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au trésor des souffles

Recueil de citations

Un souffle…

I-Souffle qui passe…
II-Souffle qui s’éteint …
III-Autre souffle…Ailleurs ?!…

(On retrouve le plan détaillé à la fin .)



  1. Souffle qui passe…

1-Le temps

Le temps : sa présence…
Partout où quelque chose vit, il y a, ouvert quelque part, un registre où le temps
s’inscrit.
Henri Bergson
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Le temps est un grand maître, il règle bien des choses.
Pierre Corneille
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Le soleil est nouveau tous les jours.
Héraclite

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Temps qui passe
La vie est quelque chose qui arrive quand on est occupé à faire autre chose
John Lennon
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Aimez ce que jamais on ne verra deux fois.
Alfred de Vigny
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La nostalgie est une délectation ambivalente, c’est la souffrance douce-amère des
choses révolues ; elle est liée en général au fait que le passé est passé, la nostalgie
la plus immotivée est celle qu’on éprouve pour un passé banal mais c’est
inexplicablement la nostalgie la plus déchirante.
Jankélévitch
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Les sanglots longs
Des violons
De l’automne
Blessent mon cœur
D’une langueur
Monotone.
Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l’heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure ;
Et je m’en vais
Au vent mauvais
Qui m’emporte
Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte.
Verlaine
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Longtemps longtemps longtemps
Après que les poètes ont disparu
Leurs chansons courent encore dans les rues.
Charles Trenet

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Qui nous a retournés de la sorte, que nous ayons dans tous nos actes, l’attitude de
quelqu’un qui s’en va ? Et comme sur la dernière colline qui lui montre encore une
fois sa vallée tout entière, il se retourne et tarde, tels nous vivons, à chaque pas
prenant congé.
J.M. Rilke
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Nous ne baignerons jamais deux fois dans l’eau du même fleuve.
Héraclite
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…Pas même une fois puisque les éléments changent, le présent nous échappe.
Cratyle
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Le temps s’en va
Le temps s’en va
Ma Dame
Las! Le temps, non,
Mais nous nous
En allons.
Pierre de Ronsard
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Une heure n’est pas une heure. C’est un vase rempli de parfums, de sons, de projets
et de climats.
Proust
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La montre est un petit animal à sang froid qui vit dans une coquille, replié sur luimême.
Même domestique elle peut être classée parmi les parasites car elle vit de
préférence sur l’homme. (…) La montre est l’animal connu qui a le plus de dents, ces
dents sont disposées en rond autour de petits trous qui assurent une mastication
régulière du temps. Elle ne mange pas autre chose.
Sacha Guitry
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Trois mille six-cents fois par heure la seconde
Chuchote : souviens-toi ! Rapide avec sa voix
D’insecte maintenant dit : je suis autrefois.
Et j’ai pompé ta vie avec ma trompe immonde.
Baudelaire

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Un temps où tout le monde était lent, sans destination ni impatience.
Marie Rouanet
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La vie est beaucoup trop courte. Il en faudrait deux : une pour répéter, une pour
jouer.
Vittorio Gassman
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Ecrire sur l’eau.
Aristophane
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Vous le verrez peut-être, vous la verrez parfois en pluie et en chagrin
Traverser le présent en s’excusant déjà de n’être pas plus loin
Et fuir devant vous une dernière fois la pendule d’argent
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, qui leur dit : je t’attends
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, et puis qui nous attend.
Jacques Brel
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O temps ! Suspends ton vol ! Et vous, heures propices
Suspendez votre cours
Laissez nous savourer les rapides délices
Des plus beaux de nos jours.
Lamartine
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On voudrait revenir à la page où l’on aime
Et la page où l’on meurt est déjà sous nos doigts.
Lamartine
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Avec le temps, va, tout s’en va…
Avec le temps on oublie les passions et l’on oublie les voix
Qui vous disaient tout bas les mots des pauvres gens :
Ne rentre pas trop tard, surtout ne prends pas froid.
Même les plus chouettes souvenirs çà t’a une de ces gueules,
A la galerie j’farfouille dans les rayons d’la mort, le samedi
Soir quand la tendresse s’en va toute seule…
Léo Ferré

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Que reste t-il de nos amours
Que reste t-il de ces beaux jours
Une photo vieille photo de ma jeunesse
Que reste-il des billets doux
Des mois d’avril des rendez-vous
Un souvenir qui me poursuit
Sans cesse.
Charles Trenet
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Je vous aime déclarai-je à Sylgère qui habitait la
planète Rouge. Voulez-vous m’épouser ?
Vingt ans de ma vie passèrent. J’eus même le temps
de mourir. Sylgère se tourna vers moi.
Mais oui, répondit-elle immédiatement sans hésiter.
Jacques Sternberg
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Depuis des semaines déjà il remontait le cours du temps,
Sans s’arrêter nulle part, grisé par la vitesse des événements qui défilaient à l’envers
de son regard.
Soudain il s’arrêta hurlant de douleur: Dieu lui enfonçait
Brutalement cette côte légendaire qui avait été la première femme.
Jacques Sternberg
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Le monde est un repaire de brigands et la nuit est en train de tomber…
Aussi dépêchons-nous d’être heureux, gentils, généreux et bons.
Ingmar Bergman
(Fanny et Alexandre)
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Temps : quel sens ?
Quant aux physiciens et aux astronomes, ils nous donnent le choix entre un univers
se dilatant sans fin, se vidant de toute substance, où plus rien ne surviendra, ce qui
prive le temps de définition, et un univers qui, après une période d’expansion, se
contractera durant quelques dizaines de milliards d’années et disparaîtra dans une
implosion symétrique de l’explosion initiale. La question « qu’y aura-t-il après ? » est
aussi dépourvue de sens que la question « qu’y avait-il avant le big-bang ? » Avec la
disparition de l’univers, le temps aura « fait son temps ».
Albert Jacquard

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Le temps qui décolore toutes les couleurs et ternit l’éclat des émotions, le temps
amortit la joie comme il console la peine, le temps endort la gratitude comme il
désarme la rancune, l’un et l’autre indistinctement. Il sèche les larmes mais il éteint
aussi la flamme de la passion : l’amour se perd dans les sables.
Vladimir Jankélévitch
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La méditation sur le temps est la véritable épreuve du philosophe.
Alain
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La contemplation procure à l’homme l’unique faveur qu’il sache mériter : suspendre
la marche, retenir l’impulsion qui l’astreint à obturer l’une après l’autre les fissures
ouvertes au mur de la nécessité et à parachever son œuvre en même temps qu’il clôt
sa prison.
Claude Lévi-Stauss
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Quand on a raison vingt-quatre heures avant le sens commun des hommes on passe
pour n’avoir pas le sens commun pendant vingt-quatre heures.
Rivarol
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Le temps seul est irréversible. C’est ce qui lui donne son caractère pathétique. Dans
l’espace tous les trajets sont réversibles. Il s’ensuit que le temps et l’irréversible c’est
la même chose.
Jankélévitch
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Le temps fait oublier les douleurs, éteint les vengeances, apaise la colère, étouffe la
haine.
Avicenne
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Le temps est un adversaire, une tristesse. Il nous éloigne des joies passées, il
détruit, use, nous sépare au bout de divers chemins de ceux et celles qui ont été
proches.
Le temps est un ami, une chance. C’est à travers lui que nous mettons en oeuvre
des possibles, que nous aimons, sommes aimé(e)s, il peut faire mûrir, il peut guérir,
éventuellement effacer ou atténuer des échecs, des chagrins.
JML
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Accueillir chaque instant
Comme un cadeau royal
Avec ses fleurs qui s’ouvrent
Et son bouquet fané.
Michel Scouarnec
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Le bonheur de la vie n’est pas dans la durée
Mais dans l’usage qu’on en fait.
Sénèque

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Pourquoi le temps
S’il ne fait que passer ?
Pourquoi l’amour
S’il ne va qu’à se perdre ?
Pourquoi l’oiseau
S’il n’enchante les arbres ?
Et pourquoi l’homme…
Didier Rimaud
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Nous sommes à la fois obsédés du temps et orphelins du temps. Notre existence
individuelle se dissout dans un zapping permanent ; nos sociétés surprogrammées
sont bloquées dans l’immédiat ; notre devenir historique se brouille (…) Comment
renouer dans le respect de la durée un dialogue interactif entre le présent agissant,
le passé comme expérience, l’avenir comme horizon des responsabilité ? Comment
reconquérir le temps pour redonner du sens et de la cohérence à notre être en
société comme à notre vie quotidienne ? Comment réintégrer le temps dans notre
culture politique, dans nos pratiques citoyennes, dans notre art de vivre ?
Jean Chesneaux
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La vie est une horloge qui crie à son propriétaire – au quart d’heure, « tu… », à la
demie : « tu es… », aux trois quarts : « tu es un », et quand l’heure sonne : « tu es un
être humain ».
Lichtenberg
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La vie est trop courte pour être petite.
Goethe
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Regarde le soir comme si le jour y devait mourir,
Et le matin comme si toute chose y naissait.
Que ta vision soit à chaque instant nouvelle,
Le sage est celui qui s’étonne de tout.
André Gide
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Toi d’aujourd’hui que j’aime par delà moi-même
Comme la vie fait espérance
Tu multiplies mon cœur et mon corps et mes sens
Et la raison suprême
De croire que le temps n’efface pas la vie
Mais qu’il est la vie même.
Anonyme

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Qu’est-ce que l’homme dans la nature ? Un néant à l’égard
De l’infini, un tout à l’égard du néant, un milieu entre rien et tout.
Blaise Pascal
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L’instant est le croisement du temps et de l’éternité.
Louis Lavelle
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Si la lueur
Des cerisiers fleuris sur les collines
Durait plus longtemps que quelques jours
Nous ne l’aimerions aussi tendrement.
Yamabé no Akahito
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« Bonjour dit le petit prince
-Bonjour dit le marchand.
C’était un marchand de pilules perfectionnées qui apaisent la soif. On en avale une
par semaine et l’on n’éprouve plus le besoin de boire.
– Pourquoi vends-tu ça ? dit le petit prince
– C’est une grosse économie de temps dit le marchand. Les experts ont fait des
calculs. On épargne cinquante-trois minutes par semaine.
On en fait ce qu’on veut…
– Moi, dit le petit prince, si j’avais cinquante-trois minutes à dépenser, je marcherais
tout doucement vers une fontaine ».
Antoine de Saint-Exupéry
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Temps : agir aujourd’hui
Vivez, si m’en croyez, n’attendez à demain.
Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie.
Pierre de Ronsard
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Faire que ce ne soit pas seulement un jour de plus mais une vraie journée.
Entendu
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Carpe diem (cueille le jour présent)
Horace

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Il est déjà tard mais toujours temps.
Jean Malrieu
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N’agis point comme si tu devais vivre des milliers d’années. L’inévitable est sur toi
suspendu. Tant que tu vis, tant que cela t’est possible, deviens homme de bien.
Marc Aurèle
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Mais ce soir un vertige le saisissait à compter tout son temps perdu. Il aurait voulu le
crier. Jetez votre montre! Le secret n’est pas d’être exact mais de ne jamais perdre
un instant! (…) Dormir? Non, tomber de sommeil. Et ne pas laisser passer un seul
être sans l’aimer. O le temps! O l’amour!
Gilbert Cesbron
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Il ne faut jamais remettre au lendemain ce qu’on n’a pas fait le jour même mais qu’on
aurait pu faire la veille ou l’avant veille du surlendemain.
Pierre Dac
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Durant plus d’un jour de paresse j’ai pleuré sur le temps perdu. Pourtant il n’est
jamais perdu, mon Seigneur ! Tu as pris dans tes mains chaque petit moment de ma
vie.
Caché au cœur des choses, tu nourris jusqu’à la germination la semence, jusqu’à
l’épanouissement le bouton et la fleur mûrissante jusqu’à l’abondance du fruit.
J’étais là, sommeillant sur mon lit de paresse et je m’imaginais que tout ouvrage avait
cessé. Je m’éveillais dans le matin et trouvais mon jardin plein de merveilles et de
fleurs.
Tagore
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Temps : l’avenir…
La vie ne va pas en arrière ni ne s’attarde avec hier.
Vous êtes les arcs par qui vos enfants comme des flèches vivantes sont projetées.
K. Gibran
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Demain soufflera le vent de demain.
Proverbe japonais
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Ne lave pas la vaisselle que tu feras demain.
Proverbe polonais

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Toutes les fleurs de l’avenir sont les semences d’aujourd’hui.
Proverbe chinois
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Demain est moins à découvrir qu’à inventer.
Gaston Berger
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On n’attend pas l’avenir comme on attend le train. L’avenir on le fait.
Georges Bernanos
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Il faut bien le dire la peste avait enlevé à tous le pouvoir de l’amour et même de
l’amitié. Car l’amour demande un peu d’avenir, et il n’y avait plus pour nous que des
instants.
Camus
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N’est promis à l’éternel que ce qui résiste au temps.
Gustave Thibon
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Effacer le passé on le peut toujours : c’est une affaire de regret, de désaveu, d’oubli.
Mais on n’évite pas l’avenir.
Oscar Wilde
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Quand il s’agit d’un mortel il faut attendre sa dernière journée avant de l’appeler
heureux.
Sophocle
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Nous demandons à l’imprévisible de décevoir l’attendu.
René Char
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Elle est retrouvée !
– Quoi ? L’Eternité
C’est la mer mêlée
Au soleil
Arthur Rimbaud

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Il y a un temps pour…
Il est un temps pour aller à la pêche
Et un temps pour faire sécher les filets.
Proverbe chinois
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Il y a un temps pour tout faire sous le ciel,
Un temps pour enfanter et un temps pour mourir,
Un temps pour planter et un temps pour arracher le plant,
Un temps pour pleurer et un temps pour rire,
Un temps pour gémir et un temps pour danser,
Un temps pour déchirer et un temps pour coudre,
Un temps pour se taire et un temps pour parler…
Bible, L’Ecclésiaste
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Au temps de la rencontre succède vite le temps de la durée. Après le temps de
l’éphémère, de l’improvisation, de l’invention vient celui de la répétition aveugle et
grise.
C’est tout le temps de la rencontre qu’il faudrait retrouver dans celui de la durée.
Jacques Salomé
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A mesure que l’âge m’envahit, la nature me devient plus proche. Chaque année, en
quatre saisons qui sont autant de leçons, sa sagesse vient me consoler.

 Elle chante, au printemps: « quoi qu’il ait pu, jadis, arriver, je suis au commencement. Tout est clair, malgré les giboulées : jeune, y compris les arbres rabougris : beau, même ces
champs caillouteux. L’amour fait monter en moi des sèves et des certitudes si
radieuses et si puissantes qu’elles ne finiront jamais ».

Elle proclame, en été : « quelle gloire est ma fécondité. A grand effort, sort de moi
tout ce qui nourrit les êtres. Chaque vie dépend de ma chaleur. Ces grains, ces fruits,
ces troupeaux qu’inonde à présent le soleil, ils sont une réussite que rien ne saurait
détruire. Désormais, l’avenir m’appartient ».

En automne, elle soupire : « ma tâche est près de son terme. J’ai donné mes fleurs,
mes moissons, mes fruits. Maintenant, je me recueille. Voyez comme je suis belle
encore, dans ma robe de pourpre et d’or, sous la déchirante lumière. Hélas, les vents
et les frimas viendront bientôt m’arracher ma parure. Mais, un jour, sur mon corps
dépouillé, refleurira ma jeunesse ».

En hiver elle gémit : « Me voici, stérile et glacée. Combien de plantes, de bêtes,
d’oiseaux, que je fis naître et que j’aimais meurent sur mon sein qui ne peut plus les
nourrir ni les réchauffer. Le destin est-il donc scellé ? Est-ce, pour toujours, la victoire
de la mort ? Non. Déjà, sous mon sol inerte, un sourd travail s’accomplit. Immobile
au fond des ténèbres, je pressens le merveilleux retour de la lumière et de la vie ».
Charles de Gaulle

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Urgence et long terme
Il y a une sacralisation de l’urgence érigée en catégorie centrale du politique. Nos
sociétés prétendent que l’urgence des problèmes leur interdit de réfléchir à un projet,
alors que c’est en fait l’absence totale de perspective qui les rend esclaves de
l’urgence. L’urgence ne constitue pas la première étape d’un projet de sens : elle en
représente plutôt la négation active. L’émergence de l’humanitaire dans la vie
internationale depuis la fin de la guerre froide reflète cette évolution. L’humanitaire
conduit à une confusion entre fins et moyens avec pour conséquence une incapacité
à faciliter ou favoriser l’émergence de solutions politiques durables. (…) Rompre
avec la logique de l’urgence, et pas seulement dans le domaine humanitaire, me
paraît devoir être une priorité collective, une démarche indispensable à la
reconstruction du sens.
Zaki Laïdi
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Le droit d’assistance humanitaire demeure inscrit dans une certaine logique de
l’urgence. (…) Il ne peut servir en lui-même ni d’alibi ni de substitut à une politique
cohérente destinée
à prévenir les exactions ou les catastrophes.
Pierre-Marie Dupuy
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La grande faiblesse de l’humanitaire c’est qu’il fait prendre un sédatif pour un
remède, un effet éphémère pour une solution durable. (…)
Ghassan Salomé
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Soigner les victimes, soulager d’urgence des souffrances existantes c’est essentiel.
Mais, parallèlement, agir à tous les niveaux géographiques sur la destruction des
causes de ces souffrances c’est aussi essentiel. Sinon l’absence de politique à long
terme nous jettera de plus en plus en aval des problèmes, des menaces et des
drames. Débordés par l’urgence, nous serons alors de moins en moins capables d’y
répondre parce que de moins en moins capables de penser et de mettre en oeuvre le
long terme.
JML

Temps libéré
Nous prendrons le temps de vivre, d’être libres, mon amour.
Georges Moustaki
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La vie simple commence peut-être simplement par un ralentissement du rythme
frénétique de notre vie.
Pierre Pradervand
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Définir un projet de société du temps libéré ou si l’on préfère, du temps de travail
réduit pour tous, non seulement dans le contexte d’une lutte pour l’abolition du
chômage mais aussi dans le cadre d’un développement de la sphère des activités
autonomes, c’est, inéluctablement subvertir la finalité du système. Scier peu à peu la
branche sur laquelle il est assis.
Angelo Basile
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Diminuer la durée du temps d’un travail à partager est impératif, mais il faut aller
beaucoup plus loin. Il convient de trouver un nouvel équilibre entre travail rémunéré
et activités productives non rémunérées, découvrir « l’abondance frugale », inventer
une vie plus détendue, plus conviviale, plus libre.
André Gorz

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Je déplore la disparition du temps libre. Nous perdons cette paix essentielle des
profondeurs de l’être, cette absence sans prix pendant laquelle les éléments les plus
délicats de la vie se rafraîchissent et se réconfortent, pendant laquelle l’être, en
quelque sorte, se lave du passé et du futur, de la conscience présente, des
obligations suspendues et des attentes embusquées… Point de pression intérieure
mais une sorte de repos, dans l’absence, une vacance bienfaisante qui rend l’esprit à
sa liberté propre.
Paul Valéry
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Le bon sens suffit pour admettre que le progrès technologique, en multipliant la
productivité diminue le temps de travail mais le bon sens n’a pas prévu la peur du
« temps libre » ni les pièges de la consommation ni le pouvoir manipulateur de la
publicité. Liberté de « perdre son temps »: la société de consommation n’autorise
pas pareil gaspillage, les vacances organisées sont devenues une activité épuisante.
« Tuez le temps »: les plages modernes reproduisent le vertige de la vie quotidienne
dans les fourmilières urbaines.
Eduardo Galeano
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Le modèle de vie de la société de consommation convertit le temps en une ressource
économique toujours plus rare et plus chère : le temps se vend et se loue. Mais qui
est maître du temps ? L’automobile, le téléviseur, la vidéo, l’ordinateur personnel, le
téléphone portatif conçu(s) pour « gagner du temps » ou pour « passer le temps »
s’approprient celui-ci. L’automobile sert à économiser le temps mais elle le dévore :
une bonne partie du temps de travail sert à payer le transport vers le travail qui
engloutit plus de temps.
Eduardo Galeano

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Nous avons à enrichir le « temps libéré » : pour que celui-ci ne soit ni temps vide, ni
temps marchand, la transformation des mentalités demande une éducation ouverte à
d’autres perspectives. Ce sont bien les connaissances, les savoirs, les savoir-faire
qui se révèlent les vraies richesses. Pour permettre une égalité continue des
chances d’épanouissement pour chacun, nous avons à concevoir de nouvelles
conditions sociales et mentales, et considérer qu’à côté de la vie professionnelle et
du travail d’autres activités humaines sont « gratifiantes » : la créativité personnelle,
la convivialité sociale et la curiosité naturelle.
Jacques Robin
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Méfiez-vous de la hâte, échappez-lui. Combattez la car c’est un des plus grands
destructeurs de la vie intérieure (…) Ne perdons pas notre temps à nous dépêcher.
Lanza del Vasto

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Paresse – Oisiveté
M’étendant de tout mon long dans le bateau les yeux tournés vers le ciel, je me
laissais aller et dériver lentement au gré de l’eau, quelque fois pendant plusieurs
heures, plongé dans mille rêveries confuses mais délicieuses, qui sans avoir aucun
objet bien déterminé ni constant ne laissaient pas d’être à mon gré cent fois
préférables à tout ce que j’avais trouvé de plus doux dans ce qu’on appelle les
plaisirs de la vie.
Jean-Jacques Rousseau
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Ô Paresse, prends pitié de notre longue misère ! Ô Paresse, mère des arts et des
nobles vertus, sois le baume des angoisses humaines !
Paul Lafarge
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L’appétit d’honneur et de louange prive l’humanité de tout repos. Mais dans la
chaleur du soleil et la caresse du vent des choses se renouvellent spontanément. La
clarté printanière, au-delà du pouvoir des hommes, est pâle et profonde. Dans les
monts du repos sans fin se trouve un homme seul et tranquille.
Gesshü
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L’oisiveté que Thomas Hobbes appelait « la mère de la philosophie » est un temps
nécessaire, un indispensable « lâcher prise » qui permet à l’homme de se recentrer.
Il faut redécouvrir les délices de la paresse qui est sans doute le meilleur
médicament contre le stress fébrile de la vie moderne. Il faut oser chaque jour
quelques minutes de paresse en plus, des minutes volées à ce dieu Travail que
Joseph Delteil dénonçait déjà comme « La grande mystification » du XXe siècle. Il
faut redécouvrir « l’oisiveté du siècle » dont parle La Bruyère, une oisiveté qui n’est
pas fainéantise mais un temps de « vacance » rond et plein. La morale de la paresse
est à réinventer ! De toute urgence mais avec sérénité.
Michel Piquemal
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Sommeil
Sommeil… tiède et tranquille masse mystérieusement isolée, arche close de vie qui
transporte vers le jour mon histoire et mes chances, tu m’ignores, tu me conserves,
tu es ma permanence inexprimable ; ton trésor est mon secret… Tu t’es fait une île
de temps, tu es un temps qui s’est détaché de l’énorme temps où ta durée indéfinie
subsiste et s’éternise comme un anneau de fumée.
Paul Valéry
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Rarement le sommeil visite le chagrin, quand il daigne le faire, c’est un consolateur
tout-puissant.
Shakespeare
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Le phénomène le plus constant, le plus frappant et qui marque le début de
l’endormissement consiste en un sentiment de fatigue cérébrale, d’indifférence
psychique, de désintérêt au monde extérieur, enfin de relâchement de l’attention. (…)
Le sommeil est-il la « petite mort » comme l’affirment certains ? Le moment de la
mort serait semblable à celui du sommeil, avec ou sans rêve. Tout y prend des
dimensions inhabituelles jusqu’à ce que l’inconscience ait le dessus.
Jean Lhermitte

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Béni soit celui qui inventa le sommeil !
Cervantes
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La nuit, profitant de ce qu’on bavardait, s’est glissée entre nous comme une chatte,
et nos voix comme des rats peureux, restent dans leurs cachettes de silence.
Jules Renard
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L’humour et le sommeil : avec ces deux ingrédients l’être humain, ce primate, cette
étincelle entre deux gouffres, conserve la santé mentale.
Théodore Monod
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2-Jeunesse, vieillesse

Jeunesse
Etre jeune…
La jeunesse n’est pas une période de la vie, elle est un état d’esprit, un effet de la
volonté, une qualité de l’imagination, une intensité émotive, une victoire du courage
sur la timidité, du goût de l’aventure sur l’amour du confort.
On ne devient pas vieux pour avoir vécu un certain nombre d’années, on devient
vieux parce qu’on a déserté son idéal. Les années rident la peau, renoncer à son
idéal ride l’âme. Les préoccupations, les doutes, les craintes et les désespoirs sont
les ennemis qui, lentement, nous font pencher vers la terre et devenir poussière
avant la mort.
Jeune est celui qui s’étonne et s’émerveille. Il demande comme l’enfant insatiable : et
après ? Il défie les événements et trouve la joie au jeu de la vie.
Vous êtes aussi jeune que votre foi, aussi vieux que votre doute, aussi jeune que
votre confiance en vous-même, aussi jeune que votre espoir, aussi vieux que votre
abattement.
Vous resterez jeune tant que vous resterez réceptif à ce qui est beau, bon et grand,
réceptif aux messages de la nature, de l’homme et de l’infini.
Si un jour votre cœur allait être mordu par le pessimisme et rongé par le cynisme,
puisse Dieu avoir pitié de votre âme de vieillard.
Samuel Ullman

———————————
Je ne crois pas à l’âge.

Tous les vieux
portent
dans les yeux
un enfant,
et les enfants
parfois
nous observent
comme des vieillards profonds.

Mesurerons-nous
la vie
en mètres ou kilomètres
ou mois ?
Et depuis que tu nais ?
Et tout ce que
tu dois parcourir
jusqu’à ce que
comme les autres
au lieu de marcher dessus
nous reposions sous la terre ?

De l’homme de la femme
qui ont assumé
actions, bonté, force,
colère, amour, tendresse,
de ceux qui véritablement
vivants
se sont épanouis
et dans leur nature ont mûri,
n’approchons pas, nous,
la mesure
du temps
qui peut-être
est autre chose, une couche
de minerai, un oiseau
planétaire, une fleur,
autre chose peut-être,
mais pas une mesure.

Temps, métal
ou oiseau, fleur
au long pétiole,
étale-toi au long
des hommes,
fleuris-les
et lave-le
d’une
eau
ouverte
ou d’un soleil caché.
Je te proclame
chemin
et non linceul,
escalier
pur
à marches
d’air,
costume sincèrement
remis à neuf
pour de longitudinaux
printemps. Maintenant,
temps, je t’enroule,
je te dépose dans ma
boîte sylvestre
et je m’en vais pêcher
avec ta longue ligne
les poissons de l’aurore !
Pablo Neruda

———————————
Etre jeune c’est être spontané, rester proche des sources de la vie, pouvoir se
dresser et secouer les chaînes d’une civilisation périmée, oser ce que d’autres n’ont
pas eu le courage d’entreprendre. Le courage de la jeunesse c’est l’esprit du « Meurs
et deviens », la notion de la mort et de la renaissance.
Thomas Mann
———————————–
Les enfants disent probablement aux parents et aux adultes: essayez de redevenir
des enfants, laissez votre émotion éclater, aimez la spontanéité, venez jouer, rire.
Ressuscitez en vous l’enfant, un enfant libre.
JML
——————————–
Les cheveux blancs marquent les années et non pas la sagesse.
Ménandre
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On met longtemps à devenir jeune.
Picasso
————————–
Ah, mais c’est que j’étais beaucoup plus vieux à cette époque ! J’ai bien rajeuni
depuis.
Bob Dylan
————————
Si l’on peut dire de la camomille que plus elle est foulée aux pieds plus elle pousse,
néanmoins la jeunesse plus on la gaspille plus vite elle s’use.
W. Shakespeare
——————————
Donc, si vous n’en croyez, mignonne,
Tandis que votre âge fleuronne
En sa plus verte nouveauté,
Cueillez, cueillez votre jeunesse ;
Comme à cette fleur, la vieillesse
Fera ternir votre beauté.
Ronsard
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L’éternelle jeunesse est impossible : Même s’il n’y avait d’autre obstacle,
l’observation de soi-même la rendrait impossible.
Franz Kafka

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Qu’as-tu fait, ô toi que voilà
Pleurant sans cesse,
Dis qu’as-tu fait, toi que voilà,
De ta jeunesse ?
Verlaine
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Temps : vieillesse
La vieillesse est particulièrement difficile à assumer parce que nous l’avions
considérée comme une espèce étrangère. Suis-je donc devenue une autre alors que
je demeure moi-même ?
Simone de Beauvoir
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Partager le silence d’un vieux ce n’est pas perdre du temps, c’est en recevoir, c’est
trouver asile dans le temps.
Bernadette Veysset-Puijalon
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Le vieillissement est l’événement le plus inattendu dans la vie d’un homme.
Trotski
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La vieillesse m’infecte le cœur… Mes révoltes sont découragées par l’imminence de
ma fin et la fatalité des dégradations ; mais aussi mes bonheurs ont pâli. La mort
n’est plus dans les lointains une ouverture brutale : elle hante mon sommeil ;
éveillée, je sens son ombre entre le monde et moi. Elle a déjà commencé. Voilà ce
que je ne prévoyais pas : ça commence tôt et ça me ronge… Ce qui me navre…
c’est de ne plus rencontrer en moi de désirs neufs : ils se flétrissent avant de naître
dans ce temps raréfié qui est désormais le mien.
Simone de Beauvoir
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Souvent, à la fin de sa vie, le souvenir des tendresses passées fleurit notre vieillesse.
Auguste Vacquerie.
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Un vieil homme qui meurt c’est une bibliothèque qui brûle.
Amadou Hampâté Bâ

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La sagesse des vieillards c’est une grande erreur. Ce n’est pas plus  sages qu’ils
deviennent, c’est plus prudents.
Ernest Hemingway
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Vieillir ensemble ce n’est pas ajouter des années à la vie mais de la vie aux années.
Anonyme
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Le soir de leur mariage Tobie et Sarah se tournent ensemble vers Dieu. « Daigne
avoir pitié d’elle et de moi et nous mener ensemble à la vieillesse ». Ils dirent
« amen » et se couchèrent pour la nuit.
Bible, lecture du livre de Tobie
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Les années font plus de vieux que de sages.
Proverbe français
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Quand vous serez bien vieille, au soir à la chandelle,
Assise auprès du feu, dévidant et filant,
Direz, chantant mes vers, en vous émerveillant,
Ronsard me célébrait du temps que j’étais belle.
Pierre de Ronsard
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Les feuilles flétries n’enlaidissent pas les beaux arbres.
Proverbe du Kurdistan
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Souvent, à la fin de la vie, le souvenir des tendresses passées fleurit notre vieillesse.
Nous sommes tous les deux voisins du ciel, Madame, puisque vous êtes belle et
puisque je suis vieux.
Victor Hugo
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Beaucoup d’hommes et de femmes dépensent une énergie considérable à nier leur
âge remarque Betty Friedman (« La révolte du troisième âge) « . Ils passent ainsi à
côté de grands bonheurs. Pourquoi dit-on qu’une personne est « restée jeune » alors
qu’elle vieillit bien ? La vieillesse n’est ni « un problème » ni une maladie. Acceptée,
revendiquée et célébrée elle peut être, au contraire, l’une des aventures les plus
riches de l’existence. Passé un certain âge l’obsession du succès ne joue plus. On
est libre d’être émerveillé et de jouir du monde alentour (…).
Robert Solé

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Il est déjà tard mais toujours temps
Jean Malrieu
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Chacun va vers son remède. L’essentiel est connu depuis toujours, mémorisé par la
sagesse des nations : il faut continuer à vouloir demander quelque chose à la vie.
Georges Mounin
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Quand on vieillit les colères deviennent des tristesses.
Montherlant
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Savoir lâcher prise, vivre l’instant présent. Quand on est petit on veut être grand,
quand on vieillit on veut être jeune…On est trop souvent dans la souffrance du
décalage, alors qu’il faudrait accompagner son vieillissement d’un regard généreux
sur soi (…) Il ne s’agit pas de tomber dans le renoncement mais de déplacer les
plaisirs. J’ai par exemple un rapport au temps différent. Aujourd’hui j’essaie d’être
moins dans l’urgence, de me trouver des lieux de paix, des espaces personnels où je
laisse mon corps apprendre à vieillir de manière à apprivoiser cette obligation, à ne
plus la vivre comme un funeste destin.
Noëlle Châtelet
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Jeunesse, vieillesse
J’avance dans l’hiver à force de printemps.
Charles-Joseph. de Ligne
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Si jeunesse savait, si vieillesse pouvait.
Henri Estienne
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Beaucoup de gens ne sont jamais jeunes, quelques personnes ne sont jamais
vieilles.
G. B. Shaw
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Les jeunes vont en bande, les adultes par couples, et les vieux tout seuls.
Proverbe suédois
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On n’est pas vieux tant que l’on cherche.
Jean Rostand

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On peut être vieux à tout âge, on peut être vieux à tous les instants, car c’est en soi
qu’on porte l’âge et non dans les cartons poudreux d’une mairie. (…) Le lionceau
qu’on met en cage est vieux du jour où il renonce à briser les barreaux.
Georges Bastide
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La jeunesse croit beaucoup de choses qui sont fausses,
la vieillesse doute de beaucoup de choses qui sont vraies.
Proverbe allemand
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Qu’importe que mes cheveux grisonnent.
Je suis toujours aussi jeune et aussi vieux que le plus
Jeune et le plus vieux du village.
Les uns ont un sourire simple et doux, d’autres ont des
Pleurs qui sourdent à la lumière du jour.
Tous ils ont besoin de moi…
Je suis de l’âge de tous, qu’importe si mes cheveux grisonnent ?
Tagore
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  1. Souffle qui s’éteint…

 

1-Mort des civilisations, fin de l’humanité ?

Nous autres civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles.
Paul Valéry
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Nous avions entendu parler de mondes disparus tout entiers, d’empires coulés à pic
avec tous leurs hommes et tous leurs engins (…) Nous apercevions à travers
l’épaisseur de l’Histoire, les fantômes d’immenses navires qui furent chargés de
richesse et d’esprit. Nous ne pouvions pas les compter. Mais ces naufrages, après
tout, n’étaient pas notre affaire. Ninive, Babylone étaient de beaux noms vagues et la
ruine totale de ces mondes avait aussi peu de signification pour nous que leur
existence même. Mais France, Angleterre, Russie… ce serait aussi de beaux noms
(…) Et nous voyons maintenant que l’abîme de l’Histoire est assez grand pour tout le
monde.
Paul Valéry

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Pourquoi y a-t-il un devoir de mémoire ? C’est certainement une dette. Nous avons
une dette à l’égard des morts et c’est cela qui nous donne une mémoire longue, une
identité durable et puis peut-être aussi que nous avons à nous délivrer de la
culpabilité du passé en mettant à plat, en mettant au clair notre mémoire et donc il y
a toute une thérapeutique. Alors peut-être aussi qu’il faut délivrer le passé de ce qui
est simplement révolu, que l’on ne peut plus changer et retrouver les promesses
inaccomplies du passé et de ce qui dans le passé est aussi un projet.
Paul Ricoeur
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L’humanité se vivait comme infinie car elle était une abstraction. Les dangers qui la
guettent lui révèlent à la fois son existence et sa mortalité.
René Jean Dupuy
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2-Mort : la sienne

Jamais les crépuscules
Ne vaincrons les aurores
Etonnons-nous des soirs
Mais vivons les matins
Méprisons l’immuable
Comme la pierre ou l’or
Sources qui tariront
Que je trempe mes mains
En l’onde heureuse.
Apollinaire
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On se réjouissait à ta naissance et tu pleurais. Vis de manière que tu puisses, au
moment de ta mort, être dans la joie et les autres dans les pleurs.
Proverbe Perse
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L’homme vient au monde les mains closes, il le quitte les mains ouvertes.
Proverbe d’Inde
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Tout est en cours de transformation. Toi-même tu es en état de transformation
continue et, à certains égards, de dissolution. De même pour l’univers entier.
Marc-Aurèle
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La vie, peu à peu, nous déloge de partout.
Jean Rostand

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Lorsqu’au cœur de la vie nous nous croyons elle ose soudain pleurer en nous.
Rainer-Maria Rilke
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Je veux que la mort me trouve plantant mes choux mais nonchalant d’elle et encore
plus de mon jardin imparfait.
Montaigne
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Dès qu’un homme est né il est assez vieux pour mourir.
Heidegger
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Corps, vieux compagnon,
Nous périrons ensemble.
Comment ne pas t’aimer
Forme à qui je ressemble,
Puisque c’est dans tes bras
Que j’étreins l’univers.
Marguerite Yourcenar
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Ma poésie infortunée
Aura-t-elle mes yeux pour voir ?
Garderai-je odeurs et couleurs
Lorsque, détruit, je dormirai ?
Pablo Neruda
——————————
L’homme est un-être-pour-la-mort.
Heidegger
——————————
Je vais être appelé à passer sur l’Autre Rive, à rendre « la barque prêtée » comme
disait mon père.
J’avoue ne pas être pressé, il me faudrait encore quelque deux cents ans pour, peutêtre,
épuiser ma soif de curiosité (…) Je ne suis pas inquiet de franchir le passage,
j’en éprouve même une extrême curiosité, je me cristallise sur la question de savoir
s’il y a quelque chose de l’autre côté du voile. C’est un prodigieux problème que cet
Au-Delà.
Théodore Monod
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Je suis dans ma trente troisième année.  J’ai passé trente-deux fois devant le jour et
l’heure de ma mort comme on passe devant la porte d’une maison qu’on habitera un
jour et qu’on ne pense pas à regarder.
Julien Green
——————————-
(…) Pourquoi la mort nous inquiète-t-elle à ce point ? C’est qu’elle nous paraît liée à
la souffrance et à l’inconnu.
Peut-on vivre paisiblement, malgré cette peur ? Voila tout le problème de la mort. Or,
indéniablement, la réponse est oui, quels que soient les aléas de la sensibilité de
chacun.
La souffrance fait peur ; mais la mort n’est pas synonyme de souffrance : il existe des
souffrances non-suivies de mort et des morts sans souffrance. (…)
L’inconnu fait peur ; mais la mort n’est pas de l’inconnu, elle n’est rien. Il y a plus de
mystère en un seul être vivant que chez tous les défunts. Au soir de sa vie, le
philosophe Jankélévitch, qui avait longuement réfléchi sur la mort, dut conclure qu’il
n’en pouvait rien dire :  comment parler de rien, en effet ?
Nous ne craignons pas tant de mourir que de cesser de vivre ; mais cette peur aussi
repose sur un malentendu. Dans une formule indépassée, Epicure avait résumé la
situation : tant que nous vivons, la mort n’est pas là ; lorsque la mort est là, nous ne
sommes déjà plus.
On le voit mieux avec la mort des êtres chers, laquelle est la plus terrible : nous
craignons qu’ils ne subissent un sinistre destin, alors que c’est nous, les vivants, qui,
amputés d’eux, souffrons de solitude et d’abandon. Cessons donc de craindre la
mort et fortifions notre vie.
Albert Memmi
—————————
Je pense évidemment à la mort. Mais peu, aussi peu que possible. Pour en avoir
moins peur, j’ai appris à vivre avec une idée très simple, très peu philosophique :
brusquement tout s’arrête et c’est le noir absolu. La mémoire est abolie. Ce qui me
soulage et m’attriste, car il s’agira là de la première expérience que je ne pourrai pas
raconter. »
Gabriel Garcia Marquez
————————-
Approche-t-il du but, quitte-t-il ce séjour
Rien ne trouble sa foi : c’est le soir d’un beau jour.
La Fontaine
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De même qu’une journée bien employée procure un heureux sommeil, une vie bien
remplie nous laisse mourir en paix.
Léonard de Vinci
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Qui nous a retournés de la sorte que nous ayons dans tous nos actes l’attitude de
quelqu’un qui s’en va ? Et comme sur la dernière colline qui lui montre encore une
fois la vallée tout entière, il se retourne et tarde…
Tels nous vivons, à chaque pas prenant congé.
 Rilke
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Toute la masse d’arôme de ces fleurs pour rendre sereine la nuit qui tombe sur nos
larmes.
René Char

——————————
Nous sommes de l’étoffe dont les rêves sont faits et notre petite vie est entourée de
sommeil.
William Shakespeare
——————————–
Nous craignons toutes choses comme mortels et nous désirons toutes choses
comme si nous étions immortels.
La Rochefoucauld
———————————
Tant que je vis je suis un homme mortel
Mais quand je meurs, cessant d’être un homme,
je cesse aussi d’être mortel,
je ne suis plus capable de mourir.
Maurice Blanchot
————————–
L’homme passe sur cette terre comme un long sommeil
adouci par les rêves et qu’éveille la mort.
Jacques Phytilis
————————
Mort, la seule de mes aventures que je ne commenterai pas.
Mauriac
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Etre seul c’est s’entraîner à la mort.
Céline
———————————
On n’apprend pas à mourir en tuant les autres.
Chateaubriand
———————————-
Ô Energie de mon Seigneur (…)
Ce n’est pas assez que je meurs en communiant,
Apprenez moi à communier en mourant.
Pierre Teilhard de Chardin
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Vieil homme recru d’épreuves, détaché des entreprises, sentant venir le froid éternel,
mais jamais las de guetter dans l’ombre la lueur de l’espérance.
Charles de Gaulle

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La mort ne nous concerne pas car tant que nous existons la mort n’est pas là et
quand vient la mort nous n’existons plus.
Epicure
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Il faut quitter la vie comme Ulysse quitta Nausicaa, en la bénissant et non amoureux
d’elle.
Nietzsche
—————————–
Je regarde le dernier coucher de soleil
J’attends le dernier oiseau
Je lègue le néant à personne
Jorge Luis Borges
————————–
Pourquoi nous disputer la montagne ou la plaine
Notre tente est légère, un vent va l’enlever.
La table où nous rompons le pain est encore pleine
Que la mort, par nos noms, nous dit de nous lever!
A. de Lamartine
—————————
« Le métier de vivre » comme disait Pavese, n’est pas autre chose que le « travail du
deuil » comme disait Freud et c’est ce que François George résume en une phrase:
« vivre c’est perdre ».
André Comte-Sponville
——————————-
La vie est une succession de séparations par lesquelles on ne cesse de grandir. A
chaque instant on meurt à soi-même, à l’autre, au monde, au temps. (…) Le deuil
comme un apprentissage, vivre malgré tout, car « vivre c’est perdre ».
André Comte-Sponville
——————————
Puis je regarderai
Le haut de la colline
Qui danse qui se devine
Qui finit par sombrer
Et dans l’odeur des fleurs
Qui bientôt  s’éteindra
Je sais que j’aurais peur
Une dernière fois.
Jacques Brel

—————————-
Seigneur donne à chacun sa propre mort
La mort que cette vie comporte
Où il connut l’amour, le sens et la tendresse.
Car nous ne sommes rien que l’enveloppe et la feuille.
La grande mort, que chacun porte en soi,
Elle est le fruit, elle est le centre.
Rainer Maria Rilke
————————-
Enfin hors d’atteinte
Ni servitude, ni dépendance
Que l’océan est calme,
Qu’il est furieux, le vide
Tessho
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Quand je serai mort on ne me fera plus souffrir.
Claudel
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Que nul ne meure qu’il n’ait aimé !
Saint-John Perse
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Un jour, je pousserai la porte et je vous nommerai le monde des oiseaux par leurs
plumages reconnus, les soirs d’été, l’eau sur toit, le soupir…
Debout, réconciliée dans le visage des journées avec la maison noire dans le dos…
Tellement j’ai espéré ce jour, tellement espéré.
Jacques Bertin
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Cinquante quatre ans
Que j’accroche des étoiles dans le ciel
Maintenant je saute au travers
Quel fracas !
Dôgen
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Il est temps que parte l’oiseau. Le refuge bientôt sera vide. Le chant réduit au
silence, le nid abîmé dans la poussière par le balancement des branches.
Avec les feuilles mortes les fleurs fanées je m’envolerai au crépuscule dès l’aube
dans le vide sans bornes par delà les rives du couchant.
Que longtemps cette opulente terre m’offrit l’hospitalité, tantôt du prodigue printemps
je reçus l’invite, capiteuse senteur des bourgeons des manguiers, la fleur d’ashoka
me fit signe en demandant des airs que j’infusai d’amour; quelquefois sous l’orage
battant de Baishakha, le sable brûlant m’étrangla la voix, me figea l’aile – de tout cela
je suis heureux en hommage à la vie.
Lorsque s’interrompt le périple épuisé de cette rive, me retournant le temps d’un
instant d’un humble salut en adoration devant le Seigneur de cette existence, je m’en
irai.
Rabindranath Tagore

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3-Mort : suicide

Le suicide n’est qu’un mal social et non pas un crime moral.
Durkheim
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Si je me suicide ce ne sera pas pour me détruire mais pour me retrouver
complètement.
Antoine Artaud
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L’homme qui attente à ses jours montre moins la vigueur de son âme que la
défaillance de sa nature.
Chateaubriand
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Nul n’éprouve de velléité du suicide qui ne soit une impulsion au meurtre d’autrui
retourné contre soi-même.
Freud
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Celui qui se suicide est le prisonnier qui, voyant que l’on dresse un gibet dans la
cour, croit que c’est à lui qu’on le destine, s’évade la nuit de la cellule, descend dans
la cour et se pend soi-même.
Kafka
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Es-tu réduit à l’indignité ? Sors de la vie avec calme.
Marc Aurèle
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Défaite ou non du suicide cela a peu d’importance si, par son suicide, il a témoigné
de deux choses : de son courage et de sa domination.
H. de Montherlant
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Il te plaît de vivre, vis. Il te déplaît, retourne d’où tu viens.
Sénèque
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Le suicide procède de l’impuissance où l’on se trouve d’abolir exactement un certain
mal.
Paul Valéry
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En certaines situations il n’y a place que pour une alternative dont l’un des termes est
la mort. Il faut faire en sorte que l’homme puisse choisir la vie.
Sartre

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4-Mort des êtres aimés

A l’heure de l’adieu, en partant loin de toi, mes yeux se sont vidés tout d’un coup de
lumière, et je suis resté aveugle à force de pleurer.
Hafiz
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Chaque nouveau mort en descendant dans notre souvenir dérange parfois ceux qui
l’y ont précédé. Ils protestent, et ainsi se déroulent en nous de sourdes querelles
d’ombres.
Jean Rostand
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Jusque-là, je n’avais jamais été intéressée par la mort. Je ne comptais pas avec elle.
Seule la vie importait. La mort ! Un rendez-vous à la fois inéluctable et éternellement
manqué, puisque sa présence signifie notre absence. Elle s’installe à l’instant où
nous cessons d’être. C’est elle ou nous. Nous pouvons en toute conscience aller audevant
d’elle, mais pouvons-nous la connaître, ne fût-ce que le temps d’un éclair ?
J’allais être à tout jamais séparée de qui j’aimais le mieux au monde. Le « jamais
plus » était à notre porte. Je savais que nul lien sauf mon amour, ne nous relierait. Si
certaines cellules plus subtiles, que l’on appelle âme, continuent à exister, je me
disais qu’elles ne pouvaient être douées de mémoire et que notre séparation serait
éternelle…
Je découvrais le malheur, il me fallait remonter jusqu’à mes souvenirs d’enfance,
pour retrouver, insurmontablement, ce noir de nuit et de suie, ce sentiment
d’enlisement, d’étouffement.
Je t’ai trop aimé pour accepter que ton corps disparaisse et proclamer que ton âme
suffit et qu’elle vit. Et puis comment faire pour proclamer: ceci est ton âme, ceci est
ton corps. Ton sourire et ton regard, ta démarche et ta voix étaient-elles matière ou
esprit ? L’un et l’autre, mais inséparables… Tu fus mon plus beau lien avec la vie. Tu
es devenu ma connaissance de la mort. Quand elle viendra, je n’aurai pas
l’impression de te rejoindre, mais celle de suivre une route familière déjà connue de
toi.
Anne Philippe
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La séparation des corps est une détresse plus forte que toutes les idées, que tous les
savoirs. Il suffit d’être en face du cercueil qui enferme un être aimé pour que continue
ou commence à se dire tout ce qui n’avait pu être dit la veille. Qu’un vivant et un
mort seuls peuvent se dire à la dernière minute toute une vérité de leurs vies
croisées et indissolubles. Il nous reste l’essentiel. Tu peux partir, je peux
rester, qu’importe la durée de moi « ici » de toi »là », nous n’aurons jamais été aussi
« embrassés ».
Marc Oraison
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Un soir fait de rose et de bleu mystique
Nous échangerons un éclair unique
Comme un long sanglot, tout chargé d’adieux.
Baudelaire

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Nous aurons perdu jusqu’à la mémoire de notre rencontre.
Pourtant nous nous rejoindrons pour nous séparer et nous rejoindre encore, là où se
rejoignent les hommes trépassés: sur les lèvres des vivants.
Samuel Butler
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(…)Qui maintenant meurt quelque part dans le monde
Sans raison meurt dans le monde
Me regarde
 Rilke
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L’acceptation est très difficile à décrire. Elle ressemble au tout premier âge de la vie
où vous avez besoin qu’une personne aimante prenne soin de vous. Il faut avoir à
porter quelqu’un qui n’a pas besoin de parler… C’est le temps où le silence va bien
au delà des mots.
Kubler-Ross
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Accompagner ce n’est pas « prendre la place de l’autre » ; c’est favoriser
l’établissement de cet espace (de temps, de respect, d’écoute ou de silence) où
peuvent être entendus aussi bien la révolte que la résignation, les ruptures
irréparables que les mots de pardon. C’est donner la possibilité que le Nom du sujet
mourant ne soit gommé par la banalité ou par l’indifférence, mais qu’il puisse
s’inscrire au terme du parcours de la vie, comme la signature du peintre vient sceller
une oeuvre accomplie.
Pierre Bellais et Christian Biot
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Chacun de ceux que nous avons aimés emporte avec lui un peu de notre secret.
Jean Rostand
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Aussi faut-il aimer en pure perte, toujours, et cette très pure perte de l’amour c’est le
deuil lui-même et l’unique victoire. Vouloir garder c’est déjà perdre, la mort ne nous
prendra que ce que nous avons voulu posséder.
André Comte-Sponville
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Derniers instants, murmure ému ou cri dicté par le désarroi…
Michel Leiris
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Quelque expérience que nous ayons acquise en ce domaine il n’est guère possible
de prévoir ce que va nous devenir un être une fois que nous l’avons perdu.
Jean Rostand

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Les morts les pauvres morts ont de grandes douleurs
et quand octobre souffle, émondeur des vieux arbres,
son vent mélancolique à l’entour de leur marbre
Certes ils doivent trouver les vivants bien ingrats
A dormir comme ils font chaudement dans leurs draps.
Charles Baudelaire
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Si j’ai voulu faire parler ces enfants malades,
si j’ai rapporté leurs mots, leurs paroles, leurs silences parfois, c’est pour dénoncer le
silence, la méconnaissance, le leurre dont l’adulte fait rempart entre l’enfant et la
mort, entre la mort et lui-même, en vérité. Ces paroles les enfants les pensent. Mais
elles ne peuvent être entendues et recueillies que par ceux, enfants ou adultes, qui
acceptent d’entrer dans ces pensées. Si l’enfant ne rencontre personne capable de
le rejoindre, s’il ne rencontre que silence et mensonge, lui aussi se tait.
Ginette Raimbault
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(…)Tous ceux enfin dont la vie un jour ou l’autre ravie
Emportent une part de nous
Semblent dire sous la pierre : vous qui voyez la lumière
De nous vous souvenez-vous?
Brassens
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Telle est la vie des hommes. Quelques joies, très vite effacées par d’inoubliables
chagrins. Il n’est pas nécessaire de le dire aux enfants.
Marcel Pagnol
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Tout être cher avec lequel nous avons lié une grande intimité nous imprègne, nous
transforme. Il arrive que le dialogue qui s’instaure est un vrai dialogue de soi avec
l’autre, l’être aimé continue de poursuivre en nous sa vie intellectuelle, affective, et
sensible et pour ainsi dire de s’y développer encore pour son propre compte.
Vercors
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C’est la saison où tout tombe
Aux coups redoublés des vents
Un vent qui nous vient de la tombe
Moissonne aussi les vivants…
Brassens
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Sa mort nous sépare. Ma mort ne nous réunira pas. C’est ainsi, il est déjà beau que
nos vies aient pu si longtemps s’accorder.
Simone de Beauvoir

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Le vrai tombeau des morts est le cœur des vivants.
Edouard Herriot
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Si nous n’avons pas su toujours écouter leur bouche de chair ils nous parlent
aujourd’hui pourvu que nous fassions en nous le silence. Ils nous pressent de
considérer les vivants avec indulgence et compréhension, de voir les gens avec leurs
beaux et bons côtés. Faut-il qu’ils nous soient aussi retirés pour que nous prenions
conscience de ce qu’ils représentent pour nous?
Article il y a bien longtemps dans « Elle »
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Chaque jour je pense à « mes » morts. Penser aux morts c’est assurer, pour son
temps de vie, la survie des gens qu’on a aimés en attendant que d’autres le fassent.
François Mitterrand
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Certaines morts, mieux que d’autres,
nous enseignent la mort.
Jean Rostand
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Nos morts continuent à vieillir avec nous.
Pablo Picasso
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Que peut-on dire, expliquer, comprendre, lorsque la mort vous arrache l’être aimé ?
La vie quitte aussi ceux qui restent. Partout il me semble n’être qu’à demi. Le chagrin
est insurmontable. La révolte me fige. Comme vous j’ai pensé au suicide. Certains
me disent aujourd’hui que l’espoir est une herbe qui pousse entre les tombes. Mais
comment continuer la chaîne des gestes quotidiens ? Comment étouffer ces
questions : pourquoi, à quoi bon, que dois-je faire ? Comme dit Rilke : jouons la vie.
Catherine Jajolet
——————————
Adieu, je m’ennuie déjà.
Derniers mots à l’heure de la mort de deux personnes qui s’aiment
——————————-

5-Mort et humour
Il faut rire avant d’être heureux de peur de mourir sans avoir ri.
Jean de la Bruyère
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On ne meurt qu’une fois, et c’est pour si longtemps!
Molière
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Ces mains qui ferment mes yeux et qui ouvriront mes armoires.
Sacha Guitry
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Mes chers amis, je m’en vais ou je m’en va car l’un et l’autre se dit ou se disent.
Nicolas Beauzée , grammairien
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On demanda à M. de Fontenelle mourant : « Comment cela va-t-il ? ». « Cela ne va
pas, dit-il, cela s’en va. ».
Chamfort
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Les morts n’ont pas de voix, heureusement. Si les morts pouvaient se plaindre…
quelle clameur, on ne s’entendrait plus vivre !
Georges Duhamel
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La vie est une maladie héréditaire, sexuellement transmissible et mortelle.
Woody Allen
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Ne prenez pas la vie trop au sérieux, de toute façon vous n’en sortirez pas vivant.
Bernard le Bovier de Fontenelle
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Les frères se pressaient autour du mourant et pleuraient.
Mais il ouvrit les yeux et se mit à rire trois fois
« Dis nous, frère, pourquoi ris-tu alors que nous pleurons ? »
Il leur répondit : « La première fois j’ai ri parce que vous craignez la mort. La
deuxième fois j’ai ri parce que vous vous n’êtes pas préparés à la mort. Et la
troisième fois parce que je quitte mes peines pour le repos. »» A peine eut-il
prononcé ces paroles qu’il ferma les yeux et mourut.
Sagesse Zen

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Lorsqu’il faudra aller vers vous, ô mon Dieu, faites
Que ce soit par un jour où la campagne en fête
Poudroiera. Je désire, ainsi que je fis ici-bas,
Choisir un chemin pour aller, comme il me plaira,
Au Paradis où sont en plein jour les étoiles.
Je prendrai mon bâton et sur la grande route
J’irai et je dirai aux ânes, mes amis :
Je suis Francis Jammes et je vais au Paradis
Car il n’y a pas d’enfer au pays du Bon Dieu. (…)
Mon Dieu, faites qu’avec ces ânes je vous vienne.
Faites que dans la paix des anges nous conduisent,
Vers des ruisseaux touffus où tremblent des cerises
Lisses comme la chair qui rit des jeunes filles,
Et faites que, penché dans ce séjour des âmes,
Sur vos divines eaux, je sois pareil aux ânes
Qui mireront leur humble et douce pauvreté
A la limpidité de l’amour éternel.
Francis Jammes
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Quelle chance d’être venu sur la terre pour se poser cette simple question :
« Pourquoi y-a-t-il quelque chose plutôt que rien ? » C’aurait été dommage de
manquer cela.
Georges Mounin
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Il avait fait écrire sur sa tombe : « Je vous avais bien dit que je n’allais pas bien ! »
Muriel Robin
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Tout dans la vie est une affaire de choix, ça commence par la tétine ou le téton,
ça se termine par le chêne ou le sapin
Pierre Desproges
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Il faut mourir aimable
si on le peut.
Joubert
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Ce n’est pas que j’aie vraiment peur de mourir, mais je préfère ne pas être là quand
ça arrivera.
Woody Allen
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L’éternité c’est long, surtout vers la
fin.
Woody Allen
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A l’éternelle et triple question toujours demeurée sans réponse : qui sommes-nous ?
D’où venons-nous ? Où allons-nous ? Je réponds : en ce qui me concerne
personnellement je suis de chez moi, je viens de chez moi et j’y retourne.
Pierre Dac

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6-Mort : sens… quel sens ?

Ce fut le mérite d’Edgar Morin d’avoir su tracer les grands moments historiques de
l’évolution de la mort qui s’articule en trois temps :
– Dans les sociétés archaïques les hommes répugnaient à l’idée d’une destruction
définitive, la mort n’est qu’une renaissance. D’où l’idée que les disparus vivent
ailleurs de leur vie propre, des vivants invisibles, il ne s’agit pas d’esprits, il s’agit de
doubles, de spectres ayant formes de fantômes qui accompagnent le vivant dans son
existence, ses rêves, se prolongent dans son ombre, son souffle, pouvant être aussi
une partie de son corps..
C’est l’amortalité (double) égyptienne, romaine, et aussi des hébreux et des Perses.
– Dans les sociétés métaphysiques on assiste à une séparation radicale des vivants
et des défunts. A l’intérieur du monde des morts il y a des grands morts dont certains
accèdent au titre de dieux. On en arrive à concevoir l’existence de morts jamais nés
et de vivants jamais morts. Ainsi s’épanouit du double au dieu, en passant par le
mort-ancêtre-dieu, la divinité potentielle du mort. La notion d’esprit prend peu à peu
son sens, comme celle d’âme. L’immortalité véritable (esprit) remplace l’amortalité
(double). Les religions du salut prennent dès lors naissance. L’idéal platonicien, la
quête du salut des chrétiens, la recherche ascétique du nirvâna ou de l’Un-Tout dans
les systèmes de pensée orientaux illustrent cette tendance.
– Dans les sociétés modernes l’homme ne se laisse plus envahir par les doubles et
les esprits. Au nom de la science (Marx) ou plus simplement pour déborder sa propre
angoisse (Nietzsche) il proclame la mort de Dieu. Les progrès des techniques, le
développement de l’esprit critique, le déploiement de l’individualisme et de la
concurrence (rentabilité, profit) laissent l’individu seul. Le salut, s’il existe, ne peut
être qu’en lui, comme la mort reste sa mort qu’il doit affronter seul sans l’aide de
Dieu. A partir de la seconde moitié du XIXe une crise de la mort commence. Il existe
une tentative de « dépassement » de cette crise qui s’exprime de quatre façons :
Ou bien la mort sera ignorée, rejetée parce que hors des atteintes de l’énergie
pratique de l’homme (la praxis révolutionnaire n’a que faire d’elle. – Marx)
Ou bien on la reconnaîtra comme le non-sens, la négation de mes possibilités, leur
néantisation(J. P. Sartre)
Ou bien c’est dans l’acte d’assumer notre « être-pour-la-mort » que nous trouverons
l’authenticité : « L’Etre authentique pour la mort est le fondement caché de
l’historicité de l’homme ». (Heidegger)
Ou bien la peur de la mort c’est au fond celle de notre propre irréversibilité dans le
temps (Freud).
Louis-Vincent Thomas
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La mort on peut en parler avant qu’elle ne se produise mais on ne sait rien sur elle.
Après on saurait peut être quelque chose mais on ne peut plus parler. Il reste
l’instant du « mourir ». Comment parler de la mort dans l’instant de la mort ? Il m’a
fallu tout un livre pour l’expliquer. La mort n’est pas un grand voyage, elle n’est pas
semblable au sommeil. Elle n’est pas une maladie. C’est la maladie des maladies. La
mort c’est la maladie des bien portants et des malades.
Vladimir Jankélévitch

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Ce qui donne un sens à la vie donne un sens à la mort.
Antoine de Saint-Exupéry
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La mort est ce qui transforme la vie en destin.
André Malraux
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Vivre c’est naître sans cesse. La mort n’est qu’une ultime naissance, le linceul notre
dernier lange.
Marcel Jouhandeau
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L’aveu de notre ignorance, même concernant la vie future, me semble plus louable
que certaines théologies pompeuses bâties par les théologiens. Après la mort j’ai le
droit d’espérer en une vie future, mais non d’affirmer son existence. Je me rappelle
un mot de Forrow, un ami d’Emmerson. Durant son agonie de bonnes gens
espéraient une révélation du mourant. Forrow, plein d’esprit répondit simplement :
One world in the time, « un monde à la fois ». Voilà qui est honnête et courageux.
Théodore Monod
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Quand on est mort c’est pour toute la vie.
Azouz Begag
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Devant cet entassement de tombes on dirait que les gens n’ont d’autre souci que de
mourir.
Emile Cioran
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Il nous faut vivre d’amour, d’amitié, de défaites
Donner à perte d’âme, éclater de passion
Pour qu’on puisse écrire à la fin de la fête
Quelque chose a changé pendant que nous passions.
Serge Reggiani
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Toute notre culture n’est qu’un immense effort pour dissocier la vie de la mort.
Capitalisme et communisme sont une même tentative d’abolition de la mort par
l’accumulation, selon le même schéma fantastique d’une éternité d’accumulation et
de forces productives.
Jean Baudrillard
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Le fait d’avoir été est inaliénable. Le mort ne peut revenir à la vie mais celui qui a
vécu ne retombera plus jamais dans le néant prénatal: l’irréversibilité qui empêche sa
résurrection, empêche sa nihilisation. Du moment que quelqu’un est né, a vécu, il en
restera toujours quelque chose même si on ne peut dire quoi. (…) Jusqu’aux siècles
des siècles il faudra tenir compte de ce mystérieux « avoir-été ». (…) On ne dirait pas
« il n’est plus » s’il n’avait jamais été. Métaphysique est la différence entre « il n’est
plus » et « il n’est pas » ; le « plus rien » est distinct à jamais du néant pur et simple ;
il est sauvé de l’inexistence éternelle, sauvé pour l’éternité.
V. Jankélévitch
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Mourir c’est pour mon corps se dissoudre. Les atomes qui le constituent poursuivront
leur aventure commencée il y a quinze milliards d’années ; cette aventure a
comporté un épisode pour eux sans importance, participer à la constitution de mon
organisme, elle continuera, aveugle, sans projet, sans signification, jusqu’à la
disparition de toute matière dans un espace étiré à l’infini ou ramené à une
dimension nulle.
Mais, pour ce qui en moi est autre « chose » que ces atomes, mourir c’est échapper
au temps. Souvenons-nous de Saint-Augustin : « Ce qui nous autorise à affirmer que
le temps est, c’est qu’il tend à n’être plus ». Plutôt que de demander à la mort où est
sa victoire, il nous faut l’accueillir comme l’alliée qui nous permet de remporter la
victoire sur le temps. Evènement décisif qui peut être salué comme l’équivalent d’un
big-bang personnel.
« L’esprit est un palais formé de miroirs fécondés par une lampe solitaire qu’ils
enfantent à l’infini ». Cette définition, dont je recherche sans succès l’auteur, décrit
fort bien la conscience : l’aller et retour sans fin d’un je ne sais quoi rebondissant sur
des parois à l’étrange pouvoir (…)
Le labyrinthe disparaît, dans lequel je me suis perdu, allant de reflets en reflets, à la
recherche de la lampe solitaire toujours échappée ; les miroirs se brisent et
fournissent des éléments qui en reconstituent d’autres. Qu’importe, si la lampe brille,
et participe à la lumière.
Albert Jacquard
————————————–
La mort m’impose la conscience de la finitude de mon existence. Elle confère à
chacun de mes actes une incomparable dignité et à chaque instant qui passe son
unicité. Dans la durée floue, elle me singularise. Sans elle je ne serais, au sens
précis du terme, personne.
Jean Ziegler
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L’homme libre ne pense à rien moins qu’à la mort, et sa sagesse est une méditation
non de la mort mais de la vie.
Spinoza
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« De la mort apprivoisée » (Philippe Ariès) vécue parce qu’elle reflète les solidarités
sur la terre comme au ciel, à la solitude du mourant dans nos sociétés modernes, un
parcours de longue durée pose à l’historien une vraie question : y a-t-il jamais eu un
âge d’or de la mort?
Michel Vovelle
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Né aux Etats-Unis où il a prospéré, diffusé aujourd’hui dans tout l’Occident, un
commerce de la mort s’est érigé en système. La tombe est devenue l’objet de
spéculation immobilière, les apprêts du cadavre et la funéraille une mine de services
et de produits de plus en plus sophistiqués. La vie humaine a son prix, le corps
humain, même mort, peut devenir à son tour une marchandise.
Michel Vovelle
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Par delà la diversité des gestes et des rituels hors de l’Occident Chrétien, se dessine
un trait universel : la croyance aux devoirs dus aux morts. Et sous le discours plaqué
de la religion (comme au Mexique, par exemple), la présence de ce peuple de morts
conviviaux ou hostiles, qu’il convient d’apaiser ou d’exclure, est constante.
Michel Vovelle
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La mort ne nous concerne pas car tant que nous sommes la mort n’est pas. Et quand
la mort est, c’est nous qui ne sommes plus.
Epicure
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Si nous savions pourquoi nous allons du berceau à la tombe nous chanterions sur la
route comme des enfants qui jaillissent de l’école.
Maeterlink
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Elle est retrouvée !
-Quoi ? L’Eternité
C’est la mer mêlée
Au soleil
Arthur Rimbaud
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En quart monde la mort et l’enterrement sont la seule occasion d’avoir une vie
publique. C’est une façon pour les pauvres de montrer qu’ils croient encore en euxmêmes.
Un volontaire d’Aide à Toute Détresse
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Si l’on prêche que Jésus est ressuscité des morts comment certains d’entre vous
prétendent-ils qu’il n’y a pas résurrection des morts ? Sans résurrection des morts
pas de Résurrection du Christ.
Saint Paul
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Nier sa mort dans le fil quotidien de notre vie c’est vivre en somnambule de
l’existence. Projeter sa mort sur l’autre – ennemi – c’est en venir à la violence.
L’homme s’accommode généralement de cette double duperie: celle du déni de la
mort ou de sa projection sur l’autre. La troisième attitude: l’assumer, c’est sur ce
chemin que s’édifie la non-violence. Y a-t-il démarche plus authentiquement humaine
que d’assumer cette mort dans ma vie au point que je puisse la brandir devant tous
quand je ne supporte plus que la vie soit bafouée?
Jacques Semelin
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Accepter de quitter la vie avec la paix de qui se met complètement au monde avant
de disparaître.
Michel de M’uzan

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Toi qui est paralysé prend ton lit, ton grabat sur tes épaules, lève-toi et marche.
Aucun homme n’est fait pour rester à l’endroit où il se trouve, aucun homme, aucune
femme, aucun né de l’homme et de la femme n’est condamné à ne pas dépasser
largement ses frontières. Chacun est destiné à parcourir avec tous l’immense
étendue de l’histoire des siècles, à vivre la longue marche de la libération unanime.
Et, à l’heure qualifiée de dernière, où la mort t’a couché sans espoir d’un retour aux
vies habituelles, tu n’en finiras pas de te lever encore pour fouler les terres
innombrables de ceux que tu fis proches, les sols et l’horizon de tes mises en
commun.
Jean Cardonnel
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Alors Almitra parla, disant, nous voudrions maintenant vous questionner sur la Mort.
Et il dit :
Vous voudriez connaître le secret de la mort.
Mais comment le trouverez-vous sinon en le cherchant dans le coeur de la vie ?
La chouette dont les yeux faits pour la nuit sont aveugles au jour ne peut dévoiler le
mystère de la lumière.
Si vous voulez vraiment contempler l’esprit de la mort, ouvrez amplement votre coeur
au corps de la vie,
Car la vie et la mort sont un, de même que le fleuve et l’océan sont un.
Dans la profondeur de vos espoirs et de vos désirs repose votre silencieuse
connaissance de l’au-delà,
Et tels des grains rêvant sous la neige, votre coeur rêve au printemps.
Fiez-vous aux rêves, car en eux est cachée la porte de l’éternité.
Votre peur de la mort n’est que le frisson du berger lorsqu’il se tient devant le roi dont
la main va se poser sur lui pour l’honorer.
Le berger ne se réjouit-il pas sous son tremblement, de ce qu’il portera l’insigne du
roi ?
Pourtant n’est-il pas plus conscient de son tremblement ?
Car qu’est-ce que mourir sinon se tenir dans le vent et se fondre dans le soleil ?
Et qu’est-ce que cesser de respirer, sinon libérer le souffle de ses marées inquiètes,
pour qu’il puisse s’élever et se dilater et rechercher Dieu sans entraves ?
C’est seulement lorsque vous boirez à la rivière du silence que vous chanterez
vraiment.
Et quand vous aurez atteint le sommet de la montagne, vous commencerez enfin à
monter.
Et lorsque la terre réclamera vos membres, alors vous danserez vraiment.
Khalil Gibran
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« La mort transforme la vie en destin » disait Malraux. Ce jugement n’est pas
recevable par un non-violent. Dans la non-violence la mort ne peut plus être vécue
comme une impasse à la vie, autant injuste qu’absurde. Le fait d’assumer sa mort
renouvelle et élargit l’espace de la liberté humaine, celle de la non-violence.
Jacques Semelin

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Ma vie a sa dimension d’éternité non pas après cette vie mais au-delà d’elle, mais ici
et maintenant lorsque je suis responsable d’un projet qui me dépasse. Ce contre quoi
nous avons à lutter c’est contre la mort prématurée d’êtres jeunes, plein de
possibles. Mais la mort d’un vieillard n’est pas une malédiction. A mesure que je
vieillis je participe de moins en moins à la création et vient l’impossibilité réelle d’un
projet. Ma mort est, dans ce mouvement, un passage à la limite. Une seule chose est
sûre: on ne peut y faire face à partir d’une conception individualiste de la vie. Car
l’individualisme nous fournit l’image même de la mort: la séparation.
Jean Cardonnel
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Mort et amour de la vie. Un mandarin chinois proposa une fois au gouverneur d’une
province cette mesure qui ne tarda pas à être adoptée. Au moment où la victime
devait poser la tête sur le billot pour que le bourreau puisse la trancher un cavalier
harnaché arrivait au grand galop et criait : Arrêtez ! Le gouverneur a gracié le
condamné à mort ! Et à cet instant d’euphorie suprême, le bourreau tranchait la tête
de l’heureux mortel.
Kostas Axelos
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Glèbe dont nous sommes faits, argile modelé à la forme de nos corps, geste de la
terre jetée sur les disparus, geste aussi de la vie que des mains ridées refermées sur
ce morceau de sol.
H. Anglard
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L’affreux en mourant c’est de disparaître sans avoir compris. Le crime de la mort
n’est pas qu’elle nous tue mais qu’en tranchant notre angoisse elle lui confère
l’éternité.
Jean Rostand
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Père, père, écoute… La lumière est pour les vivants le plus doux des biens et pour
les morts il n’y a plus rien.
Euripide
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La vie dépense sans compter pour permettre aux espèces de survivre, d’évoluer…
mais vers quel rendez-vous ? Nous ne le savons pas. En tant qu’individus nous
sommes uniques, irremplaçables : en cela, la promesse des grandes religions est
tenue. Mais nous assistons au naufrage de l’individu pour la plus grande gloire de
l’espèce. La mort est donc un échec, d’une certaine manière, mais elle donne de
nouvelles chances à la vie, par le « recyclage » de chaque atome, de chaque
molécule qui sert des milliers de fois. L’échec est dépassé finalement par le grand
dessein mystérieux de la vie.
Maurice Marois
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Soyez comme l’oiseau
Posé un instant
Sur des rameaux
Trop frêles
Qui sent plier
La branche
Et qui chante
Pourtant
Sachant qu’il a
Des ailes.
Victor Hugo
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III-Autre souffle ailleurs ?!…


Je sens en l’âme une éternelle mèche
Toujours flambante
Au milieu de mon cœur.
Pierre de Ronsard
———————————
Je suis parvenue sur le bord de l’éternité, d’où jamais rien ne se dissipe – nul
bonheur, nul souvenir de visage entrevu à travers des larmes.
Oh ! Trempe dans cet océan ma vie creuse, plonge-la dans le sein de cette
plénitude, et que cette caresse perdue, je la ressente dans la totalité de l’univers.
Rabindranah Tagore
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Ressusciter c’est échanger sa condition de mort contre une autre vie de
vivant, sans ombre, ailleurs. Et cela est plus juste, plus quotidien, plus vrai,  du
miracle de l’amour que des murs de Jéricho de la science et du savoir .Jésus-
Christ , lui-même, n’en a tenu aucun compte qui n’a jamais voulu être prouvé ni
rien garantir que la tendresse qui renvoie toutes les violences au delà des lieux
de supplice des hommes.
L’amour ne parle peut-être pas plus que la mort, ce sont les deux seules
immenses extrémités humaines qui se touchent et par quoi nous existons
grands ouverts à l’éternité si elle veut bien de nous. Il n’y a peut-être pas de
mystère de la mort, il n’existe que des amours .Et la certitude charnelle que
nous n’avons jamais cru en vain à l’amour quand bien même la mort nous
l’arrache. Elle ne nous prend rien puisque nous aimons. Nous sommes déjà
ailleurs; Et Christs.
Marc Oraison
————————————-
Savoir que nous ne sommes pas emprisonnés,
Savoir qu’il y a une issue,
Et de l’air,
Et de la lumière et de l’amour
Quelque part au delà de toute mort,
Le savoir sans illusion, sans fiction,
Voilà ce dont sous peine de devenir asphyxiés
Par l’étoffe même de notre être
Nous avons absolument besoin
Teilhard de Chardin

————————————-
Ma poésie infortunée
Aura-t-elle mes yeux pour voir ?
Garderai-je odeurs et couleurs
Lorsque, détruit, je dormirai ?
Pablo Neruda
—————————–
Ce que j’ai gardé je ne l’ai plus
Ce que j’ai dépensé je l’ai eu
Ce que j’ai donné je l’ai
Lu sur une tombe
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Quelqu’un meurt, et c’est comme des pas qui s’arrêtent…
Mais si c’était un départ pour un nouveau voyage?
Quelqu’un meurt, et c’est comme un arbre qui tombe…
Mais si c’était une graine germant dans une terre nouvelle?
Quelqu’un meurt, et c’est comme une porte qui claque…
Mais si c’était un passage s’ouvrant sur d’autres paysages?
Quelqu’un meurt et c’est comme un silence qui hurle…
Mais s’il nous aidait à entendre la fragile musique de la vie?
Pierre Bartoli
————————————–
La pensée humaine n’a jamais cessé au cours des temps d’imaginer ou de concevoir
des systèmes de croyances qui aident à supporter la mort.

– La mort-renaissance : le mort humain, immédiatement ou plus tard, renaît en un
vivant nouveau, enfant ou animal (conceptions premières de la mort).
– La négation de la mort : la mort n’est rien. Tout cesse avec elle et la crainte de l’audelà
n’est donc qu’une vaine crainte (Epicure).

– La dédramatisation de la mort : Dieu existe, donc il ne peut rien arriver de mal à
l’homme juste après sa mort. (Socrate). L’existence ici-bas est une propédeutique
pour l’au-delà : un nouveau monde nous attend (Sénèque). Cette dédramatisation
est très présente dans l’Antiquité.

– L’amortalité : est une période indéfinie mais pas nécessairement éternelle. Les
morts mangent, s’aiment (cf. Afrique noire animiste). Le double s’intériorise, et
devient une âme immortelle (à Thèbes).

– L’immortalité : En Egypte le droit à l’immortalité est reconnu avec foi : d’abord
réservé aux pharaons, il est reconnu à tous les égyptiens en 2000 avant notre ère.
L’âme, le double ne sont pas détruits par la mort.

La philosophie grecque, à son tour, fait de l’immortalité de l’âme une idée force (cf. le
Phédos de Platon).
Les bouddhistes pensent que le corps de l’homme contient une âme immortelle.
Les religions du salut (islam, christianisme surtout) développent cette croyance en
l’immortalité de l’âme en y ajoutant la notion de résurrection.

– La résurrection des morts : Dans le christianisme elle réhabilite le corps et l’associe
au destin de l’âme. « Vos corps vivront » prophétisait Isaïe. Le pêché a introduit la
mort mais la rédemption (mort féconde du Christ) permet de la transcender : elle
devient la transition nécessaire pour atteindre le salut qui est la vision de Dieu. Pour
l’Islam aussi : la résurrection des corps est une idée maîtresse : chacun sera jugé.
Mais il n’y a pas de rédemption et la vision de Dieu ne constitue pas l’essence de la
béatitude éternelle.
Le monde moderne retrouve à sa manière le thème de la résurrection avec la
pratique encore très limitée de la cryogénisation : des cadavres attendent dans un
bain d’azote liquide le moment où on est censé les ramener à la vie.

– La fusion dans l’Un-Tout : Dans le brahmanisme il y a identité du moi profond et du
principe fondamental de l’univers. La transmigration des âmes est en référence
directe avec les actes des existences antérieures. Le salut réside dans la libération
de celles-ci puisque le perpétuel recommencement d’existence est un perpétuel
recommencement de souffrance. Ainsi il faut attendre l’absolu véritable. Pour arriver
à l’immortalité il faut détruire en soi tout désir. Dans le Bouddhisme : alors que le
brahmanisme vise la saisie de l’Etre, le bouddhisme s’attache plutôt à l’appréhension
du devenir. La sagesse ne peut être que « l’anéantissement du désir, de la haine et
de l’égarement »(nirvâna). Puisque la vie entraîne la mort et que la renaissance
réintroduit le malheur de vivre pour mourir, le nirvâna est une protestation contre
l’inévitabilité de la mort individuelle. Le torrent de l’être est arrêté, il n’y a plus de
renaissance. Brahmanisme et bouddhisme refusent donc l’existence individuelle au
profit de la grande vie cosmique.
Louis-Vincent Thomas
———————————
Matin de Pâques, entraîne-nous dans le printemps du monde. Explose en bourgeons
d’espérance aux mille fleurs des étoiles. Roule la lourde pierre qui entrave nos vies
et jette nous dans ton éternité.
Albéric de Palmaert
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Il n’y a pas de morts Seigneur
Il n’y a que des vivants sur notre terre et au-delà.
La mort existe Seigneur
Mais elle n’est qu’un moment
Un instant, une seconde, un pas,
Le pas du provisoire au définitif
Le pas du temporel à l’éternel.
Ainsi meurt l’enfant quand naît l’adolescent
La chenille quand s’envole le papillon
Le grain quand s’annonce l’épi.
Mais où sont-ils Seigneur ceux que vivants j’ai chéris?
Seigneur ils sont près de moi mes morts,
Je ne les touche plus de mes yeux
Mais en toi Seigneur je les entends qui m’appellent
Je les rencontre quand je te rencontre
Je les aime lorsque je t’aime.
Michel Quoist
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Esprit, viens des quatre vents, souffle sur ces morts et qu’ils revivent.
Ezéchiel
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Comment je pense à la mort? Je vais essayer une comparaison. Je me trouve dans
la même situation qu’un enfant dans le sein de sa mère. Il doit éprouver une grande
angoisse au moment où il sent qu’il se passe quelque chose dont il ne peut avoir
aucune idée. Il va sortir de cette chaleur et de cette nuit, il va jaillir dans l’inconnu, il
va savoir ce que cela veut dire vivre. Mourir c’est naître.
Jacques de Bollardière
——————————-
Le dernier mot

On dit quelquefois que le dernier mot est le bon, en tous les cas il peut être
symbolique. Le dernier mot d’Hamlet était « silence », le dernier mot d’Harpagon était
« cassette », le dernier mot de Cyrano était « panache ». Le premier mot de ce livre
était « marché mondial », le dernier mot pourrait être « humanité » ou « amour »
mais le dernier mot sera le vôtre :

………………………….

Plan de la 3ème partie

III-Troisième partie  Un souffle…


  1. Souffle qui passe…

1-Le temps
Le temps : sa présence…
Temps qui passe
Temps : quel sens ?
Temps : agir aujourd’hui
Temps : l’avenir…
Il y a un temps pour…
Urgence et long terme
Temps libéré
Paresse – Oisiveté
Sommeil

2-Jeunesse, vieillesse
Jeunesse
Temps : vieillesse
Jeunesse, vieillesse

  1. Souffle qui s’éteint…

1-Mort des civilisations, fin de l’humanité ?

2-Mort : la sienne

3-Mort : suicide…

4-Mort des êtres aimés

5-Mort et humour

6-Mort : sens… quel sens ?

III Autre souffle…Ailleurs ?!…

Le dernier mot