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au trésor des souffles

Environnement III

Apocalypses écologiques: Une gigantesque reconversion financière: comment? (IV)

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 Une gigantesque reconversion financière: comment? (IV) 

Certains d’entre vous auront l’impression que l’auteur de cet article opère à grands coups de  remises en cause ,  cette  impression correspond à  une impérieuse nécessité. On ne peut pas arrêter  la débâcle écologique  sans contre-mécanismes radicaux, qui  soient certes respectueux des personnes mais qui créent de véritables alternatives.

 Dans le cas contraire on  aura beau mettre en avant de  fausses victoires ou fermer les yeux sur les mécanismes d’autodestruction   la machine infernale ne s’arrêtera pas.

Une idée forte est celle d’un ensemble de remises en cause ,  on ne peut mettre en œuvre une reconversion financière titanesque  en laissant de côté  de nombreux mécanismes qui l’en empêchent et sans repenser vraiment la protection de l’environnement et de  la santé.

Au moins sept  séries d’éléments peuvent être examinés :

Quelques éléments relatifs à la mise en œuvre  de cette reconversion financière(A).

Des remises en cause qui doivent voir le jour pour « désarmer le pouvoir financier »(B).

De nouvelles ressources financières qui sont à créer (C).

Des  acteurs vont continuer à prendre des initiatives   face  à l’arrivée massive des catastrophes écologiques(D).

Des moyens écologiques devront être massivement soutenus par la grande reconversion financière ( F).

Des moyens sanitaires devront être massivement soutenus par la grande reconversion financière(G).

 

 

A-Quelques éléments relatifs à  la mise en œuvre de cette grande reconversion financière. 

1-On retrouve la notion d’intérêt commun.

 Qui va dégager « l’intérêt commun des Etats » ?  Et à plus forte raison qui va dégager  « l’intérêt commun de l’humanité » ?

On ne pourra  échapper aux droits de l’humanité en particulier à ceux des générations futures ,   droits fondés ici sur la non-discrimination environnementale.(Voir nos articles sur le projet de « Déclaration universelle des droits de l’humanité. »)

 

2-Certaines institutions internationales seront à créer.

D’une part le critère de la démocratie est   essentiel ,   en particulier sous la forme  de  « un Etat, une voix. »

D’autre part il faudra probablement  créer des institutions regroupant différents acteurs, certes des Etats  mais aussi des ONG, des  collectivités, d’autres encore cela  pour une légitimité plus forte. Les processus de votations  certes alors  parfois compliqués, pourront cependant être porteurs.

Mais  une des grandes difficultés est constituée par le fait qu’on ne saurait  se lancer dans  des créations s’étalant sur des décennies, elles doivent être opérationnelles le plus rapidement possible.

 

3-Enfin des processus de planification seront déterminants.

 Il s’agira ici, on l’a compris , de détermination d’objectifs, de moyens et de suivis, cela à court, moyen et long termes. Ces processus seront déterminés par des institutions anciennes et nouvelles.

 

4-Les obstacles mis en avant par  des « puissants »  face au  principe du partage et à sa mise en œuvre. 

-Les  « puissants » ont concentré des avoirs et des pouvoirs ,ils peuvent donc se trouver  face au principe et aux pratiques  du partage.

Des théories et des pratiques nous enseignent que les puissants, c’est-à-dire des personnes et des  collectivités à tous les niveaux  géographiques ,  qui ont concentré des avoirs, des pouvoirs et /ou des savoirs, ne partagent pratiquement jamais d’eux-mêmes.

Les puissants ne partagent que si des rapports de forces les obligent à le faire. Ces rapports de force peuvent se dérouler soit à travers un règlement  pacifique soit à travers de multiples tensions et répressions soit  à travers des conflits armés.

Il arrive que les puissants partagent exceptionnellement d’eux-mêmes s’ils arrivent à avoir une  conscience particulièrement  forte, vive, aigue  de drames   qui  soit  les  atteignent  soit   les menacent  soit  menacent l’ensemble de l’humanité et du vivant. Il y a donc des rapports entre les catastrophes écologiques et les changements éventuels des dominants.

-Mais une  reconversion  radicale n’est-elle pas un   obstacle idéologique face à la compétition ?

Remettre en cause les concentrations gigantesques des avoirs  a  fait souvent  l’objet de refus immémoriaux, ainsi aujourd’hui par exemple  des hausses d’ impôts sur les plus riches et sur des sociétés   dans tel ou tel pays.

Un des arguments essentiels est le fait, dit-on, qu’il s’agit d’une atteinte à la compétition  laquelle est un mécanisme puissant  du système mondial.(Voir sur notre site et ce blog nos articles  relatifs à « La compétition. »)

 Ainsi le Président  des  Etats-Unis en 2021  a  proposé un taux minimum d’imposition de 15% sur les profits des multinationales, l’accord a vite vu le jour au G7. Le taux est peu élevé.  Mais, malgré cela , l’ONG Attac insiste à juste titre sur le fait que « la mobilisation citoyenne sera essentielle pour que le Président des Etats-Unis ne renonce pas aux hausses d’impôts sous la pression des lobbies. »  (lignes d’attac 126).

 

B-Des remises en cause doivent voir le jour pour désarmer le pouvoir financier.

Rappel historique :

En 1972, juste après l’abandon de la convertibilité du dollar en or en août 1971, un économiste américain de l’Université de Yale , James Tobin (1918-2002),  propose une taxe relative aux  transactions financières spéculatives sur les marchés internationaux des devises. Elle aurait pour but de réduire la volatilité des cours et les risques de crise. Collectés par chaque Etat les fonds seraient reversés à un organisme international géré par le FMI. Cette taxe à l’origine ne concernait donc  que le marché des changes.

En décembre 1997 au moment de la crise financière asiatique, Ignacio Ramonet, Directeur du Monde diplomatique de 1990 à 2008 ,   écrit un  article « Désarmer les marchés financiers », article qui devint fondateur. « La mondialisation du capital financier est en train de  mettre les peuples en état d’insécurité généralisée. Elle contourne et rabaisse les nations et leurs Etats en tant que lieux pertinents de l’exercice de la démocratie et garants du bien commun. »(…) « La taxation des revenus financiers est une exigence démocratique minimale. » Il propose de créer une ONG ,  « Action pour une taxe Tobin d’aide aux citoyens (Attac) » pour réclamer la mise en œuvre de cet « impôt mondial de solidarité. »

En juin 1998 est ainsi créée « l’Association pour la taxation internationale des transactions financières et pour l’action citoyenne » qui existe aujourd’hui dans 40 pays, cette ONG est fondée sur plus de  mille groupes locaux. Des membres d’Attac sont à l’origine du premier Forum social mondial de Porto Alegre en 2001 et des forums sociaux européens. Attac est donc pleinement  impliquée dans le mouvement altermondialiste.

 

Ces remises en cause  sont  vitales. Il s’agit de remettre radicalement en cause le capitalisme financier autrement dit les marchés financiers qui ont envahi les vies des peuples, qui sont  favorisés par des Etats chargés de « rassurer » ces dieux souvent inquiets, qui ont vu aussi les banques centrales au  service de la spéculation, par exemple en 2008 lors de la crise financière  en inondant de liquidités des banques  pour les sauver.

Ainsi au moins sept séries de  remises en cause  sont vitales.

Elles peuvent être bien sûr moins radicalisées  que celles qui suivent.

 Leur liste n’est pas exhaustive tant il est vrai que les finances ont de multiples liens.

 

1-Les remises en cause des paradis fiscaux.

Pourquoi ? Parce que ces zones légales cachent des illégalités, en particulier des évasions fiscales énormes et de l’argent sale issu de multiples trafics. Parce que de nombreux  besoins vitaux sont criants et attendent de gigantesques sommes.

Un ancien président de la République français avait déclaré le 1er décembre 2009 « En six mois on a obtenu la fin des paradis fiscaux ! »  Illusion, ignorance,  erreur ,  mensonge ou un peu  tout cela ? Il en faudrait  beaucoup plus qu’un simple début de levée du secret bancaire pour faire chuter et disparaitre ces géants .

Par quels moyens  remettre en cause véritablement en cause ces paradis fiscaux ?  

  –  la disparition obligatoire, complète  et définitive du secret bancaire  dans tous les pays,

    – l’obligation  contrôlée, sans exceptions,   pour les firmes multinationales de déclarer et de payer leurs impôts dans les lieux  où elles exercent leurs  activités,

     – la suppression , mise en œuvre nationalement et internationalement, des évasions fiscales,

     –  des limites importantes  et très encadrées  relatives à « l’optimisation  fiscale »,

– sans oublier l’ensemble des autres moyens c’est à dire les remises en cause des corruptions, les interdictions par rapport à la spéculation, l’encadrement des banques et de nouvelles ressources financières (précisées ci-dessous.).

 

 2- Les  remises en cause des   corruptions .

Elles  seront fondées sur

  –  un traité international et sur des lois encadrant les groupes de pression, allant entre autres dans le sens de la transparence,

   –   l’organisation d’un financement sur la  transparence des partis politiques dans tous les pays,

    – une  protection collective renforcée   de la liberté de la presse pour toute enquête sur les corruptions, ce qui pose aussi le problème de seuils à ne pas dépasser quant à la possession  par de grands groupes, par exemple  de journaux, de chaines de radio et de télévision…

      -une remise en cause des filiales des banques dans les paradis fiscaux.

 

 3-Deux interdictions par rapport à la spéculation

-une interdiction de la spéculation sur les produits agricoles,

-une interdiction des marchés opaques (de gré à gré, trading à haute fréquence…),  et une interdiction  des fonds qui spéculent avec l’argent des déposants.

 

  4-Un encadrement  des banques

 –  Une responsabilité sociale  et environnementale des banques est  créée ou  développée, elle est civile et pénale,

  –  Une séparation générale et radicale est mise en place entre les activités de dépôts et  les activités d’affaires (spéculation) pour les banques. Ainsi l’ensemble des opérations  de spéculation (opérations pour compte propre, trading haute fréquence, financement de hedge funds…) devra se trouver dans des activités séparées, financées indépendamment des ressources de la banque et sacrifiées en cas de difficulté. Il serait totalement  interdit d’utiliser les ressources des dépôts pour spéculer.

   -La Banque centrale européenne devra contribuer directement aux investissements publics et privés pour la protection de l’environnement, de la santé et  la protection sociale. 

 

 5-Un encadrement des firmes multinationales 

La  responsabilité des sociétés mères est mise en place

   – contre  les exactions commises par  elles et par  leurs filiales à l’étranger,

   – c’est  aussi  la  conclusion d’un traité et c’est  l’adoption de lois  contraignant les multinationales à respecter les droits de l’homme,

   -la responsabilité  environnementale , sanitaire et sociale  des entreprises est créée et renforcée au niveau national et international.

 

 6-Une remise en cause de certaines   productions d’entreprises et de  firmes multinationales

   – Les productions doivent  être écologiquement viables, socialement utiles, pacifiquement reconverties.

  – Certaines productions du marché peuvent donc être considérées comme plus ou moins négatives pour les  acteurs humains et le vivant. Ainsi seront nécessaires  des reconversions  par exemple des industries d’armements, des produits dangereux pour la santé humaine et/ou  l’environnement .   

-Un traité international, doté de puissants fonds, favorisera sur l’ensemble de la planète  la création et le développement d’entreprises productrices  d’énergies renouvelables.

 

7-Le commerce international  perd sa toute-puissance, il est désormais subordonné

 – à la primauté de la santé et  de l’environnement, mais aussi du social et de la culture. Les normes et les pratiques du commerce international doivent   être conformes à leurs protections.

  – Ainsi sont  dénoncées par exemple toutes les dispositions de traités  permettant à des multinationales de s’opposer à des transitions énergétiques.

 

C-   Les créations massives  de « nouvelles ressources financières du XXIème siècle »

Les imaginations d’experts et de citoyen.ne.s  sont  ici et là en route pour penser les créations de nouvelles ressources dans la décennie qui vient. « Le désarmement financier » a commencé à être pensé il y a longtemps, ses auteurs étaient souvent  dans le désert, les temps sont probablement en train de changer. Des débuts de réalisation voient le jour sous telle ou telle forme.

 

 1-Les nouvelles ressources financières massives  ont pour noms

  –  une  taxation , importante et mondiale, des transactions financières. Cette taxation  doit inclure les obligations, les actions, les devises et les produits dérivés. Une grande ONG comme Attac insiste sur ce point : « Il y a chaque année entre un million deux cent mille milliards et un million huit cent mille milliards de dollars de transactions financières, dont environ les trois quarts portent sur les produits dérivés échangés sur des marchés opaques. »Il est difficile d’imaginer dans la vie du système mondial des sommes aussi colossales.

    –   un impôt  progressif et mondial sur les capitaux, en particulier un  impôt   pour les grandes fortunes,

    – une taxation  des fonds  spéculatifs,                                                                      

    -des ressources issues des bénéfices des firmes multinationales,

    -une taxation importante des géants du numérique,

     -des ressources issues de la taxation des  émissions de CO2  pour tous les transports internationaux, dans le langage courant une taxe carbone aux frontières,

     – des capitaux  provenant de la suppression  complète et rapide des  subventions des énergies fossiles,

     –les transferts de dépenses militaires vers les dépenses prioritaires  d’environnement et de santé, mais aussi  de la protection sociale, de l’alimentation, du logement, de l’éducation et  de la culture…

   2- …Et toute nouvelle ressource allant dans le sens de « l’intérêt commun de l’humanité » 

c’est-à-dire de la démocratie, la justice, la protection de l’environnement, la paix tout cela  pour les générations passées (  protection de leur patrimoine culturel) , présentes et futures(non-discrimination environnementale).

 

 D- Des  acteurs vont continuer à prendre des initiatives financières  face  à l’arrivée massive des catastrophes écologiques.

Nous rappelons le schéma général de fonctionnement des acteurs(1).

Nous soulignerons les quatre séries d’acteurs qui paraissent pouvoir amplifier cette reconversion financière(2).

   1-Le schéma général de mise en œuvre,   déjà en route et à probablement à venir, par  des acteurs de moyens pour un monde viable est et serait vraisemblablement  le suivant :

– Des résistances et des pratiques alternatives de plus en plus nombreuses « à la base », par des personnes, des associations, des mouvements, des collectivités locales, d’autres  acteurs de toutes  sortes,  cela sous les pressions et des catastrophes et  des  logiques d’un système en route vers l’humanicide et le terricide .

-Des discours et des remises en cause, d’importances très variables, aux « sommets » des différents niveaux géographiques, locaux, régionaux, nationaux, continentaux ,internationaux, cela sous les pressions et des catastrophes  et de « la base »…

-Des  fissures « au cœur » des mécanismes du système mondial,  autrement dit dans l’intérêt commun de l’humanité   la détermination de limites radicales et contrôlées des acteurs les plus puissants que sont  les marchés financiers, le marché mondial,  la techno science ,  cela  sous les pressions et des catastrophes  et  de « la base » et des « sommets » et de l’intérieur de ce « cœur » des mécanismes su système mondial.

 

2—Quatre séries d’acteurs peuvent particulièrement amplifier la reconversion financière.

-« A la base »l’amplification importante puis  gigantesque de la révolte et de la résistance  des jeunes. Les « marches » peuvent passer de dizaines de millions  à quelques centaines de millions, donc devenir gigantesques. Des jeunes en Chine ( Comment ?Avec quelles marges de manœuvres ? A la suite de catastrophes écologiques ?) et en Inde (massivement quand ?) sont deux  des clefs de cette  grande naissance d’immenses foules de jeunes,  marches tenaces, résistantes, non-violentes.(Voir sur ce blog  des synthèses de la non-violence dans nos articles sur « Les résistances. »)

-Des associations et des mouvements sociaux constituent ici aussi un puissant levier à travers entre autres des « fronts communs. » De même le soutien le plus large  possible d’une partie des mondes médiatiques doit s’amplifier.

-Aux « sommets » des Etats, par exemple des « conférences  générales et spécifiques de reconversion financière »  devraient  aller dans le sens de ce qui a commencé. La reconversion  générale  radicale du pouvoir financier serait planifiée vers les besoins écologiques ,   sociaux et pacifiques criants. Des conférences spécifiques accompagneraient les conférences générales,  par exemple celles de  la remise en cause de la course aux armements, ainsi  un ou plusieurs Etats nucléaires pourraient rejoindre le Traité d’interdiction des armes nucléaires, ainsi les ventes d’armes seraient remises en cause.

-Enfin « dans le cœur du système » , c’est-à-dire le financier, l’économique et la techno science, des transformations encore dérisoires  ont commencé, allant dans le sens de cette  reconversion , encouragées par de nombreux acteurs .

 

E-Reconversion financière : quels  facteurs favorables ?

Au moins quatre  facteurs  sont favorables à la mise en œuvre de ce bouleversement.

Certains  acteurs  sont plus ou moins ouverts  à des  résistances et des propositions(1).

Des Etats, certes  encore lentement et   dérisoirement ,   commencent à aller dans ce sens (2).

Une  toute petite partie des mondes financiers, encore dérisoirement certes, commence à se remettre en cause et à être remise en cause (3).

Les générations présentes ont probablement encore des marges de manœuvres(4).

 

1-Certains  acteurs sont plus ou moins ouverts à des résistances et des propositions.

a-L’espoir de suites porteuses  réside donc, une fois de plus,  dans l’ensemble des acteurs c’est-à-dire  des  Etats qui continueront à négocier, des collectivités territoriales, des  entreprises, des ONG ,des citoyens, des peuples…  qui amorceront  des  transitions énergétiques et, de façon plus globale, qui mettront en œuvre des moyens démocratiques, justes, pacifiques  et écologiques…  

 b-Les  Etats  continueront à négocier dans les COP à venir et dans d’autres lieux de gouvernance .Le rôle des Etats  peut être ici essentiel dans les temps à venir pour aller vers des réformes et mais surtout  vers des remises en cause. Dans «  le temps qui reste » les réformes , c’est une certitude, ne suffiront pas.

c -Bien sûr des collectivités territoriales, des  entreprises et des acteurs  de la société civile (ONG , citoyens,  syndicats, mouvements sociaux) , bien sûr aussi  des fondations engagées, qui amorceront la transition énergétique, qui lancent et lanceront diverses alternatives pouvant  se rencontrer ici et là. Il ne faut  pas sous-estimer également  les juridictions  qui  , de plus en plus  saisies en particulier par des associations  et des citoyen.ne.s ,  demandent des comptes aux Etats quant à  l’exécution de leurs obligations nationales et internationales.

d- Interviennent aussi scientifiques, journalistes spécialisés, juristes, économistes, sociologues, philosophes, diplomates, fonctionnaires internationaux, militants d’ ONG environnementales et beaucoup d’autres , cela  pour analyser et proposer des remises en cause  à travers  ouvrages,  articles,  émissions, appels,  tribunes et autres moyens d’expression….

e-Des marches de jeunes et de moins jeunes  pour « Sauver le climat « se multiplient, des grèves  par des élèves  de leur enseignement,  à partir de janvier 2019, voient le jour une fois par semaine dans certains pays. Si on atteignait des chiffres gigantesques  de jeunes sur la  planète ,  en révolte non-violente,  résistante et constante, celle-ci pourrait avoir une influence importante entre autres  sur une telle reconversion financière.

 

2-Des Etats, encore lentement et  dérisoirement,  commencent à aller dans ce sens. 

 a – Voilà   quelques avancées de levées partielles des secrets bancaire et judiciaire, qui est un des contre-mécanismes des paradis fiscaux, mais on est encore très  loin d’une  véritable remise en cause que  serait , entre autres, une transparence   généralisée .

  Les sommes abritées dans les  paradis fiscaux en 2018, c’est à dire dans plus d’une soixantaine de pays et territoires, seraient de l’ordre de 20.000(?) à 40.000(?) milliards de dollars! C’est l’une des sommes les plus gigantesques que l’on puisse imaginer. Il est vrai que l’on est encore loin des 226.000 milliards de dollars (192.000 milliards d’euros) du total de la dette mondiale en 2018 ,  soit trois fois le PIB mondial…On notera l’imprécision  massive  , opacité oblige, des sommes cachées dans les paradis fiscaux.

  b – Voilà également  quelques timides tentatives de luttes contre  l’évasion fiscale de grandes firmes multinationales, ainsi le G 20 en novembre 2015 a adopté un plan de l’OCDE en vue de pousser ces entreprises à déclarer leurs bénéfices pays par pays, de même la Commission de l’Union européenne est allée   dans ce sens fin 2015 et début 2016 par exemple  en critiquant  des pays (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg…) qui sont accusés de soutenir de telles pratiques, mais on est cependant encore loin d’une véritable convention mondiale accompagnée de sanctions.

   c -Voilà aussi en mars 2018 la Commission de l’UE qui propose de taxer de 3% les revenus des géants numériques, les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon), cela dans les pays de leurs utilisateurs, et au delà 200 groupes ayant un chiffre d’affaires annuel de plus de 750 millions d’euros et de plus de 50 millions d’euros  dans l’Union européenne, cette taxe, rapporterait 5 milliards d’euros par an.

La France en 2019 commence à prélever une taxe sur les géants du numérique, c’est  le début d’un long chemin légitime et légal consacré en avril 2019. Si la taxe précédente est à l’initiative de la France, l’Allemagne par contre semble se déclarer favorable à « un impôt minimum mondial sur les bénéfices des multinationales du numérique ». La proposition française, beaucoup plus cadrée, va donner lieu à un rapport de forces  aux enjeux importants entre des Etats européens et les GAFA.

Les GAFA se retrouvent sous pression  avec  l’administration du nouveau président des Etats-Unis à partir de 2021, à cela s’ajoutent de multiples enquêtes et poursuites venant d’ Etats  fédérés, du Congrès, du ministère de la justice et de l’autorité américaine de la concurrence.

 d-Voilà ces  rapports  de forces également  par rapport à des amendes, ainsi  en juin 2017 (2,47 milliards d’euros) et juillet 2018(4,3 milliards d’euros) infligées par la Commission à Google pour abus de position dominante, ainsi pour la seconde amende l’abus concerne le système d’exploitation pour  smartphones ,  Android.    Google  verse les amendes pour éviter d’énormes astreintes mais  fait appel devant la Cour de justice de l’Union européenne. En février 2019 le géant bancaire suisse UBS a été condamné par le tribunal de grande instance de Paris à une amende de 3,7 milliards d’euros pour démarchage bancaire illégal et pour blanchiment aggravé de fraude fiscale. Les premiers pas des uns et des autres sur ce chemin  peuvent être prometteurs.

  Les GAFA en 2019 pèsent en Bourse 3360 milliards de dollars et réalisent 600 milliards de chiffres d’affaires par an. Les amendes records imposées par l’UE  ne vont pas assez loin selon certains auteurs  ,    en particulier aux Etats-Unis, auteurs  qui, ici et là,  proposent parfois  de démanteler, de «  casser ces géants. »

  e-Voilà certes les premières taxes sur les transactions financières(TTF) d’un certain nombre d’Etats encore très minoritaires (ainsi par exemple  deux sur 27 dans l’Union européenne) mais on est encore loin d’une véritable TTF qui serait mondiale dans sa portée  et radicale dans son assiette.

C’est très certainement un des grands espoirs de véritables alternatives mondiales, espoir  porté par exemple par une ONG telle que ATTAC, qui contribuerait à construire un monde viable dans la mesure où des sommes gigantesques, dégagées par ces TTF, seraient consacrées à des besoins criants,  en particulier sanitaires et environnementaux…En France elle a rapporté 1,7 milliard d’euros en 2020 soit un montant record depuis sa création en 2012.

Pour l’UE on croyait le projet enterré depuis 2016, mais en 2019 dix Etats tentaient de relancer le processus, en 2020  il ressurgit  le Royaume-Uni  n’étant plus dans l’UE . Les négociateurs du  Parlement européen et la présidence du Conseil européen sont parvenus en novembre 2020 à un compromis sur le financement pluriannuel (2021-2027) de l’UE soit 16 milliards de plus consacrés à protéger les citoyens de la pandémie  et issue pour une part d’une TTF. « Est-ce que l’Europe est au service des banquiers, des milliardaires et des traders ? Ou bien au service du bien commun, des hôpitaux et de l’emploi ?  Il est temps de choisir »  écrit Pierre Larrouturou, député européen, qui milite pour une taxe européenne sur les transactions financières qui à 0,1%  rapporterait 50 à 60 milliards d’euros par an.

A ce jour en juillet 2021  la TTF existe dans 9 des pays du G20(Afrique du Sud,Argentine,Brésil,Chine,Etats-Unis,France,Inde,Italie,Royaume-Uni) mais les impositions sont faibles et sur les transactions en Bourse.

Ici et là certains  plaident  pour des taux plus élevés et des taxes plus larges c’est-à-dire  sur les actions en Bourse, les obligations, les devises et les produits dérivés …

Le 8 juillet 2021 un collectif de 124 économistes et experts financiers  dans une tribune au « Monde » demande au G20 de mettre en œuvre au plus vite des taxes sur les transactions financières  « pour lutter contre la volatilité de l’économie et générer des investissements publics nécessaires de toute urgence, pour sauver des vies en renforçant les systèmes de soins de santé, et pour couvrir une partie des coûts causés par le réchauffement climatique. »

Ils affirment  en conclusion  « Il est temps que le marché le plus riche du monde soit enfin mis à contribution. » C’est un appel  qui fait date.

 

f- Le G7 des ministres des finances  le 5 juin 2021 a publié un communiqué commun,  concrétisant  leur accord sur une taxation mondiale des sociétés à hauteur de 15% « au moins ». Un accord plus approfondi  verra   le jour  au G20 de juillet 2021.

C’est une avancée. Elle a cependant  au moins  deux  faiblesses  :  les communiqués de ces instances n’obligent pas directement les  Etats mais fixent des orientations, et le taux mis en avant est considéré par  beaucoup comme trop faible en particulier par des économistes critiques et par des ONG.

Le 10 juillet 2021 les ministres des finances du G20 ont entériné l’accord de l’OCDE sur la réforme de la fiscalité des multinationales .Les précisions verront le jour en octobre 2021 à Washington.

On le voit  des mouvements… de fond et de fonds…   ont  très probablement commencé, des Etats commencent à en appeler à des  sommes très importantes ici et là, peut-être un jour (mais quand ?) à des capitaux gigantesques ?

 La question qui se pose est celle de la lenteur de l’évolution de ces rapports de forces face à la rapidité de la débâcle écologique et des autres périls communs soulignés plus haut.

Ces  contre-mécanismes sont prometteurs mais trop lents, trop faibles face aux  mécanismes puissants et rapides de l’autodestruction environnementale, sanitaire  et sociale.

 

3-Une petite partie des mondes financiers commence, encore dérisoirement, à  aller en ce sens .

Le rôle de forces allant dans ce sens   dans une toute petite partie des mondes financiers n’est  probablement pas  négligeable. 

a-On trouve par exemple depuis une trentaine d’années des fonds  qui se veulent éthiques et liées au développement durable,   encore faut-il des mécanismes de contrôle des objectifs proclamés, mais  ces objectifs et ces moyens peuvent être porteurs…

b-Quelques milliardaires, par exemple à travers des fondations, mettent une part, dérisoire par affichage ou plus importante  , de leurs  fortunes au service par exemple de luttes contre des maladies (tuberculose, sida…) et contre les changements climatiques.

c- Egalement  une partie, certes  encore très insuffisante, du monde financier   se détache  des énergies fossiles et se tourne vers les énergies  renouvelables. Ce sont là des  rapports de force entre banques, Etats et firmes multinationales. Ce serait  un des points clefs de la grande reconversion.

d-De façon plus massive,  même si tout reste à faire, la BCE en juillet 2021 met en avant des garanties de protection de l’environnement, cela  alors que  des  banquiers centraux déclarent cette stratégie  contraire à la « neutralité » que doit observer la BCE.

e-Lieu de décisions. Fonds souverains, gestionnaires d’actifs(Black Rock),fonds d’investissement (Carlyle).

f-On peut aussi penser à « l’objection de conscience collective »  d’une petite partie des mondes financiers,  Jean Rostand l’appelait de ses vœux  dans les recherches scientifiques militaires et les  industries d’armements..Peuvent-elles voir le jour dans les mondes financiers ? Comment ?

En résistant  à des pratiques bancaires porteuses par exemple de soutiens aux énergies fossiles.

En  proposant des mises à disposition de fonds vers les drames  évoqués plus haut, ainsi  ceux   de la faim et de l’absence d’eau potable.

En libérant des imaginations et des courages pour penser et mettre en œuvre des ressources nouvelles conformes à un monde viable.

Il s’agit bien  de formes de résistances.(Voir nos six articles « Résistances » sur ce blog et sur notre site.)

Evoquons  simplement ici la graphie du verbe  résister , elle est magnifiquement soulignée par un auteur qui écrit : « Il est des mots dont la graphie semble incarner mystérieusement  le sens. Ainsi du beau verbe résister avec ses deux r, ses deux e, ses deux s qui entourent symétriquement son i, comme s’il s’agissait de le préserver, de le garder précieusement en vie .Car résister c’est d’abord  cela : maintenir intacte la flamme fragile, éphémère de l’existence : tenir : survivre ». (« Résister. Le prix du refus », sous la direction de Gérald Cahen, Editions Autrement, Série Morales, 1994 ,4ème de couverture).

 

4- Les générations présentes ont, probablement, encore des marges de manœuvres.

a-Les marges de manœuvres se réduisent  à travers les générations.

 Nous avons reçu de trois générations passées ( 1850 à 1945 environ), un environnement pour une part atteint et faisant l’objet de destructions en marche sous les logiques du productivisme en route en fait depuis le XVème siècle et de l’anthropocène en route voilà donc plus  de 170 ans à travers les explosions des énergies fossiles et de la démographie.

Nos trois générations présentes (1945 -2030 environ),  ont produit un environnement pour une large part détruit et plongeant dans des apocalypses écologiques multiformes, en interactions et rapides, ainsi à travers le réchauffement climatique et les atteintes à la diversité biologique.

Les trois générations qui ont commencé à voir le jour et qui viennent (2030 à 2110 environ) se trouveront  donc devant une question vitale : cette forme de « veille de fin des temps », faite en particulier de nombreuses catastrophes écologiques, peut-elle encore se transformer sinon en une forme d’aube d’humanité en tout cas en un monde viable ?

b-Ainsi on peut penser que les générations actuelles (1945-2030) ont encore des marges de manœuvres,  les suivantes (2030-2110) vont très vraisemblablement en avoir beaucoup moins  pour construire un monde viable.

La décennie qui vient (2020-2030) est donc encore celle d’une  chance qu’il faut saisir pour passer de l’autodestruction à un monde viable.

Lorsque l’on affirme de plus en plus souvent  que « la catastrophe climatique est en route » et que  « l’on ne peut attendre » pour arrêter cette machine infernale  ,   est-ce que  l’arrivée d’un déclencheur de remises en cause en cascade ne serait pas  cette reconversion  financière ,  à partir de la création de puissantes ressources nouvelles allant vers les besoins criants ?

 

F- Des moyens écologiques  seront massivement soutenus par la grande reconversion financière.

Qui veut la protection de l’environnement doit  penser et mettre en œuvre des moyens écologiques. Chacun de ces moyens exige des sommes considérables prises , entre autres, sur les ressources nouvelles du XXIème siècle(Voir ci-dessus).

 Supprimer enfin l’un des plus grands drames du monde, celui de l’absence d’accès à l’eau potable et à l’assainissement. Ce seul exemple suffit à montrer la gigantesque reconversion financière vitale et possible : résoudre cette série de drames liés à l’eau en transférant pendant cinq ans  de l’ordre de quatre cents milliards de dollars par an, ces 2000 milliards de dollars seront pris sur les nouvelles taxes des transactions financières et gérés par un fonds spécifique. Ils correspondront à une année de dépenses mondiales  d’armements  et à un grand nombre de vies sauvées de maladies liées à l’absence d’eau potable et à l’assainissement.

Mettre en œuvre  des transitions énergétiques massives,

 Réduire et éliminer  les modes de production, de consommation et de transport écologiquement non  viables ,

 Lutter contre l’effondrement de la biodiversité,

Réparer les dégradations de régions  dans le monde ,

Conclure de nouvelles conventions et s’emparer des principes de droit de l’environnement,

Créer massivement des emplois  écologiques et relocaliser des activités,

Créer et développer des moyens juridiques et des moyens généraux de protection,

 Ralentir l’explosion démographique…

(Voir mes articles sur  ce blog intitulés  « Quels moyens écologiques ? »)

Ces moyens doivent être  liés à des moyens justes, démocratiques, pacifiques.(Voir aussi nos articles « Quels moyens pacifiques, démocratiques, justes ? ».) 

 

G-Des moyens sanitaires seront massivement soutenus par la grande reconversion financière.

Qui veut la protection de la santé doit  penser et mettre en œuvre des moyens sanitaires. Chacun de ces moyens exige des sommes considérables prises, entre autres, sur les ressources nouvelles du XXIème siècle.(Voir « C » développements ci-dessus)

Repenser la santé c’est créer et développer des politiques de prévention et des politiques d’urgences, cela à tous les niveaux géographiques.

Repenser la santé c’est organiser des systèmes médicaux en supprimant des inégalités, ainsi par exemple en repeuplant les déserts médicaux.

Repenser la santé c’est construire de nouveaux rapports Nord Sud en matière sanitaire, autrement dit  soutenir  massivement les pays du Sud dans les politiques de santé en termes de bâtiments, de personnels, de matériels. C’est en particulier organiser  l’accès effectif et universel  aux médicaments.

Repenser la santé c’est établir des liens  entre les politiques sanitaires  publiques et  privées dans l’intérêt supérieur des malades…

Repenser la santé c’est établir du point de vue sanitaire  de multiples liens entre l’environnement et la santé. Ainsi c’est organiser un système d’assistance sanitaire et écologique à tous les niveaux géographiques, système  puissant, rapide, multiforme. Ainsi c’est remettre en cause la place de plus en plus dominante de l’homme dans la nature, place qui est à l’origine de déstabilisations et de destructions d’espèces animales et donc de pandémies.(Voir « La fabrique des pandémies. Préserver la biodiversité, un impératif pour la santé planétaire »,Marie-Monique Robin, éditions La Découverte,2021).

 

Remarques terminales

Cette reconversion ne  contribuerait-elle pas à l’hypothétique passage de ce monde autodestructeur à un monde viable ?

Ce ne serait pas une utopie abstraite, détachée des conditions de sa réalisation. Nous croyons à l’utopie concrète ,  celle  qui prend les moyens de se réaliser. Et  de toute façon ,   écrivait René Dumont, le choix est on ne peut plus clair : c’est « L’utopie ou la mort »(titre de son ouvrage lumineux publié en 1973) .

Ce ne serait pas  « Le » grand remède miracle, il n’y en a pas. Ce serait un moyen parmi d’autres mais particulièrement  important par le montant des sommes et leurs  destinations multiples vers des besoins criants.

 –Ce ne serait pas une forme d’atteinte aux autres  contre-mécanismes face au productivisme autodestructeur    mais,  au contraire, pour eux un puissant soutien, un côte à côte  avec ces autres  nombreux moyens viables.

Ce ne serait pas  supposer la question résolue : certains pensent en effet qu’ on  ne peut pas par les finances changer le système productiviste puisque ce sont elles qui représentent  un des piliers de l’autodestruction. Il serait au contraire impératif de  mettre fin à l’argent, point final. Nous pensons que l’un n’empêche pas l’autre,  qu’on  remettrait en partie en cause, par les destinations des fonds, le système mondial autodestructeur dans un de ses piliers centraux particulièrement puissant ,   le domaine financier. Ceci ne veut pas dire que l’on ferme les yeux sur  la question des alternatives à l’argent, alternatives qui existent ici et là à une certaine échelle. La question reste entière puisque   la réponse dépend des volontés, des moyens et des marges de manœuvres  pour aller dans ce sens, mais les urgences vitales exigent que l’environnement et la santé aient des moyens financiers puissants et rapides pour être viables. .

Ainsi cette  immense reconversion financière pourrait   être  un élément  décisif ,

en répondant à des besoins environnementaux et sanitaires vitaux,

 en favorisant  des mobilisations dans l’ensemble des domaines,   

en ouvrant de nouvelles  portes  vers  de nouveaux  espoirs pour l’humanité et pour  le vivant.