Synthèse de l’histoire des relations internationales (1945 à nos jours au 2-4-2020) soit 75
ans:
Il n’est pas toujours évident de trouver des synthèses qui se veulent globales de l’histoire des
relations internationales. A la dimension politico-stratégique qui domine souvent
l’historique, on ajoutera l’évocation même rapide d’autres dimensions
(économiques, scientifiques, juridiques, écologiques, sanitaires, démographiques, sociales,
culturelles…) .L’auteur du blog est reparti ici de son ouvrage de « Relations
internationales »(éditions Ellipses) en ajoutant des développements allant dans ce sens et
bien sûr des mises à jour nécessaires.
Introduction.
Six remarques essentielles pour mieux situer et comprendre les choix de cette synthèse.
1- Le passé comme expérience ne peut-il pas contribuer à éclairer le présent agissant et
l’avenir comme « horizon de responsabilité »? Alexis de Tocqueville avait écrit « Quand le
passé n’éclaire plus l’avenir l’esprit marche dans les ténèbres »: cette affirmation se vérifie oh
combien! Mais, en même temps, certaines réalités, telles que la techno science, le marché
mondial, la débâcle écologique, ne sont pas toujours éclairées par le passé… et leur
accélération complique les situations. Les lumières ne sont pas faciles à trouver et les remises
en cause paraissent parfois insurmontables.
2- Et puis, avant de plonger dans cette synthèse, une question est toujours présente : mais
enfin qui fait l’histoire?
Répondre que ce sont les grands hommes, ou les peuples ou « tout le monde » voilà qui
témoigne de trois positions certes rapides mais très différentes.
On peut aussi mettre en avant les marges de manoeuvres des acteurs, du plus petit au plus
puissant.
On peut également distinguer les types d’histoires selon les domaines, ainsi tout à tour les
acteurs de l’histoire politique, économique,scientifique, militaire,écologique, culturelle…
On peut aussi raisonner en termes de mécanismes et de contre-mécanismes d’un système
productiviste devenu terricide et humanicide et examiner les acteurs qui agissent dans le sens
des « reproductions »,des « ruptures » ou des « entre deux » du système productiviste.On peut pour
chaque acteur,du plus petit au plus grand, remplir ces trois colonnes par rapport à la paix,la
justice,la démocratie,l’environnement.
On peut également raisonner en termes de dominations et examiner, à chaque époque dans
des lieux plus ou moins vastes, les dominants et les dominés.Aujourd’hui les dominants
s’appellent les marchés financiers,les firmes multinationales,les complexes de la techno
science, les complexes scientifico militaro industriels,les grands groupes médiatiques,les pays
du G20,le FMI,l’OMC,quelques organisations régionales dont l’Union européenne,sans
oublier bien sûr les hommes… même si la libération des femmes voit peu à peu le jour.
Pour aller vers une analyse se voulant plus globale,critique et créatrice, de
cette question « qui fait l’histoire? » on pourrait dire qu’il s’agit vraisemblablement de
mélanges, dans des proportions variables selon les lieux et les périodes, de trois séries
d’acteurs : des hasards(« le géant hasard « comme l’appelait Nietzsche),des nécessités
(cette catégorie floue n’est pas neutre,elle peut comprendre aujourd’hui par exemple des auto
reproductions du système productiviste, des temps de reconstitutions d’écosystèmes ), des
volontés (celles des dominants et des dominés cela à tous les niveaux géographiques,à
resituer par rapport à leur rôle dans le système productiviste).
Quelque soit l’analyse choisie(une de celles ci-dessus ou d’autres) pour répondre à la
question trois éléments qu’on ne peut passer sous silence sont aujourd’hui présents,
cela si on veut s’approcher d’un certain sens des ensembles :
-la complexité de ce système mondial , »penser c’est dialoguer avec la complexité » nous dit
Edgar Morin, elle est redoutable parce qu’elle montre des obstacles à surmonter pour faire
bouger des situations,ainsi pour les changements climatiques alors que le temps presse,
-les situations de certains des éléments de la maison commune qu’est la Terre atteignant
écologiquement des seuils d’irréversibilité pouvant remettre des acteurs en cause,ainsi les
pays et les groupes pétroliers,charbonniers,gaziers,
-l’accélération du système mondial, la vitesse est un des facteurs de répartition des
pouvoirs,ainsi par exemple les parlements souvent lents sont pris de vitesse par les exécutifs,
par exemple en matière de politique étrangère, les exécutifs sont « court circuités » plus ou
moins par les marchés financiers qui opèrent à la seconde,ou à la nanoseconde à travers des
robots.
3- Comme j’avais déjà fait ce choix dans mes cours et ouvrages de relations internationales,ce
panorama des relations internationales de 1945 à nos jours ne sera pas sans cris de révoltes
en particulier par rapport aux inégalités massives, hurlantes de la planète,par rapport au
productivisme terricide et humanicide, par rapport à la folie meurtrière quotidienne
en dépenses d’armements (5 milliards de dollars chaque jour en 2017).Ces dénonciations et
d’autres seront souvent accompagnées de rappels et d’appels à des alternatives, portées entre
autres par des ONG et différents auteurs dans le monde. .La tiédeur,l’indifférence,la
neutralité,la fuite , l’absence d’analyse globale,critique et prospective devant ces situations, ne
seront pas le choix de cette synthèse qui mettra souvent en avant des fins et des moyens
démocratiques,justes,écologiques et pacifiques(complétés et explicités dans d’autres
articles de ce blog).
4- En exergue si on nous demandait, arbitrairement, de ne retenir de 1945 à mai 2018,
seulement que deux évènements symboliques, l’un symbolique d’un monde dramatique, ce
serait les 6 et 9 août 1945, le lancement des bombes atomiques(Hiroshima,Nagasaki), l’autre
symbolique d’un monde d’espoir, ce serait le 9 novembre 1989, la sortie de Yalta (chute du
mur de Berlin).
5- Du point de vue politique le critère dominant est celui des rapports entre les Etats. De
1945 à 1991 c’est le « duopole » des Etats-Unis et de l’Union soviétique, les deux « supergrands
», « un seul lit pour deux rêves » disait un premier ministre chinois. De 1991
(implosion de l’Union soviétique en 15 Etats) à nos jours, les Etats-Unis se retrouvent
« hyper-puissance », mais n’est-ce pas aussi l’arrivée des pays émergents, en particulier
de la puissante Chine, sur la scène internationale ?
6- Du point de vue global le système international ne s’enfonce-t-il pas dans une crise
radicale, écologique, économique, sociale, politique, culturelle ? N’est-ce pas la crise du
système productiviste ? (Sur » le système international productiviste » voir les billets sur ce
blog).Les grands défis ne s’appellent-ils pas la débâcle écologique (avec en particulier le
réchauffement qui peut annoncer, ni plus ni moins , la fin du vivant avec 4 à 6°C de plus de
température moyenne de la planète vers 2100) , les armes de destruction massive,les inégalités
criantes,les logiques de toute-puissance de la techno-science et du marché mondial ?
7- Trois grandes périodes seront synthétisées,
dans la première (I ) (1945-1964) nous résumerons quatre sous-périodes,
dans la seconde (II) (1964-1989)
puis dans la troisième (III) (1989 à nos jours,11 juin 2018), nous résumerons à chaque
fois deux sous-périodes.
Chaque « résumé » soulignera les éléments primordiaux de chaque sous-période.
Nous rappellerons ensuite « des événements essentiels» reposant sur une énumération
globale sans prétendre à l’exhaustivité.
Enfin nous avons pensé important de rajouter une synthèse sur les grandes violences de
1945 à nos jours (IV) tant il est vrai que beaucoup d’oublis et de méconnaissances existent
lorsque nous voulons prendre en compte ce gigantesque élément.
I- De la Conférence de Yalta à la guerre du Vietnam (1945-1964)
Nous proposons d’envisager tour à tour quatre sous-périodes :
la formation des blocs, la guerre froide, la fausse détente, les confrontations localisées.
A- La formation des blocs (1945-1947)
1) Le résumé
a) L’ère nucléaire s’ouvre dramatiquement en 1945. Cette sous-période est celle de « la paix
manquée » puisque l’Europe va se séparer en deux. Deux blocs se constituent : d’une part les
Etats-Unis à la tête du « monde libre » c’est-à-dire l’Ouest, d’autre part l’Union soviétique à la
tête « du camp anti-impérialiste » c’est-à-dire l’Est.
b) Certes les Nations Unies ont vu le jour, mais les conférences de l’après-guerre témoignent
du partage du monde entre Etats dominants en 1945 (qu’on retrouve d’ailleurs membres
permanents du Conseil de sécurité.)
2) Des évènements essentiels
Il y avait eu l’avancée de juillet 1944 à travers les Accords de Bretton Woods (système
monétaire international, Fonds monétaire international, Banque mondiale), l’Union soviétique
cependant n’y participait pas.
La Conférence de Yalta (4 au11 février 1945 en Crimée) est une forme de « partage du
monde » entre Roosevelt, Churchill et Staline. Viennent ensuite la capitulation de
l’Allemagne (8 mai 1945 à Berlin), la création des Nations Unies (Charte de San Francisco,
26 juin 1945), la Conférence de Potsdam (en juillet 1945 entre Truman, Churchill et Staline)
où ce partage du monde continue.
C’est l’envoi terrifiant et apocalyptique des bombes atomiques par les Etats-Unis sur
Hiroshima et Nagasaki, les 6 et 9 août 1945, ces armes ouvrent l’ère nucléaire. Albert
Camus écrit « La civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de
sauvagerie(…) Ce n’est plus une prière mais un ordre qui doit monter des peuples vers les
gouvernements, l’ordre de choisir définitivement entre l’enfer et la raison. »Jean-Paul Sartre
affirme de son côté « Désormais nous savons que chaque jour peut être la veille de la fin des
temps ». Jean Rostand écrira « Accepter l’arme atomique c’est se rendre complice, par
nonchalance ou passivité, du plus abominable forfait que l’homme ait jamais prémédité contre
l’homme. »
Voilà le procès de Nuremberg (novembre 1945 à décembre 1946) qui juge et condamne des
responsables des crimes nazis, en particulier bien sûr de l’horreur des camps de concentration.
Voilà les pays du « rideau de fer », ainsi nommés par Churchill en mars 1946, c’est-àdire
sous domination soviétique. La Conférence de Moscou (avril 1945) échoue et
précipite la coupure des deux Allemagnes et la guerre froide.
Voilà le premier ordinateur en 1946,(avant cela : en 1877 le téléphone,en 1920 les
premières émissions régulières de radio,et en 1926 la télévision).
B- La guerre froide (1947-1953)
1) Le résumé
a) La guerre froide va de la doctrine Truman (mars 1947), qui ouvre une politique d’aide à
l’Europe pour « endiguer les progrès du communisme », jusqu’à la mort de Staline (mars
1953) (le système totalitaire du stalinisme va de 1929 à 1961 avec les camps de travail puis le
Goulag).Au sens non pas strict (1947à 1953) mais au sens large on peut dire que la guerre
froide va de 1947 jusqu’en 1989, à la chute du mur de Berlin c’est à dire à la sortie des blocs,
dite sortie de Yalta .
b) La guerre froide c’est l’affrontement que se livrent par pays et peuples interposés les
deux« super-grands » sans en arriver au conflit nucléaire. Raymond Aron, (auteur
d’un grand ouvrage « Paix et guerre entre les nations »,1962), la résumait en une formule :
« paix impossible, guerre improbable ».
c) Le blocus de Berlin (juin 1948 à mai 1949) marque la guerre froide : l’Union soviétique
bloque les voies d’accès terrestres à Berlin-Ouest, les Etats-Unis mettent en place un pont
aérien qui permet de ravitailler Berlin-Ouest.
d) Les guerres israélo-arabes commencent, il y en aura quatre, en 1948, 1956, 1967, 1973,
sans compter les opérations militaires de l’armée israélienne au Liban et dans la bande de
Gaza.
2) Des événements essentiels
Voilà le plan Marshall (juin 1947,plan d’aide à la reconstruction économique de l’Europe),
voilà le plan de partage de la Palestine adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies
en novembre 1947 (33 voix pour, 13 contre,10 abstentions), le plan est rejeté par les pays
arabes.
C’est l’indépendance de l’Inde le 15 août 1947 (avec l’action non-violente de Gandhi, »Les
générations futures auront du mal à croire qu’un tel homme ait pu exister sur notre terre! »
disait Einstein) et du Pakistan le 14 août 1947.
Des haines se multiplient, en trois mois il y a 1 million de morts et un des plus grands
exodes de l’histoire humaine puisque 15 millions de personnes passent la frontière dans
les deux sens : 6 millions de musulmans quittent l’Inde,9 millions d’hindous et de sikhs
viennent du Pakistan.
le « coup de Prague » c’est-à-dire la prise du pouvoir par les communistes en février 1948 en
Tchécoslovaquie,
la création de l’Etat d’Israël en mai 1948, la première guerre israélo-arabe (de mai 1948
à juillet 1949), le blocus de Berlin-Ouest par les soviétiques (1948-1949),
le début de la première guerre d’Indochine contre la France ( décembre 1946 jusqu’en
mai 1954), la défaite de l’armée française à Dien Bien Phu (bataille de mars à mai 1954) est
suivie des Accords de Genève de juillet 1954.
La Chine, avec Mao Tsé-toung, devient « République populaire » le 1er
octobre 1949.Certains historiens estiment que la seconde partie de la guerre civile de 1945 à
1949 aurait fait au moins 5 millions de victimes.
Sont conclues les 4 conventions de Genève sur le droit des conflits armés(12 août 1949).
L’OTAN, organisation militaire sous domination des Etats-Unis, est créée en avril 1949, en
mai 1949 c’est la naissance de l’Allemagne de l’Ouest(RFA), en octobre 1949 c’est celle
de l’Allemagne de l’Est(RDA).
C’est l’adoption par l’AG des Nations Unies de la Déclaration universelle des droits de
l’homme ( DUDH,10 décembre 1948).
Le 9 mai 1950, dans le sillage de Jean Monnet, Robert Schuman fait une Déclaration qui
donne le jour à la première Communauté européenne, celle du charbon et de
l’acier(CECA,1951), c’est aussi dans le cadre du Conseil de l’Europe (créé en mai 1949 avec
10 Etats membres et 47 en 2013 )que voit le jour la Convention européenne des droits de
l’homme en novembre 1950,avec la Cour européenne des droits de l’homme(CEDH) qui
deviendra une juridiction essentielle et en elle-même et en inspirant la création d’autres
juridictions régionales.
C’est enfin la guerre de Corée de 1950 à 1953, la Corée du Nord avait pris Séoul, capitale de
la Corée du Sud, la guerre est accompagnée de 2 millions de victimes et se termine en juillet
1953 par l’armistice (et non pas un véritable accord de paix). En mars 1953 c’est la mort de
Staline.
A l’époque sont des puissances nucléaires dotées de la bombe atomique (bombe A, arme à
fission) les Etats-Unis (1945), l’Union soviétique(1949), le Royaume-Uni(1952).
Deviendront ensuite des puissances nucléaires dotées de la même arme : la France(1960), la
Chine(1964). D’autre part ont, depuis ce temps, des armes nucléaires atomiques l’Etat
israélien(1967),l’Inde (1998) et le Pakistan(1998),les Etats étant au seuil de ces armes sont la
Corée du Nord et l’Iran.
Enfin à l’époque ont des armes thermonucléaires (bombe H, armes à fusion) : les Etats-
Unis(1952), l’Union soviétique(1953). Deviendront ensuite des puissances thermonucléaires
le Royaume-Uni(1957), la Chine(1967), la France(1968)).
En 1949 le roman d’anticipation « 1984 » pose la question du « Big Brother » qui nous
regarde, nous surveille et devient synonyme d’une forme de totalitarisme.
C- La fausse détente (1953-1957)
1) Le résumé
a) Cette sous-période s’appelle souvent « la détente », en fait il s’agit d’une fausse détente
puisqu’il y a certes, d’une part, des discours sur « la coexistence pacifique »…mais
b)… d’autre part, des affrontements entre les Etats-Unis et l’Union soviétique.
c) Le Tiers-monde arrive sur la scène internationale à la Conférence de
Bandoeng(Indonésie) en avril 1955.
2) Des événements essentiels
L’accord de paix sur l’Indochine crée une ligne de démarcation provisoire (le 17ème
parallèle) entre les deux Vietnam.
C’est ensuite la Conférence de Bandoeng(ou Bandung) (18 au 24 avril 1955 en Indonésie,
29 pays d’Afrique et d’Asie, avec Nasser, Nehru, Chou En-lai, Soekarno, Sihanouk), elle
marque l’arrivée du Tiers-monde sur la scène internationale, elle en appelle à la
décolonisation et au non-alignement.
Voilà l’entrée de l’Allemagne de l’Ouest dans l’OTAN (mai 1955), la création du Pacte
de Varsovie en mai 1955, pacte militaire des pays de l’Est sous domination de l’Union
soviétique.
C’est le 20ème Congrès du PC de l’Union soviétique en février 1956 qui dénonce « le culte
de la personnalité » à l’époque de Staline, c’est l’insurrection en Hongrie en octobre 1956
qui fait l’objet d’une répression terrible des forces du Pacte de Varsovie,
c’est enfin la crise de Suez dans laquelle le chef d’Etat égyptien,Nasser, nationalise la
compagnie du Canal de Suez(juillet 1956), c’est la seconde guerre israélo-arabe (octobre
1956 à novembre 1956), et pour protéger le Canal de Suez les franco-britanniques envoient
des troupes fin octobre 1956, elles repartiront fin décembre sur pressions des Etats-Unis et de
l’Union soviétique.
En 1956 voilà … la pilule contraceptive, sept ans après « Le deuxième sexe » paru en
- En 1954 c’est le premier poste à transistor.En 1955 « Tristes tropiques »
est l’avertissement d’un grand anthropologue sur les menaces relatives à l’avenir de
l’homme et du vivant. En octobre 1957 l’Union soviétique met sur orbite le premier satellite
artificiel (Spoutnik 1).
D- Les confrontations localisées (1957-1964)
1) Le résumé
a) L’évènement majeur est celui d’une crise gravissime qui éclate entre les Etats-Unis et
l’Union soviétique, c’est « l’affaire des missiles de Cuba » en octobre 1962 qui voit le
monde au bord d’une guerre nucléaire.
b) D’autre part les tensions par rapport à Berlin sont toujours présentes.
c) Les indépendances en Asie et en Afrique se multiplient,
d) La Communauté économique européenne(CEE) est créée par le Traité de Rome le 25
mars 1957 (au départ 6 Etats membres, 28 en juillet 2013).
e) En Chine de 1958 à 1961 c’est « le Grand Bond en avant »autrement dit un plan de
développement économique désastreux qui exige la marche forcée de l’industrialisation et la
mise de côté de l’agriculture et qui va être la cause de 36 millions de morts,chiffre terrifiant
donné par plusieurs historiens.
2) Des évènements essentiels
C’est la création de l’OPEP (pétrole) en septembre 1960,
c’est la construction du mur de Berlin par l’Allemagne de l’Est en août 1961 pour arrêter
les habitants qui partaient à l’Ouest,
c’est la première conférence des pays non-alignés en 1961.
Ce sont aussi des indépendances qui interviennent parfois après une guerre , par exemple de
1954 à 1962 en Algérie, ou des indépendances parfois suivies d’une guerre, comme au Congo
belge devenu indépendant en juin 1960.
C’est la naissance du couple franco-allemand , fondé par Charles de Gaulle et Konrad
Adenauer en 1963,couple essentiel et en lui-même et pour les Communautés européennes puis
l’Union européenne.
(Le Chancelier allemand sera le seul chef d’Etat à être reçu à Colombey-les -deux
églises,résidence privée de Charles de Gaulle.)
C’est enfin la crise de Cuba : un avion espion des Etats-Unis détecte des rampes de
lancement de missiles installées à Cuba par l’Union soviétique, le 22 octobre 1962 le
président des Etats-Unis, Kennedy, ordonne le blocus de l’île communiste, blocus qui sera
levé le 22 novembre à la suite de la décision de Khrouchtchev de démanteler ces installations
nucléaires.
C’est aussi l’assassinat de Kennedy en novembre 1963.
II- De la guerre du Vietnam à la sortie de Yalta (1964-1989)
Nous proposons d’envisager tour tour deux sous-périodes :
des rivalités multiples, la détente.
A- Des rivalités multiples (1964-1985)
1) Le résumé :
a) Les affrontements entre les Etats-Unis et l’Union soviétique sont nombreux et dramatiques.
Il s’agit d’abord de la course aux armements qui atteint son apogée en 1988 (1000 milliards
de dollars de dépenses militaires mondiales).
b) Il s’agit ensuite de la guerre du Vietnam (seconde guerre d’Indochine), elle oppose d’une
part le Nord Vietnam pro communiste, soutenu militairement par la Chine et l’Union
soviétique et d’autre part le Sud Vietnam, soutenu militairement par les Etats-Unis. Cette
guerre va de 1964 à 1973, elle est synonyme de souffrances gigantesques ! Les victimes du
côté vietnamien sont de 1 million de combattants et de 4 millions de civils, du côté des Etats-
Unis 58.000 militaires, s’ajoutent aussi des souffrances physiques, morales ainsi que
d’énormes et dramatiques atteintes sanitaires et destructions environnementales à travers le
déversement massif de « l’agent orange ». Cette guerre est synonyme aussi de « victoire »
d’un petit pays sur une grande puissance.
c) D’autre part des craquements apparaissent dans le bloc de l’Est, ainsi en
Tchécoslovaquie en 1968 où « le printemps de Prague » est réprimé, en Pologne en 1980 la
grève du chantier naval de Gdansk et la naissance du syndicat Solidarnosc symbolisent la
liberté. Des craquements moindres à l’Ouest : en mars 1966 la France quitte l’OTAN,
Charles de Gaulle veut une France indépendante des deux blocs.
d) Enfin c’est le totalitarisme du génocide du Cambodge (avril 1975 à janvier 1979), de
l’ordre de un habitant sur quatre est exécuté, soit près de deux millions sur près de huit
millions de personnes, l’horreur de l’horreur !
e) C’est la montée des marchés financiers à partir d’août 1971, fin de la convertibilité du
dollar en or, voilà donc des spéculations sur les monnaies.
2) Des événements essentiels
La guerre du Vietnam avait commencé en fait en 1959 par l’interventionnisme des Etats-
Unis au Sud Vietnam (bases militaires, conseillers militaires), en 1964 les Etats-Unis
s’engagent dans la guerre au Nord puis au Sud, ils perdent cette guerre qui se termine en
janvier 1973 par les Accords de Paris entre les Etats-Unis et le Nord Vietnam. La troisième
guerre d’Indochine se poursuit entre les deux Vietnam et se termine par la victoire du Nord
Vietnam en avril 1975 (chute de Saigon) et par la réunification du Vietnam procommuniste.
En octobre 1971 la Chine entre aux Nations Unies.L
Ce sont la troisième (5 au 10 juin 1967 dite « guerre des six jours ») et quatrième (au
mois d’octobre 1973, dite « guerre du Kippour »)guerres israélo arabes.Le 22-11-1967
est adoptée la résolution 242 du Conseil de sécurité,l’une des plus célèbres des Nations Unies
et qui est inappliquée depuis…49 ans. La résolution commence par préciser « l’inadmissibilité
de l’acquisition de territoires par la guerre et la nécessité d’oeuvrer pour une paix juste et
durable permettant à chaque Etat de la région de vivre en sécurité ». Deux principes sont
ensuite énumérés : le retrait d’Israël des territoires nouvellement conquis en échange de la
cessation de l’état de belligérance ; la reconnaissance de tous les Etats de la région et de leur
intégrité territoriale.
C’est la guerre du Biafra (mai 1967 à janvier 1970) dont la sécession au Nigéria est écrasée
(2 millions de victimes de la guerre, de la famine, de la soif, et des épidémies),
c’est le génocide du Cambodge mis en oeuvre par les khmers rouges d’avril 1975 à janvier
1979, l’armée Vietnamienne entre alors au Cambodge,elle en partira en avril 1989.
En Chine de 1966 à 1976 c’est « la révolution culturelle » lancée par Mao qui fera de 1 à 3
millions de victimes.
C’est la suspension de la convertibilité du dollar en or (décision du président des Etats-
Unis en août 1971) qui constitue, à travers la spéculation, un pas vers la puissance des
marchés financiers.
C’est le quadruplement des prix du pétrole de 3 à 12 dollars le baril, par les pays
producteurs du Golfe, en décembre 1973, le second « choc »pétrolier se produit en 1979(chute
du Shah d’Iran et guerre Irak-Iran), les prix passent de 13 à 40 dollars le baril.
Voilà aussi la Déclaration sur le nouvel ordre économique international(NOEI) adoptée
par l’AG des Nations Unies en mai 1974.
Enfin, avec les craquements à l’Est et à l’Ouest, on observe une politique « d’ouverture à
l’Est » pratiquée par l’Allemagne de l’Ouest et les négociations d’Helsinki sur les droits de
l’Homme en juillet 1973 vont dans ce sens, elles regroupent 35 Etats.
Voient le jour les deux Pactes internationaux des droits de l’homme du 16 décembre 1966
entrés en vigueur en 1976, l’un relatif aux droits civils et politiques, l’autre relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels.
En 1968 est conclu le Traité de non-prolifération des armes nucléaires(TNP) dont
l’efficacité sera toute relative (des Etats non signataires, des difficultés de contrôle…)
A partir de 1976 c’est le G7 (Etats-Unis, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie,
Canada) qui devient en 1998 le G8 (avec la Russie), il s’agit d’une enceinte diplomatique et
de coopération économique dont les réunions sont celles de pays économiquement parmi les
plus puissants du monde.
A partir de 1981 les premiers cas de sida sont observés, de 1981 à 2010 la pandémie a causé
la mort de près de 40 millions de personnes. L’épidémie continue, depuis peu de temps
apparait une certaine diminution des décès et des contaminations, mais par exemple, pour la
seule année 2011, il y avait encore 34 millions de personnes vivant avec le VIH (dont 23,5
millions en Afrique subsaharienne) 2,5 millions de nouvelles infections, et 1,7million de
décès liés au sida.
L’homme pose le pied sur la Lune le 21 juillet 1969.En 1968 Le film « 2001 : l’Odyssée
de l’espace » pose la question d’une techno science qui tend à nous dépasser.
B- La détente (1985-1989)
1) Le résumé :
a) L’hypothèse la plus probable de la grande cause de la détente est une nouvelle équipe,
celle de Gorbatchev, arrivant au pouvoir à Moscou en mars 1985, qui veutalléger le poids
de la course aux armements ce qui permettrait de dégager des marges de manoeuvres
militaires, économiques, politiques.
b) La détente se met en route à travers de gigantesques changements structurels en Union
soviétique et dans les pays de l’Est , elle prépare la fin des blocs et les grandes retrouvailles
Est-Ouest.
Le 9 novembre 1989 c’est la chute du mur de Berlin, M. Gorbatchev écrira : « L’histoire
est sortie de ses gonds », F. Mitterrand affirmera « Comme un fleuve entre dans son
lit, l’Europe est rentrée dans son histoire et sa géographie ».
2) Des évènements essentiels
Voilà donc l’arrivée de Gorbatchev au pouvoir (mars 1985) et le traité bilatéral (Etats-
Unis, Union soviétique) de destruction des euromissiles (décembre 1987).
En septembre 1989 la Hongrie décide d’ouvrir sa frontière avec l’Autriche, le 10
septembre 10.000 allemands de l’Est vont en RFA.C’est en octobre 1989 que 8000
réfugiés Est allemands, venant de Prague et de Varsovie, arrivent en Allemagne de
l’Ouest à bord « des trains de la liberté ». Le 9 novembre 1989 les autorités d’Allemagne
de l’Est décident l’ouverture de la frontière, les allemands se déplacent librement. On
peut dire des résistants non-violents des peuples des pays de l’Est « Ils ne savaient pas
que c’était impossible, alors ils l’ont fait. »
C’est la Convention des droits de l’enfant (20 novembre 1989).
Le 26 avril 1986 c’est la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, en Ukraine (à l’époque en
Union soviétique).Une forme de dernier avertissement que l’humanité se donne à elle même.
III-HISTORIQUE: DE LA SORTIE DE YALTA A NOS JOURS
(novembre 1989-avril 2020)
III-HISTORIQUE:DE LA SORTIE DE YALTA A L’AGGRAVATION DES
LOGIQUES DU SYSTEME PRODUCTIVISTE (1989 à nos jours, 2-4-2020.)
Nous proposons d’envisager tour à tour deux sous-périodes :
la sortie de Yalta de 1989 à 2001 , (A)
et celle des attentats du 11 septembre 2001 à l’aggravation des logiques du
productivisme ( mise à jour 2-4- 2020 ) (B)
A- La sortie de Yalta (1989-2001)
Nous avons déjà souligné l’évènement considérable de la chute du mur de Berlin.
Nous nous situons maintenant juste après le 9 novembre 1989. Nous envisagerns tour à
tour le résumé de cette période (1) puis les évènements essentiels (2).
1= Le résumé
Nous soulignerons tour à tour sept points.
1-1 C’est la fin des blocs, les régimes communistes sont balayés par les révolutions de
1989(voir le développement précédent) des peuples de l’Est qui manifestent par une
résistance massive et non-violente dans ces pays, l’Union soviétique implose en 15 Etats,
elle n’existe plus à partir du 8 décembre 1991(ouvrage d’André Fontaine, « L’un sans
l’autre »,1991), les Etats-Unis restent la seule superpuissance. Les accords de désarmement
nucléaire stratégique sont conclus entre l’Union soviétique, puis la Russie avec les Etats-Unis
en juillet 1991 et janvier 1993.
.1-2 Des pays de l’Est adhèrent à l’Union européenne (8 en 2004, 2 en 2007, 1 en
2013,l’UE comprend 28 Etats et 500 millions d’habitants en 2013 ), ils adhèrent aussi
au Conseil de l’Europe(tous entre 1990 et 2007,la Russie en 1996,le Conseil de l’Europe
comprend 47 Etats et 800 millions d’habitants en 2013),certains pays de l’Est adhèrent à
l’OTAN ,7 entre 1999 et 2009,(l’OTAN comprend 28 Etats membres en 2013 et 910 millions
d’habitants, il n’y a pas la Russie mais les Etats-Unis bien sûr sont toujours là).
1-3 En juin 1992, vingt ans après celle de Stockholm en 1972 qui était une certaine prise
de conscience interétatique et la consécration du droit de l’homme à l’environnement,, c’est le
succès, à Rio, de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement(le développement
durable est consacré, dont un des principes est celui de précaution)qui sera suivie des
échecs de celles de Johannesburg en juin 2002 et de Rio en juin 2012(« Rio moins 20 » diront
certains).En 2022 qu’en sera-t-il ?
1-4 Cette période est marquée aussi par le processus de paix israélo-palestinien qui se
remet en route, le 9 septembre 1993 ce sont les Accords d’Oslo, l’OLP reconnaît le droit à
l’Etat d’Israël d’exister en paix et en sécurité, et Israël reconnaît l’OLP comme le représentant
du peuple palestinien.
1-5 Ce sont les premières élections multiraciales en Afrique du Sud, Nelson Mandela,
après 27 années passées en prison, est élu en mai 1994 président de la République. Symbole
de résistance il agit ensuite pour la réconciliation.
1-6 C’est l’horreur du génocide du Rwanda d’avril à juillet 1994, il y a un million de
victimes, soit un habitant sur sept ! Les Tutsis, et aussi des Hutus modérés, sont assassinés à
la machette par les Hutus. La guerre de 1990 à 1993 avait précédé ce génocide programmé
précédé de décennies d’affrontements. Les appels aux meurtres de « la radio mille collines
« plongeaient dans l’horreur. Une cohabitation douloureuse entre les tueurs et les rescapés
existe aujourd’hui. Le rôle de la France reste à éclaircir dans ce génocide cela par l’accès aux
archives et les procès contre des génocidaires.
1-7 Ce sont les naissances de l’OMC en 1995, du G 20 en 1999(voir infra) et de la CPI
en 1998.
2 – Des événements essentiels :
Nous envisagerons tour à tour onze points.
2-1 Aux événements précédents s’ajoute un traité de septembre 1990 qui
rétablit l’Allemagne unie. Le Pacte de Varsovie est dissous en juillet 1991.
2-2 C’est aussi l’implosion dramatique de l’ex-Yougoslavie, en particulier de 1992 à - La Croatie, la Slovénie, la Bosnie Herzégovine, la Macédoine font sécession en 1992,
puis deviennent indépendants la Serbie en 2003, le Monténégro en 2006 et le Kosovo en
2008.
2-3 C’est la guerre en Tchétchénie déclenchée par la Russie qui tient à l’intégrité de son
empire (17 millions km2).
2-4 En janvier et février 1991 les Nations Unies adoptent des sanctions militaires contre
l’Irak qui avait envahi le Koweït, c’est la « guerre du Golfe ».Le Koweit est libéré, le
dictateur irakien reste au pouvoir, il réprime les populations chiites et kurdes.
2-5 De 1986 à 1996 une autre guerre provoque en RDC (République Démocratique du
Congo) 4 millions de victimes dans cette guerre civile, l’une des plus terrifiantes depuis
1945, en particulier en nombre de victimes, avec la guerre du Vietnam et celle du
Soudan.
2-6 C’est la fin de l’apartheid en Afrique du Sud (l’abolition des lois d’apartheid en juin
1991, par le pouvoir en place, marque la victoire de l’ANC et de Mandela, ce sera son
élection en mai 1994.
2-7 Le 4 juin 1989 le régime chinois réprime dans le sang une tentative de mouvement
pour la démocratie. Celle-ci avait vu le jour à la mi avril. Des étudiants de Pékin, soutenus
par des habitants de la ville et des syndicats, entament une grève le la faim place
Tiananmen , le parti unique et même l’armée sont divisés mais les partisans de l’ordre à tout
prix l’emportent, des militaires tirent sur le peuple, des tanks arrivent, les derniers étudiants
non-violents quittent la place, il y a des milliers de victimes, des milliers d’arrestations. Il est
interdit depuis, même plus de trente ans après, en Chine, d’évoquer ce printemps de Pékin.
2-8 C’est aussi la création de la Cour pénale internationale (CPI) le 17 juillet 1998
(statut entré en vigueur le 1er juillet 2002).Création qui constitue une avancée importante ,
certes dramatiquement tardive et dont la mise en oeuvre rencontrera obstacles et
insuffisances.
2-9 L’Organisation mondiale du commerce (OMC) est créée à Genève (1-1995), c’est le
libre-échange tout-puissant. La Chine y adhère en décembre 2011.
2-10 Le G20 est créé en 1999, il réunit 19 pays et l’Union européenne, c’est à dire ceux du
G8, puis dix pays à économie émergente, et l’Australie ainsi que l’UE. (Autrement dit :
Afrique du Sud, Allemagne, Arabie saoudite, Argentine, Australie, Brésil, Canada, Chine,
Corée du Sud,Etats-Unis,France,Inde,Indonésie,Italie,Japon,Mexique,RoyaumeUni,
Russie,Turquie,et Union européenne.)Cinq pays peuvent être invités chaque année. Les
réunions sont celles des chefs d’Etat ou de gouvernement, celles des ministres des finances et
des gouverneurs des banques centrales, celles depuis 2010 des ministres de l’emploi. Le G20
représente les 2/3 de la population mondiale, 90% du PIB mondial, 85% du commerce
international. C’est un lieu de concertation diplomatique et c’est une enceinte de
coopération économique et financière globalement proche du libéralisme international
même si, de façon limitée, on peut en attendre quelques impulsions porteuses.
2-11 En 1992 voient le jour la Convention sur la diversité biologique, qui avalise pour une
part la marchandisation du vivant, et la Convention sur les changements climatiques, suivie
du Protocole de Kyoto en 1997(entré en vigueur en 2005) dont le contenu modéré et
n’engageant surtout que certains Etats, fait l’objet d’une application laborieuse alors que le
défi est vital pour l’humanité.
B- Des attentats « du 11 septembre » à l’aggravation des logiques du système
productiviste (2001 à nos jours 2-4-2020)
1- Le résumé de cette période d’une vingtaine d’années
Nous envisagerons tour à tour dix sept points.
1-1 En premier lieu après les attaques qui causent la mort de 3000 victimes le 11
septembre 2001, attaques d’un réseau terroriste (Al-Qaïda dont le chef sera exécuté en mai
2011) sur leur territoire, les Etats-Unis (avec d’autres pays) interviennent en
Afghanistan (2001- 2015) puis en Irak (2003-2010, 500.000 victimes).
Leur budget de la défense explose, il représente en 2012 près de 43% du total des dépenses
militaires mondiales.
Les Etats-Unis concluent avec la Russie des traités de désarmement nucléaire
stratégique (24-5-2002, 8-4-2010).
A partir de la présidence des Etats-Unis de janvier 2017 le processus de nouveaux traités est
non seulement dans l’impasse mais un traité de désarmement a volé en éclats. La
dénonciation le 2 août 2019 par Etats-Unis du Traité bilatéral de 1987 sur les armements
nucléaires intermédiaires (1000 à 5000 km de portée) est une lourde erreur et une grave
faute politique qui, bien sûr, a aussitôt amené la Russie à faire de même. On craint désormais
que soit menacé le Traité bilatéral de 2010 sur les armements nucléaires stratégiques (plus de
5000 km de portée) qui arrive à échéance en 2021 et qui devrait être renouvelé.
1-2 En second lieu une crise immobilière, bancaire, financière, économique, sociale(le
chômage explose dans de nombreux pays) se développe d’abord aux Etats-Unis (juillet 2007)
puis dans une grande partie du monde, surtout à partir de la fin 2008.On parle « de grande
dépression » comparée, parfois, à celle de 1929 .
Des mécanismes d’une certaine régulation sont mis en place mais les logiques de
financiarisation du marché mondial ne sont pas remises en cause.
Le système financier mondial reste vulnérable, certains pensent que le spectre d’une
crise radicale, pire que celle de 2008, est loin d’être écarté.
1-3 En troisième lieu les pays émergents (en particulier la Chine, l’Inde, le Brésil, l’Afrique
du Sud…) apparaissent sur la scène commerciale, monétaire et
environnementale internationale. Leurs taux de croissance sont importants en particulier par
rapport à ceux de l’Europe. Le 15 juillet 2014 les BRICS (réunis en sommet annuel depuis
2009, Brésil, Russie, Inde, Chine et, depuis 2011, Afrique du Sud-South Africa ) créent leur
banque de développement, dotée d’un capital de 50 milliards de dollars et d’un fonds
d’urgence de 100 milliards de dollars, l’événement financier est considérable, c’est un
contrepoids aux structures et aux politiques de la Banque mondiale et du FMI. Les BRICS
(40% de la population mondiale) représentent en 2014 le 1/5ème du PIB mondial, si tout
continuait à cette allure: 40% en 2025.Le budget militaire de la Chine, encore loin
derrière celui des Etats-Unis (le tiers de celui-ci), devient de plus en plus puissant et en même
temps les problèmes, menaces et drames écologiques s’y multiplient, à l’image d’un
productivisme autodestructeur..
Une question centrale est donc celle, en Chine et dans d’autres pays émergents, du
partage du « gâteau mondial »(matières premières, commerce…) mais, aussi et
surtout, celle du « quel gâteau parle-t-on ? » Celui d’un productivisme terricide et
humanicide ou celui d’une communauté humainement viable?
L’écologie devient une série de problèmes, drames et menaces dans de plus en plus de
pays émergents et autant de défis pour y faire face.
1-4 En quatrième lieu le « printemps des peuples arabes » voit le jour de 2010 à 2013, il
se traduit par de grands espoirs portés surtout par la jeunesse, ceux de « dégager » les dictateurs
(trois sont renversés), ceux des partages de richesses, ceux des créations d’emplois.
Les marches vers la démocratie sont remplies d’obstacles, par exemple en Tunisie,
en Egypte, en Lybie. Quant à la Syrie elle est déchirée par la guerre civile et
l’internationalisation du conflit, la présence du groupe de l’Etat islamique a aggravé la
guerre. La Lybie, depuis la chute du dictateur en 2011, est déchirée et épuisée par la guerre
civile, des milices sont là et un affrontement armé éclate entre le gouvernement et des forces
armées. La Tunisie à ce jour semblait sortir plus solidement du printemps arabe, mais de
nouvelles élections veulent représenter une période de « transition démocratique.» En février
2019 en Algérie un printemps semble vouloir voir le jour, à partir de février 2019 de
gigantesques manifestations pacifiques, chaque vendredi, poussent à la démission le 2 avril du
président qui s’apprêtait à aller vers un cinquième mandat. L’armée , avec son poids
décisif, ne le soutenait plus, le peuple a continué dans la voie du « dégagisme » des dirigeants
du régime. Les élections présidentielles sont là. Même le Soudan à travers les manifestations
à partir de décembre 2018 voit la destitution du président en avril 2019 …mais c’est l’armée
qui prend le pouvoir. De la dictature au régime militaire on est encore loin de la démocratie.
L’accord en août 2019 entre l’armée et les révolutionnaires prévoient une « transition
démocratique » de 39 mois.
1-5- En cinquième lieu le réchauffement climatique reste un terrible drame et une
grande menace pour l’humanité et le vivant.
Nous lui consacrons sept points.
1-5-1 Ce réchauffement n’arrive pas à ce jour (fin novembre 2019) à déclencher des
politiques de réductions universelles et massives des gaz à effet de serre(GES). C’était
d’abord l’échec de la Conférence de Copenhague (12-2009).
1-5-2 Ensuite la 21ème conférence des Etats parties (COP21)à Paris en décembre
2015 avait pour objectif de conclure un accord de tous les pays sur les réductions de GES et
de financer par les pays développés à partir de 2020 l’adaptation des pays en développement.
Une solution sautait aux yeux pourvu qu’on les ouvre : articuler la création d’un système de
taxation des transactions de change ainsi qu’une baisse des dépenses militaires mondiales à la
mise en route de cette aide et d’autres aides…
L’Accord de Paris sur le climat du 12 décembre 2015,entré en vigueur en novembre
2016, certes est une forme de « premier pas », certes voit l’ensemble des Etats qui s’y
engagent, certes a surmonté le traumatisme de l’échec de la Conférence de Copenhague six
ans plus tôt, mais sa « souplesse », qui a permis son adoption, est synonyme de marges de
manoeuvres laissées aux Etats qui ont , sur beaucoup de points, décidé…qu’on déciderait plus
tard, par exemple il n’y a pas de date sur le pic des émissions, et les silences sont nombreux et
criants, ainsi celui sur les déplacés environnementaux, ainsi celui sur le prix du carbone… Le
réchauffement climatique est encore le grand » gagnant », les générations futures à ce
jour sont les grandes perdantes, et l’élection du nouveau président des Etats-Unis en
novembre 2016 peut entraîner certaines difficultés si les Etats-Unis sortent de l’accord de
Paris.
Le 1er juin 2017 le nouveau président annonce le retrait des Etats-Unis de l’Accord
de Paris,. en novembre 2019 intervient la notification du retrait qui sera effectif en
novembre 2020. Outre le fait que ce retrait juridiquement arrive trois ans après donc vers la
fin du mandat du président, cette décision n’aura a priori qu’un effet négatif grave, celui de
difficultés financières pour aider les pays du Sud. Cela étant les autres Etats ont exprimé leurs
volontés d’appliquer l’Accord et même, ici et là , de l’accélérer. Des Etats fédérés des Etats-
Unis dans leurs marges de manoeuvres veulent faire de même, de nombreuses villes et des
entreprises américaines aussi. Cette décision de ce président n’est-elle pas une forme
d’atteinte aux droits de l’humanité? (Sur les droits de l’humanité voir articles sur ce blog).
Les conférences d’application de l’Accord de Paris continuent (COP 22 à Marrakech,
COP 23 à Bonn, COP 24 à Katowice en Pologne en décembre 2018, COP 25 finalement en
Espagne en décembre 2019.
1-5-3 Des marches pour « Sauver le climat « se multiplient, des grèves de classes à partir
de janvier 2019 voient le jour une fois par semaine dans certains pays, si on atteignait des
chiffres gigantesques de jeunes sur la planète en révolte non-violente celle-ci pourrait avoir
une influence importante.
On peut penser pourtant que l’une des plus grandes remises en cause allant serait celle
de la réorientation massive de sommes gigantesques vers les luttes contre le
réchauffement climatique et la pauvreté, ainsi par exemple à travers « un impôt mondial sur
le capital » .( Sur celui-ci voir par exemple Thomas Piketty, Le capital au XXème siècle,
Points,2019,p 835 à 883).
On peut penser que cela suppose des rapports de forces dans lesquels des Etats, des
populations, des jeunes, des entreprises, des ONG et tant d’autres acteurs
deviendraient fraternisés par ce péril commun. La finance mondiale au service de la
survie… »Ils ne savaient pas que c’était impossible alors ils l’ont fait » écrivait Mark Twain.
1-5-4- En attendant des phénomènes climatiques extrêmes se multiplient, ainsi les
inondations, les canicules, les typhons, les incendies. Par exemple les gigantesques de
Californie en novembre 2018, en octobre 2019, témoignent du fait que les Etats-Unis
sont entrés dans une insécurité écologique grandissante.Les incendies au Brésil s’aggravent
en 2019. L’Australie est, elle aussi, en novembre 2019 la proie des flammes sur de grandes
étendues qui déciment en particulier la faune..
L’accélération de la fonte des glaces de l’Antarctique a quelque chose d’
une apocalypse à long terme: si le glacier Thwaites, à l’Ouest , grand comme le quart de la
France, venait à s’effondrer le niveau des mers augmenterait de 70 centimètres et avec
d’autres glaciers… de plus de deux mètres ! Adieu de nombreuses iles, adieu de nombreuses
villes en bord de l’eau…tout cela dans les décennies qui viennent.
.Le rapport du GIEC en septembre 2019, outre l’accélération de la fonte des glaciers, alerte
sur l’état du permafrost c’est-à-dire des sols gelés de la Sibérie, de l’Alaska et du Canada qui
pourraient fondre d’un tiers, ou beaucoup plus, d’ici 2100 et provoquer ainsi une libération de
CO2 et surtout de méthane remontant de l’eau , dix fois plus nocif que le
CO2, donc accélérer encore plus dramatiquement le réchauffement.
1-5-6 Ainsi le grand « vainqueur » est , à ce jour( avril 2020 ), le
réchauffement. (voir notre ouvrage, écrit pour cette 4ème édition en collaboration avec
Hubert Delzangles et Catherine Le Bris, Le droit international de l’environnement,
Ellipses,2018).
La situation globale est relativement simple à résumer :
Si l’Accord de Paris (2015) sur le climat était appliqué en l’état l’augmentation de la
température serait de l’ordre au minimum de 3,5°C vers la fin du siècle.
Situation encore gravissime.
Si l’Accord n’était pas appliqué le réchauffement serait de 4°C à 6°C, voire plus, vers
2100.Autant dire que la sixième extinction des espèces (humains compris) serait en voie
d’effacer la plus grande partie du vivant. Le 7 novembre 2019 un appel de 11000
scientifiques (climatologues, biologistes, physiciens, chimistes, agronomes…) de 153 pays
(dont 1500 Français) va dans le sens d’une transformation radicale de nos modes de vie,
sinon les humains risquent « des souffrances indescriptibles » liées à l’urgence climatique.
« Souffrances indescriptibles» !!
Si l’Accord contribuait à donner le jour à de nouveaux engagements, massifs et
appliqués, le vivant aurait alors probablement des chances de survie.
1-5-7 Cette débâcle écologique va probablement multiplier dans le monde les
collapsologues qui sont certains d’un effondrement rapide de la civilisation industrielle dans
les années proches.
D’autres, au contraire des collapsologues , pensent qu’ à partir environ des années 2030
, si une sorte d’horloge de l’apocalypse devient de plus en plus menaçante, il n’en reste pas
moins qu’ une « métamorphose de l’humanité » est encore possible d’ici là et après .
1-6 Face au drame de la faim (821 millions de personnes en 2017 soit un habitant sur
neuf dans le monde !), ou face au drame de l’absence d’accès à l’eau potable et à
l’assainissement… on décide… qu’on décidera plus tard de s’attaquer aux causes de ces
situations inhumaines .Le réchauffement climatique est devenu une cause qui s’ajoute aux
autres et aggrave ces deux drames mondiaux.
Ces deux formes de crimes contre l’humanité sont d’autant plus écoeurantes qu’une
des solutions existe : permettre un accès à la nourriture et un accès à l’assainissement de l’eau
en réorientant par des taxations de gigantesques capitaux vers ces besoins criants.
1-7 Le 26 décembre 2004, en Asie du Sud Est, un tsunami provoque la mort de près de
300.000 personnes.
Le 11 mars 2011 c’est la catastrophe de Fukushima au Japon, où se déchaînent séisme,
tsunami et accident nucléaire. Des choix massifs, mondiaux ne sont pas faits.
1-8 En 2007 un cap est passé : un habitant sur deux dans le monde vit en ville, cette
urbanisation est vertigineuse, c’est l’un des plus grands événements en profondeur de la
planète. D’autre part elle s’accompagne d’une explosion des mégalopoles, vingt villes
dépassent en 2013 les dix millions d’habitants, 448 villes dépassent le million d’habitants.
Cette urbanisation s’accompagne aussi de nombreux bidonvilles (un tiers de la population
des pays pauvres survit dans ces bidonvilles en 2013 soit près de 900 millions de personnes)
et d’un environnement souvent malade, les mégalopoles sont méga polluantes. La ville est «
le lieu de multiples fractures », et le taux d’urbanisation mondiale pourrait atteindre 60% en
2030 !
1-9 En 2015 c’est l’accroissement massif du nombre de réfugiés et de déplacés, 60
millions de personnes selon le HCR, soit l’équivalent de presque toute la population française.
Sur ce total 20,2 millions essaient d’échapper aux guerres et aux persécutions, c’est un niveau
sans précédent depuis 1992.En 2017 voilà un nouveau record du nombre de déplacés : 68,5
millions de personnes.
L’Union européenne s’est enfin mise d’accord sur un plan de répartition proportionnelle à
chaque PIB des 28 Etats membres, au total 120.000 réfugiés qu’elle accueille, syriens,
irakiens, érythréens, arrivés surtout par la Grèce et l’Italie, ces arrivées sont accompagnées de
multiples drames de disparus en Méditerranée, de l’ordre de 3500 en 2015,3800 en 2016,3150
en 2017 ! Voilà une honte pour l’Europe et la communauté internationale.
L’Allemagne s’est lancé le « défi » d’accueillir au moins un million de demandeurs d’asile. Le
18 mars 2016 un accord est conclu entre la Turquie et les 28 de l’UE pour que la mer Egée
reste interdite aux réfugiés et aux migrants et… pour que les syriens restent en Turquie (plus
de 3 millions actuellement).Chaque syrien arrivé illégalement en Grèce est renvoyé en
Turquie, un autre syrien arrivé en Turquie est renvoyé en Europe cela jusqu’à 72000 réfugiés
syriens, enfin la Turquie financièrement et la Grèce administrativement sont aidées. L’accord
est difficile à appliquer mais surtout ne règle pas cette question : les personnes bombardées
en Syrie trouveront d’autres routes pour fuir la guerre.En février 2020 la Syrie ouvre ses
frontières vers la Grèce,les réfugiés affluent mais sont arrêtés ,l’UE est une fois de plus
devant ses responsabilités.
L’Union européenne, malgré les réunions qui s’enchainent, ne contribue pas à s’attaquer aux
causes de ces situations et n’a pas à ce jour (février 2020) de véritable politique européenne
d’accueil..Dans certains Etats membres la poussée des partis populistes aux élections trouve là
de quoi s’alimenter et de quoi diviser l’Europe.
1-10 Quant aux déplacés environnementaux (voir articles sur ce blog) ( voir aussi le projet
de Convention élaboré par des universitaires de Limoges) les estimations le plus souvent
avancées pour 2050 sont de l’ordre de 250 millions de personnes, autant dire que les défis
multiples soulevés sont gigantesques et à ce jour (novembre 2019) ne sont pas pris en compte.
Les estimations pour 2100 sont encore plus incertaines, l’évacuation de grandes villes
asiatiques devenues irrespirables et de grandes villes au bord des mers pourraient être( ?) de
l’ordre de un milliard d’habitants ou plus( ?). Citons par exemple le fait que Jakarta (10
millions d’habitants) et d’autres mégapoles s’enfoncent peu à peu, le fait que Pékin, Hong
Kong, Canton , Hô chi-Minh-ville et d’autres mégapoles ont de nombreuses nappes
phréatiques asséchées…
1-11 Les technologies des communications ont continué leur ascension : après 1973 le
téléphone portable (75% des terriens en ont un en 2013), à partir de 1970 le jeu vidéo
électronique devient un produit de masse, 1981 l’ordinateur portable, 1991 Internet avec en
particulier des moteurs de recherche géants comme Google, voilà en 2001 le smart phone
(téléphone intelligent), voilà à partir de 2003 les réseaux sociaux numériques de contact
(généralistes:MySpace, Facebook, Twitter; professionnels :LinkedIn, Viadeo; virtuels:
SecondLife, World of Warcraft), réseaux sociaux de partage de vidéos:YouTube,
DailyMotion) et d’autres encore…Au total en janvier 2019 (voir wearesocial.fr) sur les 7,4
milliards de terriens: 4,3 milliards d’internautes dans le monde,3,4 milliard de personnes
actives sur les réseaux sociaux, donc un phénomène massif.(En France sur 69 millions
d’habitants: 54 millions d’internautes,38 millions sur les réseaux sociaux).Parmi les questions
posées celle de la sécurité des données, celle aussi des impôts que devraient payer les géants
du Web.Les rapports de forces se situent entre Etats et firmes multinationales mais aussi entre
Etats puisque, par exemple, au niveau d’une législation qui serait européenne il faut
l’unanimité des Etats membres en matière fiscale, ce qui n’empêche pas un Etat de montrer
l’exemple.
l – 12 Le « désarmement du pouvoir financier » a toujours de grandes difficultés à se
mettre en route. Les Etats à ce jour (février 2019) n’ont pas encore les volontés
massives et radicales de faire face aux nouveaux conducteurs de la planète, les marchés
financiers, de plus en plus puissants depuis 1971 ( la fin de la convertibilité du dollar en
or précipite la spéculation internationale sur les monnaies et amplifie la puissance des
bourses, des banques et des marchés financiers).
Les liens entre des Etats, des firmes multinationales et les marchés financiers contribuent à
transformer l’ensemble en géants mais ne s’agit-il pas de géants aux pieds d’argile dans la
mesure où, en fin de compte, des logiques terricides et humanicides sont à l’oeuvre?
1-13 Les remises en cause de la financiarisation
Nous leur consacrons sept points.
1-13-1 Ces marchés financiers comprennent six classes d’actifs : le marché actions, le
marché obligataire, le marché monétaire, le marché des dérivés, le marché des changes,
le marché des matières premières. Deux chiffres symboliques de cette force : en avril 2016
les transactions quotidiennes(!) sur le marché des changes étaient de 5100 milliards de dollars,
pour l’année 2017 le gestionnaire américain d’actifs BlackRock gérait 6000 milliards de
dollars et réalisait un bénéfice de 3,7 milliards.
A titre de comparaisons le chiffre d’affaires annuel en 2017 des dix premières entreprises du
monde allait de 200 à 500 milliards de dollars, le PIB en 2017 était pour 139 Etats inférieur à
10 milliards de dollars dont 30 inférieur à 3 , alors que le PIB des Etats-Unis était de 19362 et
celui de la France( cinquième dans la liste des 193 Etats) de 2574, le budget bi annuel des
Nations Unies pour 2018-2019 est de 5,4 milliards de dollars, ce sont là quelques rapports de
forces financiers qui en disent longs sur cette partie de la vie internationale.
1-13-2 Voilà certes quelques avancées de levées partielles des secrets bancaire et
judiciaire, qui est un des contre-mécanismes des paradis fiscaux, mais on est encore très loin
d’une véritable remise en cause que serait une transparence généralisée . Les sommes
abritées dans les paradis fiscaux en 2018,c’est à dire dans plus d’une soixantaine de pays et
territoires(?), seraient de l’ordre de 15.000(?) à 40.000(?) milliards de dollars!!! C’est l’une des
sommes les plus gigantesques que l’on puisse imaginer. Il est vrai que l’on est encore loin des
226.000 milliards de dollars(192.000 milliards d’euros) du total de la dette mondiale, soit trois
fois le PIB mondial…On notera l’imprécision, opacité oblige, des sommes cachées dans les
paradis fiscaux.
1-13-3 Voilà certes quelques timides tentatives de luttes contre l’évasion fiscale de
grandes firmes multinationales, ainsi le G 20 en novembre 2015 a adopté un plan de
l’OCDE en vue de pousser ces entreprises à déclarer leurs bénéfices pays par pays, de même
la Commission de l’Union européenne va dans ce sens fin 2015 et début 2016 par
exemple en critiquant des pays (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg…) qui sont accusés de
soutenir de telles pratiques, mais on est encore loin d’une véritable convention mondiale
accompagnée de sanctions.
1-13-4 – En mars 2018 la Commission de l’UE propose de taxer de 3% les revenus des
géants numériques, les GAFA (Google,Apple,Facebook,Amazon), cela dans les pays de
leurs utilisateurs, et au delà 200 groupes ayant un chiffre d’affaires annuel de plus de 750
millions d’euros et de plus de 50 millions d’euros dans l’Union européenne, cette taxe,
rapporterait 5 milliards d’euros par an.
La France en 2019 commence à prélever une taxe sur les géants du numérique, c’est le début
d’un long chemin légitime et légal consacré en avril 2019. Si la taxe précédente est à
l’initiative de la France, l’Allemagne par contre semble se déclarer favorable à « un impôt
minimum mondial sur les bénéfices des multinationales du numérique ». La proposition
française beaucoup plus cadrée va donner lieu à un rapport de forces gigantesque aux enjeux
importants entre des Etats européens et les GAFA.
1-13- 5- Ces rapports de forces on le voit déjà au niveau d’amendes en juin 2017(2,47
milliards d’euros) et juillet 2018(4,3 milliards d’euros) infligées par la Commission à Google
pour abus de position dominante, ainsi pour la seconde amende l’abus concerne le système
d’exploitation pour smartphones , Android. Google verse les amendes pour éviter d’énormes
astreintes mais fait appel devant la Cour de justice de l’Union européenne. En février 2019 le
géant bancaire suisse UBS a été condamné par le tribunal de grande instance de Paris à une
amende de 3,7 milliards d’euros pour démarchage bancaire illégal et pour blanchiment
aggravé de fraude fiscale. Les premiers pas des uns et des autres sur ce chemin peuvent être
prometteurs.
1-13- 6- Les GAFA en 2019 pèsent en Bourse 3360 milliards de dollars et réalisent 600
milliards de chiffres d’affaires par an. Les amendes records imposées par l’UE ne vont pas
assez loin selon certains auteurs , en particulier aux Etats-Unis, qui proposent de démanteler,
de casser ces géants.
1-13- 7- Voilà certes les premières taxes sur les transactions financières(TTF) d’un
certain nombre d’Etats encore très minoritaires (ainsi par exemple à ce jour deux sur 28 dans
l’Union européenne) mais on est encore loin d’une véritable TTF qui serait mondiale dans sa
portée et radicale dans son assiette. C’est très certainement un des grands espoirs de
véritables alternatives mondiales, espoir porté par exemple par une ONG telle que ATTAC,
qui contribuerait à construire une communauté mondiale humainement viable dans la mesure
où des sommes gigantesques, dégagées par ces TTF, seraient consacrées à des besoins
criants, en particulier sanitaires et environnementaux…
l -14 L’extension des zones de libre-échange et les résistances qu’elles rencontrent.
Nous leur consacrons sept points.
De 1950 à 2013 les zones et les accords de libre-échange se sont multipliés, c’est une
véritable « déferlante » qui a existé et qui continue (Manière de voir, Le Monde diplomatique,
juin-juillet 2015), soutenue en particulier par l’OMC.
Une victoire provisoire, contre ce rouleau compresseur profitant aux plus forts , avait été
obtenue par l’abandon de la conclusion d’un accord multilatéral sur l’investissement
(AMI),négocié en secret de 1995 à 1997 entre les 29 Etats membres de l’OCDE.
1-14-1 Mais les offensives du libre-échange ont repris. Négocié depuis 2008, voilà un
accord de libre-échange le CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement) entre
l’UE et le Canada qui aboutit en octobre 2013.Cet accord économique et commercial vise à
éliminer la quasi-totalité des droits de douane entre les deux blocs. Il est entré provisoirement
en vigueur fin septembre 2017 pour ce qui relève de la compétence exclusive de l’UE. un seul
Etat qui refuserait de le ratifier bloquerait l’entrée en vigueur définitive. Une version remaniée
en février 2016 n’empêchera pas des contestations qui ont continué en 2018 et 2019 à travers
des parlements en Europe qui doivent intervenir pour son entrée en vigueur. Il est jugé
dangereux par certains pour les services publics, l’agriculture, le climat, la démocratie. Il
profitera avant tout aux grands groupes dans les logiques du productivisme. En août
2019 13 Etats de l’UE l’ont ratifié (sur 28).
l -14- 2- Est aussi négocié l’accord de libre échange trans pacifique (TPP)(40% du PIB
mondial,25% du commerce international) entre 12 pays cela pour faire contrepoids à la Chine
qui n’en faisait pas parti. Le nouveau président des Etats-Unis en janvier 2017 s’est d’abord
retiré de l’accord au nom du protectionnisme américain puis en avril 2018 a envisagé de le
rejoindre, un enjeu est celui des rapports commerciaux entre les Etats-Unis et la Chine.
l-14- 3- On se retrouve aussi dans des négociations difficiles entre l’UE et le
Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay), cela depuis vingt ans, avec d’un côté les
européens qui craignent l’arrivée de produits agricoles sud-américains , et d’un autre côté les
sud-américains qui craignent l’arrivée de produits manufacturés européens. Le Président
français le 26 aoùt 2019 a déclaré « en l’état je ne le signerai pas.»
1-14- 4- La Commission européenne travaille à partir de 2018 à un nouveau partenariat
transatlantique. En réaction aux mesures protectionnistes des Etats-Unis, l’UE et le
Japon concluent en juillet 2018 un accord de libre-échange qui permet un accès important
aux produits agricoles européens au marché japonais et une levée progressive des droits de
douane sur les voitures japonaises. Les critères écologiques de cet accord sont passés sous
silence.
1-14- 5- Enfin et surtout, dans le but de créer un grand marché de 850 millions d’habitants
entre l’UE et les Etats-Unis, voici un mastodonte de l’ultra libéralisme. Il porte différents
noms, les sigles francophones le qualifient de PTCI (Partenariat Transatlantique sur le
Commerce et l’Investissement), APT (Accord de Partenariat Transatlantique) ou GMT (
Grand Marché Transatlantique) ,les sigles anglophones le nomment TTIP(Transatlantic Trade
and Investment Partenership) ou TAFTA (Transatlantic Free Trade Agreement).La
Commission de l’UE (non élue) a reçu mandat du Conseil de l’ UE pour négocier avec les
Etats-Unis, c’est le 13ème cycle de négociations à partir de juillet 2013,dans la confidentialité
loin d’une certaine transparence démocratique, avec des pressions pour conclure qui
s’aggravent en 2016. Bloqué depuis trois ans grâce à de fortes mobilisations le TAFTA revient
sur la table des négociations dans la mesure où la Commission de l’UE prépare les
négociations avec les firmes multinationales européennes et nord américaines. Cependant de
très nombreuses ONG ,dans une Déclaration conjointe du 18 février 2019, affirment à juste
titre que ces négociations saperaient les engagements sur les changements climatiques.
Concrètement c’est une entreprise de démantèlement des droits de douane qui restent et c’est
la suppression des barrières non tarifaires. Le TAFTA donne la part belle aux grandes
entreprises qui, lorsqu’elles se considèreraient menacées dans leurs profits par des législations
sanitaires ou environnementales qui leur barreraient la route, pourraient mettre en cause les
lois d’un Etat devant une juridiction spéciale d’arbitrage tournée… vers des intérêts privés,
cette juridiction pourrait infliger des pénalités financières à un Etat. Un exemple est clair : la
multinationale Monsanto pourrait ainsi imposer les produits OGM aux européens. Autrement
dit seraient encore plus mises à rude épreuve qu’aujourd’hui les protections de la santé, de
l’environnement, les pratiques de relocalisation etc…
1-14- 6- On est donc loin, dans ces accords , d’un renversement du système consistant
à passer de la primauté du libre-échange à celle d’ un juste échange conforme aux
conditions sanitaires et environnementales. Nombreuses sont les résistances qui se
manifestent. en Europe et aux Etats-Unis. Un front commun d’ONG en France s’est
organisé: « STOP TAFTA », non au Grand Marché Transatlantique! Les opinions publiques
n’y sont plus favorables, en 2014 on était à 55% aux Etats-Unis et en Allemagne, en mai 2016
on se retrouve à 15% d’opinions favorables.
L’arrivée sur la scène d’un nouveau président aux Etats-Unis en novembre 2016, qui met en
avant un certain protectionnisme, peut réserver des surprises liées à des guerres tarifaires
déclenchées par les Etats-Unis (ainsi au sommet du G7 de juin 2017).Par contre la Chine met
en avant un libre-échange puissant allant dans le sens d’une vaste zone de libre-échange.
1-14-7 Une guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine est déclenchée en
septembre 2018 par les Etats-Unis qui décident de taxer de 10% les droits de douane de
produits chinois importés sur le sol américain. Tout cela se fait à partir d’une vision simpliste
du président des Etats-Unis qui croit que ce remède permettra de rétablir la balance
commerciale déficitaire de son pays. En réalité lorsque, à son tour, la Chine taxe des produits
américains et, en plus, laisse chuter sa devise (sept yuans pour un dollar) de nombreux
emplois se trouvent menacés aux Etats-Unis d’où un premier accord en octobre 2019 dans
lequel le président renonce à l’augmentation de tarifs douaniers.
1-14-8 Le coronavirus en février 2020 entraine un ralentissement du commerce
international et un effondrement des bourses mondiales. Ce virus, qui part de la Chine,
entraine aussi une baisse des émissions de CO2 dans la mesure où de nombreuses activités et
de nombreux transports sont suspendus.
Les services de santé de nombreux pays sont débordés, les budgets de santé (équipes,
lits, matériels) avaient été négligés, par exemple en France, les victimes sont
nombreuses.
Redonner à la santé une place prioritaire sera impératif à la sortie de cette crise
sanitaire et économique.
Dans les causes profondes de cette pandémie est mise en avant la place de la nature que
le productivisme réduit de plus en plus.
1-15 Le Brexit..
Nous lui consacrons quatre points.
1-15-1 A une faible majorité (près de 52%) le 23 juin 2016 les britanniques votent par
référendum en faveur du Brexit (British Exit).Cette sortie de l’Union européenne est mise
en oeuvre par la notification du déclenchement de l’article 50 du Traité sur l’UE par le
Royaume-Uni. Un accord de retrait est négocié.
1-15- 2- Les négociations dès septembre 2017 ont été difficiles et ont donné lieu à deux
textes.
Premier texte : après 18 mois un projet de traité de près de 600 pages voit le jour le 22
novembre 2018. Signé par les 27 chefs d’Etat du Conseil européen le 25 novembre 2018 ce
traité de retrait (Traité du Brexit) pour entrer en vigueur devra être ensuite ratifié par les
parlementaires britanniques et par les eurodéputés, si c’est le cas le Royaume-Uni sortira de
l’UE le 29 mars 2019 à minuit. L’Accord porte sur les engagements financiers du Royaume-
Uni, la protection des droits de 4 millions d’expatriés britanniques et européens, et l’absence
de frontière physique entre l’Irlande du Nord qui sort de l’UE et la République d’Irlande. Ce
dernier point est l’un des plus sensibles puisqu’il d’agit de préserver le traité de paix de
1998.Le traité de retrait est accompagné d’annexes et de trois protocoles sur l’Irlande, Chypre
et Gibraltar.
Second texte : le 25 novembre 2018 les 27 chefs d’Etat du Conseil européen valident
une déclaration (à valeur de recommandation contrairement au traité précédent)qui sur 26
pages fixe les grandes lignes des « relations futures » relatives au commerce(fondé sur le libreéchange)
, à la coopération en matière de défense, de police et de justice(fondée sur un
partenariat en matière de sécurité),fondé aussi sur une autonomie normative de l’UE, sans
oublier un accord de pêche relatif à un accès aux eaux territoriales britanniques et à une
répartition des quotas. Les négociations sur ce second texte devraient commencer après le
départ du Royaume Uni, le 29 mars 2019 et devraient s’achever au cours d’une période de
transition fixée au 31 décembre 2020.
1-15- 3- C’est alors que s’ouvre une période de confusion à travers les blocages répétés
de la Chambre des communes. Nous la résumons de façon non exhaustive..
L’accord est massivement rejeté le 15 janvier 2019. La date du Brexit est repoussée au 12
avril puis au 31 octobre 2019.Le lendemain des élections européennes du 23 mai la Première
ministre britannique annonce sa démission. En juillet 2019 un nouveau Premier ministre doit
trouver une issue. Après divers épisodes le 17 octobre 2019 Londres et Bruxelles s’entendent
sur un nouvel accord de sortie qui prévoit notamment des contrôles douaniers en mer
d’Irlande entre l’Irlande du Nord et le reste du Royaume-Uni. Finalement le 22 octobre la
Chambre des communes approuve la loi d’application du nouvel accord tout en exigeant un
examen approfondi du texte. Le 31 janvier 2020 est retenu par l’UE comme nouvelle date
du Brexit. Entre temps des élections générales anticipées auront lieu au Royaume-Uni le 12
décembre 2019.
Le 31-1-2020 l’accord de sortie est adopté par les députés britanniques et européens.Le
Royaume-Uni faute de progrès rapides menace de claquer la porte des négociations en juin
2020.Le 31-12-2020 sera la fin de la pèriode de transition.Les problèmes à résoudre sont
redoutables : commerce,pêche,libre circulation des personnes,budget… sans oublier les
rapports de l’Angleterre avec l’ Ecosse et l’Irlande.
1-15- 4- On peut penser que le Brexit constitue un divorce regrettable, difficile et
douloureux pour le Royaume-Uni et aussi pour les 27.Il ne constituera d’ailleurs pas une
remise en cause des inégalités au Royaume-Uni qui sont une des raisons de cette voie
« tragique » prise par ce référendum de 2016 .
Les graves difficultés présentes et à venir du Royaume-Uni ne devraient-elles pas contribuer
à dissuader d’autres populations d’Etats membres d’être tentées par une telle sortie?
N’est-ce pas aussi un appel de plus pour construire d’urgence une véritable Europe fondée
sur des moyens démocratiques, justes, écologiques et pacifiques?
1-16 La construction européenne continue. Les élections du Parlement européen de mai
2019 marquent en ce sens un moment relativement important. Les conservateurs(PPE) et les
sociaux démocrates(SD) ont perdu la majorité qu’ils détenaient depuis plus de vingt ans. On
observe une perte de vitesse des conservateurs, des divisions chez les eurosceptiques, un
renforcement des libéraux avec les « marcheurs »français, une chute des socialistes, une
régression de l’extrême gauche et une progression des écologistes. Diverses alliances
apparaitront selon les questions débattues.
1-17 En 2017 a eu lieu un événement passé inaperçu pour beaucoup, vivement critiqué par
d’autres comme étant « irréaliste dans un monde dangereux »(ainsi la position officielle de la
France) et considéré par d’autres enfin comme un espoir dans le tableau sombre de la
course aux armements. Cette dernière vérité saute aux yeux pourvu qu’on les ouvre : plus les
armements nucléaires se développent en qualité et quantité plus l’insécurité grandit
.(Voir à ce sujet nos deux ouvrages sur la paix : JM.Lavieille, « Construire la paix », éditions
Ellipses,1988).Ont affirmé cette vérité non seulement depuis longtemps des ONG, de
nombreux auteurs, mais aussi par exemple la Commission Canberra(Australie)(rapport d’août
1996) sur le désarmement nucléaire qui comprenait en particulier des personnalités telles que
Robert Mc Namara (ancien secrétaire d’Etat des Etats-Unis, Michel Rocard , ancien premier
ministre de la France, le général George Butler, ancien commandant en chef des forces
stratégiques aériennes aux Etats-Unis…
Grace à un puissant regroupement d’ONG (près de 500 dans 90 pays) en 2007 l’ICAN
(International Campaign to Abolish Nuclear Weapons), la Campagne pour l’abolition des
armes nucléaires (prix Nobel de la paix en 2017) a été à l’origine du Traité d’interdiction des
armes nucléaires(7 juillet 2017). Selon l’article 1 de ce traité il est interdit « en toutes
circonstances de développer, tester, produire, fabriquer, acquérir, posséder ou stocker des
armes nucléaires ou d’autres dispositifs nucléaires explosifs. »La menace de l’emploi de ces
armes est aussi interdite.
Tous les Etats qui ont des armes nucléaires (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni
et aussi l’Inde, le Pakistan, Israel, la Corée du Nord, au total de l’ordre de 15.400 armes
nucléaires) ont refusé de participer aux négociations de ce traité jugé contraire aux réalités de »
l’environnement sécuritaire international ». Sur l’autel du réalisme (celui de la domination des
puissants) les peuples sont souvent sacrifiés.
Le traité de l’espoir a donc été signé par 122 Etats dès le 17 juillet 2017.Lorsque 50 Etats
l’auront ratifié il entrera en vigueur, cela probablement en 2018. La pression sur les Etats
nucléaires continuera pour qu’ils remettent en cause leur course suicidaire, en espérant que les
apocalypses de leurs utilisations n’interviendront pas.
Il faudrait pour compléter ce traité agir aussi en amont et accomplir l’un des plus grands pas
pour l’humanité, celui qui consisterait à conclure un traité d’interdiction des recherches sur les
armes de destruction massive(nucléaires, biologiques, chimiques).Le chemin sera long et très
difficile mais il est vital .
(Voir sur ce point un important article écrit avec trois collègues dans le cadre d’un colloque
international sur les responsabilités liées aux nouvelles techniques, colloque qui s’est déroulé
au Sénat, article intitulé « Les recherches sur les armes de destruction massive : des lacunes
du droit positif à une criminalisation par le droit prospectif », JM.Lavieille, J.Bétaille,
S.Jolivet, D.Roets, in « Droit et techniques nouvelles :quelles responsabilités? Editions
LexisNexis 2011″)
(Voir aussi de façon plus globale notre ouvrage « Le droit international du désarmement et de
la maitrise des armements », préfacé par M.Bedjaoui, ancien président de la Cour
Internationale de Justice, Editions L’Harmattan, 1997).
1-18-1- La crise du coronavirus (Covid 19) apparait en novembre 2019 en Chine centrale
à Wuhan. Elle se développe rapidement et atteint en mars avril 2020 peu à peu l’ensemble
des pays du monde en particulier des pays européens dont l’Italie , la France, l’Espagne,
l’Allemagne. D’autres pays mal préparés , comme les Etats-Unis et le Brésil, seront
gravement atteints. L’inquiétude pour des pays africains et américains est grande.
1-18-2- Cette crise sanitaire a pour effet la mort en avril 2020 de plus de cent mille
personnes, les prévisions d’ici juillet 2020 sont en général de plus de trois cent mille morts,
certaines vont jusqu’à un million voire plus. Les recensements des victimes sont souvent très
incomplets. Les services de santé faute de moyens en personnels, en lits, en matériels
(masques et tests en particulier) sont débordés.
1-18-3-La crise sanitaire se double d’une crise économique profonde puisque à la suite du
« confinement » La plupart des entreprises de toutes tailles ferment. En particulier des
entreprises de transports aériens qui tombent en faillite. Les bourses s’effondrent mais surtout
le nombre de chômeurs explose. Les inégalités s’aggravent, le nombre de personnes en
situations catastrophiques explose, il est « amorti » dans certains pays comme la France par
des aides sociales.
1-18-3-Quelques effets positifs de cette crise sont les émissions de CO2 qui diminuent, la
nature qui respire un peu moins mal, le télé travail qui se développe avec pourtant ses limites,
des solidarités qui s’organisent, en particulier celle des groupes qui s’auto organisent par
exemple pour la consommation alimentaire. Enfin les déplacements à bicyclette se
multiplient. Les projets « du monde d’après » commencent à voir le jour venant surtout des
milieux associatifs.
Mais les remises en cause après la crise ne seront très probablement pas au rendezvous,
les mêmes logiques productivistes reprendront le dessus. Par exemple les émissions
de gaz à effet de serre vont vraisemblablement reprendre de plus belle, par exemple les
remises en cause nécessaires par rapport aux causes profondes du développement des
épidémies ne seront pas tirées.
Autrement dit la place de plus en plus restreinte accordée à laa nature sera toujours là
et sa marchandisation aussi.
On pourra espérer vivement que les budgets accordés à la santé feront l’objet
d’une…explosion. Quelques jours pris dans l’ensemble des pays sur les dépenses
d’armements seraient salvateurs mais ce serait là déranger des pensées bien ordonnées dans
le non-sens et couchées devant le courage .
2) Des événements essentiels (sur cette période 11 septembre 2001- 2 mars 2020)
Nous envisagerons tour à tour une trentaine de points.
2- 1- C’est à nouveau l’escalade des dépenses militaires mondiales qui augmentent de
40% de 2000 à 2009 …puis vient une baisse importante de 2009 à 2013, en 2014 c’est la
hausse qui reprend, 1547 milliards de dollars.
En 2017 selon le SIPRI de Stockholm les dépenses militaires mondiales ont été de 1739
milliards de dollars (avec en tête les Etats-Unis 610 milliards de dollars, puis la Chine 228,
l’Arabie Saoudite 69,4, la Russie 66,3, l’Inde 63,9, la France 57,8 milliards de dollars..
.En 2018, toujours selon le SIPRI, le total mondial a continué à augmenter, 1822
milliards de dollars soit pour cinq Etats 60% de ce total. Il s’agit des Etats-Unis 649
milliards de dollars (36% du total mondial), de la Chine 250 (14%), de l’Arabie saoudite
68 (3,7%),de l’Inde 67 (3,6%),de la France 64 (3,5%),de la Russie 62 (3,4%).
Chaque jour le monde dépense donc près de 5 milliards de dollars (4,87 en 2018) en
armements. Voilà des logiques humanicides et terricides.
2- 2- Une décision regrettable, une de plus, du président des Etats-Unis a été de dénoncer
en octobre 2018 le Traité bilatéral de 1987 sur les armes nucléaires intermédiaires (500 à
5500 km de portée), en affirmant que la Russie ne le respecte pas et que les Etats-Unis vont
donc les développer. Les Etats-Unis se sont retirés de ce traité le 1er février 2019,la Russie a
aussitôt suspendu sa participation au traité en affirmant se lancer dans la construction de
nouveaux missiles.
Les Etats-Unis et la Russie en sont toujours au traité bilatéral d’avril 2010 qui limite à
1550 le nombre de têtes nucléaires stratégiques pour chacun de ces deux Etats, traité qui
expire en 2021 mais qui pourra être alors prolongé pour cinq ans. On peut désormais
craindre que le renouvellement de ce traité soit menacé.
Selon le SIPRI le pic du milieu des années 1980 atteignait presque 70.000 armes
nucléaires. En juin 2019 les neuf Etats nucléaires détenaient environ 13.865 armes
nucléaires (soit 600 de moins qu’en 2018.) Les arsenaux des Etats-Unis et de la Russie
représentent toujours plus de 90% des armes nucléaires mondiales. Le quantitatif a
donc beaucoup diminué. Il risque de reprendre en 2021 et la course
au « qualitatif » sera toujours là .
(Sur le Droit international du désarmement voir notre ouvrage aux editions
L’Harmattan,1998, préfacé par Mohammed Bedjaoui qui présidait la Cour internationale de
justice au moment de l’avis consultatif de juillet 1996 relatif aux armes nucléaires).
2- 3- L’OTAN et ses 29 Etats membres est une organisation toujours incapable de remettre
en cause ses logiques de dépenses militaires massives dans le sillage des Etats-Unis qui en
appellent à « partager le fardeau »( voir le sommet de juillet 2018).
.Merci, merci, merci les complexes scientifico-politico- militaro-industriels ! Les peuples
vous remercient de jeter sous la terre leurs besoins criants au nom d’une protection qui ne fait
que les sacrifier un peu plus et qui ne fait qu’aggraver l’insécurité globale de l’ensemble de
la planète.
2- 4- A propos de hausses et de baisses celles des prix du pétrole sont aussi bien présentes.
On constate des fluctuations importantes puisque, par exemple, le prix du baril début
2013 était autour de 100 dollars, fin 2015 il se retrouvait à 38 dollars , l’offre étant alors trop
importante par rapport à la demande, le 16 novembre 2019 il était à 63,3 dollars. La suite du
destin du pétrole dans les décennies à venir sera mouvementée, liée en particulier aux
situations stratégiques, aux pics de productions et aux remises en cause de l’or noir qui
est un des responsables des gaz à effet de serre. A ces facteurs peuvent s’jouter les
découvertes de réserves ainsi en novembre 2019 en Iran. Ces fluctuations ont et auront des
conséquences bénéfiques ou néfastes sur l’économie des pays producteurs et sur les
consommateurs. Les reconversions des pays producteurs de pétrole seront probablement
douloureuses pour des économies qui n’auraient pas commencé leurs reconversions dans les
énergies renouvelables, d’où l’intérêt de les planifier à moyen et long termes, mais ces
reconversions seront bénéfiques pour les générations futures et l’ environnement .
2- 5- Le processus de paix d’Oslo est interrompu depuis 2000, ainsi par exemple se
développe la colonisation par Israël des territoires occupés (Cisjordanie et Jérusalem Est).
D’autre part la politique de reconnaissance de l’Etat palestinien comme observateur aux
Nations Unies (novembre 2012) contrarie fortement Israël. La Cour internationale de justice,
dans un avis du 9 juillet 2004,a déclaré l’édification du mur par Israël dans le territoire
palestinien occupé, contraire au droit international. En juin 2007 le Hamas arrive au pouvoir
à Gaza, le blocus par Israël de la bande de Gaza commence en septembre 2007. Dans cette
bande de terre de 41km et de deux millions ď’habitants la situation est catastrophique et
explosive. Les opérations militaires contre les Gazaouis se succèdent en 2006, 2008, 2012. Le
président des Etats-Unis, Barack Obama , dans son second mandat à partir de 2013, ne peutil
contribuer à remettre en route ce processus de paix ? Les obstacles restent nombreux. En
juillet 2014, après des assassinats de jeunes de part et d’autre, aux roquettes palestiniennes
répondent les bombardements israéliens intenses et terrifiants sur la bande de Gaza , en huit
ans(2006-2014) quatre guerres ravagent la population de Gaza…Ce conflit est l’un des lieux de
fractures les plus importants de la planète. La politique du nouveau président des Etats-Unis
en janvier 2017 contribue à aggraver les tensions, à rendre la situation de plus en plus
inextricable, ainsi la décision de transférer l’ambassade américaine à Jérusalem en mai 2018,
vécue comme une provocation par les palestiniens, sera un élément de plus porteur
de violences. En novembre 2019 les combats se multiplient entre l’Etat israélien et le Jihad
islamique dans la bande de Gaza.
2-6- Deux processus de paix aboutissent:. D’abord en Colombie en août 2016 un accord
de paix voit le jour entre les guérilleros des forces armées révolutionnaires de Colombie (les
FARC) et le gouvernement, il est rejeté par référendum mais un nouvel accord en novembre
2016 est appliqué, les FARC déposent les armes en août 2017,ainsi se termine un conflit de
52 ans(!) dont le bilan est de 300.000 morts,45000 disparus et 7 millions de déplacés.
Ensuite au pays Basque franco-espagnol l’organisation séparatiste basque( l’ETA, sigle de
« Pays basque et liberté » en basque), renonce à la lutte armée en octobre 2011 après 43 ans (!)
de luttes, l’ETA désarme en avril 2017,le conflit a provoqué la mort de 830 personnes, et 112
militants de l’ETA ont trouvé là mort. L’ETA prononce sa dissolution en mai 2018.
2- 7- A propos de l’Espagne voit le jour l’affirmation du mouvement indépendantiste en
Catalogne qui se traduit par un référendum en octobre 2017 favorable à ce choix. Le
gouvernement central espagnol suspend le gouvernement catalan, dissout le Parlement catalan
et place la province sous tutelle. Les élections au Parlement catalan en
décembre sont remportées par les indépendantistes, le gouvernement de Madrid prévient que
l’administration directe cessera lorsque sera élu en mai un président de l’exécutif catalan.
Après la condamnation en octobre 2019 pour « sédition » et « détournement de fonds »
d’indépendantistes à des peines de prison , des manifestations massives dénoncent ces
situations de « prisonniers politiques » et un pouvoir central répressif.
Au regard de l’Union européenne une région nouvellement indépendante deviendrait un pays
tiers par rapport à l’UE et donc un éventuel candidat. L’UE pendant la crise n’a pas désavoué
le gouvernement de Madrid entre autres parce que la peur d’une boite de Pandore, ouverte
pour d’autres régions chez des Etats membres, l’appelait à cette prudence.
Il n’en reste pas moins qu’à moyen et long termes la question est posée . Parmi les
interrogations soulevées ( gigantesques , connues et ayant fait l’objet de nombreux
événements historiques) :
Quid de l’unité d’un pays au regard d’une partie qui s’en détache (sécession ou droit d’un
peuple)?
Qu’est-ce qu’un peuple?
Quid d’un statut pouvant être plus autonome sans basculer dans l’indépendance?
Quid des possibilités pour une région devenant indépendante d’être viable par exemple
économiquement?
2- 8- Une crise explose au Venezuela. Le président, Chavez (1999-2013), avait réduit
drastiquement la pauvreté et multiplié par cinq le produit intérieur brut. Après sa mort sous la
nouvelle présidence, elle aussi de gauche, de 2014 à 2019 c’est la crise économique avec le
prix du baril qui s’effondre, l’hyperinflation qui s’installe, le PIB qui perd 40%, des pénuries
qui se multiplient et trois millions de personnes qui ont fui le pays. Des manifestations ont été
réprimées dans le sang. A la suite de la réélection du président en mai 2018 le président de
l’Assemblée nationale, acquise à l’opposition de droite, (l’autre Assemblée nationale
constituante est de gauche acquise au président) s’autoproclame président par intérim , le
premier est soutenu par l’armée, la Russie et la Chine, le second est soutenu en
particulier par les Etats-Unis qui envoient des convois d’aide humanitaire, ils seront bloqués
aux frontières de la Colombie et du Brésil. L’Union européenne se prononce pour
l’organisation rapide d’élections libres. Les Etats-Unis soutiennent le renversement
réactionnaire du président de gauche en durcissant leurs sanctions économiques qui
contribuent à mettre en grandes difficultés le pays puisque la production de pétrole a baissé
des deux tiers.
2- 9- La guerre en Irak (2003-2010) (pour la première de 1991 voir ci-dessus) aura causé
la mort d’au moins 500.000 personnes! Elle est considérée par certains comme une erreur et
une faute majeures des Etats-Unis, non seulement sources de multiples souffrances mais aussi
une des sources de l’arrivée de l’Etat islamique trois ans après, en 2006 en Irak.
En janvier 2003 le président des Etats-Unis avait annoncé que l’Irak possédait des armes de
destruction massive, ce qui était faux, et était lié à Al-Qaida responsable des attentats du 11
septembre 2001. En mars 2003, face aux menaces de veto de la France et de la Russie qui se
prononçaient contre la guerre, les Etats-Unis renoncent à passer par les Nations Unies. Les
inspecteurs de désarmement des Nations Unies quittent l’Irak.
Fin mars 2003 les forces américaines, anglaises et australiennes passent à l’attaque. Le
dictateur irakien est renversé, il sera retrouvé et exécuté. Il a fallu attendre août 2010 pour que
les Etats-Unis se retirent d’Irak, en laissant une situation chaotique, et il a fallu attendre les
législatives de mai 2018 pour un espoir de reconstruction du pays grâce à un certain soutien
financier international. Cependant depuis octobre 2019 la contestation réclame à travers la
désobéissance civile (blocages multiple) le départ de la classe politique jugée corrompue et
incompétente et une « transition démocratique »
.L’Irak continue d’être ravagé par les guerres de puissances étrangères sur son
territoire (Etats- Unis,Iran…)et par des terroristes islamistes.Le départ des troupes
américaines est souhaité par l’Iran,les tensions s’aggravent à la suite de l’assassinat en Irak par
les Etats-Unis du numéro 2 iranien en janvier 2020.Se succèdent alors les envois de roquettes
contre les bases américaines en Irak et les sanctions économiques des Etats-Unis contre l’Iran.
2- 10- Dans les logiques de prolifération nucléaire l’Iran et la Corée du Nord sont arrivées
au seuil des armes nucléaires ce qui provoque des tensions internationales et des sanctions du
Conseil de sécurité.
La diplomatie arrive à reprendre sa place par rapport à l’Iran puisqu’un accord sur le
nucléaire est conclu, après de longues négociations, le 14 juillet 2015 ( limitation de
l’enrichissement d’uranium, limitation de la production de plutonium, inspections renforcées,
levée des sanctions (le 17 janvier 2016 le processus de levée a commencé),maintien de
l’embargo sur les armes).Le nouveau président des Etats-Unis en septembre 2017 semble
vouloir remettre en cause cet accord iranien sur le nucléaire. Le 8 mai 2018 les Etats-Unis se
retirent de l’Accord sur le nucléaire iranien, beaucoup affirment à juste titre que c’est là une
grave erreur politique (une de plus ) qui va probablement multiplier des tensions et des
risques de guerres dans la région. Le régime israélien a bombardé d’ailleurs aussitôt des
positions iraniennes en Syrie en réponse à des missiles envoyés sur le Golan. L’Iran, entré en
récession à cause des sanctions des Etats-Unis, annonce le 9 novembre 2019 la découverte
d’un immense gisement de pétrole, bonne nouvelle pour le pays mais mauvaise pour le
réchauffement climatique.
A ce retrait de l’Accord sur le nucléaire s’ajoute le fait que les entreprises
étrangères implantées en Iran sont menacées de sanctions financières par les Etats-Unis si
elles ne se retirent pas de ce pays. Ce dernier mécanisme repose sur l’extraterritorialité du
droit américain à partir de 1998 qui est un instrument de guerre économique selon lequel une
entreprise étrangère qui utilise le dollar pour ses transactions peut être poursuivi par le
département de la justice américaine et obligée de payer d’énormes amendes pour embargo
américain non respecté, pour corruption ou terrorisme. Cette domination économique et
judiciaire est loin du respect des souverainetés étatiques. Elle marque ici la faiblesse du droit
international et la puissance d’un système financier injuste. Cette forme d’impérialisme en
appelle à des résistances et des alternatives dont, par exemple, la Chine et l’Europe pourraient
prendre l’initiative. De façon plus radicale un certain nombre d’ONG proposent d’autres
systèmes financiers.
2- 11- L’escalade continue en Corée du Nord, cela à partir des essais nucléaires (elle est
sortie du TNP en 2003 et n’est plus liée par ce traité), six essais nucléaires d’octobre 2006 à
septembre 2017, et à partir du développement de missiles balistiques vecteurs de ces armes
nucléaires. Les tensions de cet Etat totalitaire de 25 millions d’habitants sont importantes avec
la Corée du Sud, les Etats-Unis , le Japon. La huitième série de sanctions des Nations
Unies est intervenue en septembre 2017, en particulier une réduction de ses
approvisionnements en pétrole. La Chine, la Russie, le Japon, l’UE sont pour le dialogue
accompagnant ces sanctions, le président des USA est partisan d’une ligne dure et va jusqu’à
menacer « de destruction complète la Corée du Nord en cas de menace des Etats-Unis ».(AG
des Nations Unies, discours du 19 septembre 2017).
A propos des Nations Unies en janvier 2017 Antonio Guterres succède à Ban Ki-moon
comme Secrétaire général des Nations Unies.
La surprise est grande quant au revirement du dirigeant nord coréen qui annonce début janvier
2018 que son pays participera aux jeux olympiques d’hiver en Corée du Sud, début mars le
leader de la Corée du Nord se déclare favorable à la dénucléarisation de la péninsule coréenne
et propose une rencontre avec le président des Etats-Unis qui l’accepte. Les deux dirigeants
coréens ont une rencontre historique le 24 avril 2018 dans laquelle ils affirment leur volonté
de détente, la Corée du Nord déclare qu’elle ferme son site d’essais nucléaires fin mai.
Le 12 juin 2018 à Singapour voilà le sommet, » historique » depuis 1953, entre les Etats-Unis et
la Corée du Nord, C’est la signature d’un document commun dans lequel les deux Etats
s’engagent à une dénucléarisation complète de la péninsule coréenne tout en garantissant la
sécurité de la Corée du Nord. Voilà qui constitue une avancée, la mise en application
rencontrera de grandes difficultés cela d’autant plus qu’elle reste trop imprécise.(par exemple
au niveau de la vérification, voir notre ouvrage « Le droit international du
désarmement »,L’Harmattan,1997,préface du président de la CIJ, M. Bedjaoui.).
Un accord solide n’est pas en vue, d’autant plus que le contexte est celui de l’accélération de la
course aux armements nucléaires. Après un échec d’un second sommet (mars 2019) les
discussions reprennent en octobre 2019 alors qu’en même temps la Corée du Nord tire des
missiles balistiques mer-sol.
2- 12 – La prolifération entre le nucléaire militaire et civil est une des raisons qui appelle à
l’éradication universelle du nucléaire, le chemin sera long, les systèmes nucléocrates sont
puissants mais les effets sanitaires, environnementaux et financiers, sont sans fin,
gigantesques et désastreux, Ils devraient pousser à un arrêt et à une reconversion de
l’ensemble des complexes scientifico-militaro-industriels mondiaux .
Les générations qui viennent sont prises à la gorge, elles commencent à manifester. Le
temps qui reste a pour marqueur véritable l’établissement d’un rapport de forces qui
imposerait la réorientation radicale de sommes gigantesques vers la remise en cause de
notre système terricide et humanicide. »Ils ne savaient pas que c’était impossible alors ils
l’ont fait » écrivait Mark Twain.
2- 13- Au Mali (20 millions d’habitants), dont l’Etat était déliquescent, en janvier 2013 la
France et des pays africains interviennent militairement, l’enjeu est aussi, affirment certains,
celui du développement économique social et écologique de la région du Sahel. Après le feu
vert du Conseil de sécurité la France a envoyé des troupes en appui à la force africaine en
décembre 2013 pour faire cesser les affrontements inter communautaires en Centrafrique,
pays qui fin 2015 arrive à organiser des élections. En 2007 la France a donc lancé ces
opérations militaires, Serval, puis en 2014 Barkhane (4500 soldats), cela dans un contexte
explosif : politique d’austérité du FMI, paralysie par la Françafrique, sécheresses liées au
réchauffement climatique, rebellions dans le Nord, revendications touarègues, déstabilisation
de la Lybie, stratégies des Etats-Unis et d’Etats de l’UE…La guerre depuis 2012 a donc lieu à
la suite d’insurrections de groupes djihadistes, salafistes et d’ indépendantistes touaregs.
2-14- Le peuple soudanais est un des peuples martyrs de la planète, il a plongé dans une
succession terrifiante d’horreurs , celles de quatre guerres, de trois famines (en 1998, 2003 et
2017), de catastrophes écologiques dues à la sécheresse, enfin celles de dictatures et de
régimes militaires !
La première guerre civile, soudanaise a lieu au Sud soudan, elle commence un an avant
l’indépendance de 1956, elle a duré 17 ans (1955-1972),cette guerre a fait au moins 500.000
morts, elle se termine par l’accord d’Addis Abeba, le Sud Soudan devient autonome.
La seconde guerre civile fut une des plus meurtrières du XXième siècle,2 millions de morts,4
millions de déplacés,600.000 réfugiés, elle se déroule de 1983 à 2005,soit près de 22 ans, c’est
celle entre les rebelles séparatistes du Sud, dont l’autonomie est supprimée, qui s’opposent au
gouvernement central. L’Accord de paix de Nairobi de janvier 2005 est conclu, il prévoit un
partage du pouvoir et des richesses pétrolières. Pendant six ans le Soudan du Sud sera
autonome puis il y aura un référendum..
.Le Soudan du Sud proclame donc son indépendance en janvier 2011,une guerre civile éclate
en 2013,elle dure 5 ans jusqu’à un accord de paix d’août 2018 qui doit entrer en vigueur en
mai 2019,cette guerre a causé la mort de plus de 400.000 personnes.
En 1989 une junte militaire avait pris le pouvoir à Khartoum. Une autre guerre civile éclate
en 2003 au Darfour, à l’Ouest du Soudan , elle dure jusqu’à nos jours en 2019,soit plus de 16
ans, elle a causé la mort de plus de 300.000 personnes, les déplacés sont plus de 3 millions.
L’Union africaine en 2004 puis de façon conjointe l’ONU en 2007 envoient missions armées
et casques bleus.
Les causes de ces guerres sont multiformes, d’où la complexité des négociations et traités de
paix. Guerres sur fond de rivalités ethniques et religieuses et de partage de richesses
pétrolières découvertes dans le Darfour qui est province à l’Ouest du Soudan, pétrole acheté
massivement par la Chine. Le Nord du pays a une population arabo-islamique nomade, le Sud
du pays est majoritairement peuplé de tribus africaines, chrétiennes et animistes le plus
souvent sédentaires. Cette dimension du conflit est essentielle, celle entre des éleveurs qui
recherchent des pâturages et de l’eau, celle d’agriculteurs voulant protéger leurs champs, la
sécheresse du Sahel a aggravé les situations. Ajoutons à cela l’explosion démographique et les
famines.
Au Soudan à partir de décembre 2018 des manifestations de la population ainsi
que l’armée finissent, en avril 2019, par provoquer la destitution du dictateur au pouvoir
depuis trente ans, il est poursuivi aussi par la Cour pénale internationale. L’armée prend alors
le pouvoir « pour deux ans ».
Parallèlement à cette situation il faut mentionner qu’en septembre 2019 deux ONG et neuf
militants soudanais ont déposé plainte auprès du tribunal de Paris contre
BNPParibas.Ce groupe bancaire est accusé de s’être rendu complice de crime contre
l’humanité, « en permettant leur financement et en les facilitant, des crimes (…) commis par
le gouvernement soudanais. »
2- 15- En Syrie le régime sombre dans une répression massive à partir de mars 2011. Plus
de sept ans après, en novembre 2018, la guerre civile (armes conventionnelles et armes
chimiques) a causé la mort de plus de 360.000 personnes dont près de 20.000 enfants, et le
déplacement de la moitié de la population de 25 millions d’habitants, soit dans le pays soit
dans d’autres Etats(20% de la population syrienne, soit 3 millions en Turquie,1,2 million au
Liban,1 million en Jordanie…). Voilà un autre échec des Nations Unies et des Etats, voilà
encore surtout les souffrances d’un peuple.
La complexité de la situation militaire et diplomatique est égale à son horreur. Nous ne
soulignons ici que quelques éléments de ces trois dernières années parmi de très nombreux
combats acharnés et les multiples tentatives de règlement du conflit.
A partir d’octobre 2016 c’est la bataille de Raqqa(en Syrie) par la force arabo-kurde soutenue
par les Etats-Unis contre l’Etat islamique. La reprise d’Alep par le régime syrien, avec l’aide
puissante de la Russie, débouche sur une initiative russo-turque de cessez-le-feu le 31
décembre 2016 et des négociations qui suivent en 2017 entre le régime, soutenu par Moscou,
et les rebelles syriens, soutenus par Ankara. La Conférence internationale
d’Astana(Kazakhstan) en janvier 2017 et les pourparlers de Genève échouent.
En mai 2017, toujours à Astana, la Russie, l’Iran et la Turquie s’accordent pour créer des
zones de « désescalade » entre le régime syrien et les rebelles. Fin 2017 le régime contrôle 55%
du territoire, les forces démocratiques syriennes(dominées par les milices kurdes) 28%,les
rebelles 12%, l’Etat islamique 5%(au départ il disposait de 30% du territoire).En mars 2018
les turcs et les rebelles syriens prennent la ville d’Afrine, le régime syrien à l’Est de Damas
reprend la Ghouta en avril 2018.Une utilisation d’armes chimiques, moins massive que celle
d’octobre 2012, provoque un bombardement de sites chimiques syriens par les Etats-Unis, la
France et le Royaume-Uni.
D’aucuns diront que le régime syrien , puissamment soutenu par ses alliés, a gagné la guerre,
ce qu’il y a de sûr c’est que l’ensemble du peuple syrien l’a perdue dans les morts et les
souffrances.
Après le retrait de troupes des Etats-Unis dans le Nord Est Syrien (autre erreur politique)la
Turquie déclenche une offensive le 9 octobre 2019 pour créer une »zone de sécurité » contre
les forces kurdes, celles-ci appellent à l’aide le chef de l’Etat syrien ce qui renforce sa position
et celle de la Russie qui est arbitre, à la fois alliée du régime syrien et partenaire de la Turquie
dans les négociations.
Fin février début mars 2020 la situation s’aggrave lorsque des militaires turcs sont tués par
l’armée syrienne, la Turquie riposte,l’escalade reste possible entre les deux pays,le régime
syrien est toujours soutenu par la Russie.
2- 16- En Afghanistan la guerre continue, en 2017 plus de 19.000 morts, en 2018 plus de
20.000.
Elle oppose les talibans, soutenus par le Pakistan, aux autorités étatiques affaiblies.
L’Etat islamique revendique de nombreux attentats. Les Etats-Unis, qui avaient annoncé leur
retrait sous la présidence précédente, maintiennent 18000 soldats en 2018, puis si l’accord est
conclu avec les talibans 8600 hommes et ils pourraient se retirer fin 2020.avant les élections
américaines.
Russie, Chine, Etats-Unis veulent discuter avec les talibans qui refusent d’accepter le
gouvernement afghan affaibli.
L’emplacement stratégique du pays, un des grands carrefours de l’Asie, a toujours attiré les
convoitises. Après les empires médiévaux, après les empires coloniaux russe et britannique,
après les deux blocs Etats-Unis Union soviétique, voilà aujourd’hui de grandes puissances
économiques (Russie, Etats-Unis) et émergentes (Chine)..
Le 29 février 2020 un accord est conclu à Doha(Qatar) entre les Etats-Unis et le mouvement
des talibans,il prévoit le retrait des forces américaines et ouvre la voie à des négociations entre
le gouvernement afghan et les talibans.Le conflit de 18 ans (2001-2019) cesse après 60.000
victimes afghanes et 1900 militaires américains,la paix entre les afghans n’est pas assurée
pour autant.
2- 17- Les tensions entre l’Arabie saoudite et l’Iran se multiplient. Comme en
1987(jusqu’en 1991) les relations diplomatiques sont rompues en janvier 2016.Les causes sont
nombreuses et profondes, au moins de quatre ordres : la crise économique liée à la baisse du
prix du pétrole, le retour de l’Iran vers les Etats- Unis (alliés de l’Arabie saoudite)sous la
présidence Obama à la suite de l’accord sur leur programme nucléaire, le rôle de puissances
régionales(ainsi l’Iran soutenant le régime Syrien et soutenant aussi les rebelles du Yémen
plongé dans la guerre),enfin les rivalités anciennes entre arabes(Arabie Saoudite) et
perses(Iran),entre mondes musulmans c’est à dire l’Arabie saoudite voulant rassembler le
monde sunnite , majoritaire chez les musulmans, et l’Iran voulant protéger le monde chiite,
minoritaire chez les musulmans. La décision en mai 2018 du président des Etats-Unis de se
retirer de l’Accord sur le nucléaire iranien peut , entre autres, contribuer aux tensions entre
l’Arabie Saoudite et l’Iran.
2- 18- La guerre au Yémen se déroule dans le sillage des tensions précédentes. Ce
pays de 28 millions d’habitants, comprend 60% de sunnites et 40%de chiites,c’est l’un des
plus pauvres du monde..
En 2004 au Nord du pays, à la frontière avec l’Arabie saoudite, les habitants chiites se
rebellent, ils estiment être mis à l’écart ,leur chef est tué, ils prennent son nom, les
« Houthistes ».
En 2009 l’Arabie saoudite, sunnite, lance des frappes aériennes contre ces rebelles soutenus
par l’Iran, chiite. En 2011, dans le sillage du printemps arabe, le président est renversé, le
vice-président prend sa place en 2012 et dans ce chaos Al Qaida ainsi que l’Etat islamique
étendent leur influence.
Pendant l’été 2014 les rebelles Houthistes refusent le projet de fédération et entrent dans la
capitale, Saada. L’Arabie prend la tête d’une coalition arabe composée en particulier des
Emirats arabes unis.
En mars 2015 le président s’exile en Arabie saoudite laquelle multiplie les bombardements,
cette coalition arabe est soutenue par les Etats-Unis. Dans la coalition arabe les Emirats arabes
unis utilisent des chars français commandés en 1990 et livrés en 2000.
De mars 2015 à avril 2019, en quatre années, le bilan humain est terrible : plus de 100.000
morts au moins ,85000 enfants morts de faim et de maladie, 3,4 millions de
personnes déplacées, plus de 14 millions de personnes menacées par la famine.
Les pressions se multiplient pour qu’aboutissent sous l’égide des Nations Unies des
pourparlers de paix ouverts en Suède. Le 13 décembre 2018 l’Accord de Stockholm n’est que
partiel sur le territoire. La rivalité entre l’Arabie saoudite et l’Iran continue, le peuple du
Yémen en est une victime. Les habitants du Yémen sont une des populations martyrs
frappée par les guerres, les épidémies, la malnutrition et une crise humanitaire.
2- 19- En 2006 apparait l’Etat islamique en Irak, en 2013 l’Etat islamique en Irak et au
Levant et en juin 2014 des djihadistes établissent un « califat » à cheval sur l’Irak et la Syrie.
Cette organisation armée terroriste islamiste est donc née des guerres en Irak, Syrie,
Lybie. Des conflits armés continuent.
Le choix d’un blocus financier au départ n’est pas mis en avant mais celui d’une coalition de
pays occidentaux et d’une coalition aussi de pays arabes qui, en particulier, bombardent les
positions du groupe de l’Etat islamique. Parmi les troupes au sol des kurdes, des irakiens, des
syriens. Les guerres multiplient les souffrances et la diplomatie essaie de reprendre place dans
le règlement du conflit.
A partir d’octobre 2016 c’est la bataille de Mossoul (en Irak)par l’armée irakienne, les
peshmergas, les forces de sept pays de la coalition contre l’Etat islamique .En septembre 2017
les troupes de l’organisation de l’Etat islamique reculent devant les forces irakiennes et se
replient dans un secteur où Syriens et Kurdes les assiègent.
De juin à septembre 2017 la majeure partie de la ville syrienne de Raqqa est reprise, elle
était considérée comme la capitale de l’Etat islamique.
En février 2019 on peut dire que l’Etat islamique a perdu, à quelques exceptions, le terrain
syro-irakien, en mars 2019 l’enclave de Baghouz tombe,ainsi la zone détenue par Daesh sur
l’Irak et la Syrie n’existe plus.
Par contre ses activités n’ont pas cessé à travers son idéologie, ses groupes armés , en
particulier en Afrique et en Asie, et ses combattants terroristes, en réseaux ou isolés, dans
différents pays en particulier en Irak et en Syrie. Fin octobre 2019 les Etats-Unis exécute le
chef de Daesh, un successeur prend sa relève.
2- 20- Des attentats se développent, ils sont massifs dans des pays asiatiques, par exemple
au Pakistan(de 2007 à 2014 : 7000 victimes, le 17 décembre 2014 à Peshawar 148 morts,
massifs dans des pays africains, par exemple au Nigeria le 3 janvier 2015 ce sont 2000 civils
chrétiens et musulmans qui sont massacrés par Boko Haram.
Dans des pays européens, ils sont revendiqués en particulier par Al-Qaida au Yémen. En
France, le 8 janvier 2015, l’ensemble de la direction d’un journal, Charlie Hebdo, et des
clients d’un magasin juif sont exécutés. Le 11 janvier 2015 ont lieu les plus gigantesques
manifestations de l’histoire de France,4 millions de personnes dans les rues, soutenues par des
manifestations dans de nombreux pays étrangers, contre ces attentats et pour la liberté
d’expression. Le 13 novembre 2015 Paris fait l’objet d’attentats revendiqués par l’organisation
de l’ Etat islamique, ils causent la mort de 130 personnes, l’état d’urgence est décrété.
Le ramadan 2016 est sanglant, ainsi des attentats en Arabie saoudite, en Turquie, au Yemen,
en Jordanie, en Irak…Dans ce dernier Etat à Bagdad le 3 juillet 2016 l’Etat islamique
provoque la mort de près de 300 personnes, ainsi Daesh est capable de frapper sur une partie
de la planète.
2-21- Les luttes contre le terrorisme mises en place après le 11 septembre 2001 se sont
intensifiées peu à peu : plans de surveillance et de sécurité, développement des services de
renseignements, coopérations judiciaire et policière entre Etats, entreprises de
déconditionnement et de « déradicalisation », remise en cause de circuits financiers .
.Trois difficultés sont grandes. La première consiste à ne pas porter atteinte aux libertés
fondamentales au nom de la sécurité, on bascule alors dans les dérives du sécuritaire.
L’exemple caricatural est celui de l’emprunt à la panoplie des régimes autoritaires de « la
déchéance de nationalité ». La seconde difficulté consiste à s’attaquer aux véritables causes du
terrorisme, essentiellement au terreau des injustices, dans des quartiers « défavorisés », dans
les « zones urbaines sensibles » ces inégalités sont criantes , et aussi aux guerres porteuses de
souffrances et de haines, « si on répond à la haine par la haine on ne fait que l’étendre en
surface et en profondeur » disait Gandhi. La troisième difficulté est celle des labyrinthes des
circuits financiers dans lesquels sont directement et indirectement impliqués différents
acteurs, nombreux et quelquefois puissants.
2- 22- En novembre 2013 le gouvernement ukrainien cède aux pressions de Moscou: il
refuse de signer un accord d’association avec l’Union européenne. La contestation prend de
plus en plus d’ampleur en Ukraine, le régime répond en février 2014 par une répression
sanglante et finit par être emporté.
La Crimée est rattachée à la Russie à la suite d’un référendum en mars 2014, la Russie est
sanctionnée en particulier par une suspension de sa participation au G7..
Des situations de guerre civile apparaissent en Ukraine, ce conflit est pour une part
dangereusement internationalisé. La France et l’Allemagne essaient de trouver une
solution diplomatique entre la Russie et l’Ukraine (accord de Minsk, en Biélorussie, le 12
février 2015),ce groupe des quatre continue des pourparlers depuis quatre ans. A l’Est de
l’Ukraine le conflit a fait plus de 10.000 victimes. La Russie contrôle de plus en plus la mer
d’Azov essentielle pour l’économie de l’Ukraine, mer qui débouche sur la mer Noire. Fin
novembre 2018 les tensions sont grandes dans le détroit qui sépare les deux mers, cela pour
des raisons stratégiques et économiques.
L’Ukraine est opposé aux séparatismes des régions orientales (provinces de Donetsk et
Louhansk qui forment le Donbass ) soutenues par la Russie. En février 2019 le total des
victimes est d’au moins 12.000 morts depuis la guerre commencée en avril 2014.
2- 23- L’arrivée au pouvoir de la gauche radicale en Grèce débouche sur des
renégociations en février 2015 sur sa dette au sein de l’Union européenne laquelle se montre
particulièrement intransigeante. La plus grande partie du peuple grec a plongé dans de
grandes difficultés .
D’une façon plus globale des pays de l’Union européenne, en particulier les sociétés du
Sud, sont sous les effets sociaux et économiques désastreux de la crise, ainsi en Espagne
et en Italie.
2- 24- En France le nouveau président affirme que pour réformer il faut réunir à la fois
une certaine droite et une certaine gauche. Sa politique néo libérale en fait marginalise les
plus pauvres et paupérise les classes moyennes, la révolte des uns et des autres gronde.
Cette révolte explose pour une partie d’entre eux en novembre 2018 sous la forme des
« gilets jaunes », rassemblés le samedi sur des ronds points et manifestant dans la rue. Ils
sont soutenus par une majorité de français, ils protestent encore un an après en novembre
2019 et manifestent toujours pour le pouvoir d’achat, la justice fiscale et la mise en place
d’un référendum d’initiative populaire. (Voir mes deux articles sur ce site et ce blog « Les
violences des injustices, des révoltes, des répressions. »)
Des protestations et des grèves se multiplient dans des services publics (ainsi les
hôpitaux) et par rapport à la réforme des retraites (manifestations et grèves se succèdent à
partir du 5 décembre 2019 ) .Celle-ci est adoptée par le passage en force du gouvernement
qui utilise l’article 49-3 de la constitution. Comme dans de nombreux pays la France se
retrouve touchée par l’épidémie de coronavirus venue de Chine en janvier 2020,elle met en
oeuvre divers moyens pour y faire face.
Quant à la politique énergétique nucléaire de la France elle avance vers des risques
sanitaires et environnementaux très inquiétants et elle court vers des finances
dramatiquement explosives.
2- 25- En mars 2013 est élu le pape François , un argentin, ses engagements sont
nombreux, pour n’en citer qu’un seul : une encyclique consacrée à la protection de la création
et à l’écologie humaine. »Pour la sauvegarde de la maison commune ». (2015, »Laudato Sii »,
Loué sois-tu! ).L’importance qu’il accorde « aux pauvres » et à « l’accueil des migrants »
témoigne d’ un certain souffle. La fin du silence par la hiérarchie catholique de pratiques
pédophiles dans l’Eglise commence enfin à voir le jour, de même face aux drames de
religieuses violées par des prêtres.
2- 26- Quant au nouveau président des Etats-Unis le voilà , en plus de deux années de
pouvoir (janvier 2017 à novembre 2019), critiquable et critiqué. .Sur le fond une allergie au
multilatéralisme, une tendance au nationalisme et au protectionnisme, une fascination pour la
domination, une incapacité criante à tenir compte de la complexité de la vie internationale.
Une telle situation contribue à des tensions, des crises et des drames.
Ainsi le désengagement de l’Accord de Paris sur le climat est inacceptable et
irresponsable. Il touchera même les Etats-Unis et en catastrophes écologiques qui iront en
s’aggravant (voir les incendies de Californie en novembre 2018 et octobre 2019) et en
catastrophes économiques qui vont se multiplier pour eux aussi, les unes et les autres
préparent très probablement des révoltes dans les régions sinistrées et la multiplication de
déplacés environnementaux sur place, et dans une moindre mesure à l’étranger, d’
habitants des Etats-Unis. Nous pensons que son aveuglement, en particulier face au
réchauffement climatique, se retournera contre lui au moment des élections de novembre
2020.
Ajoutons à cela l’influence d’une partie de son entourage constituée « d’ultras faucons » qui ont
une panoplie guerrière : la sacro sainte puissance militaire des Etats-Unis, les guerres »
préventives », la lutte contre « l’axe du Mal et les Etats voyous », le rejet viscéral du
multilatéralisme considéré comme inefficace et dangereux pour les intérêts des Etats-Unis.
Des acteurs, aux Etats-Unis et ailleurs, essaient de s’organiser pour proposer et mettre en
oeuvre des alternatives à différents niveaux géographiques. En novembre 2018 les élections
de mi-mandat marque une certaine sanction des électeurs puisque la majorité bascule en
faveur des démocrates à la Chambre des représentants. La frontière avec le Mexique fait
l’objet d’une obsession du président sur « les hordes qui envahissent les Etats-Unis ». Pour les
en préserver le « mur » à construire qu’il réclame est symbolique d’une politique dénoncée à
juste titre entre autres par les démocrates.
2- 27- De façon plus globale on constate dans un certain nombre de pays (Etats-Unis,
en Europe, en Amérique du Sud) une certaine montée de nationalismes et de
populismes.
La nouvelle présidence des Etats-Unis depuis janvier 2017 s’inscrit ainsi dans un
certain nationalisme comme d’ailleurs celles du président russe (4ème mandat 2018-2024) et
du président turc. Ce dernier a mis en oeuvre une répression organisée massivement en
Turquie, la poudrière kurde est toujours là et le régime turc en Syrie bombarde les kurdes
syriens d’Afrine ( janvier à mars 2018) ainsi que d’autres villes de Syrie où ils se trouvent, le
régime turc est en lien avec ses ultra nationalistes qui veulent écraser le mouvement kurde.
On constate aussi une montée, plus ou moins importante selon les pays, de populismes par
exemple au pouvoir en Pologne, en Hongrie, en Autriche, en Italie, et sous la forme d’un parti
politique par exemple en France… Ainsi des extrêmes droites vont même jusqu’à conquérir le
pouvoir, comme au Brésil fin 2018,en novembre 2019 par un coup d’Etat qui chasse le
président de gauche..
On peut distinguer
d’une part , des populismes protestataires, tournés vers la dénonciation de la confiscation du
pouvoir par des élites et vers la dénonciation de la corruption ,
d’autre part, des populismes identitaires tournées vers la dénonciation d’une mondialisation
destructrice d’identités et d’une immigration jugée inquiétante ou inacceptable. Dans des
proportions variables des populismes rassemblent souvent ces deux dimensions, la
protestataire et l’identitaire.
2- 28- Les crises sociales éclatent dans de nombreux pays ces dernières
années. particulièrement en 2018-2019.
Elles se déroulent souvent à travers la désobéissance civile non violente. Il arrive cependant
qu’elles répondent aux répressions dont elles sont l’objet ou qu’elles utilisent directement
diverses formes de violences.
Les revendications sont celles de la démocratie ( par exemple à Hong Kong… sous le regard
de la Chine)
celles de la dénonciation de gouvernements jugés corrompus ( par exemple au Liban) ,
de la sortie de tout un système politique ( par exemple en Algérie),
d’une droite contre une gauche chassée du pouvoir ( par exemple en Bolivie )
d’un partage des richesses ( par exemple au Chili qui en arrive à un référendum sur une
nouvelle constitution).
De façon plus profonde ces crises sociales , auxquelles s’ajoutent les crises écologiques,
ont pour cause le système productiviste porteur d’injustices, d’autoritarismes, de
débâcle écologique, de violences.
2- 29- Les grandes rencontres de coopération et concertation inter étatiques ( G 8
créé en 1975 , G 20 créé en 1999, sans oublier l’organisation de Shangai créée en
2001qui comprend huit Etats, en particulier la Chine ,la Russie, l’Iran et maintenant l’Inde)
adoptent des communiqués communs et peuvent faire des recommandations .
Ces rencontres ont leur utilité au niveau des rapports interpersonnels de ceux et celles qui y
participent, au niveau aussi des rencontres bilatérales, elles peuvent également essayer de
faire face à des crises, apaiser des conflits, préparer des régulations et des stratégies
économiques, financières, commerciales, politiques…
.Ces rencontres ont cependant deux limites. D’abord elles ne débouchent pas sur des
décisions, elles ont simplement un pouvoir incitatif, non obligatoire. Ensuite et surtout elles
s’inscrivent dans des régulations…du productivisme et non pas celles de la construction d’une
communauté mondiale humainement viable. Même s’il ne faut pas négliger telle ou telle
remise en cause contribuant à préparer une législation internationale porteuse, leurs logiques
dominantes ne sont pas celles de la mise en oeuvre massive de moyens démocratiques, justes,
écologiques et pacifiques.
Ce qui pourrait être porteur d’un certain espoir c’est que dans de telles rencontres voient le
jour par exemple une taxe sur les transactions financières, par exemple un programme
mondial financé sur le droit à l’eau et d’autres alternatives.
S’ils ne faut sans doute pas désespérer de telles rencontres les peuples savent qu’il ne faut pas
en attendre à ce jour de remède miracle. Ce sont surtout leurs luttes qui peuvent contribuer à
de tels changements.(voir notre article sur « Les moyens contribuant à passer d’un système
mondial productiviste autodestructeur à une communauté mondiale humainement viable »).
2- 30- Un autre type de rencontre est la Coupe du monde de football, évènement sportif et
médiatique , qui a permis à 32 pays qualifiés de concourir en Russie, l’équipe de France des »
bleus » renouvelle l’exploit de 1998 en juillet 2018 , elle est à nouveau championne du
monde. La prochaine coupe devrait se dérouler au Qatar en 2022.
2-31- La crise du coronavirus (Covid 19) apparait en novembre 2019 en Chine centrale à
Wuhan. Elle se développe rapidement et atteint en mars avril 2020 peu à peu l’ensemble des
pays du monde en particulier des pays européens dont l’Italie , la France, l’Espagne,
l’Allemagne. D’autres pays mal préparés , comme les Etats-Unis et le Brésil, seront
gravement atteints. L’inquiétude pour des pays africains et américains est grande.
2- 32-Cette crise sanitaire a pour effet la mort en avril 2020 de plus de cent mille
personnes, les prévisions d’ici juin 2020 sont en général de plus de trois cent mille morts,
certaines vont jusqu’à un million voire plus. Les recensements des victimes sont souvent très
incomplets. Les services de santé faute de moyens en personnels, en lits, en matériels
(masques et tests en particulier) sont débordés.
2-33-La crise sanitaire se double d’une crise économique profonde puisque à la suite du
« confinement » La plupart des entreprises de toutes tailles ferment. En particulier des
entreprises de transports aériens qui tombent en faillite. Les bourses s’effondrent mais surtout
le nombre de chômeurs explose. Les inégalités s’aggravent, le nombre de personnes en
situations catastrophiques explose, il est « amorti » dans certains pays comme la France par
des aides sociales.
2-33-Quelques effets positifs de cette crise sont les émissions de CO2 qui diminuent , la
nature qui respire un peu moins mal, le télé travail qui se développe avec pourtant ses limites,
des solidarités qui s’organisent, en particulier celle de groupes qui s’auto organisent par
exemple pour la consommation alimentaire. Enfin les déplacements à bicyclette se
multiplient. Des projets « du monde d’après » commencent à voir le jour venant surtout des
milieux associatifs.
2-34-Mais les remises en cause après la crise ne seront très probablement pas au rendezvous,
les mêmes logiques productivistes reprendront le dessus. Par exemple les émissions
de gaz à effet de serre vont vraisemblablement reprendre de plus belle, par exemple les
remises en cause nécessaires par rapport aux causes profondes du développement des
épidémies ne seront pas tirées.
2-35-Autrement dit la place de plus en plus restreinte accordée à la nature sera toujours
là et sa marchandisation aussi.
2-36-On pourra espérer vivement que les budgets accordés à la santé feront l’objet
d’une…explosion. Quelques jours pris dans l’ensemble des pays sur les dépenses
d’armements seraient salvateurs mais ce serait là déranger des pensées bien ordonnées dans
le non-sens et couchées devant le courage.
Voir la quatrième et dernière partie de cette synthèse des relations internationales :
IV HISTORIQUE : LES GRANDES VIOLENCES DE 1945 A NOS JOURS (avril
2020).
Ce billet et article est le dernier de la série de l’histoire des relations internationales de
1945 à nos jours.
« De la Conférence de Yalta à la guerre du Vietnam(1945-1964) ( I )
« De la guerre du Vietnam à la sortie de Yalta(1964-1989) ( II )
« De la sortie de Yalta à nos jours (1989 à fin novembre 2019) ( III )
et donc « Synthèse des grandes violences de 1945 à nos jours(fin novembre 2019) ( IV )
Nous avions distingué sur notre blog et notre site « les contenus des violences » en trois
grandes catégories. Le contenu des grandes violences, massives, terrifiantes, porteuses de
nombreuses morts et de grandes souffrances, le contenu des atteintes aux personnes, aux
biens, à la paix publique, à l’environnement, le contenu des autres violences à ne pas
banaliser. Nous renvoyons les lecteurs intéressés à notre série d’articles de ce blog et de ce
site sur les violences plus précisément aux contenus de ces deux dernières catégories que
nous n’abordons pas dans ces développements.
Nous avons voulu proposer ici une synthèse des grandes violences pour deux raisons.
D’une part il faut avoir une vue globale de l’ensemble de ces souffrances or on oublie telle
ou telle catégorie de drames ou tel ou tel drame particulier.
D’autre part il faut avoir une idée du nombre des victimes, donc ne pas sous-estimer
l’ampleur de ces horreurs depuis 1945 et par rapport à l’ensemble des drames et par rapport
à tel ou tel drame.
Le contenu des grandes violences est tragiquement clair à définir.
Ce sont les violences massives, terrifiantes, porteuses de nombreux morts et de grandes
souffrances multiformes.
Deux remarques préalables :
Nous n’hésiterons pas à rappeler des drames gigantesques précédents 1945, ainsi la
grande boucherie de 1914-1918 , la Seconde guerre mondiale (1939-1945) , les
génocides des arméniens(1915-1917) et des juifs(1939-1945).
Nous donnerons parfois les écarts des chiffres des victimes, les historiens et d’autres avec
eux évoquent parfois des différences considérables, ainsi par rapport aux morts des plus de
530 conflits armés depuis 1945 les deux extrêmes vont de quinze millions de victimes à
cinquante cinq millions soit l’équivalent de la Seconde guerre mondiale, cela sans prendre en
compte de multiples autres tragédies que nous soulignerons et qui arrivent à un total général
gigantesque avec les conflits armés cela même dans les recensements les moins élevés.
Pour établir cette énumération des grandes violences nous combinerons des formes
de grandes violences proches (guerres, massacres, épurations de masse), des aspects où le
droit les qualifie (crimes internationaux), des aspects plus politiques (régimes politiques,
terrorismes) des domaines de grandes violences (scientifique et industriel, économique,
social, culturel, écologique).
Nous regrouperons les grandes violences en deux points :
A- Les guerres, les massacres, les épurations de masse de 1945 à nos jours (fin 2019),
B- Les autres grandes violences de 1945 à nos jours(fin 2019) 1-les crimes internationaux
(crimes de guerre, crimes contre l’humanité, crime de génocide, crime d’agression), 2- les
crimes contre l’environnement 3-les régimes totalitaires et les camps de l’horreur, 4-les
régimes autoritaires, 5-les terrorismes, 6-la course aux armements, 7-les grandes violences
économiques et sociales, 8- les grandes violences culturelles : les ethnocides 9- les grandes
violences écologiques.
A- LES GUERRES , LES MASSACRES , LES EPURATIONS DE MASSE DE 1945 A
NOS JOURS (fin 2019)
1- Les guerres
1-1 Quelques généralités
Il est probable que la guerre n’a pas toujours existé, elle apparait à la suite de trois
séries de causes (climatiques, économiques, démographiques) (voir sur ce blog « Analyses
des causes des violences »).
Cependant les guerres sont omniprésentes dans l’histoire : guerres préhistoriques, guerres
des empires, guerres des sociétés féodales, guerres coloniales, guerres révolutionnaires,
guerres de décolonisation, guerres de libération, et bien sûr les guerres mondiales de 1914-
1918,72 pays en guerre,65 millions de soldats mobilisés et de 1939-1945,68 pays en guerre,70
millions de soldats mobilisés. De nos jours les guerres civiles sont de loin les plus
nombreuses, souvent plus ou moins internationalisées, des guerres inter étatiques sont encore
présentes.
De 1945 à nos jours, en plus de sept décennies (début 1945-fin 2019) quel a été le nombre de
conflits armés ? Il y a eu de l’ordre de cinq cents vingt (530) conflits armés.
Ainsi par exemple, de façon plus précise, de 1945 à 1968 cent conflits armés (Annuaire
SIPRI, 1968-69), sur la période 2001-2011 soixante treize conflits étatiques, deux cents vingt
deux non étatiques (SIPRI, Yearbook 2013)… Les conflits inter étatiques depuis 1945 sont
moins nombreux, neuf conflits armés sur dix sont intra étatiques et de plus en plus ont une
portée internationale dans la mesure où plusieurs Etats soutiennent les parties internes au
conflit.
1-2 Les malheurs apportés par les guerres ce sont d’abord les morts.
1-2-1 La Première guerre mondiale de 1914-1918 est à l’origine de 18,6 millions de
morts,. Ce nombre global comprend 9,7 millions de morts pour les militaires (on cite
d’ailleurs souvent cette donnée de 10 millions de pertes humaines pour la Grande Guerre) et
8,9 millions pour les civils.
Il y a eu 2 millions de soldats allemands et 1,5 million de soldats français tués pendant cette
guerre. En France les 40.000 monuments aux morts de la Première Guerre
mondiale témoignent de cette immense boucherie.
Rappelons nous un des témoignages bouleversants, celui de Roland Dorgelès (Les Croix de
bois, Paris, Albin Michel, 1925) relatif aux cadavres d’un champ de bataille des tranchées de
1914-1918: « Sans regarder, on sauta dans la tranchée. En touchant du pied ce fond mou, un
dégoût surhumain me rejeta en arrière, épouvanté. C’était un entassement infâme, une
exhumation monstrueuse de Bavarois cireux sur d’autres déjà noirs, dont les bouches tordues
exhalaient une haleine pourrie, tout un amas de chairs déchiquetées, avec des cadavres qu’on
eût dit dévissés, les pieds et les genoux complètement retournés, et, pour les veiller tous, un
seul mort resté debout, adossé à la paroi, étayé par un monstre sans tête. (…) On hésitait
encore à fouler ce dallage qui s’enfonçait, puis, poussés par les autres, on avança sans
regarder, pataugeant dans la Mort… »
1-2-2 La Seconde guerre mondiale, 1939-1945, est à l’origine de cinquante cinq
millions de morts, militaires et civils. C’était « une guerre totale » où les victimes civiles
ont été de plus en plus nombreuses.
Au sein de cette guerre le génocide mis en oeuvre par les nazis témoigne de l’horreur de
l’horreur.
Les historiens, en particulier Raul Hilberg, estiment aujourd’hui que les nazis ont exterminé
5,1 millions de juifs ( 3 millions dans les camps,800.000 dans les ghettos,1,3millions
massacrés en dehors des camps) et d’autre part 250.000 tziganes,200.000 handicapés
physiques et mentaux , 15000 homosexuels, 3,5 millions de prisonniers de guerre soviétiques
et 1,1 million de déportés ne relevant pas des « crimes » précédents. Le Tribunal
international de Nuremberg a estimé le nombre de victimes juives à 5,7millions et a
employé le nombre de 6 millions repris par la suite. L’extermination a été celle des deux
tiers de la population juive d’Europe et du tiers du peuple juif dans son entier.
Rappelons nous un des témoignages bouleversants en 1947celui de Primo Levi dans « Si
c’est un homme », ouvrage que Paul Klein synthétise de la façon suivante : « Ce livre est
sans conteste l’un des témoignages les plus bouleversants sur l’expérience indicible des camps
d’extermination. Primo Levi y décrit la folie meurtrière du nazisme qui culmine dans la
négation de l’appartenance des juifs à l’humanité. Le passage où l’auteur décrit le regard de ce
dignitaire nazi qui lui parle sans le voir, comme s’il était transparent et n’existait pas en tant
qu’homme, figure parmi les pages qui font le mieux comprendre que l’holocauste a d’abord été
une négation de l’humain en l’autre.
Si rien ne prédisposait l’ingénieur chimiste qu’était Primo Levi à écrire, son témoignage est
pourtant devenu un livre qu’il importe à chaque membre de l’espèce humaine d’avoir lu pour
que la nuit et le brouillard de l’oubli ne recouvrent pas à tout jamais le souvenir de
l’innommable, pour que jamais plus la question de savoir « si c’est un homme » ne se pose.
De ce devoir de mémoire, l’auteur s’est acquitté avant de mettre fin à ses jours, tant il semble
difficile de vivre hanté par les fantômes de ces corps martyrisés et de ces voix étouffées. »
Au sein de cette guerre les holocaustes nucléaires d’août 1945 sur Hiroshima et Nagasaki
ont causé la mort, selon des estimations de 2005, d’au moins 240.000 personnes. (Voir sur
Hiroshima par exemple mon ouvrage « Construire la paix . Les armements détruisent
l’humanité. »,tome 1, Editions La Chronique sociale,1988.)
Rappelons-nous un des témoignages bouleversants, celui de l’écrivain Mizukawa : « Une
mère aveugle serrant contre elle son enfant mort, des larmes ruisselants de ses yeux détruits.
C’était dans mon enfance, ma mère me tenait par la main. Vision de cauchemar inoubliable. »
1-2-3 Depuis 1945 jusqu’à fin 2019 les conflits armés pendant plus de sept décennies, 74
ans, ont été à l’origine d’au moins dix à quinze millions de victimes. Il faut souligner
l’incertitude de ce total puisque on avance parfois l’équivalent de la Seconde guerre
mondiale soit 55 millions de morts.
Un témoignage bouleversant, symbolique de tant et tant d’autres souffrances, témoignage de
Maida, douze ans,en 2001 en Macédoine à Skopje : « Guerre est le mot le plus triste qui sort de
mes lèvres tremblantes. C’est le plus mauvais des oiseaux qui remplit les murs de sang et qui
fait du monde un enfer. »
1-2-4 Depuis 1945 les guerres les plus terrifiantes en nombre de victimes ont été
En Chine : certains historiens estiment que la seconde partie de la guerre civile enChine de
1945 à 1949 aurait fait au moins 5 millions de victimes.(1949 c’est l’indépendance de la
Chine.)
Depuis 1945 la guerre du Vietnam (seconde guerre d’Indochine) a été l’une des plus
meurtrières. Elle opposait, d’une part, le Nord Vietnam procommuniste, soutenu
militairement par la Chine et l’Union soviétique et, d’autre part, le Sud Vietnam, soutenu
militairement par les Etats-Unis. Cette guerre va de 1964 à 1973, elle continue entre les deux
Vietnam de 1973 à 1975, elle est synonyme de souffrances gigantesques. Les victimes du côté
vietnamien sont de plus de 1 million de combattants et de 4 millions de civils, la
population vietnamienne a été écrasée, du côté des Etats-Unis de 58.000 militaires.
En nombre de victimes une autre guerre a été particulièrement gigantesque quant aux pertes
humaines puisque, de 1986 à 1996, en RDC (République Démocratique du Congo) il y a eu
au moins 4 millions de victimes.
Les autres guerres gigantesques et terrifiantes en nombre de morts, celle de Corée
(1950-1953) 2 millions de victimes, celle du Biafra au Nigeria ( 1967-1970) 2 millions…
Et d’autres guerres encore…En août 1947 la partition de l’Inde et du Pakistan, pays qui
deviennent indépendants, entraine une guerre faisant un million de victimes et un des plus
grands déplacements de population, l’une hindoue, l’autre musulmane, plus de 12 millions de
personnes allant d’un côté ou de l’autre.
1-3 Les malheurs des guerres ce sont aussi des souffrances physiques, morales, souvent
à vie, des combattants et des populations.
La Grande Guerre fit 20 millions de blessés dont de nombreux invalides à vie, et des millions
de veuves et d’orphelins.
En France cette hécatombe dans la population française, en plus des 1,5 million soldats morts,
est de 5,5 millions de blessés, plus de1,2 million d’invalides, 600.000 veuves de guerre, et
près de 1 million d’orphelins, autant de personnes plongées dans des détresses physiques,
morales et matérielles.
Evoquer cette grande boucherie de 1914-1918 c’est penser à la survie dans les tranchées, une
forme d’enfer extrême sur terre : attaques, mitrailleuses, obus, explosions de surface et
souterraines, gaz de combat, combats à la baïonnette et au couteau, cadavres, cris plaintes et
souffrances des blessés, peurs de mourir, lassitudes, crises de folie, suicides, exécutions pour
en appeler à la « combativité » , prises de conscience des abattoirs programmés par les folies
et les erreurs du commandement, manques de sommeil, de nourriture et d’eau, puanteurs
multiples, conditions sanitaires catastrophiques, noyades, froid, pluie, boue, poux, rats,
vermine …(Voir en particulier la terrifiante et remarquable série documentaire « Apocalypse,
la 1ère Guerre mondiale »).
1-4 Les malheurs des guerres ce sont aussi
les destructions matérielles (villes, villages, routes, voies ferrées, aéroports, ponts …),
les destructions culturelles (monuments, musées, bibliothèques, oeuvres d’art…) qui sont
autant de violations des patrimoines locaux , nationaux, continentaux, mondiaux des
générations passées, présentes et futures…
les destructions environnementales (faune, flore, forêts, paysages, air, sol, eau, étendues
agricoles, monuments…), la guerre est destructrice non seulement des êtres humains mais
aussi de l’environnement (voir article sur ce blog « Les atteintes à l’environnement et les
conflits armés »), et article de JML, Droit de la guerre, droit de l’environnement, colloque
OMIJ Limoges, 15 et 16 décembre 2008. Actes du colloque, Les droits de l’homme face à la
guerre, Dalloz, 2009), dans ces articles est proposée au départ une synthèse des effets
nombreux et catastrophiques de la préparation de la guerre, puis du conflit et enfin de l’aprèsconflit
sur l’environnement, c’est une vision globale terrible.
2- Les massacres
Selon Jacques Sémelin (-Pour sortir de la violence, Jacques Sémelin, les éditions ouvrières,
1983). « le massacre peut être commandé ou spontané, méthodique ou non mais, par
définition, il est toujours limité. Sa finalité n’est pas de détruire le groupe-victime en tant que
tel mais de créer en son sein un effet de terreur de nature à faciliter sa soumission ou à
l’inciter à fuir un territoire donné. Le massacre est au service d’une stratégie de conquête ou
de mise en esclavage de populations. On le retrouve dans toutes les formes de guerres : de
la guerre antique à la guerre moderne, en passant par la guerre coloniale. »
Un exemple terrible est celui du massacre à Madagascar alors colonie française .C’est un
crime colonial français face au soulèvement. Après l’insurrection du 29 mars 1947l’armée
française exécute un massacre de 20 000 à 30 000 malgaches en avril mai 1947 .La guerre va
de 1947 à 1958, il y a eu au moins 100.000 victimes. , l’indépendance de Madagascar date de
1960.
Le massacre peut exister aussi en dehors de la guerre, par exemple sous la forme d’une
opération militaire spécifique à telle ou telle situation, par exemple aussi sous la forme d’actes
terroristes importants.
3- Les épurations de masse
Jacques Semelin –(Pour sortir de la violence, Jacques Sémelin, les éditions ouvrières,
1983).écrit « Si la finalité du massacre peut être aussi bien interne qu’externe, la technique de
l’épuration est fortement liée à la gestion intérieure des peuples. Elle vise à consolider,
renforcer, accroître le pouvoir de ceux qui la décident et qui, par là-même, révèlent le
caractère tyrannique de leur régime. L’épuration de masse répond souvent à des critères
idéologiques en s’abattant sur des groupes politiques, des catégories économiques ou des
classes sociales particulières. La logique de l’épuration (sélection, regroupement,
déportation) est proche de la logique du génocide même si elle n’a pas pour objet l’éradication
des populations visées. Les chiffres des morts des grandes épurations de masse sont de l’ordre
de ceux des grands génocides et parfois les dépassent.»
Trois des exemples terrifiants sont ceux
de la famine organisée par Staline contre les paysans ukrainiens pour mettre en oeuvre
l’industrialisation forcée et écraser les révoltes en 1932-33, 6 à 8 millions de morts,
des camps du totalitarisme stalinien entre 1928 et 1953, au moins 25 millions de
victimes,(voir ci-dessus « les camps de l’horreur »)
des répressions massives sous la révolution culturelle en Chine de 1966 à 1976, de 1 à 3
millions de morts.
B- LES AUTRES GRANDES VIOLENCES DE 1945 A NOS JOURS ( FIN 2019 )
1- Les crimes internationaux : crime de guerre, crime contre l’humanité, crime de
génocide, crime d’agression
1-1 Notre objectif est de donner ici une idée juridique précise de ces crimes tout en
rappelant aussi certains d’entre eux.
Des tribunaux spécifiques ont été créés pour juger de tel ou tel crime puis, après leur
mission, ils avaient ou ont vocation à disparaitre. Est enfin venu le jour où une cour
permanente a été créée, la CPI en 1998.
Selon l’article 5 du Statut de la Cour pénale internationale(CPI) du 12 juillet 1998, entré
en vigueur le 1er juillet 2002, la compétence de la Cour est limitée aux « crimes les plus
graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale. En vertu du présent
Statut, la Cour a compétence à l’égard des crimes suivants : a) Le crime de génocide ; b)
Les crimes contre l’humanité ; c) Les crimes de guerre ; d) Le crime d’agression. »
Ce sont donc les formes de crimes internationaux. De 2004 à 2018 dix ouvertures
d’enquêtes ont vu le jour : République démocratique du Congo(2004), Ouganda(2004),
Darfour-Soudan (2005 puis 2014), République
centrafricaine(2007),Kenya(2010),Libye(2011),Côte d’ivoire
(2011),Mali(2013),Géorgie(2016),Burundi(2017).Sur les vingt suspects huit ont eu un nonlieu,
deux ont été acquittés, dix ont été condamnés à ce jour fin 2018.
1-2 Les crimes de guerre
Quand éclate une guerre, des crimes de guerre l’accompagnent souvent. Ils sont très
loin d’être toujours dénoncés et condamnés.
Les « crimes de guerre » sont des violations graves du droit international humanitaire,
elles sont commises à l’encontre de civils ou de combattants ennemis, pendant un conflit
armé international ou interne, ces violations entraînent la responsabilité pénale
individuelle de leurs auteurs.
Les crimes de guerre sont des infractions graves au droit international humanitaire applicable
en cas de conflits armés(les quatre conventions de Genève du 12-12-1949 et le Protocole I de
1977), autrement dit dans les conflits internationaux (entre Etats).
Cependant, et heureusement, ils sont pris également en compte dans les conflits non
internationaux (internes, autrement dit les guerres civiles), ces conflits armés noninternationaux
dépendent quant à eux de l’article 3 commun aux Conventions de Genève ainsi
que du second Protocole additionnel de 1977relatif à « la protection des victimes des conflits
non internationaux. » « L’article 8 §2 alinéa e) du Statut de la Cour s’applique aux conflits
armés ne présentant pas un caractère international et ne s’applique donc pas aux situations de
troubles et tensions internes telles que les émeutes, les actes isolés et sporadiques de violence
ou les actes de nature similaire. Il s’applique aux conflits armés qui opposent de manière
prolongée sur le territoire d’un État les autorités du gouvernement de cet État et des groupes
armés organisés ou des groupes armés organisés entre eux. »
Le Statut de la CPI dans son article 8 précise :
« 1.La Cour a compétence à l’égard des crimes de guerre, en particulier lorsque ces crimes
s’inscrivent dans le cadre d’un plan ou d’une politique ou lorsqu’ils font partie d’une série de
crimes analogues commis sur une grande échelle. - Aux fins du Statut, on entend par « crimes de guerre » :
a) Les infractions graves aux Conventions de Genève du 12 août 1949, à savoir
l’un quelconque des actes ci-après lorsqu’ils visent des personnes ou des
biens protégés par les dispositions des Conventions de Genève :
i) L’homicide intentionnel ii) La torture ou les traitements inhumains, y compris les
expériences biologiques iii) Le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de
porter gravement atteinte à l’intégrité physique ou à la santé
iv) La destruction et l’appropriation de biens, non justifiées par des nécessités militaires et
exécutées sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire v) Le fait de contraindre un
prisonnier de guerre ou une personne protégée à servir dans les forces d’une puissance
ennemie vi) Le fait de priver intentionnellement un prisonnier de guerre ou toute autre
personne protégée de son droit d’être jugé régulièrement et impartialement vii) La déportation
ou le transfert illégal ou la détention illégale viii) La prise d’otages.
b) Les autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés
internationaux dans le cadre établi du droit international, à savoir, l’un
quelconque des actes ci-après :
i) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre la population civile en tant que telle
ou contre des civils qui ne participent pas directement part aux hostilités; ii) Le fait de diriger
intentionnellement des attaques contre des biens de caractère civil, c’est-à-dire des biens qui
ne sont pas des objectifs militaires; iii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques
contre le personnel, les installations, le matériel, les unités ou les véhicules employés
dans le cadre d’une mission d’aide humanitaire ou de maintien de la paix conformément à la
Charte des Nations Unies, pour autant qu’ils aient droit à la protection que le droit
international des conflits armés garantit aux civils et aux biens de caractère civil; (…) » (Voir
la suite énumération sur site icc-cpi-int).
En décembre 2017 une résolution sur les amendements à l’article 8 du Statut de Rome
ajoute trois crimes de guerre à la compétence de la Cour : l’usage d’armes qui utilisent des
agents microbiens ou autres agents biologiques ou des toxines, d’armes blessant par des éclats
qui ne sont pas localisables par rayons X, ou d’armes à laser.
1-3 Les crimes contre l’humanité
Contrairement au crime de guerre qui a lieu pendant un conflit armé, le crime contre
l’humanité, comme d’ailleurs le crime de génocide, peut avoir lieu en période de paix ou
en période de guerre. Nombreux sont les crimes contre l’humanité.
Un exemple de tribunal spécifique était, bien sûr, celui de Nuremberg face aux crimes
nazis. Selon l’article 6 du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août
1945 les crimes contre l’humanité sont constitués par « l’assassinat, l’extermination, la
réduction en esclavage, la déportation ou tout autre acte inhumain contre toutes populations
civiles, ou bien les persécutions pour des motifs politiques, raciaux ou religieux lorsque ces
actes ou ces persécutions sont commis à la suite d’un crime contre la paix ou d’un crime de
guerre, ou en liaison avec ces crimes ».
Selon l’article 7 paragraphe 1 du Statut de la Cour pénale internationale
« 1. Aux fins du présent Statut, on entend par crime contre l’humanité l’un quelconque des
actes ci-après lorsqu’il est commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique
lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque :
a) Meurtre ; b) Extermination ; c) Réduction en esclavage ; d) Déportation ou transfert forcé
de population ; e) Emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en
violation des dispositions fondamentales du droit international ; f) Torture ; g) Viol, esclavage
sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée ou toute autre forme de
violence sexuelle de gravité comparable ; h) Persécution de tout groupe ou de toute
collectivité identifiable pour des motifs d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel,
religieux ou sexiste au sens du paragraphe 3, ou en fonction d’autres critères universellement
reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans
le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour ; i) Disparitions
forcées de personnes ;
j) Crime d’apartheid ; k) Autres actes inhumains de caractère analogue causant
intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à
la santé physique ou mentale. »
1-4- Le crime de génocide
Rappelons les génocides du XXème siècle : génocides des arméniens (1915-1917), des juifs
et des tsiganes (1933-1945), des cambodgiens (1975-79), des rwandais(1994).(voir
développements précédents)
Jacques Sémelin (ouvrage déjà cité ci-dessus) écrit « Le génocide est toujours un ethnocide,
un massacre, une épuration et en même temps il est plus que tous ces éléments réunis. Il a
pour finalité la destruction totale du groupe-victime. La spécificité du génocide réside dans la
volonté de détruire totalement une collectivité humaine définie en tant que telle. »
Selon l’article 2 de la Convention pour la prévention et la répression du crime de
génocide du 9-12-1948 il s’agit des « actes criminels, commis en temps de guerre ou de paix,
dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou
religieux ».
Selon l’article 6 du Statut de la Cour pénale internationale
« Aux fins du présent Statut, on entend par crime de génocide l’un quelconque des actes
ci-après commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national,
ethnique, racial ou religieux, comme tel :
a) Meurtre de membres du groupe ; b) Atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de
membres du groupe ; c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence
devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ; d) Mesures visant à entraver les
naissances au sein du groupe ; e) Transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe. »
En ce qui concerne le génocide au Cambodge (1975-1978, au moins deux millions de
victimes) un tribunal composé de juges cambodgiens et internationaux a été créé en 2006, il a
jugé les derniers dirigeants du régime génocidaire, il a fallu attendre lejugement du 16
novembre 2018 pour que deux d’entre eux soient condamnés comme responsables de
crimes qualifiés de « génocide ».
1- 5 Le crime d’agression
Depuis 1945 les crimes d’agression d’un Etat contre un autre ont été nombreux, les
Nations Unies les ont parfois sanctionnés par l’embargo et/ou des sanctions militaires
mais, le plus souvent, elles sont restées paralysées par l’utilisation du droit de veto d’un
membre permanent du Conseil de sécurité (voir article sur « Qu’est-ce que la paix?
Construire la paix ! »).
Selon l’article 8 bis du Statut de la Cour pénale internationale, rajouté conformément à la
résolution du 11 juin 2010 :
« 1. Aux fins du présent Statut, on entend par «crime d’agression» la planification, la
préparation, le lancement ou l’exécution par une personne effectivement en mesure de
contrôler ou de diriger l’action politique ou militaire d’un État, d’un acte d’agression
qui, par sa nature, sa gravité et son ampleur, constitue une violation manifeste de la
Charte des Nations Unies.
2.Aux fins du paragraphe 1, on entend par «acte d’agression» l’emploi par un État de la force
armée contre la souveraineté, l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique d’un autre
État, ou de toute autre manière incompatible avec la Charte des Nations Unies. Qu’il y ait ou
non déclaration de guerre, les actes suivants sont des actes d’agression au regard de la
résolution 3314 (XXIX) de l’Assemblée générale des Nations Unies en date du 14
décembre1974 :
a)L’invasion ou l’attaque par les forces armées d’un État du territoire d’un autre État ou
l’occupation militaire, même temporaire, résultant d’une telle invasion ou d’une telle attaque,
ou l’annexion par la force de la totalité ou d’une partie du territoire d’un autre État ;b)Le
bombardement par les forces armées d’un État du territoire d’un autre État, ou l’utilisation
d’une arme quelconque par un État contre le territoire d’un autre État ;c)Le blocus des ports
ou des côtes d’un État par les forces armées d’un autre État d)L’attaque par les forces armées
d’un État des forces terrestres, maritimes ou aériennes, ou des flottes aériennes et maritimes
d’un autre État ;e)L’emploi des forces armées d’un État qui se trouvent dans le territoire d’un
autre État avec l’agrément de celui-ci en contravention avec les conditions fixées dans
l’accord pertinent, ou la prolongation de la présence de ces forces sur ce territoire après
l’échéance de l’accord pertinent ;f)Le fait pour un État de permettre que son territoire, qu’il a
mis à la disposition d’un autre État, serve à la commission par cet autre État d’un acte
d’agression contre un État tiers ;g)L’envoi par un État ou au nom d’un État de bandes,
groupes, troupes irrégulières ou mercenaires armés qui exécutent contre un autre État des
actes assimilables à ceux de forces armées d’une gravité égale à celle des actes énumérés cidessus,
ou qui apportent un concours substantiel à de tels actes. »
La compétence de la CPI en ce domaine ne pouvait pas s’exercer avant le 1er janvier
2017, année où au moins deux tiers des Etats devront confirmer leur volonté d’activer cette
compétence. Chaque Etat pourra refuser la compétence de la CPI s’agissant du crime
d’agression. Par ailleurs, la compétence de la CPI sera liée à la constatation par la Conseil de
Sécurité d’un acte d’agression, ou à défaut devra être autorisée par une Section (chambre)
préliminaire de la CPI. En décembre 2017 l’Assemblée des Etats Parties au Statut de la
CPI a déclaré la compétence prévue pour le crime d’agression à compter du 17 juillet
2018.
2 – Qu’en est-il des crimes contre l’environnement ?
Certes les crimes contre l’environnement sont consacrés de façon spécifique. Il s’agit de
l’article 8, paragraphe 2,b, IV du Statut de la CPI : « Constitue un crime de guerre le fait de
lancer une attaque délibérée en sachant qu’elle causera incidemment des dommages
étendus, durables et graves à l’environnement naturel qui seraient manifestement
excessifs par rapport à l’ensemble de l’avantage militaire concret et direct attendu».
Mais, d’une part, ils sont consacrés comme crimes de guerre et non comme crimes
écologiques, autrement dit ces crimes ne sont qu’une forme de crime de guerre. D’autre part
cette disposition ne peut être invoquée que dans le cadre des conflits armés
internationaux et non pas des conflits internes. Enfin la preuve du caractère intentionnel
est certainement difficile à établir, comme d’ailleurs celle de la violation du principe de
proportionnalité. De façon plus précise il s’agirait, par exemple, de dégager la notion d’un
nouveau crime international, le crime d’écocide, cela en période de conflit armé et, aussi, en
période de paix.
Dans l’avenir ne faudrait-il pas soit ajouter un amendement au Statut de la CPI qui
consacrerait de façon autonome ces crimes contre l’environnement, soit les inclure dans une
future Vème convention de Genève sur la protection de l’environnement en période de conflit
armé ? (Voir l’article à venir sur ce blog : Les conflits armés et la protection de
l’environnement.)
3- Les régimes totalitaires et les camps de l’horreur
3-1 Les violations massives des droits de l’homme
Ces violations sont omniprésentes dans les régimes totalitaires. Les totalitarismes du
XXème siècle ont été le nazisme c’est-à-dire le régime politique (« national-socialisme ») en
Allemagne de 1933 à 1945, le stalinisme c’est-à-dire le régime politique ( « Républiques
socialistes soviétiques ») en Union soviétique de 1928 à 1953,et le régime politique au
Cambodge de 1975 à 1979 (les khmers rouges et le « Kampuchéa démocratique »).
A cela il faut ajouter la période totalitaire sous la Chine de Mao, pendant « la Révolution
culturelle » de 1966 à 1976, et la Corée du Nord de 1948 à nos jours dont le régime est
souvent qualifié de totalitaire dans la mesure, entre autres, où existent des camps de détention
de travail forcé.
Un des points communs de ces régimes est le ciment totalitaire du parti unique dirigé
par le dictateur. (Voir sur ce blog l’article : « Le contraire absolu de la démocratie : le
totalitarisme. »)
Pour Hannah Arendt, philosophe américaine d’origine allemande qui avait fui le nazisme, («
Les origines du totalitarisme », 1951,publié en français: Le Système totalitaire, Le
Seuil,1972), le totalitarisme est le résultat d’un ensemble d’éléments :une idéologie
officielle couvrant tous les aspects de la vie individuelle et collective, une main mise sur tous
les moyens d’information et de propagande, un isolement de l’individu, « isolé et désolé »,
par la destruction des anciennes structures(familles ,syndicats, associations, églises), un parti
unique dirigé par le dictateur, une terreur dont la police politique est un instrument, une
mobilisation de la population dès la petite enfance, enfin, horreur de l’horreur ,des camps de
concentration. Donc réduire le totalitarisme au dictateur c’est faire une analyse incomplète, le
totalitarisme c’est un système composé d’un ensemble d’éléments parmi lesquels le dictateur
et le parti unique ont des rôles essentiels. Arendt met en avant la convergence entre le
nazisme et le stalinisme.
Pour Raymond Aron, sociologue français, (« Démocratie et totalitarisme »,Gallimard,
1965) le totalitarisme repose un ensemble d’ éléments suivants : le monopole de l’activité
politique par un parti, l’existence d’une idéologie monopolistique, le monopole des moyens
de force et de persuasion détenus par ce parti, la subordination des activités à l’idéologie du
parti, la terreur politique et idéologique, les camps de concentration. Aron en comparant les
deux totalitarismes fait une différence : le nazisme est un « totalitarisme volontaire »,
l’homme « ne doit pas se donner pour but de ressembler à une bête de proie, il y réussit
trop bien. » Par contre le stalinisme est un « totalitarisme involontaire », « qui veut faire
l’ange fait la bête », les lendemains radieux annoncés étaient porteurs de présents
massacreurs.
3-2 Les manifestations les plus terrifiantes : les camps de l’horreur
Les nazis éliminaient les juifs, les tziganes, les homosexuels et les handicapés, les
staliniens éliminaient les opposants au régime communiste, les khmers rouges
éliminaient tous ceux qui avaient un capital matériel et/ou intellectuel.
3-2-1 Sous le nazisme la décision de « la solution finale » est prise le 20 janvier 1942 (pour
certains historiens en décembre 1941).Dachau(l’ouverture de ce premier camp est annoncée
par Himmler) fonctionnait depuis mars 1933, Auschwitz dès juin 1940.Le système
concentrationnaire comprenait en particulier 4 camps d’extermination immédiate (Treblinka,
Belzec, Chelmno, Sobidor),2 camps d’extermination et de concentration(Auschwitz-Birkenau
avec au moins 1, 1million de victimes, Madjanek), 14 camps de concentration ( Ravensbruck,
Buchenwald, Mauthausen, Dachau… et aussi le seul en territoire français, Struthof).En marge
des centrales concentrationnaires et de leurs commandos il y avait les camps de transit ou
d’internement qui dépendaient du système et deux camps de représailles pour prisonniers de
guerre.
Les historiens, en particulier Raul Hilberg, estiment aujourd’hui que les nazis ont exterminé
5,1 millions de juifs ( 3 millions dans les camps,800.000 dans les ghettos,1,3millions
massacrés en dehors des camps) et d’autre part 250.000 tziganes,200.000 handicapés
physiques et mentaux , 15.000 homosexuels, 3,5 millions de prisonniers de guerre soviétiques
et 1,1 million de déportés ne relevant pas des « crimes » précédents. Le Tribunal international
de Nuremberg a estimé le nombre de victimes juives à 5,7millions et a employé le nombre de
6 millions repris par la suite. L’extermination a été celle des deux tiers de la population juive
d’Europe et du tiers du peuple juif dans son entier.
3- 2-2 Sous le stalinisme la décision de création du Goulag est du 7 avril 1930, 10 à 19
millions de personnes sont envoyés dans ces camps de rééducation par le travail. Les
bagnards (les zeks) du Goulag étaient affectés à des chantiers terrifiants, par exemple creuser
la roche à mains nues dans la construction du canal de la mer Blanche. Le système
concentrationnaire était gigantesque, il comprenait des centaines de camps et 17 camps
principaux, parmi les pires les camps de Magadan, de Kolyma, le plus grand était le Bamlag.
Ces camps étaient synonymes d’arbitraire, de misère, de mort.
Le stalinisme dans son ensemble est responsable d’au moins 25 millions de victimes, à travers
les camps, les purges, les famines organisées, ainsi celle terrifiante contre les paysans d’
Ukraine en 1932-1933 qui fit 6 millions de victimes.
3-2-3 Sous les Khmers rouges, du 17 avril 1975 (leur entrée dans Phnom Penh) au 7
janvier 1979 (l’arrivée des Vietnamiens au Cambodge), au nom d’une révolution radicale
c’est, en fait, un génocide qui prend la forme d’un monde concentrationnaire, il s’installe dans
le pays à travers évacuations des villes, déportations, famines, oppressions, persécutions,
disparitions, centres de torture… Parmi ces derniers « S-21 », un lycée de la capitale Phnom
Penh, où sont torturées et exécutées plusieurs dizaines de milliers de victimes.
On considère que plus du quart de la population a été décimé, en trois ans, huit mois et vingt
jours, soit plus de 2 millions de cambodgiens sur 7 millions. Là aussi l’horreur de l’horreur.
Telles sont les manifestations de ces formes d’enfer que sont les totalitarismes.
4– Les régimes autoritaires
Fondés sur le parti unique et/ou l’armée ces régimes violent les droits de l’homme, en
particulier les libertés. La population est tenue d’une main de fer, les souffrances sont
grandes, les opposants politiques font l’objet de multiples répressions (prisons, tortures…) et
sont souvent dans la clandestinité ou à l’étranger. Les différences avec les totalitarismes sont
celles de l’absence de camps de l’horreur et d’une emprise moins totalisante mais tout de
même terrible sur la population. Dans le totalitarisme le système s’est totalement refermé sur
lui même, l’air est devenu totalement irrespirable, « tout dans l’Etat, rien contre l’Etat, rien en
dehors de l’Etat », dans le régime autoritaire le système laisse encore, ici ou là, quelques
poches d’air, quelques marges de manoeuvres rarissimes.
5- Le terrorisme
5-1 C’est la menace et la mise en oeuvre de moyens de terreur au service d’une cause.
Cette cause peut être légitime, par exemple libérer un territoire d’une occupation armée
étrangère, ou cette cause peut être illégitime, par exemple la destruction d’une race. Mais la
légitimité d’une cause ne signifie pas la légitimité de tous les moyens pour la faire
triompher. Ainsi, il était combien légitime de lutter contre le nazisme mais tous les moyens
pour le faire n’étaient pas légitimes, les bombes d’Hiroshima et de Nagasaki, moyens massifs
de terreur, n’étaient pas légitimes. Quelque soit la cause, légitime ou non, les moyens de
terreur sont inacceptables, ils constituent une forme de grande violence.
5-2 Il y a trois types d’acteurs terroristes : des personnes, des réseaux, des Etats. Des
personnes motivées par des injustices, des vengeances privées, des causes liées à des conflits
armés, des idéologies totalitaires. Des réseaux plus ou moins importants et plus ou moins
organisés, éliminent, selon leurs choix et/ou selon les situations, des autorités, des militaires,
des policiers, des membres de la population ciblés ou pris au hasard. Des Etats, que l’on doit
alors qualifier de terroristes, terrorisent une partie plus ou moins massive de la population et
éliminent des opposants en particulier en les faisant disparaitre. Il existe une Convention
internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (20-12-
2006, entrée en vigueur le 23-12-2010) qui qualifient ces actes de « crimes contre l’humanité
». Selon l’article 2, « on entend par « disparition forcée » l’arrestation, la détention,
l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté par des agents de l’État ou par des
personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou
l’acquiescement de l’État. »
5-3 Les moyens de terreur les plus utilisés par les terroristes sont les attentats qui peuvent
être individuels, plus importants (facilités par la circulation d’armes) ou massifs (marchés,
gares, grands magasins, immeubles, tours…) et les enlèvements (revendiqués ou non, aux
motivations politiques et/ou financières suivis ou non de libérations). Dans la logique de
prolifération gouvernementale et non gouvernementale d’armes de destruction massive, les
attentats basés sur ces types d’armements (en 1995 l’utilisation du gaz sarin dans le métro de
Tokyo) pourraient se développer dans les temps à venir.
5-4 Le terreau du terrorisme apparait plus souvent soit sur fond de désespoir à partir
d’injustices vécues comme insupportables, soit sur fond d’idéologies de dominations à
tendances totalitaires ou totalitaires. Certains pensent que c’est essentiellement le système
d’exploitation inhumaine , producteur d’injustices et d’humiliations, qui crée le terreau de la
plupart des terrorismes. (Voir les développements sur ce blog « les analyses des causes des
violences et les luttes contre ces causes. »)
5-5 L’ampleur du nombre d’attentats est de l’ordre de 96.600 de septembre 2001 à
décembre 2016, ils ont coûté la vie à plus de 190.000 personnes et blessé plus de 340.000.
Ces attentats sont massifs dans des pays asiatiques, par exemple au Pakistan de 2007 à 2014 :
7000 victimes, le 17 décembre 2014 à Peshawar 148 morts, massifs dans des pays africains,
par exemple au Nigeria le 3 janvier 2015 ce sont 2000 civils chrétiens et musulmans qui sont
massacrés par Boko Haram. Dans des pays européens, ils sont revendiqués en particulier par
Al-Qaida au Yémen. En France, le 8 janvier 2015, l’ensemble de la direction d’un journal,
Charlie Hebdo, et des clients d’un magasin juif sont exécutés. Le 11 janvier 2015 ont lieu les
plus gigantesques manifestations de l’histoire de France, 4 millions de personnes dans les
rues, soutenues par des manifestations dans de nombreux pays étrangers, contre ces attentats
et pour la liberté d’expression. Le 13 novembre 2015 Paris fait l’objet d’attentats revendiqués
par l’organisation de l’ Etat islamique, ils causent la mort de 130 personnes, l’état d’urgence
est décrété. Le ramadan 2016 est sanglant, ainsi des attentats en Arabie saoudite, en Turquie,
au Yemen, en Jordanie, en Irak…Dans ce dernier Etat à Bagdad le 3 juillet 2016 l’Etat
islamique provoque la mort de près de 300 personnes, ainsi Daesh est capable de frapper sur
une partie de la planète.
5-6 Les luttes contre le terrorisme mises en place après le 11 septembre 2001 se sont
intensifiées peu à peu : plans de surveillance et de sécurité, développement des services de
renseignements, coopérations judiciaire et policière entre Etats, entreprises de
déconditionnement , remise en cause de circuits financiers …
Trois difficultés sont grandes. La première consiste à ne pas porter atteinte aux libertés
fondamentales au nom de la sécurité, on bascule alors dans les dérives du sécuritaire.
L’exemple caricatural est celui de l’emprunt à la panoplie des régimes autoritaires de « la
déchéance de nationalité ».
La seconde difficulté consiste à s’attaquer aux véritables causes du terrorisme, essentiellement
au terreau des injustices, dans des quartiers « défavorisés », dans les « zones urbaines sensibles »
où ces inégalités sont criantes, et aussi aux guerres porteuses de souffrances et de haines, « si
on répond à la haine par la haine on ne fait que l’étendre en surface et en profondeur » disait
Gandhi.
La troisième difficulté est celle des labyrinthes des circuits financiers dans lesquels sont
directement et indirectement impliqués différents acteurs, nombreux et quelquefois puissants.
6- La course aux armements
6-1 C’est à nouveau l’escalade des dépenses militaires mondiales qui augmentent de 40%
de 2000 à 2009 …puis vient une baisse importante de 2009 à 2013, en 2014 c’est la hausse
qui reprend, 1547 milliards de dollars (à titre de comparaison le budget de l’UNESCO pour
2014-2015 était de 653 millions de dollars).
En 2018, toujours selon le SIPRI, le total mondial a continué à augmenter, 1822
milliards de dollars soit pour cinq Etats 60% de ce total. Il s’agit des Etats-Unis 649
milliards de dollars (36% du total mondial), de la Chine 250 (14%), de l’Arabie saoudite
68 (3,7%),de l’Inde 67 (3,6%),de la France 64 (3,5%),de la Russie 62 (3,4%).
Chaque jour le monde dépense donc près de 5 milliards de dollars (4,87 en 2018) en
armements. Voilà des logiques humanicides et terricides.
6-2 C’est une des formes de violence les plus gigantesques à travers quatre
mécanismes que l’on énumère très rarement de façon complète :
D’abord cette course alimente les conflits armés c’est-à-dire que des armes peuvent en
être une cause secondaire ou principale, elles vont être autant d’étincelles dans des lieux qui
sont souvent des poudrières.
Ensuite fabriquer des armes c’est préparer la mort de victimes dans des conflits armés
qui, selon certains, de 1945 à 2013 ont entrainé l’équivalent du nombre de victimes de la
Seconde guerre mondiale, 55 millions de morts, et c’est préparer beaucoup d’autres morts,
blessés et souffrances pour les années à venir.
C’est aussi penser que la paix repose sur des menaces, quelquefois même sur le chantage à
la mort absolue avec les armes de destruction massive. Or l’augmentation en quantité et en
qualité des armements accroit l’insécurité générale, la véritable paix ne peut pas reposer
sur des peurs réciproques, elle se construit côte à côte face aux défis communs rencontrés
par les générations présentes et déjà futures.
Enfin, réalité presque toujours passée sous silence, les sommes gigantesques
englouties dans les armements auraient pu aller vers des besoins criants, de santé,
d’infrastructures de l’eau, d’éducation, d’environnement…
Dans un ensemble d’estimations possibles on pourrait comparer les dépenses militaires
mondiales de 1945 à fin 2019 et ces besoins criants, de santé, d’infrastructures de l’eau,
d’éducation, d’environnement…La vérité sauterait aux yeux pourvu qu’on les ouvre
Cette forme de violence, quand on veut essayer de la penser, est une des plus terribles
que l’humanité s’est faite et se fait à elle-même, elle « déchire ses entrailles », elle répand
son propre sang, elle laisse criantes, hurlantes, d’innombrables souffrances auxquelles
elle se devait de répondre.
(Voir nos deux ouvrages JML, Construire la paix, 1er tome : les armements détruisent
l’humanité, 2ème tome : l’humanité détruira les armements, éditions La Chronique
sociale,1988.)
7- Les grandes violences économiques et sociales
7-1 La violence totalisante du système productiviste mondial terricide et humanicide
peut se résumer ainsi :
Ce système n’est-il pas condamnable du seul fait, par exemple, qu’il y ait en 2016 un enfant
sur deux dans le monde en situation de détresse et/ou de danger(guerres, maladies, misère…)
et du seul fait, par exemple, que les marchés financiers ont pris, depuis 1971 (fin de la
convertibilité du dollar en or), une large partie de la place des conducteurs(Etats,
entreprises…) ?
Ce système n’est-il pas condamné du seul fait , par exemple, que 5 milliards de dollars
partent chaque jour en 2018 vers les dépenses militaires mondiales, et du seul fait, par
exemple, que des activités humaines entraînent un réchauffement climatique qui menace
l’ensemble du vivant (+3°C à 6°C vers 2100 et plus d’un mètre (deux?) d’élévation du niveau
des mers ?)
7-2 La puissance du pouvoir financier constitue une grande violence
Les Etats à ce jour (fin 2018) n’ont pas encore les volontés massives et radicales de faire face
aux nouveaux conducteurs de la planète, les marchés financiers, de plus en plus puissants
depuis 1971 (c’était la fin de la convertibilité du dollar en or qui a précipité la spéculation
internationale sur les monnaies et amplifié la puissance des bourses, des banques et des
marchés financiers).
Les liens entre des Etats, des firmes multinationales et les marchés financiers contribuent à
transformer l’ensemble en géants mais ne s’agit-il pas de géants aux pieds d’argile dans la
mesure où, en fin de compte, des logiques terricides et humanicides sont à l’oeuvre ?
Ces marchés financiers comprennent six classes d’actifs : le marché actions, le marché
obligataire, le marché monétaire, le marché des dérivés, le marché des changes, le marché des
matières premières. Deux chiffres symboliques de cette force : en avril 2016 les transactions
quotidiennes(!) sur le marché des changes étaient de 5100 milliards de dollars, pour l’année
2017 le gestionnaire américain d’actifs Black Rock gérait 6000 milliards de dollars et réalisait
un bénéfice de 3,7 milliards.
A titre de comparaisons le chiffre d’affaires annuel en 2017 des dix premières entreprises du
monde allait de 200 à 500 milliards de dollars, le PIB en 2017 était pour 139 Etats inférieur à
10 milliards de dollars dont 30 inférieur à 3 , alors que le PIB des Etats-Unis était de 19362 et
celui de la France( cinquième dans la liste des 193 Etats) de 2574, le budget bi annuel des
Nations Unies pour 2018-2019 est de 5,4 milliards de dollars.
Ce sont là quelques rapports de forces financiers qui en disent très longs sur des rapports de
force internationaux.
7-3 Des injustices globales dans le monde aujourd’hui
« Les victimes des injustices économiques sont ainsi, sans le moindre remords, sacrifiées sur
l’autel de l’ordre public. Jusqu’à quand ? » écrit Eduardo Galeano (Le Monde diplomatique,
Guerre aux pauvres, août 1996).
Les quatre réalités qui suivent sont souvent soulignées par des institutions spécialisées des
Nations Unies, des organes subsidiaires et des programmes de cette organisation
internationale.
Ainsi en 2016, selon l’UNICEF, un enfant sur deux dans le monde est en situation de
détresse et/ou de danger (misères, sous-nutrition, maladies, guerres…). Si une civilisation
se juge en particulier au sort qu’elle réserve à ses enfants… le jugement de condamnation est
sans appel.
En 2014, selon l’OMS, dans les pays à faibles revenus 4 décès sur 10 touchaient des enfants
de moins de 15 ans, dans les pays à revenus élevés 1 enfant sur 100.L’inégalité devant la mort
existe pour l’enfant selon le pays où il vit.
En 2014, selon le PNUD, moins de 10% de la population mondiale dispose de 82% du
patrimoine mondial, alors que 70% de cette population mondiale disposent de 3% du
patrimoine mondial. C’est ce que l’on appelle une violence structurelle gigantesque.
Fin 2015, selon les Nations Unies, 4,5milliards de personnes se trouvent dans le besoin avec
le minimum vital, 1,5milliard de personnes est en situation de survie (avec moins de 1,25
dollar par jour) et 1 milliard vit dans l’aisance. On voit particulièrement bien ici que le
système ne répond pas aux besoins importants ou criants de la grande majorité de la
population mondiale.
7-4 Des injustices particulières dans le monde aujourd’hui
Nous rappelons dix séries d’inégalités terribles, cette liste des drames est très loin d’être
exhaustive. Les drames de la faim, de l’absence d’eau potable, de l’absence de toilettes, des
maladies qui tuent sans vaccinations ou soins, drames de l’inégalité de l’accès aux
médicaments, des inégalités dans l’espérance de vie, des inégalités dans l’éducation, des
inégalités relatives au niveau de vie, des inégalités devant la protection sociale, des inégalités
relatives à l’empreinte écologique. (Voir statistiques précises dans l’article à venir sur ce blog
: « L’injustice et les luttes contre les inégalités.»)
Face au drame de la faim (821 millions de personnes en 2017 soit un habitant sur neuf dans
le monde ), ou face au drame de l’absence d’accès à l’eau potable et à
l’assainissement… on décide… qu’on décidera plus tard de s’attaquer aux causes de ces
situations inhumaines .Le réchauffement climatique est devenu une cause qui s’ajoute aux
autres et aggrave ces deux drames mondiaux.
Historiquement rappelons deux drames terrifiants entrainant deus famines épouvantables
, celui volontaire du stalinisme en 1933 contre les paysans d’Ukraine avec 6 millions de
victimes, celui involontaire en Chine de mai 1958à 1961 du « Grand Bond en avant » qui
voit l’effondrement de l’agriculture et une famine de 36 millions de morts à la suite de
transferts massifs de l’agriculture vers l’industrialisation forcée.(dernière estimation
d’historiens).
Les violences des migrations forcées est massive. Ainsi par exemple pour l’année 2015
c’est l’accroissement du nombre de réfugiés et de déplacés, 60 millions de personnes selon le
HCR, soit l’équivalent de presque toute la population française. Sur ce total 20,2 millions
essaient d’échapper aux guerres et aux persécutions, c’est un niveau sans précédent depuis
1992.En 2017 voilà un nouveau record du nombre de déplacés : 68,5 millions de personnes.
Les déplacés environnementaux seraient peut-être de l’ordre de 150 à 300 millions vers
2100… Si de grandes villes asiatiques devenaient irrespirables ce type de migrations forcées
pourrait être, selon certains, de un à deux milliards de personnes…
8 – Les grandes violences culturelles.
8-1 L’ethnocide , destruction radicale, globale et délibérée d’une culture.
L’ethnocide se fait le plus souvent dans le but d’exploiter économiquement et politiquement
les membres de la culture assassinée. Il conduit à la destruction physique partielle des
membres de cette culture, il va souvent de pair avec des massacres. Les traces de la culture
assassinée sont partiellement ou massivement détruites : ouvrages, musées, oeuvres,
monuments, écoles…
8-2 Existent aussi d’autres formes de violences culturelles qui s’appellentl’assimilation,
plus ou moins imposée par un rapport de forces, c’est-à-dire l’effacement d’une culture sous
la domination d’une autre, et l’uniformisation, qui fait peu à peu disparaitre les différences, «
l’uniformisation uniformisante » était pour Kostas Axelos une violence terrible et
omniprésente.
9 – Les grandes violences écologiques
9-1 Peut-on parler de grandes violences ?
Ne doit-on pas considérer les problèmes drames et les menaces relatifs à l’environnement
comme de grandes violences ? Nous pouvons le penser dans la mesure où ils portent
massivement atteinte aux peuples, aux personnes et aux générations futures, et dans la mesure
où la plupart d’entre eux sont d’origine humaine et que l’homme n’a pas pris, à ce jour, les
moyens assez massifs et radicaux de les combattre.
Si l’on regroupe ces problèmes, ces menaces et ces drames environnementaux on peut dire
que : la dégradation des sols s’étend, la déforestation continue, les déchets ne cessent
d’augmenter, le nucléaire a engagé les générations présentes et futures, l’eau se raréfie et se
dégrade, le milieu marin est souvent traité en poubelle, la couche d’ozone reste menacée, les
gaz à effet de serre entrainent un réchauffement climatique, les espèces animales et végétales
sont décimées.
9-2 Les inégalités sont présentes aussi dans l’environnement, ne sont-elles pas des
formes de violence ?
Elles se traduisent par une empreinte écologique très variable en particulier selon les Etats
(voir ci-dessus) et par des effets très inégaux sur les populations. Des ONG insistent sur cette
dimension, ainsi l’alliance internationale « Justice Climatique Maintenant ! » met en avant les
liens entre le social et l’environnemental, le réchauffement atteint toute la Terre mais d’abord
les pays et les peuples les plus pauvres.Le mouvement contre le » racisme environnemental »
dénonce depuis les années 1980 le fait que les populations noires et pauvres sont les plus
touchées aux Etats-Unis par exemple par la proximité des déchets toxiques, un auteur
sociologue comme l’américain Robert Bullard relie droits de l’homme et environnement, des
juristes environnementalistes , ainsi en France Alexandre Kiss et Michel Prieur dès les années
1970, iront aussi en ce sens contribuant à faire du droit de l’homme à l’environnement un
droit à vocation universelle.
9-3 L’énumération des principales situations écologiques violentes est
impressionnante.
Une des plus grandes violences est celle du réchauffement
climatique, cette gigantesque machine infernale produite par ce système productiviste.
Le grand « vainqueur » est , à ce jour( fin novembre 2018), ce réchauffement
climatique. (voir notre ouvrage, écrit pour cette 4ème édition en collaboration avec Hubert
Delzangles et Catherine Le Bris, Droit international de l’environnement, Ellipses, 2018).
La situation est simple à schématiser :
Si l’Accord de Paris(2015) sur le climat était appliqué en l’état : l’augmentation de la
température serait de l’ordre de 3,5°C vers la fin du siècle. Situation encore gravissime.
Si l’Accord n’était pas appliqué le réchauffement serait de 4°C à 6°C, voire plus, vers
2100.Autant dire que la 6 ème extinction des espèces (humains compris) serait en voie
d’effacer le vivant ou la plus grande partie du vivant.
Si l’Accord contribuait à donner le jour à de nouveaux engagements, massifs et appliqués, le
vivant aurait alors probablement des chances de survie.
La liste des atteintes relatives à l’environnement et au vivant est impressionnante :
9-3-1 En ce qui concerne l’air : réchauffement climatique, phénomènes climatiques
extrêmes, appauvrissement de la couche d’ozone, retombées des pluies acides, pollutions
chimiques diffuses et accidentelles, pollutions radioactives diffuses et accidentelles d’origine
civile et militaire, pollutions urbaines, nuisances sonores, pollutions lumineuses, pollutions de
l’espace orbital…Le seul exemple en Chine de la pollution atmosphérique provoquée, entre
autres, par les industries lourdes dans les zones urbaines, est dramatique : morts prématurées,
explosions des cancers du poumon, suffocations, masques en rupture de stocks…A Pékin en
février 2014 le taux de concentration des microparticules dans l’air est de 16 fois le maximum
mis en avant par l’OMS, dans certaines villes 36 fois ce maximum. Toujours selon l’OMS la
pollution atmosphérique touche neuf urbains sur dix dans le monde ( étude sur 1 600 villes
de 91 pays, 7 mai 2014). Sont particulièrement touchées des villes du Pakistan, de l’Inde, de
la Chine…
9-3-2 En ce qui concerne les eaux douces : absence d’accès à l’eau potable, absence
d’assainissement, inondations, problèmes de quantité de réserves d’eau produisant des
situations de stress hydrique et de pénuries d’eau, sécheresses de plus en plus terribles, jamais
vues auparavant, dans des lieux de plus en plus nombreux de la planète, atteintes à la qualité
de cours d’eau et de nappes phréatiques à partir de pollutions agricoles, industrielles,
domestiques, assèchements et empoisonnements de nappes phréatiques, effets écologiques de
certains barrages et de modifications de tracés de cours d’eau…
9-3-3 En ce qui concerne le milieu marin : pollutions venant des fleuves et des côtes
(pollutions telluriques), pollution par immersion de déchets, de déchets dangereux, de déchets
radioactifs, pollutions volontaires et accidentelles de navires et de plates-formes, pollutions à
partir d’aéronefs jetant des déchets, dégradations des ressources marines et côtières,
surexploitation et disparitions d’espèces marines, filets destructeurs de fonds marins, plaques
et mers de déchets dans le milieu marin, enfin bien sûr côtes rongées, déchiquetées par les
avancées et la montée des océans…
9-3-4 En ce qui concerne les sols : l’épiderme de la Terre est ici menacé, là malade à travers
la désertification, les atteintes sont très nombreuses par surexploitation, surpâturage,
déboisement, par pesticides, nitrates, métaux lords, pluies acides, déchets mis en décharge,
transports et stockages de déchets toxiques, atteintes par extensions des surfaces urbaines …
9-3-5 En ce qui concerne les forêts : déforestation par surexploitation, par empiètements,
feux de forêt, diminution de la variété d’espèces forestières, pollutions multiples, pluies
acides, réchauffement climatique, certains insectes ravageurs, certains champignons aussi…
9-3-6 En ce qui concerne la flore, la faune, les paysages : Appauvrissement de la diversité
biologique, espèces de la faune et de la flore décimées et menacées d’extinction,
marchandisation du vivant(voir article sur ce site), risques liés aux organismes génétiquement
modifiés, artificialisation de la nature, prolifération de certaines espèces posant des problèmes
écologiques, prolifération de certaines espèces posant des problèmes économiques et
écologiques, régressions d’habitats naturels, urbanisation incontrôlée, destructions de
paysages, destructions de cultures vivrières au profit de grandes monocultures…
9-3-7 Les effets environnementaux sur la santé des êtres humains :
En 2012 l’OMS avançait le fait que 23% des décès dans le monde était liés à
l’environnement (tabac non compris) soit un décès sur quatre, soit 12,6 millions de
victimes dues pour la plus grande part aux pollutions de l’air, celles-ci en 2014 selon l’OMS
ont causé la mort de 7 millions de personnes.
Certains auteurs avancent des chiffres beaucoup plus élevés, cela est lié en particulier à la
définition plus ou moins large donnée à l’environnement, chiffres allant jusqu’à 40% des
décès , voire plus, dans le monde résultent de facteurs environnementaux : tabac, pollutions
chimiques , radioactives, pollutions dans des transports, des alimentations, des habitations,
des lieux de travail, dans des airs, des sols et des eaux…
Le tabac en 2014 a tué 5 millions de personnes(en France 78000), l’alcool a tué 3 millions de
personnes(en France 49000).
Ne soulignons ici que quelques effets dramatiques et massifs de la dégradation
environnementale. Les catastrophes écologiques mais aussi : les pollutions de l’air, des sols,
des eaux de surface et souterraines et leurs effets sanitaires, la sécurité alimentaire qui est de
moins en moins assurée dans certaines régions, les contaminations des aliments par des
pollutions chimiques, radioactives, par des additifs alimentaires, par la dioxine, par des farines
animales…l’exposition de travailleurs et de populations à des substances dangereuses(drame
de l’amiante)et d’une façon générale l’augmentation impressionnante du nombre de cancers
d’origine environnementale…(voir par exemple Dominique Belpomme, Avant qu’il ne soit
trop tard, Fayard,2007). La seule pollution de l’air, selon l’OMS ( étude du 24 mars 2014), a
causé la mort de 7 millions de personnes en 2012, soit un décès sur 8, les 2/3 de ces victimes
étaient en Asie.
De façon plus globale au moins 40% des décès (des auteurs donnent des chiffres beaucoup
plus élevés, tout dépend en particulier de la conception restreinte ou plus large que l’on a de
l’environnement) dans le monde résulteraient de facteurs environnementaux : tabac,
pollutions chimiques, radioactives, pollutions dans des transports, des alimentations, des
habitations, des lieux de travail, pollutions de l’air, des sols et des eaux…
9-3-8 Des études prévisionnelles mettent en particulier en avant une explosion des cancers
dans le monde de 75% de 2012 à 2030 et de 95% dans les pays les plus pauvres, on passerait
de 12,7millions de personnes atteintes en 2008 à 20,3millions en 2030, et on passerait de
7,6millions de morts par cancers en 2008 à 13,2millions en 2030.(The Lancet
Oncology,juin2012,étude menée dans le cadre du Centre international de recherche sur le
cancer(CIRC, Lyon),organisme lié à l’OMS.) L’étude souligne que certains cancers (côlon,
rectum, sein, prostate) semblent associés au développement économique et au mode de vie.
Va aussi dans ce sens par exemple l’ouvrage d’un toxicologue (André Cicolella, Toxique
planète, Seuil,2013) qui dénonce le « scandale invisible des maladies chroniques », il montre
la transmission d’un héritage toxique à destination des générations futures, il en appelle à de
nouvelles politiques de santé mondiale qui prennent en compte une remise en cause des
origines environnementales des « perturbateurs endocriniens », il affirme que les maladies
chroniques(cardiovasculaires, respiratoires, cancers, diabète…) peuvent reculer si nous
repensons nos façons de vivre, de travailler, de se déplacer.
TROIS REMARQUES GLOBALES ET TERMINALES RELATIVES A CETTE
SYNTHESE DES RELATIONS INTERNATIONALES DE 1945 A FIN 2019
Tout part de ce système productiviste(1),
les populations de la terre se retrouvent entre l’explosion démographique , des
inégalités criantes et la débâcle écologique (2)
et demain que faire ? (3)
1- Ne s’agit-il pas de logiques terricides et humanicides ?
Ce système n’est-il pas condamnable du seul fait, par exemple, qu’il y ait en 2017 un enfant
sur deux dans le monde en situation de détresse et/ou de danger( guerres, maladies, misère…)
et du seul fait, par exemple, que les marchés financiers ont pris, depuis 1971 (fin de la
convertibilité du dollar en or), une large partie de la place des conducteurs(Etats,
entreprises…) ?
Ce système n’est-il pas condamné du seul fait , par exemple, que 5 milliards de dollars
partent chaque jour en 2018 vers les dépenses militaires mondiales, et du seul fait, par
exemple, que des activités humaines entraînent un réchauffement climatique qui menace
l’ensemble du vivant (+3°C à 6°C vers 2100 et plus d’un mètre (deux?) d’élévation du niveau
des mers ?)
Il y avait pourtant mieux à faire devant les périls communs (débâcle écologique dépassant
des seuils d’irréversibilité, armes de destruction massive terrifiantes, épidémies
catastrophiques, inégalités criantes, techno science et marchés financiers dépassant les
êtres humains…)
Au-delà de la paix, de façon plus globale, le système international productiviste repose
sur les logiques profondes qui s’appellent la recherche du profit, la fructification des
patrimoines financiers, la marchandisation du monde, le développement d’armes
terrifiantes, la course aux quantités, le culte de la croissance, les discours et les pratiques
de la compétition, la priorité donnée au court terme, l’accélération du système.
2) Les populations de notre Terre entre explosion démographique, inégalités criantes et
débâcle écologique.
2-1 L’explosion démographique continue.
Il a fallu 2 millions d’années pour arriver au premier milliard d’habitants en 1800, il a
fallu seulement 210 ans pour avoir une population sept fois plus élevée, sept milliards
d’habitants en 2011.L’explosion continue, en janvier 2019 il y avait 7,63 milliards
d’habitants, en 2050 il y aurait en principe de l’ordre de 9,8 milliards d’habitants, elle
ralentirait ensuite puisque en 2100 il devrait y avoir (?) 11,2 milliards de terriens (soit 300
millions de plus que la prévision faite en 2012 par les Nations Unies.)
De façon peut-être plus parlante, chaque seconde en 2018 : 4,4 naissances, 1,8 décès, donc un
accroissement de 2,6 ; chaque jour approximativement 380000 naissances, 156000 décès,
donc un accroissement de 224000 personnes, (soit l’équivalent de Limoges et de son
agglomération, ou d’un peu moins que la ville de Montpellier), chaque année à peu près 139
millions de naissances, 57 millions de décès, soit un accroissement de 82 millions de
personnes de la population mondiale.
La Chine (1,38 milliard d’habitants), qui depuis 36 ans avait organisé la politique de l’enfant
unique, a décidé d’y mettre fin à partir de 2016,les couples pourront avoir deux enfants. La
population indienne (1,31 milliard) dépassera celle de la Chine. Quelles sont les
prévisions? En 2022 ce serait l’égalité à 1,4 milliard, puis en 2030 l’Inde serait à 1,5 et la
Chine à 1,4. Début 2016, la Chine représente 19% de la population mondiale et l’Inde 18%,
soit à elles deux plus du tiers de la population mondiale (37%).
2-2 Des inégalités criantes.
Pour comprendre ce que produit ce système il existe un exemple relatif à un élément
central et vital . Rappelons d’abord qu’au total les décès dans le monde pour l’année
2017 étaient de 59 millions de personnes.
Quelles sont donc les causes principales de la mortalité mondiale ? Les maladies
cardiovasculaires (3 décès sur 10), les cancers, les maladies infectieuses (pneumopathies,
diarrhées, sida, paludisme, tuberculose …), le diabète …Or ces causes sont révélatrices de
deux mécanismes gigantesques.
Ces causes montrent des inégalités entre populations de la planète. Ainsi , par exemple,
en 2011 dans les pays à faible revenu 4 décès sur 10 touchaient des enfants de moins de 15
ans, dans les pays à revenu élevé 1 enfant sur 100.
Dernier exemple criant : en 2016 les 8 personnes les plus riches de la planète, qui avaient au
total une fortune de 426 milliards de dollars, possédaient ainsi l’équivalent des richesses
détenues par la moitié des habitants de la planète, autrement dit huit richissimes égalaient 3,6
milliards de personnes. C’est une violence structurelle.
2-3 Ces causes de mortalité sont révélatrices d’un environnement qui se
dégrade rapidement, dramatiquement et arrive, ici et là, à des seuils d’irréversibilité.
En 2012 l’OMS avançait le fait que 23% des décès dans le monde était liés à l’environnement
(tabac non compris) soit un décès sur quatre, soit 12,6 millions de victimes dues pour la plus
grande part aux pollutions de l’air, celles-ci en 2014 selon l’OMS ont causé la mort de 7
millions de personnes. Certains auteurs avancent des chiffres beaucoup plus élevés, cela est
lié en particulier à la définition plus ou moins large donnée à l’environnement, chiffres allant
jusqu’à 40% des décès , voire plus, dans le monde résultent de facteurs environnementaux :
tabac, pollutions chimiques , radioactives, pollutions dans des transports, des alimentations,
des habitations, des lieux de travail, dans des airs, des sols et des eaux…
Des études prévisionnelles mettent en particulier en avant une explosion des cancers dans le
monde de 75% de 2012 à 2030 (!) et de 95% dans les pays les plus pauvres(!).Le tabac en
2014 a tué 5 millions de personnes(en France 78000), l’alcool a tué 3 millions de personnes(en
France 49000).
La dégradation de l’environnement est massive, multiforme, rapide. Ses logiques terricides et
humanicides, dans le sillage de l’autodestruction du système productiviste, assassinent le
Vivant et la Terre.
3- Et demain que faire ?
Ralentir l’explosion démographique, lutter contre les inégalités criantes, agir
radicalement et massivement contre la dégradation de l’environnement,certes , mais de
façon plus globale que faire ?
3-1 Passer de ce système suicidaire à une communauté mondiale humainement viable
est encore possible, aux différents niveaux géographiques, dans l’ensemble des activités
humaines, en pensant (cela est fait en partie) et en mettant en oeuvre (cela n’est fait que pour
une part dérisoire) des moyens démocratiques, justes, écologiques et pacifiques.(Nous en
proposons une liste indicative sur ce blog et ce site « Quels moyens pour passer du
terricide et de l’humanicide au viable ?
3-2 Tous les acteurs ont des remises en cause à mettre en oeuvre, dans des
proportions très variables et avec des responsabilités très variables : Etats, organisations
internationales et régionales, organisations non gouvernementales, entreprises, firmes
multinationales, collectivités territoriales, réseaux scientifiques et technologiques, enfin les
acteurs humains c’est-à-dire les personnes ,les peuples, l’humanité(générations passées qui ont
le droit à la préservation du patrimoine culturel mondial, générations futures qui ont le droit
que nous leur laissions des marges de manoeuvres pour choisir ce qu’elles voudront être,
générations présentes qui ont droit à une société humainement viable sans compromettre les
droits des autres générations).
« L’humanité doit avoir des droits faute de quoi les hommes perdront les leurs » écrivait
René-Jean Dupuy, (« La clôture du système international », puf, 1989).Comment passer des
intérêts nationaux (ceux de chaque Etat) aux intérêts communs (ceux des Etats et de la
société civile internationale) puis à l’intérêt commun de l’humanité ?
Les droits de l’homme, des peuples, de l’humanité, du vivant, ne doivent-ils pas
s’interpeller les uns les autres, s’appuyer les uns sur les autres, s’incliner les uns vers les
autres?
3-3 Une « métamorphose de l’humanité » (expression mise au monde en particulier par
Edgar Morin) en appelle à des moyens démocratiques pour des fins démocratiques, à des
moyens justes pour des fins justes, à des moyens pacifiques pour des fins pacifiques, à des
moyens écologiques pour des fins écologiques. Pourquoi ne pas penser souvent à cette
idée lumineuse, radicale et… terrible (par ses remises en cause) de Gandhi : »La fin est dans
les moyens comme l’arbre est dans la semence »?
Avec des responsabilités inexistantes, faibles, moyennes, importantes ou gigantesques
selon les personnes et les collectivités, ne pouvons-nous pas très probablement penser
que :
3-4 Nous avons reçu de trois générations passées ( 1850 à 1945 environ), un
environnement pour une part atteint et faisant l’objet de destructions en marche sous les
logiques du productivisme et de l’anthropocène.
Nos trois générations présentes (1945 -2030 environ) ont produit un environnement
pour une large part détruit et plongeant dans des apocalypses écologiques multiformes,
massives, en interactions et rapides.
Les trois générations qui ont commencé à voir le jour et qui viennent (2030 à 2110
environ) se trouvent donc devant une question vitale :
cette veille de fin des temps
peut-elle encore,
à travers quelles volontés , quels moyens et quelles marges de manoeuvres ,
se transformer
en aube d’humanité ?
L’enjeu vital n’est-il pas de faire naître, massivement et rapidement, les déterminations
personnelles et collectives de tous les acteurs ?
Comment , avant qu’il ne soit trop tard, donner le jour à une « métamorphose de
l’humanité » ?