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au trésor des souffles

Quelles volontés, quels moyens, quelles marges de manoeuvres pour un monde viable?

quelles volontés, quels moyens, quelles marges de manoeuvres pour un monde viable?

Quelles volontés

 

Quelles volontés,  quels moyens, quelles  marges de manœuvres pour un monde viable ?

 -Fondé sur les liens entre  productivisme , capitalisme et  anthropocène ,  le système mondial n’est-il pas condamnable du seul fait qu’il y ait  un enfant sur deux dans le monde en situation de détresse et/ou de danger ( maladies, misère, pauvreté, guerres…) et du seul fait que les marchés financiers ont pris, depuis 1971 (fin de la convertibilité du dollar en or), une large partie de la place des conducteurs  qu’étaient  les Etats et les entreprises, autrement dit une large partie de la place du politique et de l’économique ?

 –Le système mondial n’est-il pas condamné du seul fait  que plus de 5,4 milliards de dollars partent  chaque jour en 2020 vers les dépenses militaires mondiales, et du seul fait que des activités humaines entraînent un réchauffement climatique  qui menace l’ensemble du vivant , 3°C à 6°C -ou plus- d’élévation de la température moyenne du globe vers 2100 et à cette même date un  mètre  -ou plus-  d’élévation du niveau des mers ?

Le gigantesque et hypothétique  passage de ce  monde autodestructeur à un monde viable dépend   très probablement au moins de  trois  séries de conditions : des volontés(1), des moyens(2), des marges de manœuvres(3).  Ajoutons, mêlées à cela, les arrivées des imprévus, des improbables et des imprévisibles pour  le pire, l’entre-deux et /ou  le meilleur(?)

1-Quelles volontés pour un monde viable?

-La mise en œuvre des volontés est complexe entre autres parce que  chaque acteur, personne et collectivité, comme le dieu Janus, a deux faces, d’un côté  des parts de reproductions d’injustices, de pratiques non démocratiques, de violences, de dégradations de l’environnement  , d’un autre côté des parts de remises en cause dans ces différents domaines d’activités. Ces parts sont très variables et pour chaque acteur et entre les acteurs, et cela parfois même aux cours des vies, ainsi  celles d’un.e citoyen.ne, d’une association, d’une juridiction, d’une ville, d’une firme multinationale…

 –Comment passer de volontés souvent étouffées, dépassées, essoufflées, à des volontés de plus en plus naissantes, résistantes, à la recherche de nouveaux souffles ? Le schéma général de mise en œuvre,  déjà en route et à  venir,  de moyens pour un monde viable est et serait vraisemblablement  le suivant :

– Des résistances et des pratiques alternatives de plus en plus nombreuses « à la base », par des personnes, des associations, des mouvements, des collectivités locales, d’autres  acteurs de toutes  sortes,  cela sous les pressions et des catastrophes et  des  logiques d’un système en route vers l’humanicide et le terricide .

-Des discours et des remises en cause, d’importances très variables, aux « sommets » des différents niveaux géographiques, locaux, régionaux, nationaux, continentaux ,internationaux, cela sous les pressions et des catastrophes  et de « la base »…

-Des  fissures « au cœur » des mécanismes du système mondial,  autrement dit dans l’intérêt commun de l’humanité   la détermination de limites radicales et contrôlées des acteurs les plus puissants que sont  les marchés financiers, le marché mondial,  la techno science ,  cela  sous les pressions et des catastrophes  et  de « la base » et des « sommets » et de l’intérieur de ce « cœur » des mécanismes su système mondial…

2-Quels  moyens pour un monde viable ?

-D’une part ces moyens doivent être conformes aux finalités que l’on met en avant. Si l’on veut la démocratie il faut des moyens démocratiques, si l’on veut la justice il faut des moyens justes, si l’on veut la protection de l’environnement il faut des moyens écologiques, si l’on veut la paix il faut des moyens pacifiques. Cette pensée lumineuse de Gandhi n’est-elle pas incontournable  « Les fins sont dans les moyens comme l’arbre est dans la semence.» ?

-D’autre part, même si des moyens réformateurs  démocratiques, justes, écologiques et pacifiques peuvent être porteurs,  il faut avant tout penser et mettre en œuvre des moyens radicaux, c’est-à-dire remettant en cause chaque  mécanisme  par un contre-mécanisme aussi profond.  Parce que  la puissance  de l’autodestruction devient   telle qu’elle emporte et emportera de plus en plus vite   les êtres humains  et la plus grande partie du vivant.

-A titre d’exemple énumérons simplement  huit séries de moyens pacifiques : les  interdictions des recherches sur les armes de destruction massive, l’application des traités existants et de leurs protocoles et les  conclusions de nouveaux traités de  désarmement, les remises en cause  des ventes d’armes,  la création  d’une véritable  sécurité collective mondiale enfin pensée et mise en œuvre, l’avènement   de  ministères du désarmement, la consécration du droit à la paix ,  dont le droit à la sécurité et le droit au désarmement, la protection de l’environnement dans  les   conflits armés, le développement tous azimuts  d’une  éducation à la paix, entre autres à travers l’apprentissage du règlement des conflits personnels et collectifs  et d’une éducation  aux droits de l’homme et à l’environnement. A cela s’ajoutent bien sûr des moyens justes, démocratiques et écologiques  porteurs de paix.

3-Quelles marges de manœuvres pour un monde viable ?

-Les marges de manœuvres se réduisent  à travers les générations. Nous avons reçu de trois générations passées ( 1850 à 1945 environ), un environnement pour une part atteint et faisant l’objet de destructions en marche sous les logiques du productivisme en route en fait depuis le XVème siècle et de l’anthropocène en route voilà donc plus  de 170 ans à travers les explosions des énergies fossiles et de la démographie.

Nos trois générations présentes (1945 -2030 environ),  ont produit un environnement pour une large part détruit et plongeant dans des apocalypses écologiques multiformes, en interactions et rapides, ainsi à travers le réchauffement climatique et les atteintes à la diversité biologique.

Les trois générations qui ont commencé à voir le jour et qui viennent (2030 à 2110 environ) se trouveront  donc devant une question vitale : cette forme de « veille de fin des temps », faite en particulier de nombreuses catastrophes écologiques, peut-elle encore se transformer sinon en une forme d’aube d’humanité en tout cas en un monde viable ?

– Les marges de manœuvres se compliquent  dans la prise en compte d’un grand nombre d’acteurs : Etats, organisations internationales et régionales, organisations non gouvernementales, collectivités territoriales, entreprises, firmes multinationales, banques, réseaux scientifiques, juridictions, associations, générations présentes, peuples, personnes,  générations futures…Quant aux acteurs au cœur du système mondial ( techno science, marchés financiers , marché mondial) ils  jouent un rôle essentiel dans la reproduction de cette  autodestruction et donc  dans la construction possible d’un contre- système viable.

-Les marges de manœuvres pour construire un monde viable se réduisent particulièrement dans le domaine de l’environnement. Quatre mécanismes ressemblent à une machine infernale.

Premier mécanisme : le système international s’accélère. Voilà une techno-science omniprésente et toujours en mouvement, un règne de la marchandise toujours à renouveler, une circulation rapide de capitaux, de produits, de services, d’informations qui font de la planète une sorte de grand village, les déplacements nombreux et rapides des êtres humains, l’explosion démographique mondiale, l’urbanisation accélérée du monde, la sacro-sainte croissance , les discours sur la compétition « naturelle » en particulier  économique et militaire, la prise de conscience d’une fragilité écologique de la planète provoquée par des activités humaines souvent sans limites. Qu’est-ce qu’une société qui ne se donne pas de limites ?

Second mécanisme : les réformes et les remises en cause pour protéger l’environnement sont souvent lentes : complexité des rapports de force et des négociations,  retards dans les engagements, obstacles dans les applications, inertie des systèmes économiques et techniques sans oublier la lenteur de l’évolution des écosystèmes.

Troisième mécanisme : l’aggravation des problèmes, des menaces et des drames fait que l’on agit  pour une large part dans l’urgence qui  tend à occuper une place centrale du politique.

Quatrième mécanisme : s’il est nécessaire de soulager des souffrances immédiates, il est aussi non moins nécessaire de lutter contre leurs causes par des politiques à long terme ce qui demande du temps,…or le système s’accélère.

 Autrement dit : il n’est pas sûr que les prochaines générations  aient beaucoup de temps devant elles pour mettre en œuvre des contre-mécanismes nombreux, radicaux et massifs.

 

Ainsi des éléments de réponses aux trois questions posées pourraient être les suivants :

-Les volontés ? Différents acteurs, des plus petits aux plus grands, dans de multiples lieux,  peuvent les construire, entre autres à travers des rapports de force et des pédagogies radicales  des catastrophes.Les puissants ne partagent pratiquement jamais d’eux-mêmes, ils ne le font qu’à travers des rapports de forces portés par des volontés qui les y contraignent  ou exceptionnellement si des catastrophes les poussent  à des remises en cause, mais la catastrophe loin de là  n’est pas vertueuse en elle-même.

-Les moyens ? Ils sont parfois pensés, trop rarement mis en œuvre, il faut donc s’en emparer, à chaque mécanisme d’autodestruction doit répondre un contre-mécanisme pour un monde viable.

-Les marges de manœuvres ? Les quelques générations qui arrivent en auront-elles suffisamment pour qu’à travers de multiples volontés ces moyens viables voient le jour ? « Elles  ne savaient pas que c’était impossible alors elles l’ont fait. »

 Partageons enfin   trois pensées qui peuvent être porteuses :

 « Le désespoir révèle les limites de l’espoir et l’espoir les limites du désespoir. Mais le désespoir correspond à la face inerte de la réalité et l’espoir à l’action. Dans ce sens l’espoir est plus vrai que le désespoir. » (Edgar Morin)

 « Il n’est pas plus insensé de s’abandonner à un espoir, celui de la survie de l’humanité, que de le repousser au nom d’un prétendu réalisme qui n’est que le consentement défaitiste au suicide de l’espèce. » ( Jean Rostand ) 

« Il faut avoir à la fois le pessimisme de l’intelligence et l’optimisme de la volonté. »(Antonio Gramsci). On peut ajouter  que,  s’appuyant l’un sur l’autre, ils  deviennent des couples de combats.