Sélectionner une page

II
LES RESPONSABLES
DE LA DEBACLE ECOLOGIQUE
D’abord pour comprendre comment nous en sommes arrivés à cette situation
présente n’est-il pas nécessaire de resituer les responsabilités de la dégradation
environnementale dans le temps, cela avant l’anthropocène puis pendant celui-ci
c’est-à-dire cette période de la domination de l’homme sur l’environnement
d’environ 170 ans ? Doivent déjà apparaitre de nombreux acteurs de cette débâcle
écologique. (A)
On ne saurait oublier dans cette histoire les nombreux avertissements sur la route de
cette débâcle écologique (B)
Ensuite il s’agira de constater les logiques profondes du productivisme. Celles-ci
devraient nous permettre de mettre en avant les mécanismes des responsabilités.
Ce sont ces logiques qui produisent aujourd’hui la débâcle écologique. (C)
Sera alors venu le temps de souligner des critères de détermination des
responsabilités et avec eux devraient apparaitre encore mieux les acteurs qui,
aujourd’hui, sont responsables de cette débâcle. (D)
A- UNE SYNTHESE DE L’HISTOIRE DES RESPONSABILITES DE LA
DEBACLE ECOLOGIQUE
2
Les proportions dans le temps sont impressionnantes et nous appellent à une certaine
humilité ou plutôt à une humilité certaine. En effet si l’on ramène l’âge de la Terre à
24 heures, l’homme apparait les 5 dernières secondes et l’anthropocène (époque
industrielle) correspondrait aux 2 derniers millièmes de la dernière seconde.
Nous distinguerons l’immense période des débuts de l’humanité jusqu’à
l’anthropocène (1)
puis les 170 dernières années (1850-2020…) de cette domination de l’homme sur la
biosphère. (2).
1- Des débuts de l’humanité (2 millions d’années) jusqu’à l’anthropocène (1850)
a- La période de dépendance de l’homme par rapport à la nature est immense
puisqu’elle s’étend des origines de l’humanité c’est-à-dire du genre Homo (2 millions
d’années) (sans remonter à Tumai, 7 millions d’années ou à Lucy, 3 millions
d’années) jusqu’à environ 11700 ans avant notre ère (la fin de la dernière période
glaciaire).
Les êtres humains étaient vraisemblablement complètement dépendants de la nature.
La lignée humaine vivait de la chasse, de la pêche, de la cueillette. Une certaine
forme « d’harmonie » existait probablement entre de petits groupes et la nature ce
qui n’excluait pas des attaques de bêtes fauves et l’arrivée de catastrophes
écologiques, mais la nature était considérée comme une mère, comme une déesse.
b- La période d’apparition d’un pouvoir de l’homme sur la nature se situe de
la fin de l’holocène et s’étend donc sur les 11700 dernières années et cela jusqu’à la
révolution industrielle en Angleterre et en Europe à la fin du XVIIIe
siècle.
Le phénomène de sédentarisation voit le jour, ainsi que l’élevage d’animaux,
l’irrigation, la création de réserves d’eaux et de céréales. C’est l’invention de
l’agriculture, autrement dit la transformation et la mise en valeur du milieu naturel
pour obtenir des produits végétaux et animaux utiles à l’homme. Ce pouvoir sur la
nature se traduit donc par l’utilisation des ressources naturelles.
3
Il n’en reste pas moins que la plupart des sociétés à cette époque refusent la
séparation de l’être humain par rapport à la nature dont on se considère comme partie
intégrante ou simplement associé à elle-même si on commence à la dominer.
c- On arrive ainsi à une période de soumission de la nature. Du XVIe au XIXe
siècle c’est le grand tournant dans les théories et les pratiques entre l’être humain et
la nature.
La nature devient un objet au service de l’homme. La science et la raison
humaine se trouvent face aux objets naturels, et l’Europe exploite les hommes et la
nature à travers la colonisation.
Un débat sur les rapports entre les êtres humains et la nature apparait et
continue jusqu’à nos jours.
La Bible avait déjà en avant cet impératif « Soyez féconds, emplissez la terre et
soumettez-la. » Certains insisteront sur le fait que Dieu a donné la terre à l’homme
pour qu’il la soumette mais non pour qu’il la détruise. Va ainsi dans ce sens
l’encyclique du pape François de mai 2015 « Laudato si », Loué sois-tu, qui met en
avant la « sauvegarde de la maison commune.»
Sur la période du XVIIème à nos jours on peut souligner deux textes clefs
symboliques, l’un de Descartes, l’autre de Lévi-Strauss.
En faveur de cette possession de la nature citons Descartes : « […] connaissant la
force et les actions du feu, de l’eau, de l’air, des astres, des cieux et de tous les autres
corps qui nous environnent […] nous les pourrions employer en même façon à tous
les usages auxquels ils sont propres, et ainsi nous rendre comme maîtres et
possesseurs de la nature. Ce qui n’est pas seulement à désirer pour l’invention d’une
infinité d’artifices qui feraient qu’on jouirait sans aucune peine des fruits de la terre
et de toutes les commodités qui s’y trouvent, mais principalement aussi pour la
conservation de la santé, laquelle est sans doute le premier bien et le fondement de
tous les autres biens de cette vie […].»(Discours de la méthode, 1637, 6e partie,
classique Larousse).
Dénonçant ce déferlement de violence de l’homme contre le vivant,
Claude Lévi-Strauss écrira beaucoup plus tard en 1973:
« On a commencé par couper l’homme de la nature, et par le constituer en règne
souverain ; on a cru effacer ainsi son caractère le plus irrécusable, à savoir qu’il est
d’abord un être vivant. Et en restant aveugle à cette propriété commune, on a donné
le champ libre à tous les abus […]. » (Anthropologie structurale, Plon, 1973, p. 53)
C’est cette autodestruction qui nous a amenés au bord du gouffre. Comment ?
4
2-Les responsabilités des acteurs de l’anthropocène dans la débâcle écologique
La première révolution industrielle est synonyme de mécanisation, de développement
minier et métallurgique, d’urbanisation… Mais c’est la deuxième révolution
industrielle à partir de 1850-1880 qui va encore changer le rapport à la nature à
travers en particulier l’utilisation de nouvelles énergies : pétrole, gaz, mais surtout le
développement du charbon. Les forêts représentaient encore la source d’énergie
essentielle en 1850, cinquante ans plus tard c’est le charbon. Les sociétés
s’urbanisent, la nourriture et l’énergie sont achetées, les paysans commencent à
devenir moins nombreux. On est entré dans l’anthropocène.
a- En premier lieu le terme d’anthropocène de plus en plus reconnu
scientifiquement.
Il a été inventé en 2002 par un chercheur (Paul Crutzen, prix Nobel de chimie, 1995)
qui affirme que nous avons changé d’ère géologique. Nous sommes entrés dans
une ère dont l’homme est devenu « la force dominante ». Après la dernière
glaciation, les plus de dix mille années de l’ère holocène étaient à une température
stable et relativement chaude, elle a permis l’apparition de l’agriculture et des
civilisations.
Cette nouvelle ère dominée par l’homme commence il y a environ 250
ans (machine à vapeur 1769) si on la fait naitre à la révolution
industrielle (Angleterre fin XVIIIème, France début XIXème).
D’autres pensent qu’il est plus juste de la situer au moment de l’explosion des
énergies fossiles à partir de 1850 avec le charbon ensuite le premier puits de pétrole
qui arrive en 1859. De 1850 à 2020 l’anthropocène a donc, à ce jour, environ 170
ans.
5
L’ère de l’anthropocène peut se ramener à trois éléments :
à partir de 1850 c’est l’utilisation massive des énergies fossiles,
au XXème siècle la population est multipliée par quatre (en 1900 :1,6 milliard
d’habitants, en 2000 : 6,1milliards) ( et fin 2019 : 7,7 milliards),
la consommation d’énergie multipliée par 8,3 (en 1900 : 965 millions de tonnes
équivalent pétrole(TEP) en 2000 : 8000 millions TEP) ( et en 2015 : 13,649
millions de TEP).
b- En second lieu voilà les dominations de quelques Etats et de quelques unes
de leurs entreprises.
C’est d’abord l’Angleterre qui plonge dans l’exploitation de la houille au début
du XIXème. Pourquoi ? Parce qu’il y avait une crise de la principale ressource
énergétique en Europe, les forêts en effet ne suffisent plus, elles sont victimes d’une
déforestation et le prix du bois augmente.
Accompagnant le charbon apparaissent les machines à vapeur, les fonderies, arrive
aussi l’exploitation de matières premières de pays colonisés, par exemple le coton
des Amériques. L’Angleterre domine le monde, le colonialisme marche côte à côte
avec le capitalisme.
Ce sont ensuite les Etats-Unis qui se lancent dans une seconde énergie fossile qui
est nouvelle, le pétrole. A partir du premier puits en 1859 c’est la ruée vers « l’or
noir. »
Une entreprise, la Standard Oil de Rockfeller, apparait en 1870 avec ses extractions,
ses pipe lines, ses tankers. Avec le pétrole la révolution industrielle se développe,
6
ainsi voilà l’éclairage, le chauffage, le béton…Les firmes pétrolières vont aussi en
Russie, en Iran. Total apparait en 1924. Quant à la marine anglaise elle abandonne le
charbon pour le mazout.
c- En troisième lieu voilà les deux guerres mondiales dont l’environnement est
aussi une victime, voilà aussi les débuts de la société de consommation …
La guerre est synonyme de souffrances humaines, de destructions matérielles et
aussi de destructions environnementales considérables non seulement par les
conflits armés qui font de la nature une victime blessée, meurtrie, détruite mais,
aussi, par la production des armements qui font une utilisation massive,
permanente et dramatique des matières premières. (Voir nos articles « Conflits
armés et environnement »).
Elle est aussi synonyme de fortunes industrielles à partir des constructions
d’avions, de canons, de chars, de munitions. La guerre est un coup de fouet pour le
capitalisme.
L’organisation scientifique du travail à la chaine, le taylorisme, définie en 1880 , se
développe. La chimie et des industries apparaissent, on tue l’ennemi (gaz de combat
dès la Première guerre mondiale, zyklon B des chambres à gaz, agent orange au
Vietnam). On se lance dans l’agriculture productiviste et on pollue aussi une partie
du vivant avec en particulier des pesticides. L’entreprise Monsanto est créée en
1901, elle se spécialise dans les biotechnologies agricoles.
La rue commence à appartenir aux voitures, symboles de modernité, des
productions apparaissent, Renault en 1898, Ford en 1903, General Motors en
1908.Les Etats-Unis, après la grande crise de 1929 et la sortie de la Seconde guerre
mondiale, se développent tous azimuts.
7
d- En quatrième lieu voilà l’après guerre de 1945 et « la grande accélération »
de 1950 à nos jours avec les sociétés de consommation
C’est l’après guerre de 1945 à 1950 puis « la grande accélération de
l’anthropocène » de 1950 à nos jours… Les armes nucléaires ouvrent une ère de
menaces sur l’humanité et la nature. La guerre froide est une course effrénée entre les
« supergrands », Etats-Unis et Union soviétique, à travers entre autres une course
aux armements destructrice de l’environnement.
C’est le temps aussi de la consommation de masse à travers voitures, constructions
de logements, appareils électroménagers, industries agro alimentaires…En ce sens
on peut dire que les consommateurs ont des responsabilités variables selon les
contenus et les quantités de consommation, le fait par exemple d’une
surconsommation de viande est une des causes de la déforestation au profit des
pâturages.
Cette consommation explose dans l’ensemble des pays du Nord de la planète et peu
à peu dans les pays émergents.
L’explosion démographique dans les pays du Sud et celle de la pauvreté qui y
est attachée ajoutent aux problèmes, drames et menaces écologiques.
Telle est cette histoire des responsabilités. Quelle est celle des avertissements ?
B- DE NOMBREUX AVERTISSEMENTS FACE A LA DEBACLE
ECOLOGIQUE
8
On peut toujours se dire que les acteurs, personnels et collectifs, de ces
avertissements n’ont pas été assez nombreux, radicaux, tenaces, volontaires ,
organisés puisque la débâcle écologique est là.
On ne saurait oublier pourtant des militants et militantes qui ont payé de leurs
vies leurs engagements. Et d’autres qui ont commencé des remises en cause dans
leurs théories et leurs pratiques.
On ne saurait oublier tous ces actes porteurs de certains changements et se dire
que la débâcle écologique aurait pu être plus rapide et plus massive s’ils
n’avaient pas été là.
On ne saurait oublier enfin la puissance des forces et des logiques du
productivisme.
Si l’on résonne en termes de personnes voilà , symboliquement , les uns après
les autres, une foule qui serait probablement la suivante :
en tête l’immense cortège des humains et de l’ensemble du vivant, victimes
des problèmes des drames et des menaces environnementaux, dont les
survivants témoignent,
viennent ensuite des auteurs anti productivistes ,
puis des scientifiques, des militants d’associations,
des fonctionnaires d’organisations internationales,
d’ autres auteurs de nombreuses disciplines,
des politiciens,
des parties de populations qui prennent conscience et se remettent en cause…
9
Des avertissements sur la dégradation mondiale de l’environnement commencent et
se multiplient mais le productivisme continue.
Dégradation des ressources naturelles, catastrophes écologiques, menaces de
diverses sortes, réchauffement climatique, espèces décimées, pollutions multiples : le
doute accompagne la toute-puissance. Trois approches de l’environnement
apparaissent et se sont développées avant tout sous la pression des problèmes,
des drames et des menaces écologiques.
L’approche scientifique de l’environnement (1),
l’approche socio-économique de l’environnement(2),
l’approche politico-juridique(3).
1- L’approche scientifique de l’environnement se développe.
L’étude des relations des espèces avec leurs milieux a produit des premiers effets
seulement au XIXe siècle. Des historiens de l’écologie ( Acot, Deléage, Drouin) à la
fin des années 1980 ont montré que l’écologie scientifique est plus que centenaire.
Les concepts sont nés en Europe au XIXème puis ont gagné les Etats-Unis. Au
XIXème retenons la botanique géographique avec Humboldt et Warming, puis bien
sûr la théorie de l’évolution avec Darwin. En 1866 Haeckel est l’inventeur du terme
écologie. Au début du XXème voilà les premières études de la biosphère, voilà aussi
l’écosystème puis l’écologie animale, la chaine alimentaire, la niche écologique, les
points chauds de la biodiversité…
Voilà des études des Nations Unies, de réseaux de chercheurs et d’ONG sur la
dégradation de la biodiversité.
Voilà aussi les climatologues et leurs travaux, en particulier à partir du premier
rapport du GIEC en 1990, ils alertent la communauté internationale sur le
10
réchauffement, ces travaux ont été primordiaux dans la prise de conscience. Les
autres rapports sont de 1995 , .2001 , 2007, 2013-14, 2019 (rapport spécial sur les
océans et les zones glaciaires), le prochain sera publié le premier semestre de 2022.
Il faut cependant souligner que si Arrhenius, chercheur suédois, avait expliqué en
1895 le rôle de l’effet de serre , de 1895 à 1956 c’est le silence chez les
climatologues alors qu’une commission internationale de climatologie avait été
créée en 1926. En 1956-57 des chercheurs aux Etats-Unis reprennent cette hypothèse
et la précisent mais de 1956 à 1976 c’est une obstruction de la part des climatologues
dominants aux Etats-Unis et en Europe qui écrivaient que le monde s’acheminait
vers un petit âge glaciaire.
(Voir notre article in « Incertitude juridique, incertitude scientifique », Presses
universitaires de Limoges, 2001).
Le GIEC sera enfin créé en 1988.
2- L’approche socio-économique de l’environnement se trouve face à la
puissante machine productiviste.
Elle a été plus tardive : il a fallu attendre 1960 pour que l’idée selon laquelle les
ressources naturelles n’étaient pas forcément illimitées commence à être prise en
compte !
C’est le fameux rapport demandé à des chercheurs du Massachussets Institute of
Technologie par le Club de Rome en 1970 et publié en 1972, « Les limites à la
croissance », qui avertit clairement que le monde va vers un effondrement sous les
effets conjugués de la pollution, de l’explosion démographique et du manque de
ressources. On ne peut avoir de croissance illimitée dans un monde limité.
A ces auteurs se joignent les ouvrages et articles de philosophes, de sociologues ,
d’économistes et de beaucoup d’autres qui lancent de multiples avertissements et
proposent des alternatives.
11
Il faut souligner ici également le rôle essentiel des associations, des ONG dans la
prise de conscience des citoyens, dans les pressions sur les pouvoirs politiques,
dans la mise en avant d’alternatives.
3- L’approche politico-juridique de l’environnement dramatiquement lente.
En premier lieu au niveau international on peut retenir la date de la Conférence
de Stockholm de 1972, moment de prise de conscience de la responsabilité des
États, l’environnement devient un enjeu politique. Les États ont été obligés de
répondre — nationalement, régionalement, internationalement — à cette pression des
faits et des opinions publiques. En 1992 la Conférence de Rio marquera des
avancées juridiques, mais celle encore à Rio en 2012 marquera une récession
des volontés.
Rappelons que c’est en 1972 à la Conférence de Stockholm qu’est évoqué pour la
première fois au niveau de l’ensemble les Etats le danger du réchauffement
climatique, qu’il faut attendre 1992 pour voir une convention, 1997 pour qu’arrive
son protocole, 2005 pour qu’il entre en vigueur, 2015 pour un nouvel accord à Paris
qui est entré en vigueur en 2016, soit au total 44 ans (1972-2016) pour faire les
« premiers pas » ! Certes un chemin de mille pas commence par quelques pas, mais
quel est le temps qui reste pour construire cet intérêt commun de l’humanité ?
On a donc, souvent, décidé … qu’on déciderait plus tard. On retrouve cette
tendance lourde dans la plupart des conférences climatiques précédentes. « A
l’auberge de la décision les gens dorment bien » dit un proverbe. Les délégations
étaient certes motivées pour l’Accord sur le climat de 2015, en surmontant
parfois des intérêts nationaux, en dégageant parfois des intérêts communs, ce
qui n’était pas rien, mais lorsque l’intérêt commun de l’humanité les appelle
pourquoi ne répondent-elles pas ?
En second lieu l’Accord de Paris, sans remises en cause des
responsabilités, persiste dans des formes d’injustice climatique.
12
Ce consensus pour trouver un accord entre les Etats est la preuve, affirment certains,
qu’il y eu un compromis porté la justice climatique c’est à dire par la reconnaissance
que les pays développés et les pays en développement ont du principe consacré à
nouveau par l’Accord (principe déjà présent dans la Convention de 1992 et dans le
Protocole de 1997)des responsabilités communes mais différenciées dans le
changement climatique et que leurs capacités respectives à y faire face sont inégales.
-Mais sont renvoyés dans le préambule (ce qui est mieux que rien mais qui n’est
pas assez contraignant) les impératifs d’une transition juste, le respect des droits de
l’homme, des droits des peuples autochtones, l’équité entre les générations. Vous
avez dit justice ?

  • En plus de cela il y a, dirait Aragon, un « silence qui a le poids des larmes », celui
    sur les déplacés environnementaux et sur leurs droits. Quelle honte, quelle
    tristesse, quelle fuite devant les responsabilités ! On sait qu’ils sont et seront surtout
    dans les pays du Sud. Voilà qui en dit long sur ce qui constitue déjà, aux yeux de
    certains, de nouvelles classes dangereuses en voie d’explosion dans les décennies à
    venir. Au moins aurait-on pu avoir le courage minimal d’annoncer la nécessité d’une
    réunion internationale spécifique. Vous avez dit justice ?
    -Aucun mécanisme clairement défini pour faciliter le transfert des technologies,
    pour supprimer des barrières à l’accès, barrières liées aux droits de propriété
    intellectuelle. Vous avez dit justice ?
    -Egalement certes les parties qui reconnaissent la nécessité d’éviter et de réduire au
    minimum les pertes et préjudices liés aux effets néfastes des changements
    climatiques et d’y remédier mais la décision de la COP précise que « l’Accord ne
    peut donner lieu ni servir de fondement à aucune responsabilité ni indemnisation. »
    Les pays développés refusent de devoir indemniser les pays en développement pour
    les dommages climatiques. Vous avez dit justice ?
    -Enfin l’absence aussi d’un tribunal international sur la justice climatique, même
    si on peut estimer très positif le fait que des associations saisissent des tribunaux
    nationaux pour poursuivre l’Etat considérant qu’il ne faisait pas assez pour lutter
    contre le réchauffement climatique. Vive la justice climatique !
    13
    (Voir sur ce site notre article « l’Accord de Paris sur le climat.» ).
    Certes ces approches scientifiques, socio-économiques et politico-juridiques ont
    eu ici et là des aspects positifs.
    Mais les logiques et la puissance du productivisme ont empêché des contremécanismes,
    radicaux et à tous les niveaux géographiques , de se mettre en
    place.
    Les groupes de pression industriels, la puissance de la financiarisation (banques,
    bourses…) à partir de 1971 (date de la fin de la convertibilité du dollar en or),
    l’arrivée des pays émergents dans le système productiviste, tous ces éléments
    font que cette course effrénée continue.
    On en arrive ainsi en 2020 à plus de 1400 milliards de tonnes de dioxyde de
    carbone accumulés depuis deux siècles et prisonniers dans la basse atmosphère
    c’est à dire entre 0 et 15 km au dessus du niveau de la mer.
    Un documentaire remarquable intitulé « L’homme a mangé la Terre », de Jean-
    Robert Viallet ( Arte , 2019). se termine en affirmant que « l’anthropocène est peutêtre
    un point de non retour. »
    Les collapsologues se multiplient, ils croient à « l’effondrement » de la civilisation
    industrielle dans les années et les décennies qui viennent.
    D’autres , comme Edgar Morin, croient encore à une « métamorphose de
    l’humanité » .
    Telle est cette synthèse des avertissements écologiques. Quelles sont les logiques des
    responsabilités environnementales ?
    14
    C- LES LOGIQUES PROFONDES ET LES RESPONSABILITES DE LA DEBACLE
    ECOLOGIQUE
    Ces logiques sont au nombre de douze, elles peuvent être regroupées en six points
    (1, 2 , 3, 4, 5, 6) .(sur « Les causes de la débâcle écologique » voir nos quatre
    articles).
    1-La recherche du profit, la financiarisation de l’économie, l’expropriation des
    élu(e)s et des citoyen(ne)s.
  • La recherche du profit est un mobile puissant pour des organismes et des
    personnes. Elle met de côté d’autres logiques qui ne la favorisent pas, ainsi la
    protection écologique… sauf si celle-ci lui apparait rentable.
  • La financiarisation de l’économie est synonyme de fructification des patrimoines
    financiers avec des opérateurs, à la fois puissants et fragiles, qui ont donc des
    logiques spécifiques .
    -L’expropriation des élu(e)s et des citoyen(ne)s n’a-t-elle pas tendance, ici ou là, à
    apparaître ou à se développer ? Ainsi les marchés financiers n’entraînent-ils pas
    une expropriation du politique par le financier ? La primauté du libre-échange et
    la puissance des firmes géantes n’entraînent-elles pas une expropriation du social par
    l’économique ? La compétition n’entraîne-t-elle pas une expropriation de la solidarité
    par l’individualisme ? La vitesse n’est-elle pas un facteur de répartition des richesses
    et des pouvoirs qui défavorise ou rejette des organismes et des individus plus lents ?
    2- L’efficacité économique et la priorité du court terme.
    15
  • L’efficacité économique est synonyme du moment où, cessant d’être au service
    de la satisfaction de véritables besoins, la recherche d’efficacité devient sa propre
    finalité.
  • La priorité du court terme est synonyme de dictature de l’instant au détriment
    d’élaboration de politiques à long terme qui soit ne sont pas pensées en termes de
    sociétés humainement viables, soit ne sont pas mises en oeuvre et disparaissent
    dans les urgences fautes de moyens et de volontés.
    On est loin de certaines tribus d’indiens qui prenaient des décisions en essayant de
    penser leurs effets sur plusieurs générations…
    3- Le culte de la croissance, la course aux quantités, la conquête et la défense
    des parts de marchés.
  • Le culte de la croissance est synonyme du « toujours plus », de course aux
    quantités, de mise en avant de critères économiques supérieurs aux critères
    sanitaires, environnementaux, sociaux, culturels, de surexploitation des
    ressources naturelles, de fuite en avant dans une techno science qui a tendance, ici et
    là, à s’auto reproduire et à dépasser les êtres humains.
  • La course aux quantités est synonyme d’une surexploitation des ressources
    naturelles, de surproductions, de créations de pseudos besoins alors que des besoins
    vitaux ne sont pas satisfaits pour la grande majorité des habitants de notre planète.
    -La conquête et la défense des parts de marché est synonyme d’un libre-échange
    tout-puissant qui repose sur des affrontements directs, des absorptions des faibles par
    les forts, des guerres des prix, des efforts de productivité qui poussent à de
    nouvelles conquêtes de nouveaux marchés.
    16
    4-La marchandisation du monde et de la nature, la domination sur la nature.
  • La marchandisation du monde est synonyme de transformation, rapide et
    tentaculaire, de l’argent en toute chose et de toute chose en argent. Voilà de plus
    en plus d’activités transformées en marchandises, d’êtres humains plus ou moins
    instrumentalisés au service du marché.
    -La marchandisation de la nature. Les éléments du vivant (animaux,
    végétaux) sont décimés, les éléments de l’environnement sont entrés dans le
    marché (eaux, sols, air…).Dans ce système « tout vaut tant », tout est plus ou moins
    à vendre ou à acheter. (Voir « La marchandisation de la nature » voir nos trois billets
    sur ce site et notre article in Mélanges en l’honneur de Soukaina Bouraoui, Mahfoud
    Ghezali et Ali Mékouar, Hommage à un printemps environnemental, PUF,2016.)
  • La domination sur la nature fait de celle-ci un objet au service des êtres
    humains, ses ressources sont souvent exploitées comme si elles étaient inépuisables,
    de toutes façons certains pensent que l’homme est capable de se substituer peu à
    peu à la nature à travers une artificialisation totalisante, il commence à se dire même
    capable, après l’avoir réchauffée, de « mettre la Terre à l’ombre » par de
    gigantesques projets technologiques (géo-ingénierie).
    5-La militarisation du monde.
    -Cette logique profonde est synonyme de recherches scientifiques à des fins
    militaires en particulier sur les armes de destruction massive, synonymes
    d’industries d’armements, de camps militaires et de grandes manoeuvres, de
    régimes militaires ou de poids de l’armée dans des régimes politiques,
    -Logique qui est également synonyme de besoins vitaux non satisfaits et de
    participation à des inégalités criantes de territoires et d’êtres humains victimes des
    17
    guerres. Dans plusieurs articles ainsi que dans nos deux ouvrages « Construire la
    paix » (éditions La Chronique sociale,1988) nous avons souligné les liens multiples
    et dramatiques entre « les conflits armés et l’environnement ».
    6-La logique de compétition.
  • La logique de compétition est omniprésente
    Elle alimente les logiques précédentes et elle est alimentée par ces logiques. Nous
    sommes entrés dans la révolution scientifique, il faut être novateur, notre droit à
    l’existence est fonction de notre rentabilité ( ! ) « Etre ou ne pas être compétitif »
    nous dit le système, si vous n’êtes pas compétitif – pays, région, ville, entreprise,
    université, personne…- vous êtes dans des perdants, vous êtes morts.
    La compétition est un discours-vérité qui a de très nombreux fidèles, ils sont envahis
    par cette obsession. On est entré dans le grand marché, il faut donc libéraliser,
    dérèglementer, privatiser, peu importe le sens du « vivre ensemble » et celui du
    « bien commun ». La compétition est considérée comme sacrée, elle nous protège, il
    n’y a plus d’autres critères d’appréciation que la performance, la compétitivité, la
    rentabilité.
    « Chacun invoque la compétitivité de l’autre pour soumettre sa propre société aux
    exigences systématiques de la machine économique. » écrivait magnifiquement et
    tragiquement André Gorz. « La logique de la compétitivité est élevée au rang
    d’impératif naturel de la société » écrit aussi avec la même force Riccardo Petrella
    qui dénonce « l’Evangile de la compétitivité ». (Voir « L’Evangile de la
    compétitivité, malheurs aux faibles et aux exclus », Riccardo Petrella, Le Monde
    diplomatique, septembre 1991et « Litanies de Sainte Compétitivité », Le Monde
    diplomatique, février 1994).
    -La compétition pousse à la guerre donc participe à la débâcle écologique
    18
    On constate que le productivisme, pour maintenir ses taux de profit, a besoin de
    renouveler ses stocks d’armements. Dans la compétition de la course aux
    armements, un des moyens massifs est la production de conflits armés. Les
    armements constituent une des logiques infernales du productivisme. Ils contribuent
    à fabriquer l’image de l’ennemi que l’on doit surpasser en armements. Ils contribuent
    à allumer des poudrières. Ils portent atteinte dans leur production et leur utilisation
    aux populations et à l’environnement. Ils enlèvent des sommes colossales pour des
    besoins criants. Ils accroissent l’insécurité ce qui en appelle à de nouveaux
    armements et de nouvelles compétitions.
    -La compétition pousse à la croissance démographique
    Le productivisme a ici deux discours et deux pratiques.
    Il affirme qu’il faut être puissant et qu’une population nombreuse est un atout dans la
    compétition militaire et économique. A contrario il fabrique l’image de l’adversaire
    ou de l’ennemi en dénonçant les risques d’autres populations importantes, en
    particulier quant aux migrants et aux déplacés environnementaux considérés comme
    de nouvelles classes dangereuses.
    En fait on constate qu’une population nombreuse peut être un poids pour l’économie
    et l’environnement. Tout dépend du type de développement, s’il est productiviste ou
    bien si des luttes pour le partage des richesses et contre la débâcle écologique sont
    engagées dans le pays en question. D’autre part les coopérations interétatiques et les
    accueils bien organisés de réfugiés peuvent contribuer à des solidarités et éloigner la
    fabrication d’adversaires ou d’ennemis. On constate aussi que « le meilleur
    anticonceptionnel c’est le développement » lequel amène à avoir moins d’enfants
    quand on sort de la pauvreté.
    Il faudrait pourtant des politiques de ralentissement de la croissance beaucoup plus
    volontaires puisqu’en 2050, si tout continuait comme cela, il y aurait de l’ordre de 10
    milliards de terriens. Le productivisme y voit avant tout de nouveaux marchés. Peu
    importe l’empreinte écologique, à ses yeux on peut toujours réparer les destructions
    environnementales, c’est la logique de la suprématie de la technoscience.
    19
  • La compétition globale est terricide et humanicide
    Finalement on retrouve cette opposition fondamentale entre ceux et celles ( de loin
    les plus nombreux avec une véritable « colonisation des esprits ») qui pensent que la
    compétition est naturelle, qu’elle est saine, bonne, nécessaire .
    Et ceux et celles (pour l’instant moins nombreux, mais quelque chose de minoritaire
    n’est pas faux pour autant…c’est simplement minoritaire) qui pensent que la
    compétition est un produit de l’histoire, qu’il y a des compétitions liées aux périodes
    et aux sociétés, que le productivisme pousse à une compétition omniprésente,
    omnipotente, omnisciente.
    La compétition mortifère doit laisser la place aux solidarités, aux coopérations, aux
    fronts communs. Les biens communs, le « vivre ensemble » peuvent et doivent
    l’emporter face aux périls communs qui s’appellent la débâcle écologique, les armes
    de destruction massive, les inégalités criantes, la toute-puissance de la techno science
    et des marchés financiers, bref face à des logiques qui assassinent la Terre et
    l’Humanité.
    ( Voir notre article in « Les biens communs environnementaux : quel(s) statut(s)
    juridique(s) ? », sous la direction de Jessica Makowiak et Simon Jolivet, Pulim ,
    Collection les cahiers du CRIDEAU, 07/2017)
    Telles sont les logiques profondes des responsabilités environnementales. Mais
    existent-ils des critères pour les déterminer ?
    D- LES CRITERES DE DETERMINATION DES RESPONSABILITES DE
    LA DEBACLE ECOLOGIQUE
    20
    La détermination des critères doit être faite par des organisations indépendantes, il
    s’agit d’organismes scientifiques travaillant souvent en réseau, d’organisations
    internationales du système des Nations Unies, de secrétariats et d’organismes
    spécialisés de conventions internationales de protection de l’environnement , enfin
    d’ONG qui pour certaines d’entre elles ont des équipes compétentes pour
    étudier tel ou tel type de critères et contribuent à faire connaitre de nombreuses
    études.
    Ces études sont d’autant plus intéressantes qu’elles montrent aussi l’évolution des
    acteurs, en particulier des Etats, dans le recensement de ces mesures.
    Une des questions qui se pose est de savoir si l’on doit tenir compte d’une période
    historique plus ou moins longue Ainsi par exemple quelles « responsabilités
    historiques » des pays du Nord par rapport à ceux du Sud dans les émissions de gaz
    à effet de serre? Et comment et jusqu’à quel point prendre aussi en compte des
    évolutions futures ?
    Les choses se compliquent également en tenant compte des échanges entre pays .On
    exporte des biens fabriqués dans un Etat pour une consommation dans un pays
    étranger, comment en tenir compte par exemple dans le réchauffement climatique ?
    Quels sont donc les critères essentiels aujourd’hui ? Il s’agit de l’empreinte
    écologique qui est, à ce jour, le critère le plus global (1).
    Il s’agit aussi des émissions de gaz à effet de serre, critère du réchauffement
    climatique.qui sont prises en compte dans l’empreinte écologique mais aussi de
    façon autonome (2).
    Nous pouvons enfin ajouter la valeur en eau, critère appelé à prendre plus
    d’importance face aux pénuries hydriques présentes et à venir. (3)
    Nous ajouterons un critère complémentaire relatif à la place occupée par chaque
    acteur dans le système productiviste (4).
    21
    Enfin nous nous demanderons s’il n’y a pas un autre critère complémentaire. Est-ce
    qu’une vision globale n’en appelle pas à une interrogation non seulement sur les
    générations passées et présentes mais aussi sur les générations futures ? (5)
    1-L’empreinte écologique.
    a- L’empreinte écologique c’est le poids de nos modes de vie sur l’environnement
    (production, consommation, déchets, transports…).
    Elle est calculée en surfaces nécessaires pour ces modes de vie, c’est « l’hectare
    global », on peut ainsi calculer l’empreinte écologique de l’ensemble de la
    population mondiale, d’un pays, d’une ville, d’une personne…
    La planète met à notre disposition 2,1 hectares globaux par habitant, en 2016 nous
    utilisons 2,7 hectares globaux par habitant de la Terre. Notre empreinte écologique
    dépasse (depuis 1986 nous disent des chercheurs, donc depuis plus d’ une trentaine
    d’années) la capacité de régénération de la Terre. A cette allure et étant donnée
    l’ampleur de l’empreinte écologique « il faudrait plusieurs planètes Terre » pour ce
    type de développement productiviste. La Terre n’a donc plus la capacité de
    produire nos ressources et d’absorber nos déchets.
    A partir du 29 juillet 2019, l’humanité vit à crédit jusqu’au 31 décembre2019.Il est
    probable que les années suivantes le jour du dépassement sera de plus en plus avancé
    dans l’année. Ce Jour du dépassement de la Terre c’est le jour où l’humanité a
    consommé toutes les ressources que la planète est capable de produire en un an,
    creusant toujours plus notre dette écologique. A l’échelle de la planète comme
    l’affirme le WWF « nous avons pêché plus de poissons, abattu plus d’arbres et
    cultivé plus de terres que ce que la nature peut nous offrir au cours d’une année. »
    Quant à nos émissions de gaz à effet de serre, elles ont été plus importantes que ce
    que nos océans, nos sols et nos forêts peuvent absorber.
    Cette date est calculée chaque année par le Global Footprint Network (GFN),
    créateur du concept d’empreinte écologique, en liens désormais avec le WWF. Cette
    22
    date grignote peu à peu le calendrier, passant ainsi par exemple du 29 septembre en
    1999 au 29 juillet en 2019.
    b- Cette empreinte écologique est marquée par de fortes inégalités donc par
    des responsabilités différentes.
    Au niveau mondial le poids des modes de vie sur l’environnement, selon les Nations
    Unies, en 2005 représentait pour les pays du Nord 80% des ressources de la planète
    pour 20% de la population mondiale.
    Au niveau continental selon le Living Planet Report(2009) en 2006 par continent
    quelle était l’empreinte écologique ? Amérique du Nord 9,4 hectares globaux par
    habitant, Union européenne 4,8, Amérique latine 2 hectares, Asie 1,3, Afrique 1,1
    hectare.
    Au niveau de chaque pays en 2012 l’empreinte va de 9,6 hectares pour les
    Emirats arabes unis, à 3,8 hectares pour la France, puis 1,8 hectare pour le Brésil, 2
    pour la Chine et 1,9 pour l’Inde, arrivent à la fin de la liste des pays comme par
    exemple le Bangladesh 0,5, l’Afghanistan 0,1, donc entre les deux pays extrêmes
    une différence de 100…
    Aux groupes de pays, à chaque pays et à chaque continent on peut ajouter les
    empreintes écologiques de villes, d’entreprises, de personnes qui visent donc
    cette forme fondamentale de responsabilité écologique.
    2-Les émissions de gaz à effet de serre.
    Des accords internationaux prévoient cette mesure compliquée à recenser et à
    surveiller.
    Les émissions mondiales de CO2 ont triplé entre 1970 et 2017, cette tendance
    mondiale à ce jour ( octobre 2019) n’est pas encore radicalement remise en cause.
    23
    Les deux pays les plus gros émetteurs étaient en 2017 la Chine représentait 28 % du
    total mondial, les Etats-Unis 15% soit 43% à tous deux.
    Les pays qui émettent le plus de GES par habitant sont différents Avec près de 50
    tonnes de CO2 par an, le Qatar est le plus gros émetteur de CO2par habitant, suivi par
    le Koweït et les Émirats arabes unis. Par comparaison, chaque Français émet 5,48
    tonnes de CO2 par an. En effet ces pays du Golfe persique émettent de grosses
    quantités de CO2 à cause de l’exploitation pétrolière et gazière, et de la faiblesse de
    leur population. Autres gros pollueurs par habitant : les États-Unis et l’Australie, cette
    dernière étant très dépendante du charbon.
    Ainsi pour les pays, les entreprises, les villes, les personnes et l’ensemble des
    acteurs les émissions de gaz à effet de serre sont , selon les cas, presque
    inexistantes, faibles , moyennes, importantes ou gigantesques.
    3-La consommation d’eau et l’empreinte de l’eau.
    -On rappellera ce constat fait en particulier par l’UNICEF
    « 1,1 milliard de personnes n’ont pas accès à l’eau potable. • 2,6 milliards de
    personnes (1 tiers des habitants de la planète) ne disposent d’aucune installation
    sanitaire. • 7 millions de personnes dont au moins 2 millions d’enfants de moins de 5
    ans meurent chaque année de maladies liées à l’eau. • Plus de 1,6 millions d’enfants
    de moins de 5 ans meurent chaque année de maladies liées à l’eau polluée. • Des
    millions d’enfants souffrent de parasitoses, associées à la malnutrition et l’anémie. •
    118,9 millions d’enfants de moins de 15 ans souffrent de bilharziose, une grave
    maladie qui atteint le foi et les intestins. »
  • « La consommation quotidienne en eau par habitant dans les zones résidentielles
    s’élève à 600 litres en Amérique du Nord et au Japon, entre 250 et 350 litres en
    Europe, elle est de 10 à 20 litres en Afrique subsaharienne. La moyenne mondiale de
    consommation d’eau par an est de 600m3 par habitant, soit 137 litres par jour. Au
    cours de 100 dernières années, la population mondiale a triplé alors que la
    consommation d’eau pour l’utilisation humaine a été multipliée par 6. Aujourd’hui,
    la pénurie d’eau affecte 250 millions de personnes dans 26 pays pour un volume
    annuel de 1 000m3 par personne. »
  • Existe donc avant tout la consommation directe d’eau pour un usage
    domestique, industriel et surtout agricole, l’agriculture représente 70% de la
    24
    consommation mondiale d’eau. D’où l’un des intérêts de la remise en cause de
    l’agriculture productiviste par d’autres agricultures.
  • Existe aussi le concept d’eau virtuelle c’est-à-dire la quantité d’eau pour
    fabriquer un bien de consommation. Le cinquième de l’eau consommée est ainsi
    de l’eau virtuelle pour produits agricoles et industriels .
    . On a pu mesurer par exemple que pour boire une tasse de café aux Pays-Bas, il faut
    140 litres d’eau en comptant tous les stades de la production du café, ainsi pour
    cultiver, récolter, torréfier, transformer, emballer et transporter les grains de café.
    Il faut 16 000 litres pour un kilo de boeuf, ou encore 1000 litres d’eau pour un litre
    de lait, pour un oeuf 135 litres d’eau, pour un 1 tee-shirt en coton 2 000 litres
    d’eau…chiffres qui peuvent varier selon les processus de production et de
    distribution. Production et consommation productivistes sont donc ici aussi en
    cause.
    4- La place occupée par chaque acteur dans le système productiviste.
    a- Ce critère a une faiblesse, une certaine imprécision. Un acteur peut en effet
    occuper plusieurs places à la fois, il peut aussi en occuper différentes tour à tour.
    Ce critère a un avantage réel et massif, celui d’attirer l’attention sur des
    responsabilités plus fortes que d’autres dans la production des logiques
    productivistes, et donc celui d’un caractère relativement opérationnel pour penser et
    mettre en oeuvre des contre-logiques.
    25
    b- Nous avions dans deux ouvrages « Construire la paix » (éditions la
    Chronique sociale, 1988) bâti notre réflexion relative à la course aux
    armements sur cette « armature » et ce « coeur » de la « machine infernale » de
    cette course.
    Nous pouvons reprendre cette même idée forte pour l’environnement et la
    débâcle écologique, celle du « coeur » au centre du système, celle de l’armature
    autour du « centre. »
    c- Les acteurs qui se trouvent dans « le coeur de la machine infernale » de la
    débâcle écologique ont le plus souvent des responsabilités gigantesques, ou très
    importantes.
    Il s’agit des acteurs de la techno science (des réseaux scientifiques, des industries),
    de la finance (banques et bourses…), de l’économie (firmes multinationales ,
    complexe scientifico-militaro-industriel par exemple).
    d- Les acteurs qui se trouvent dans « l’armature de la machine infernale » de
    la débâcle écologique ont le plus souvent des responsabilités importantes ou
    secondaires.
    Il s’agit des acteurs du politique, de l’ éducatif , du médiatique, du juridique, et
    d’autres domaines d’activités…
    Autrement dit en termes de contre-logiques, de contre-mécanismes l’essentiel se
    joue et va se jouer dans le scientifique, le financier et l’économique.
    Ce qui ne veut surtout pas dire que
    dans les autres domaines les responsabilités n’existent pas, en particulier
    politiques !
    26
    Mais par exemple on connait le poids des lobbies et des marchés financiers sur
    le pouvoir politique…
    …sans oublier bien sûr qu’il ne s’agit que d’un schéma et que les interactions
    sont très nombreuses entre les différents domaines du centre et de la périphérie
    du système productiviste pour le meilleur , l’entre-deux et le pire.
    e- Cette place des acteurs dans le système productiviste pose d’abord
    essentiellement la question des responsabilités des acteurs collectifs puissants.
    Il faut mettre en oeuvre leurs responsabilités, ainsi en termes de dommages
    écologiques, responsabilités fondées principalement sur le principe pollueurpayeur
    et sur de multiples systèmes de prise en compte des risques.
    Nous reviendrons au niveau juridique sur la prise en compte de dommages
    futurs qui pose question mais qui se reporte surtout vers des responsabilités en
    termes de précaution, de prévention, et de remise en cause de logiques
    productivistes.
    f- La place des acteurs c’est aussi celle d’un certain nombre de responsables
    Dans « le coeur des mécanismes » il s’agit, par exemple, de dirigeants de firmes
    multinationales persistant dans de graves pollutions, de dirigeants de banques
    continuant à soutenir des énergies fossiles, de patrons de laboratoires
    travaillant dans des recherches sur les armes de destruction massive…
    Dans « l’armature des mécanismes » il s’agit, par exemple, d’ hommes
    politiques refusant des politiques de réduction des gaz à effet de serre , de
    journalistes et d’ enseignants soutenant un négationnisme climatique…
    27
    Les sanctions pourront être financières, politiques, juridiques…
    De ce dernier point de vue la mise en oeuvre de sanctions pénales pour atteinte
    aux générations futures devraient demain être consacrées et mises en oeuvre.
    (Voir mon article sur « La fraternité transgénérationnelle », particulièrement les
    atteintes qui lui sont portées).
    Au-delà des personnes voilà les générations…
    5-Les générations et les responsabilités écologiques
    a- Quelques données relatives aux générations
    Les sens du mot « générations» sont nombreux :
    Pour le démographe c’est la totalité des individus nés une même année, pour le
    généalogiste c’est l’ensemble des personnes classées selon une relation de filiation,
    pour le sociologue ce sont des personnes d’un âge proche qui ont des vécus
    historiques communs, pour l’historien c’est la durée de renouvellement des
    personnes, ce sera le sens choisi ici.
    Par rapport à sa durée une génération humaine correspond au cycle de
    renouvellement d’une population adulte, entre 22 et 32 ans, soit environ 30 ans.
    Le nombre de générations passées (d’après nos calculs aussi harassants
    qu’incertains) serait de l’ordre de 6800 à 8000 sur 200.000 ans, date d’apparition
    de l’Homo sapiens.
    Quant aux générations présentes elles sont au nombre de trois voire quatre (arrièrepetits-
    enfants). Les générations à venir seraient au minimum de zéro (le lendemain
    28
    de l’horreur nucléaire d’Hiroshima Jean-Paul Sartre écrit « nous savons désormais
    que chaque jour peut-être la veille de la fin des temps »), ou de quatre d’ici 2100
    (puisqu’existent quelques hypothèses scientifiques d’une humanité ne dépassant pas
    le siècle), ou alors d’un nombre indéterminé de générations après 2100.
    b- Que peut-on dire du mot « transgénérationnel » ?
    « Trans » est un préfixe qui signifie « au-delà », il exprime l’idée d’une
    traversée. L’inter générationnel est relatif aux générations différentes qui se
    rencontrent dans une même vie, le trans générationnel est relatif aux générations qui
    se succèdent. L’inter et le trans générationnels existent dans les transmissions
    familiales. C’est par exemple le domaine de la psycho généalogie. La transmission
    intergénérationnelle est plus observable, puisque les quatre générations peuvent
    être en contact, la transmission transgénérationnelle à distance, est plus floue, plus
    porteuse d’inconnues. Ces transmissions peuvent nous alourdir, celles par exemple
    de traumatismes, et/ou au contraire nous aider à grandir.
    c- Les « trois fois trois générations » et la débâcle écologique
    Les « trois fois trois générations » par rapport à la débâcle écologique (nous
    proposons de les appeler ainsi , comme nous avions proposé voilà plus de trente
    ans l’expression « productivisme terricide et humanicide » dans les deux
    ouvrage « Construire la paix, éditions Chronique Sociale,1988).
    Depuis les débuts de l’anthropocène on peut penser que
    Nous avons reçu de trois générations passées ( 1850 à 1945 environ), un
    environnement pour une part atteint et faisant l’objet de destructions en marche sous
    les logiques du productivisme et de l’anthropocène.
    29
    Nos trois générations présentes (1945 à 2030 environ) ont produit un
    environnement pour une large part détruit et plongeant dans des apocalypses
    écologiques multiformes, massives, en interactions et rapides sous les logiques du
    productivisme et de l’accélération de l’anthropocène.
    Les trois générations qui viennent juste après nous (2030 à 2120 environ) se
    trouvent donc devant une question vitale : cette veille de fin des temps peut-elle
    encore, à travers quelles volontés, quels moyens et quelles marges de
    manoeuvres, se transformer en aube d’humanité ?
    En fait il n’est pas exclu que leurs marges de manoeuvres soient relativement faibles,
    un des exemples les plus terribles est celui du réchauffement climatique en route qui
    pour ralentir demande une d’abord une gigantesque remise en cause du coeur de la
    machine accompagnée certes aussi de l’armature de la machine infernale de la
    débâcle écologique.
    d- Quatre remarques sur ce schéma des « trois fois trois » qui contient
    certainement une part de vérité :
  • En premier lieu peut-on aussi raisonner en termes de générations alors que les
    personnes et différents acteurs dans chaque génération ont des responsabilités
    très inégales dans cette débâcle écologique, responsabilités qui ont été sont et
    seront( ?) selon les cas presque inexistantes, faibles, moyennes, importantes ou
    gigantesques ?
    On est renvoyé par exemple à l’empreinte écologique d’une personne, d’une
    entreprise, d’une ville, d’un pays.
    Les choses se compliquent puisqu’il faudrait distinguer, pour être plus juste, ce
    poids sur l’environnement à un moment donné et dans la durée de cet acteur.
    30
  • En second lieu la question des rapports entre les générations se pose une fois de
    plus, entre les générations passées et les présentes, entre les générations présentes et
    les futures. (Voir par exemple nos articles sur les générations futures.)
    Mais la question se pose aussi entre les futures immédiates (jusqu’en 2120 environ )
    et les futures qui viendraient( ?) juste après elles…
  • En troisième lieu se pose la question des responsabilités générales et
    écologiques des dernières générations … si arrivaient la fin des temps
    humains et d’une grande partie du vivant …
    On peut penser que deux séries de situations subsisteraient :
    Une série de situations selon lesquelles la responsabilité écologique et la
    responsabilité générale n’ont plus de sens. Cela pour deux raisons :
    D’une part on ne peut absolument plus changer les choses, les actes allant dans ce
    sens sont de, façon certaine, inutiles, vains.
    D’autre part on n’a plus de responsabilité morale vis-à-vis des générations futures
    puisque l’espèce humaine s’éteint assez vite.
    Cette désespérance multiplie des désespoirs sous diverses formes face à l’extinction
    de l’humanité. Mais sont aussi présents des actes de courage personnels et collectifs.
    Une autre série de situations selon lesquelles la responsabilité écologique et la
    responsabilité ont encore un sens. Cela pour deux raisons contraires à celles
    exprimées ci-dessus.
    D’une part on pense que jusqu’au bout des temps humains on peut changer les
    choses, les actes allant en ce sens voudraient être porteurs d’un espoir fou.
    D’autre part on considère que l’on a une responsabilité morale vis-à-vis des vivants
    qui restent dans ces dernières générations.
    31
    -En quatrième et dernier lieu une question est bien présente, celle des marges de
    manoeuvres de chaque génération, autrement dit la question des rapports entre les
    responsabilités et les libertés.
    Nous sommes ainsi arrivés dans une réflexion relative aux formes de responsabilités
    (éthiques, politiques et juridiques). (IIIème et dernière partie).
    Remarques terminales de cette deuxième partie.
    Quels sont donc les responsables de la débâcle écologique ?
    1- Historiquement on peut affirmer qu’il s’agit de deux pays, l’Angleterre puis
    les Etats-Unis, et de quelques unes de leurs entreprises dans la houille et le
    pétrole.
    2- Historiquement on peut affirmer qu’il s’agit ensuite de la colonisation c’est-àdire
    d’Etats européens ayant pillé en matières premières des pays lointains.
    3- Historiquement il s’agit aussi des deux guerres mondiales, c’est à dire encore
    d’Etats européens, qui ont entrainé ces deux boucheries mondiales, avec la
    responsabilité écrasante du système totalitaire nazi. Ces guerres ont été
    destructrices de multitudes d’êtres humains et aussi d’environnement en
    amont avec les industries d’armements, puis bien sûr pendant ces conflits
    armés et longtemps après. ( Voir nos articles sur « Les conflits armés et
    l’environnement. »)
    32
    4- Historiquement on peut affirmer qu’entre 1945 et 1989 les responsables
    principaux de l’accélération de l’anthropocène s’appellent les Etats-Unis et l’Union
    soviétique qui s’affrontent dans la guerre froide ,
    5- De nos jours de 1950 à 2020 ce sont aussi les pays du Nord et leurs habitants
    les plus aisés qui se ruent vers la société de consommation, avec en particulier la
    voiture qui en est un symbole et avec leurs firmes multinationales.
    La débâcle écologique continue à travers l’explosion démographique des pays du
    Sud et la pauvreté qui lui est attachée.
    Elle s’accélère avec la plongée des pays émergents, en particulier de la Chine,
    dans le productivisme.
    6- De nos jours les logiques terricides et humanicides du système productiviste
    sont en marche. Elles marchandisent la planète.
    La financiarisation du monde se produit à travers une montée des banques , des
    bourses et des paradis fiscaux.
    Leurs responsabilités dans la débâcle écologique sont énormes, l’argent roi n’a
    pas tenu compte de la protection de l’environnement en contribuant à le
    détruire ou en faisant semblant de le protéger sans remettre en cause les
    logiques profondes du productivisme.
    7- De nos jours des personnes responsables d’organismes au « coeur » mais aussi
    dans « l’armature » des mécanismes de la débâcle écologique font ou devraient
    faire l’objet de différentes formes de responsabilité environnementale
    (réparations, sanctions…).
    33
    6- De nos jours les critères pour déterminer les responsables de la débâcle
    écologique s’appellent l’empreinte écologique, les émissions de gaz à effet de
    serre, la consommation en eau, la place occupée par chaque acteur local,
    régional, national, international dans le système productiviste .
    Tout cela avec des responsabilités gigantesques ou importantes des acteurs de la
    techno science, de la finance et de l’économie
    et des responsabilités importantes ou secondaires pour les acteurs de la
    périphérie du système productiviste (politiques, médiatiques, éducatifs…. )
    A partir de ces critères on peut avoir une responsabilité certes difficile à établir
    pour chaque acteur dans le temps, cela du plus petit au plus gigantesque mais
    pour une large part reflétant des réalités, celles des personnes, des entreprises ,
    des banques et des bourses, des Etats et des autres acteurs…
    7- Enfin en termes de générations il apparait clairement que
    celles de 1850 à 1945 ont commencé à mettre en oeuvre la débâcle écologique,
    celles de 1945 à 2020(2030) ont plongé dans les logiques de cette débâcle,
    celles de 2020(2030) à 2120 se retrouvent donc devant des formes d’apocalypses
    écologiques qu’elles vont devoir affronter.
    Ce sont les générations de 1945 à 2020 qui ont les responsabilités les plus lourdes
    non seulement parce que leur course à la débâcle écologique était la plus
    gigantesque mais aussi parce que les prises de conscience de ces apocalypses en
    marche auraient pu voir davantage le jour et se traduire par des actes à travers
    ces avertissements qui commençaient.
    Le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) dans son rapport
    GEO 2000 sur « l’avenir de l’environnement mondial » affirme : « Des efforts sont
    faits pour enrayer la dégradation de l’environnement mais on admet également
    qu’ils sont trop peu nombreux et bien trop tardifs(…)Les améliorations et les
    34
    progrès seront vraisemblablement réduits à néant par le rythme et l’ampleur de
    la croissance économique au niveau mondial, par l’aggravation générale de la
    pollution du milieu et par la dégradation accélérée des ressources renouvelables
    de la planète. » Les autres rapports, par exemple GEO 5 en 2012, vont dans le
    même sens.
    8- Les générations qui arrivent se retrouveront donc devant trois séries de
    questions vitales :
    Quelles seront leurs volontés ?
    Quels seront leurs moyens ?
    Quelles seront leurs marges de manoeuvres ?
    Les générations ne sont qu’un élément des responsabilités tant il est vrai que les
    autres acteurs sont nombreux et que leurs responsabilités sont dérisoires,
    faibles, moyennes, importantes ou gigantesques.
    Tel est le tableau général des responsables et des responsabilités. Mais alors quelles
    sont donc les formes de responsabilités ? (voir III , IV, V)