’ai suivi ton enseignement, tu m’as tout appris, ensuite j’ai parcouru le
monde, j’ai médité, aimé, souffert et agi. Il ne me manque que ta réponse à ma
question, tu me l’avais promise : Qu’est-ce que la vérité ?
Le très vieux maître le regarda avec une profonde sympathie et lui répondit à voix
basse : la vérité, qu’est-ce ?

Kostas Axelos

 

L’huile bouillante

Le discours vérité ressemble à une bassine de friture pleine d’huile bouillante.

 Celui qui veut dire quelque chose au porteur de vérité peut tremper n’importe quoi dans sa pensée : il en ressortira toujours une frite.

Roland Barthes

 

11.Humilité

 

Une forme d’humilité.

  Peu de temps avant sa mort les élèves venaient remercier le maitre  philosophe pour son œuvre.

 Il leur dit : « Et pourtant la chose la plus importante je ne l’ai pas comprise. »

 « Quelle est cette chose ? » lui demandent les élèves.

 Il répondit  «  C’est précisément cela  que je ne sais pas. »

 Histoire  racontée par Robert Maggiori.

 

 Une leçon pour tous ceux et celles qui ont concentré  des avoirs, des pouvoirs et des savoirs  et qui peuvent se croire  au dessus des autres :

Nous avons beau monter sur des échasses on marche sur nos jambes.

 Et sur le trône le plus élevé du monde on n’est assis que sur son cul.

 Montaigne

 

 

12-Globalité

 

La grotte

Sept habitants de l’Atlantide partent en promenade : un poète, un peintre, un prêtre,
un bandit, un usurier, un amoureux, un penseur. Ils arrivent devant une grotte.

Quel lieu propice à l’inspiration ! s’écrie le poète. Quel splendide thème pictural ! dit le
peintre. Quel endroit favorable à la prière ! Psalmodie le prêtre. Quel emplacement
rêvé pour un guet-apens ! Avoue le bandit. C’est une superbe cachette ! Murmure
l’usurier. Quel refuge pour mon amour ! Rêve tout haut l’amoureux.

C’est une grotte ! Ajoute le penseur.

 Kostas Axelos

 

Embrasser des réalités et des projets

Qui n’embrasse pas …n’étreint pas grand-chose (visions partielles)

« Qui trop embrasse mal étreint » (visions totalisantes)

Qui embrasse justement  peut étreindre  justement (visions globales)

L’auteur de ce blog et de ce site

 

13-Imagination

 

Chameaux et imagination

 Un homme légua dix-sept chameaux à ses trois fils.

Il avait légué la moitié à l’aîné, le tiers au cadet et le neuvième au plus jeune. Les trois fils entreprirent de diviser leur héritage mais ne purent trouver une solution. Dix-sept n’étant divisible ni par deux, ni par trois, ni par neuf les fils finirent par consulter une vieille femme connue pour sa sagesse.

 Après avoir réfléchi elle dit: « Voyez ce qui se passe si vous prenez mon chameau ».
Les fils se retrouvèrent alors avec dix-huit chameaux.

L’aîné prit sa moitié, neuf. Le cadet prit son tiers, six. Le plus jeune prit son neuvième: deux. Il restait un chameau qu’ils rendirent à la vieille femme.

William Ury

 

Du riz sur l’échiquier

Un puissant vizir voulant récompenser son plus fidèle esclave lui demanda : « Que
veux-tu ? »

L’esclave lui répondit : « Je souhaiterais obtenir pour moi et ma famille du
riz en quantité telle que sur un échiquier on dispose un grain sur la première case
puis deux sur la deuxième, quatre sur la troisième et ainsi de suite »

Le vizir surpris par cette humble demande la fit exécuter sur le champ.

 Il ne s’était pas  rendu compte du chiffre astronomique de grains de riz que cela
représentait. Quand il a compris, il a préféré accorder la liberté à l’esclave.

Théodore Monod

14-Blessure et joie

 

 Le sable et la pierre

  Deux amis marchent dans le désert, ils se disputent, l’un donne une  gifle  à l’autre qui écrit alors sur le sable : « mon ami m’a donné une gifle».

Une oasis leur permet de se baigner, l’un sauve l’autre qui allait se noyer, celui-ci écrit sur la pierre « mon ami m’a sauvé. »

 « Pourquoi as-tu fait ainsi ? » lui demande celui qui l’avait giflé puis sauvé.

 L’ami répondit : «Ne faudrait-il pas écrire nos blessures sur le sable ? Les vents du pardon et le temps les effaceront  peut-être.

 Ne faudrait-il pas graver nos joies sur la pierre ? Les vents de l’oubli  ne pourront  peut-être pas  les effacer. »

Voir Internet, les deux amis et le désert, auteur inconnu, histoire réécrite par l’auteur de ce blog.

 (Il y a plusieurs variantes vous l’avez compris avec l’oubli, le pardon, le temps, le peut-être, çà n’est qu’une version parmi d’autres, vous choisirez la vôtre.

Et puis  le “pardonne mais n’oublie pas” est quelquefois là .)

 

15-Souffrances

 

Ce « demi-siècle de servitude »

Alors on vit s’avancer sur l’estrade une petite vieille femme de maintien craintif et qui
paraissait se ratatiner dans ses pauvres vêtements.(…) Des manches de sa
camisole rouge dépassaient deux longues mains à articulations noueuses. La
poussière des granges, la potasse des lessives et le suint des laines les avaient si
bien encroûtées, écaillées, durcies qu’elles semblaient sales quoiqu’elles fussent
rincées d’eau claire, et à force d’avoir servi elles restaient entrouvertes, comme pour
présenter d’elles-mêmes l’humble témoignage de tant de souffrances subies.(…)
Ainsi se tenait devant ces bourgeois épanouis ce demi-siècle de servitude.

Gustave Flaubert décrivant une souffrance qui n’avait rien d’un  conte

 mais représentait et représente une multitude de dominations.

 

Les doigts de la main, la guerre et le drapeau blanc

Avec ses cinq doigts il chargea un obus
Qui explosa dans la culasse.
Avec ses quatre doigts il fit un salut
Non réglementaire.
Avec ses trois doigts il fit le V
De la victoire.
Avec un doigt il appuya sur la gâchette
D’un revolver et se coupa l’oreille.
Il levait l’autre bras pour se rendre mais
L’ennemi ne comprit pas.

Yvon Givert décrivant une souffrance qui n’avait rien d’un conte mais représentait de multiples  souffrances des guerres.

 

L’oiseau qui chantait une seule fois

Selon une légende, il est un oiseau qui ne chante qu’une seule fois de toute sa vie, plus suavement que n’importe quelle autre créature qui soit sur terre. Dès l’instant où il quitte le nid, il part à la recherche d’un arbre aux rameaux épineux et ne connaît aucun repos avant de l’avoir trouvé.

 Puis, tout en chantant à travers les branches sauvages, il s’empale sur l’épine la plus longue, la plus acérée. Et, en mourant, il s’élève au-dessus de son agonie dans un chant qui surpasse celui de l’alouette et du rossignol. Un chant suprême dont la vie est le prix !

Le monde entier se fige pour l’entendre, et Dieu dans son ciel sourit. Car le meilleur n’est atteint qu’aux dépens d’une grande douleur… ou c’est du moins ce que dit la légende.

 Colleen  Mc Cullough

 

16-Mort

 

Rire  trois fois

Les frères se pressaient autour du mourant et pleuraient. Mais il ouvrit les yeux et se mit à rire trois fois « Dis-nous, frère, pourquoi ris-tu alors que nous pleurons ? » Il leur répondit :

« La première fois j’ai ri parce que vous craignez la mort.

 La deuxième fois j’ai ri parce que vous vous n’êtes pas préparés à la mort.

 Et la troisième fois j’ai ri parce que je quitte mes peines pour le repos. »

A peine eut-il prononcé ces paroles qu’il ferma les yeux et mourut.

Sagesse Zen 

 

Rendez-vous à Samarcande

Le calife de Bagdad envoya son grand vizir faire quelques courses au bazar.

Le vizir revient tout tremblant.

– Tu es revenu bien vite. Que se passe-t-il ?

– Grand Calife, dit le vizir, tandis que j’étais sur la place du marché, j’ai rencontré une femme. Je l’ai regardée en face et j’ai constaté que c’était la Mort. Quand elle m’a vu, elle a fait un geste vers moi…

Puisque la Mort me cherche, aie la bonté de me donner ton meilleur cheval pour que je puisse m’enfuir et me cacher, loin d’ici, à Samarcande en Ouzbékistan. En me hâtant, j’y serai avant ce soir.
Pris de compassion, le calife lui donna son cheval le plus rapide et le vizir partit au grand galop.

Plus tard dans la journée le marchand va lui-même au bazar et rencontre la Mort. Il lui demande :
– Pourquoi as-tu effrayé mon serviteur qui est encore jeune et en bonne santé ?
La Mort lui répond :
– Je n’ai pas voulu l’effrayer, mais en le voyant ici, à Bagdad, j’ai eu un geste de surprise. En effet, j’ai rendez-vous avec lui ce soir à Samarcande.

Conte persan

 

 

Lève-toi et marche

 

Toi qui est paralysé prend ton lit, ton grabat sur tes épaules, lève-toi et marche.

 Aucun homme n’est fait pour rester à l’endroit où il se trouve, aucun homme, aucune femme, aucun né de l’homme et de la femme n’est condamné à ne pas dépasser largement ses frontières. Chacun est destiné à parcourir avec tous l’immense étendue de l’histoire des siècles, à vivre la longue marche de la libération unanime.

Et, à l’heure qualifiée de dernière, où la mort t’a couché sans espoir d’un retour aux vies habituelles, tu n’en finiras pas de te lever encore pour fouler les terres innombrables de ceux que tu fis proches, les sols et l’horizon de tes mises en commun.

Jean Cardonnel

 

 

17- Peur

 

 Dragons et princesses

Comment oublier ces mythes antiques que l’on trouve au début de l’histoire de
 peuples ; les mythes de ces dragons qui, à la minute suprême, se changent en
princesse ?

 Tous les dragons de notre vie sont peut-être des princesses qui
attendent de nous voir beaux et courageux.

Toutes les choses terrifiantes ne sont
peut-être que des choses sans secours, qui attendent que nous les secourions.

Rainer Maria Rilke

 

18-Le temps

 

 

Un univers infiniment étendu ou infiniment contracté ?

 

Quant aux physiciens et aux astronomes, ils nous donnent le choix entre

 un univers se dilatant sans fin, se vidant de toute substance, où plus rien ne surviendra, ce qui prive le temps de définition,

 et un univers qui, après une période d’expansion, se contractera durant quelques dizaines de milliards d’années et disparaîtra dans une implosion symétrique de l’explosion initiale.

 La question « qu’y aura-t-il après ? » est aussi dépourvue de sens que la question « qu’y avait-il avant le big-bang ? »

Avec la disparition de l’univers, le temps aura « fait son temps ».

 Albert Jacquard

 

 

Notre  montre a toujours faim

 

La montre est un petit animal à sang froid qui vit dans une coquille, replié sur lui-même. Même domestique elle peut être classée parmi les parasites car elle vit de préférence sur l’homme. (…)

 La montre est l’animal connu qui a le plus de dents, ces dents sont disposées en rond autour de petits trous qui assurent une mastication régulière du temps. Elle ne mange pas autre chose.

 

Sacha Guitry

 

 

Le Petit Prince encore et toujours

 

« Bonjour dit le Petit Prince

 -Bonjour dit le marchand.

C’était un marchand de pilules perfectionnées qui apaisent la soif. On en avale une par semaine et l’on n’éprouve plus le besoin de boire.

 – Pourquoi vends-tu ça ? dit le Petit Prince

– C’est une grosse économie de temps dit le marchand. Les experts ont fait des calculs. On épargne cinquante-trois minutes par semaine. On en fait ce qu’on veut…

 – Moi, dit le Petit Prince, si j’avais cinquante-trois minutes à dépenser, je marcherais tout doucement vers une fontaine ».

 

Antoine de Saint-Exupéry

 

 

Commentaire de la réponse du Petit Prince au marchand :

…Sublime,  merveilleuse, extraordinaire,  lumineuse réponse du Petit Prince au marchand :

Ce « je marcherais », c’est le courage de chaque matin ,  de chaque jour.

Ce « doucement », c’est un « ne perdons pas notre temps à nous dépêcher », ralentissons le rythme frénétique de nos vies.

Ce « vers une fontaine » c’est chercher l’essentiel qui n’est pas achetable, qui est peut être la source du bonheur en nous-mêmes et avec les autres, en traversant parfois les déserts du Petit Prince avec ce courage de la goutte d’eau qui est de tomber quelquefois ou souvent dans le désert.

L’auteur de ce blog.

 

L’une des plus belles pages de la littérature et une histoire ordinaire et extraordinaire des quatre saisons et du temps qui passe :

 

A mesure que l’âge m’envahit, la nature me devient plus proche. Chaque année, en quatre saisons qui sont autant de leçons, sa sagesse vient me consoler.

 

 Elle chante, au printemps: « quoi qu’il ait pu, jadis, arriver, je suis au commencement. Tout est clair, malgré les giboulées : jeune, y compris les arbres rabougris : beau, même ces champs caillouteux. L’amour fait monter en moi des sèves et des certitudes si radieuses et si puissantes qu’elles ne finiront jamais ».

 

Elle proclame, en été : « quelle gloire est ma fécondité. A grand effort, sort de moi tout ce qui nourrit les êtres. Chaque vie dépend de ma chaleur. Ces grains, ces fruits, ces troupeaux qu’inonde à présent le soleil, ils sont une réussite que rien ne saurait détruire. Désormais, l’avenir m’appartient ».

 

 En automne, elle soupire : « ma tâche est près de son terme. J’ai donné mes fleurs, mes moissons, mes fruits. Maintenant, je me recueille. Voyez comme je suis belle encore, dans ma robe de pourpre et d’or, sous la déchirante lumière. Hélas, les vents et les frimas viendront bientôt m’arracher ma parure. Mais, un jour, sur mon corps dépouillé, refleurira ma jeunesse ».

 

 En hiver elle gémit : « Me voici, stérile et glacée. Combien de plantes, de bêtes, d’oiseaux, que je fis naître et que j’aimais meurent sur mon sein qui ne peut plus les nourrir ni les réchauffer. Le destin est-il donc scellé ? Est-ce, pour toujours, la victoire de la mort ? Non. Déjà, sous mon sol inerte, un sourd travail s’accomplit. Immobile au fond des ténèbres, je pressens le merveilleux retour de la lumière et de la vie ».

Charles de Gaulle

 

19-Lenteur et rapidité

 

Le plus beau des papillons

 Comment tenir compte de la lenteur et de la rapidité ?

Tchouang-Tseu était un peintre extraordinaire. L’Empereur lui demanda de réaliser un crabe.

Tchouang-Tseu accepta à condition d’avoir cinq ans pour le faire et de nombreux serviteurs ainsi qu’une maison.

Au bout de ce temps la peinture n’était pas commencée, il réclama cinq ans de plus.

 Au dernier jour l’Empereur arriva et, en un instant, Tchouang-Tseu peignit le crabe le plus beau que l’on eût jamais vu.

Histoire de Chine

 

 Autre version de la peinture du papillon

Un empereur demande à un grand artiste de l’empire  de lui peindre un papillon.

 Pendant une année le peintre travaille dans les caves et les  greniers du palais, il fait  364 brouillons.

 Le 365 ème   jour il arrive devant l’empereur  et, sur une feuille blanche, en quelques minutes, il peint le plus beau papillon du monde.

Conte  reconstitué à partir du précédent.

 

20-L’autodestruction du système mondial

 

Midas et Prométhée ( mythologie grecque) et notre monde d’aujourd’hui.

Le roi Midas voulait pouvoir tout transformer en or, son vœu fut exhaussé. Mais  la nourriture et l’eau deviennent aussi de l’or et  le roi dépérit peu à peu. En se trempant dans le fleuve il fut  libéré de son malheur.

Qu’est-ce qu’une société dans laquelle tout est à vendre et à acheter, dans laquelle tout vaut tant ?

Le titan Prométhée est allé dérober le feu aux dieux. Le châtiment de Zeus sera terrible.

Qu’est-ce qu’une société qui ne se donne plus de limites ?

L’auteur de ce blog et de ce site

 

Nous sommes dans un système devenu autophage, il  se mange lui-même

Aux personnes rencontrées  par le Petit Prince de Saint-Exupéry on pourrait ainsi rajouter Erysichthon, qui se mangeait lui-même, évoqué par le poète Ovide en 30 avant notre ère dans « Les Métamorphoses », et l’identifier  au productivisme.

 « Que faites-vous ? » demande le Petit Prince.

 « Je suis devenu un système autophage.  Les pays, les marchés, les entreprises se dévorent, je dévore la nature, je dévore même mes limites. »

 « Vous aimez çà ? »  interroge épouvanté  le Petit Prince.

 «Au début  j’y prenais goût, mais depuis longtemps  je ne peux plus  m’arrêter, j’ai toujours faim » répond l’autophage.

« A cette  allure ,  dit le Petit Prince, vous souffrirez de plus en plus et vous  allez vite  disparaitre.  Moi quand j’ai soif  je marche  tout doucement vers une fontaine.»

 

 21-Croissance, décroissance

 

Sur la plage…

  Un touriste voit un pêcheur qui se repose sur la plage sous son chapeau.

 Il lui demande : « vous ne travaillez pas ? » 

«  Si, lorsque j’ai faim je vais prendre quelques poissons. »

 « Vous pourriez travailler toute la journée. »

« Pour quoi faire ? »

« Pour vendre beaucoup de poissons. »

 « Pour quoi faire ? »

 « Vous auriez d’autres bateaux   et plus d’argent. »

 « Pour quoi faire ? »

« Pour prendre des vacances et  vous reposer au soleil. »

 «  Ah bon ! » dit le pêcheur,

et il se rendormit sous son chapeau.

Conte entendu et reconstitué par l’auteur de ce blog

 

22-Techno science

 

Nucléaire… Cette statue lève toujours les bras vers le ciel, mais  la mort a pris la place de la « gloire ».

Les pionniers de l’écologie politique et de la décroissance ( Ellul , Illich , Gorz, Morin,  Dumont et beaucoup d’autres…)  posaient depuis longtemps cette question  vitale :  « Qu’est-ce qu’une société qui ne se donne pas de limites ? »

Dans la ville de Pripyat, près de Tchernobyl, en Ukraine, lieu d’un gigantesque accident nucléaire, une statue en bronze devant le cinéma représentait Prométhée levant les bras au ciel pour prendre le feu des dieux. Il était dans la toute-puissance.

Après le drame du 26 avril  1986 la statue du Titan  a été enlevée de la ville fantôme et placée devant la centrale nucléaire  pour rendre hommage aux « liquidateurs. » (Voir  Prométhée à Tchernobyl , François Flahault, Le Monde diplomatique, septembre 2009.)

 

Après la guerre nucléaire

 La guerre nucléaire n’a laissé qu’un survivant.

 Il monte au sommet d’un gratte-ciel, il boit, mange, écoute une belle musique et se jette du centième étage.

Avant d’arriver en bas il entend sonner le téléphone.

Conte  intitulé « les voix du silence », écrit  par le philosophe  Kostas  Axelos

 

Des moines, des ordinateurs et des étoiles

 Dans une nouvelle Arthur Clarke raconte l’histoire d’une communauté de moines
tibétains vouée depuis des siècles à transcrire les neuf milliards de noms donnés à
Dieu, au terme de quoi le monde sera accompli et prendra fin.

 Epuisés  par cette tâche fastidieuse, les moines font appel aux techniciens d’IBM dont les ordinateurs font le travail en quelques mois.

Et les techniciens effarés, qui n’y croyaient guère,
voient en redescendant dans la vallée les étoiles s’éteindre une à une.

En épuisant toutes les possibilités ils ont déclenché le code de disparition automatique du monde.
« Crime parfait » donc sans témoin, sans mobile, sans cadavre, sans meurtrier.

 Jean Baudrillard reconstitue un tel crime, à la manière d’un Sherlok Holmes
 métaphysicien, fasciné par la splendeur du vide. La grande question philosophique
était: « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? ».

Aujourd’hui, écrit Baudrillard, la véritable question serait: « Pourquoi y a-t-il rien plutôt que quelque chose ? » .

Roland Jacquard

 

 Sans limites…

 Une civilisation était parvenue à un niveau tellement  élevé de techno science qu’elle matérialisait la pensée,

  on  pensait à un être humain ou non humain  il était là, on pensait à une chose elle était là.

  Un jour des personnes  pensèrent  à des monstres de plus en plus gigantesques   qui avalèrent toute la civilisation.

Conte proposé par  l’auteur de ce blog    à partir de films et d’histoires de science-fiction parfois déjà dépassés par des réalités.

 

23-Humour

 

Bon conseil

Il vaut mieux prendre ses désirs pour des réalités

 …que de prendre son slip pour une tasse à café.

Pierre Dac

 

Qui est le plus bête ?

L’ennemi est bête. Il croit que c’est nous l’ennemi alors que c’est lui.

Pierre Desproges

 

 

La transmission des ordres  a des courts circuits

Le commandant au capitaine : comme vous devez le savoir il y aura demain une
éclipse de soleil, ce qui n’arrive pas tous les jours. Vous ferez partir les hommes à
cinq heures en tenue de campagne pour le terrain de manœuvres.
Ils pourront y voir le phénomène et je leur donnerai les explications nécessaires. S’il
pleut il n’y aura rien à voir. Dans ce cas laissez les hommes à leur chambre.


Le capitaine au lieutenant : sur l’ordre du commandant demain à cinq heures il y aura
une éclipse de soleil en tenue de campagne. Le commandant donnera au terrain de
manœuvres les explications nécessaires, ce qui n’arrive pas tous les jours. S’il pleut
il n’y aura rien à voir, mais alors le phénomène aura lieu dans la chambre.


Le lieutenant à l’adjoint : sur ordre du commandant à cinq heures du matin ouverture
de l’éclipse de soleil au terrain de manœuvres. Les hommes en tenue de campagne.
Le capitaine donnera les explications nécessaires sur ce rare phénomène si parfois il
pleuvait, ce qui n’arrive pas tous les jours.

 L’adjoint au canonnier : demain le commandant à cinq heures fera éclipser le soleil en tenue de campagne avec les explications nécessaires sur le terrain de manœuvres. Si parfois il pleuvait ce rare phénomène aurait lieu dans la chambre ce qui n’arrive pas tous les jours.

Les « derniers des derniers » entre eux : demain très tôt à cinq heures du matin le soleil
au terrain de manœuvres fera éclipser le capitaine à la chambre. Si parfois il pleuvait
ce rare phénomène aurait lieu en tenue de campagne ce qui n’arrive pas tous les
jours.

( L’auteur de ce blog « Cette histoire gagne à être lue tout fort en changeant de voix à chaque transmission. »

 Autre exemple :

Un premier lecteur « Autant que faire se peut. »

 Un second « Autant que peut se faire. »

Un troisième «  On peut le faire. »

Un autre «  Faites-le. »

Un autre encore « Quoi ? C’est impossible. »

 Un dernier« Ils ne savaient pas que c’était impossible alors ils l’ont fait. »