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au trésor des souffles

Démocratie

le système international et les luttes pour la démocratie

V –  Le système international et les luttes pour la démocratie

 

 Introduction

Une analyse des luttes internes pour la démocratie doit être liée à une analyse des luttes sur le plan international, nous avons déjà rencontré cette problématique en particulier par rapport à la vocation universelle de la démocratie.

Quelle est la situation ? Comment peut-on essayer de la changer?

Le système international n’est-il pas pour une large part autoritaire (A) ? 

 Par quels moyens le démocratiser (B) ?

 Et, question  souvent présente depuis 1945 : comment la communauté des Etats peut-elle se situer par rapport  à l’établissement ou au rétablissement, en situation dramatique, de la démocratie par la force  et /ou par d’autres moyens (C) ?

 

 

A-Un système international  pour  une  large part autoritaire.

 

1-Les dominants du système international

Les  dominants essentiels  au « cœur » du système se nomment  marchés financiers, firmes géantes, grands groupes médiatiques, complexes de la techno science (civils et militaires).

Les dominants importants dans « l’armature » du système s’appellent G8, surtout Etats-Unis, grands pays émergents, quelques organisations internationales (FMI, BM, OMC) et quelques organisations régionales (UE, ALENA…) avec une domination des hommes dans ce système productiviste.

 

2-Les conséquences de ces dominations

 

Les difficultés pour dégager des intérêts communs à long terme des acteurs humains sont grandes, pourquoi ?

Parce que le système productiviste concentre des avoirs, des pouvoirs, des savoirs, et les intérêts des acteurs dominants peuvent ne pas être les mêmes que ceux des acteurs humains. Un seul exemple : la défense d’un pays est-elle construite à partir des intérêts des complexes scientifico-militaro-industriels ou des intérêts des populations ? Quels sont respectivement ces intérêts ?

Ainsi peut-on en appeler aux acteurs humains, en personnes, en peuples, en humanité, pour qu’ils reprennent possession de leurs avenirs. Le doivent-ils ( choix  éthiques), le peuvent-ils (rapports de forces, marges de manœuvres), le veulent-ils(volontés politiques) ?

 

B- Quelques moyens pour contribuer à démocratiser le système international.

 

 

1-Quelques moyens de démocratisation par rapport aux dominants du système international

 

Par rapport aux dominants essentiels du système productiviste :

 

Le désarmement du pouvoir financier, principalement par la création de taxes sur les transactions financières, par la suppression des paradis fiscaux,

La règlementation des firmes multinationales principalement par la création de normes sociales, sanitaires, environnementales, par la suppression des productions contraires à l’intérêt commun de l’humanité,

La mise hors d’atteinte de l’information face à l’emprise de grands groupes industriels et financiers,

La remise à sa place de la techno science par la réorientation des budgets vers des besoins vitaux, des partages des connaissances Nord-Sud , l’interdiction des recherches portant atteinte à l’intérêt commun de l’humanité.

 

 

Par rapport aux dominants importants du système productiviste :

 

Associer des pays pauvres du Sud aux clubs diplomatiques, par exemple au G20,

Démocratiser des institutions internationales, ainsi réformer profondément le Conseil de sécurité des Nations Unies, le FMI, la BM, l’OMC.

 

 

2-Quelques autres moyens de démocratiser le système international

 

Par rapport à d’autres acteurs :

En ce qui concerne les organisations non gouvernementales(ONG) : créer et développer des  réseaux,   des forums, des conférences d’ONG, des coordinations, des fronts communs, une chambre des ONG aux Nations Unies,

En ce qui concerne les organisations internationales(OI) : créer des OI composées de représentants d’Etats, d’ONG, et d’autres acteurs (entreprises, collectivités territoriales….)

En ce qui concerne les organisations régionales : remédier au « déficit démocratique », par exemple dans l’Union européenne(UE) donner le pouvoir d’initiative au Parlement alors qu’il appartient à la Commission, c’est-à-dire à des fonctionnaires.

 

Par rapport aux liens entre les niveaux géographiques :

 

Créer un collège, consultatif dans des domaines vitaux, représentant toutes les régions du monde,

Chaque unité géographique (locale, nationale, continentale, internationale) ne devrait-elle pas respecter quelques principes essentiels ? Par exemple le respect de la dignité humaine, la responsabilité, le respect de la diversité, la prudence (précaution)…

Ne faut-il pas consacrer la représentation de l’humanité en lui donnant aussi les moyens institutionnels, juridiques  et financiers de défendre ses droits, son patrimoine ?

Enfin, à tous les niveaux géographiques,  développer l’accès des femmes aux processus de décision.

 

 

C-La  communauté des Etats et le  rétablissement ou l’établissement, en situation dramatique, de la démocratie par la force et/ou par d’autres moyens.

 

La communauté des Etats est souvent un euphémisme pour dire les Etats les plus puissants. Lorsqu’il s’agit des Nations Unies ce sont les cinq membres permanents (droit de veto pour chacun) et les dix autres membres du Conseil de sécurité qui décident, s’il s’agit de l’intervention d’une force internationale celle-ci peut voir la participation, d’importance très variable, de quelques dizaines d’Etats.

Partons de quelques données globales essentielles pour mieux se situer (1) pour en  arriver ensuite aux pratiques internationales(2).

 

1- Machiavel, Gandhi et l’entre-deux face à la démocratie imposée par la force.

 

Une fois de plus voilà, pour schématiser, Machiavel et Gandhi aux deux extrêmes. Et, entre les deux, des théories et des pratiques intermédiaires.

Des théories et des pratiques vont dans le sens de « la  fin  justifie les moyens. » Ainsi  on pense que, dans certaines circonstances, tous les moyens peuvent être employés pour instaurer ou restaurer la démocratie, par exemple  à coups de bombardements contre des autorités étatiques criminelles ou des factions armées  criminelles. Ces opérations  seront terribles mais la dictature ou même les menaces immédiates d’assassinats massifs sont, affirme-t-on, encore plus terribles. Ne pas employer de tels moyens constitue une forme  de  non-assistance à populations en danger de mort ou à peuples en voie de génocide.

D’autres théories et pratiques vont dans le sens de l’absence de neutralité des moyens. Des moyens inhumains pour instaurer ou rétablir la démocratie face à des situations inhumaines ne feront qu’aggraver des haines, ne feront  que les étendre en surface et les développer en profondeur. Gandhi écrivait «  Les moyens sont comme la graine et la fin comme l’arbre. Le rapport est aussi inéluctable entre la fin et les moyens qu’entre l’arbre et la semence.»La légitimité d’une cause n’implique pas la légitimité de tous les moyens pour la faire triompher. Il était, oh combien, légitime de lutter contre le totalitarisme nazi, il n’était pas légitime d’envoyer des bombes nucléaires sur Hiroshima et Nagasaki.

Entre les deux se trouvent les théories et les pratiques  qui mettent en avant de multiples moyens, mis en œuvre dans un processus allant vers la force armée, c’est-à-dire des  interventions par les airs, les mers, et au sol, cela si c’est absolument  nécessaire  et une fois épuisés les autres moyens, lesquels ?Des moyens diplomatiques, financiers, idéologiques, pour établir ou rétablir une démocratie, et même certains moyens militaires (conseillers militaires, fournitures d’armements).

 

2-« La responsabilité de protéger »  et les Nations Unies.

 

Historiquement « la responsabilité de protéger » apparait très tardivement après bien des drames. Dans le sillage du devoir d’assistance (« devoir d’ingérence à des fins humanitaires ») et à la suite du rapport en 2004 d’un groupe de personnalités, un Sommet des Nations Unies, en septembre 2005, accepte, dans le document final, de reconnaitre cette responsabilité de protéger, c’est  « la responsabilité première d’un Etat  de protéger sa population » du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique, des crimes contre l’humanité.

 Au cas où les moyens pacifiques seraient insuffisants et où les autorités nationales échoueraient à protéger leur population, la communauté internationale des Etats devrait agir collectivement par l’entremise du Conseil de sécurité et conformément à la Charte des Nations Unies.

 Un rapport du Secrétaire général des Nations Unies de 2009 a précisé la mise en œuvre de cette responsabilité. Mais surtout le Conseil de sécurité a fait référence à « la responsabilité de protéger » pour le Darfour (avril 2006),la Libye(février 2011),la Côte d’Ivoire(mars 2011),le Yémen(octobre 2011),le Soudan du Sud(juillet 2012).Par contre le projet de résolution(par exemple en février 2012) a échoué par rapport à la Syrie(vetos de la Russie et de la Chine.)

 

Au moins deux questions restent  présentes :

 d’abord la question de l’opposition entre une légalité qui peut se trouver bloquée au Conseil de sécurité ( avec  le serpent de mer vieillissant de sa réforme) et la légitimité d’une intervention devant une violation particulièrement terrifiante de la protection de la population.

 Ensuite la question de  la nature des moyens d’intervention qui peuvent produire victimes, souffrances et destructions. Cette interrogation se pose dans le cadre d’une intervention légale décidée  par l’ONU et, aussi, dans le cadre d’une intervention illégale, décidée par un ou plusieurs Etats sans accord du Conseil de sécurité : les effets de bombardements massifs, lorsque ces moyens sont  employés, sont le plus souvent terribles.

Les moyens de « consolidation de la paix », mis en œuvre  tardivement par les Nations Unies  (2005), s’ils étaient massifs en particulier financièrement (en 2012 les contributions scandaleusement dérisoires étaient de 80,5 millions de dollars), pourraient ensuite donner quelques chances à la paix et à la démocratie, étant entendu que les conditions pour ce rétablissement ou cet établissement sont plus générales, l’essentiel étant probablement, dans la nouvelle situation, les luttes massives contre les injustices.

 

 La communauté internationale   se trouve donc souvent , pour n’avoir pas voulu agir en amont à travers des moyens porteurs d’une véritable paix,

soit impuissante devant des drames,

 soit poussée à employer des moyens militaires plus ou moins destructeurs.

 Agira-t-elle massivement en amont par rapport aux véritables causes de ces situations ? ( Voir le dernier article sur ce site de la série sur les violences : « Les analyses des causes des violences et les luttes contre ces causes. »)

 

 

Remarques terminales  relatives à  la démocratie

 

 1- Par rapport aux totalitarismes nous avons souligné les nombreuses luttes essentielles, vitales en amont dans le premier article de cette série de cinq articles sur la démocratie.

 Ici nous remettrons en avant un seul point : ne devrait-on  pas par exemple mettre  en place des programmes d’éducation aux droits de l’homme, à la paix, à l’environnement, cela de l’enseignement primaire jusqu’à  l’université ? Cela dans tous les pays du monde  avec une adaptation bien sûr aux différents âges et dans la durée et dans le contenu et dans la pédagogie, portant (entre autres bien sûr parce que les programmes relatifs aux droits de l’homme seront beaucoup plus vastes) directement et indirectement sur les manifestations, les causes et les luttes contre ces contraires absolus de la démocratie que sont les totalitarismes ?

 Pour cela parmi les moyens financiers possibles ou bien une part de la taxation des transactions de changes, ou bien trente jours de dépenses militaires mondiales (en 2019 elles étaient de 1917 milliards de dollars, soit 5,25 milliards de dollars par jour ,soit pour un mois 159 milliards de dollars, alors que  le budget 2020-2022 dérisoire  de l’UNESCO… est de 534 millions de dollars, celui de l’OMS pour 2020 et 2021 est de 5,8 milliards de dollars.

 Ecrit et dit et pensé et vécu en grande colère : Merci les représentants des Etats, merci les responsables des complexes scientifico-militaro-industriels, les enfants du monde vous remercient ! 

 

 2- Une conception porteuse de la démocratie pourrait reposer sur trois séries d’éléments

 Une large panoplie de  critères connus : élections libres, médias libres (liberté d’expression…), système judiciaire indépendant, droits de l’homme, luttes  contre les inégalités, démocratie économique, sociale, culturelle, environnementale…

Une large panoplie  des moyens d’améliorer la démocratie représentative et des moyens de mettre en route une démocratie participative en s’inspirant entre autres du droit comparé…

Enfin l’un  des critères d’une véritable démocratie ne consiste-t-il pas à prendre en compte les générations futures ?  Cet  objectif et ces remises en cause ne seraient-ils pas porteurs aussi pour les générations présentes qui se donneraient ainsi des limites ?

 

3- Les six défis principaux rencontrés par la démocratie, défis vitaux aux niveaux locaux, nationaux, continentaux, internationaux, sont certainement les suivants:

 Désarmer le pouvoir financier,

 Remettre à leurs places le marché et la   techno science,

Remettre en cause les mécanismes de corruption,

Construire la légitimité et la confiance,

Lutter contre les injustices,

Reconquérir le temps

Démonter les critiques idéologiques contre  la démocratie

 

 Autrement dit « l’invention démocratique »  en appelle aux volontés, aux imaginations, aux courages.

La démocratie ne marche-t-elle pas, elle aussi, avec deux sacs, l’un pour recevoir, l’autre pour donner?

Sur ses chemins qui sont aussi  les nôtres  nous  contribuons à la construire et elle contribue à nous construire.